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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/6852/2019

ACJC/897/2019 du 20.06.2019 sur JTBL/498/2019 ( SBL )

Descripteurs : EFFET SUSPENSIF
Normes : CPC.325; LaCC.30.al4
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6852/2019 ACJC/897/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du JEUDI 20 JUIN 2019

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, ______ (GE), recourante contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 21 mai 2019, représentée par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile,

et

B______ et C______, sises ______, Genève, intimées, comparant par Me Jacques BERTA, avocat, place Longemalle 1, 1204 Genève, en l'étude duquel elles font élection de domicile.

 


Vu, EN FAIT, le contrat de bail à terme fixe conclu par les parties, portant sur la sous-location d'un appartement de 6 pièces au rez-de-chaussée de l'immeuble sis ______ au ______ (GE);

Que le contrat a été conclu pour une durée de deux mois, du 1er juin 2018 au 31 juillet 2018, non renouvelable;

Attendu que le loyer, charges comprises, a été fixé en dernier lieu à 2'535 fr. par mois;

Que la locataire n'a pas sollicité de prolongation du bail;

Que les locaux n'ont pas été restitués par la locataire;

Que, par requête déposée le 27 mars 2019 au Tribunal des baux et loyers, les bailleresses ont requis l'évacuation de la locataire, assortie de mesures d'exécution directes du jugement d'évacuation, par la procédure de protection de cas clair;

Qu'à l'audience du 21 mai 2019 devant le Tribunal, les bailleresses ont persisté dans leurs conclusions; qu'elles ont exposé que le compte de la locataire présentait un arriéré de 8'745 fr.;

Que, pour sa part, la locataire a déclaré de ne pas avoir trouvé de solution de relogement et vivre dans le logement en cause avec ses deux enfants, de 15 et 21 ans, ainsi que son petit-fils, âgé de 5 ans; qu'elle a sollicité l'octroi d'un sursis humanitaire de six mois compte tenu de sa situation familiale et financière;

Que la cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience;

Que, par jugement JTBL/498/2019 rendu le 21 mai 2019, reçu par la locataire le 29 mai suivant, le Tribunal a condamné la locataire à évacuer de sa personne et de ses biens et de toute autre personne faisant ménage commun avec elle l'appartement en cause
(ch. 1 du dispositif), a autorisé les bailleresses à requérir l'évacuation par la force publique de la locataire dès le 30ème jour après l'entrée en force du jugement (ch. 2), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4);

Vu le recours expédié le 11 juin 2019 par A______ contre ce jugement;

Qu'elle a conclu, principalement, au renvoi de la cause au Tribunal, motif pris d'une violation de son droit d'être entendue, et, subsidiairement, à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'évacuation pendant six mois après l'entrée en force du jugement;

Que A______ a préalablement requis la suspension du caractère exécutoire des mesures d'exécution ordonnées par le Tribunal;

Qu'invitées à se déterminer, les bailleresses ont conclu, par écritures du 17 juin 2019, au rejet de la requête d'effet suspensif; qu'elles ont produit un état de la situation comptable de la locataire au 13 juin 2019;

Considérant, EN DROIT, que seule la voie du recours est ouverte contre les mesures d'exécution (art. 309 let. a et 319 let. a CPC);

Que le recours ne suspend pas la force de chose jugée, l'instance d'appel pouvant suspendre le caractère exécutoire (art. 325 al. 1 et 2 CPC);

Que l'instance de recours est habilitée à décider d'office ou sur requête de suspendre le caractère exécutoire (cf. Jeandin, in Commentaire Romand, Code de procédure civile 2ème éd., n. 6 ad art. 325 CPC);

Que la Présidente soussignée a compétence pour statuer sur la suspension du caractère exécutoire de la décision entreprise, vu la nature incidente et provisionnelle d'une telle décision et la délégation prévue à cet effet par l'art. 18 al. 2 LaCC, concrétisée par une décision de la Chambre civile siégeant en audience plénière et publiée sur le site Internet de la Cour;

Qu'en la matière, l'instance d'appel dispose d'un large pouvoir d'appréciation
(ATF 137 III 475 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_403/2015 du 28 août 2015 consid. 5; 5A_419/2014 du 9 octobre 2014 consid. 7.1.2);

Que, selon les principes généraux, l'autorité procède à une pesée des intérêts en présence et doit se demander, en particulier, si la décision est de nature à provoquer une situation irréversible; qu'elle prend également en considération les chances de succès du recours (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.1; 4D_30/2010 du 25 mars 2010 consid. 2.3);

Que la jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient; que, pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 135 III 513 consid. 3.6.5; 134 I 83 consid. 4.1);

Qu'en procédant à l'exécution forcée d'une décision judiciaire, l'autorité doit tenir compte du principe de la proportionnalité. Que lorsque l'évacuation d'une habitation est en jeu, il s'agit d'éviter que des personnes concernées ne soient soudainement privées de tout abri; que l'expulsion ne saurait être conduite sans ménagement, notamment si des motifs humanitaires exigent un sursis, ou lorsque des indices sérieux et concrets font prévoir que l'occupant se soumettra spontanément au jugement d'évacuation dans un délai raisonnable; qu'en tout état de cause, l'ajournement ne peut être que relativement bref et ne doit pas équivaloir en fait à une nouvelle prolongation de bail (ATF 117 Ia 336 consid. 2b p. 339; arrêt du Tribunal fédéral 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1);

Que selon l'art. 30 al. 4 LaCC, le Tribunal peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement d'évacuation dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties;

Que, s'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; que sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; qu'en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.);

Considérant que seules les mesures d'exécution ont été remises en cause par la recourante, de sorte que seule la voie du recours est ouverte;

Qu'il ne se justifie de suspendre le caractère exécutoire du chiffre 2 du jugement entrepris, le recours étant, prima facie et sans préjudice de l'examen au fond, dénué de chance de succès;

Qu'en effet, si la motivation du jugement relative au sursis est brève, le Tribunal a mentionné les critères qu'il a pris en compte; qu'une violation du droit d'être entendu de la recourante ne paraît ainsi pas réalisée;

Que, par ailleurs, la recourante a déjà bénéficié, de fait, d'une prolongation de plus de dix mois, pour quitter l'appartement;

Que, de plus, la recourante a accumulé un arriéré, correspondant à plus de trois mois d'indemnités pour occupation illicite;

Qu'en conséquence, la requête de la recourante sera rejetée.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Présidente de la Chambre des baux et loyers :

Rejette la requête de suspension du caractère exécutoire du chiffre 2 du dispositif du jugement JTBL/498/2019 rendu le 21 mai 2019 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/6852/2019-7-SD.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE











Indications des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (137 III 475 consid. 1) est susceptible d'un recours en matière civile, les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 à 119 et 90 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.