Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2990/2019

ATAS/990/2020 du 22.10.2020 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2990/2019 ATAS/990/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 octobre 2020

3ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à PUPLINGE, représentée par l'Association suisse des assurés (ASSUAS)

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

1.        En juin 2012, Madame A______ (ci-après : l'assurée), assistante dentaire de profession, née en 1972, a déposé une première demande de prestations auprès de l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI), qui l'a rejetée par décision du 24 mai 2013.

L'OAI a reconnu que la capacité de travail de l'assurée avait été considérablement restreinte depuis novembre 2011, mais estimé qu'elle avait été recouvrée à 100% dans l'activité habituelle à l'issue du délai de carence, à l'issue d'une instruction ayant permis de recueillir, notamment, les éléments suivants :

-          un rapport de la doctoresse B______, spécialiste en médecine générale, du 28 juin 2012, concluant à un état dépressif apparu en 2011, suite au décès du compagnon de l'assurée, début décembre 2011, ayant entraîné dans l'activité habituelle de réceptionniste médicale une incapacité de 100% du 23 novembre 2011 au 1er janvier 2012, de 50% du 2 janvier au 5 février 2012, de 100% dès le 6 février 2012 puis de 60% dès le 14 avril 2012 ;

-          un rapport de la doctoresse C______, spécialiste FMH en psychiatrie, du 10 juillet 2012, concluant à un syndrome dépressif réactionnel à un deuil, confirmant une reprise du travail à 50% dès juillet 2012.

2.        Une seconde demande de prestations déposée en octobre 2014, sur laquelle l'OAI a refusé d'entrer en matière le 11 février 2015 au motif que l'assurée ne lui avait fait parvenir aucun document médical susceptible de rendre vraisemblable une modification des faits essentielle depuis la décision précédente.

3.        Une troisième demande de prestations déposée en septembre 2015, rejetée par décision du 3 février 2017.

L'OAI a estimé que l'assurée avait conservé une pleine capacité de travail, sans diminution de rendement, dans toute activité.

Cette décision a été rendue à l'issue d'une instruction ayant permis de recueillir, notamment :

-          une brève attestation rédigée le 7 décembre 2015 par le docteur D______, psychanalyste et médecin traitant de l'assurée, concluant à un trouble de l'humeur persistant, plus précisément à une dysthymie, dont il précisait qu'elle était chronique ;

-          un avis émis le 21 avril 2016 par le Service médical régional (SMR), rappelant que la première demande déposée en 2012 était motivée par un état dépressif réactionnel à un deuil, que l'assurée avait repris son activité avant l'issue du délai de carence ; une dysthymie n'entraînait pas de restrictions au sens de l'assurance-invalidité habituellement ; le Dr D______ évoquant un trouble d'intensité sévère, l'aggravation était toutefois rendue plausible et il convenait d'examiner s'il y avait eu modification des faits essentielle ;

-          un rapport du Dr D______ du 21 juin 2016 concluant à une totale incapacité de travail dans l'activité habituelle en raison d'une dysthymie ; le médecin décrivait un tableau clinique correspondant à une dépression anxieuse persistante, avec réactions verbales violentes alternant avec des moments de grande tristesse durant lesquels la patiente perdait toute motivation et vivait en recluse ; des symptômes somatiques s'y ajoutaient (troubles du sommeil, très grande fatigue, ménopause précoce) ; l'incapacité était totale en tant que réceptionniste, activité exigeant une attention au public et une bonne entente avec l'équipe soignante ; l'assurée avait d'ailleurs eu des conflits d'autorité avec ses patrons, ce qui avait fait échouer toute tentative de reprendre une activité d'assistante-dentaire ; son état était soumis à de fortes fluctuations ; sa capacité de rendement était nulle ;

-          un avis émis le 21 novembre 2016 par le SMR constatant que le psychiatre décrivait une symptomatologie pouvant évoquer des traits de personnalité prémorbide de type borderline mais que, malgré la thymie et le niveau d'énergie fluctuants, l'assurée avait été en mesure d'apporter des changements dans sa vie (elle s'était mise en ménage et avait débuté une activité de promeneuse de chiens libérale à 50%) ; contacté par téléphone, le Dr D______ avait indiqué que sa patiente était capable de travailler comme assistante-dentaire, mais ne souhaitait plus travailler dans un cabinet privé ; dans un tel poste à la polyclinique universitaire ou toute activité adaptée n'impliquant pas trop de pression hiérarchique, le Dr D______ était d'avis que la capacité de travail était entière ; dès lors, le SMR concluait à l'absence d'aggravation durable de l'état de santé depuis 2013, vu l'absence d'atteinte suffisamment grave et incapacitante ; le SMR rappelait que la dysthymie était une affection marquée par une fluctuation de la thymie, qui n'atteignait jamais un degré d'intensité suffisant pour qu'un diagnostic dépressif soit posé ; les informations données par le Dr D______ permettaient de relativiser la gravité de la dysthymie rapportée dans son rapport de décembre 2015 ; le caractère réactionnel aux facteurs extérieurs était prépondérant ; cela n'avait pas empêché l'assurée de s'engager dans une nouvelle activité ; qui plus est, sur le plan médico-théorique, l'activité habituelle d'assistante dentaire dans une structure n'impliquant pas trop de pression hiérarchique restait exigible à 100%, de même que toute autre activité équivalente.

4.        Une quatrième demande a été déposée en février 2019.

5.        Par courrier du 15 mars 2019, l'assurée a fait valoir que de nouveaux diagnostics avaient été posés, soit ceux de personnalité borderline, trouble de déficit de l'attention et hyperactivité (TDAH) et bipolarité. Elle a indiqué se tenir à disposition pour être évaluée par un expert.

Ont été versés au dossier :

-          un rapport rédigé le 25 mars 2019 par la doctoresse E______, médecin interne au Département de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) expliquant que l'assurée était suivie par le programme du groupe de la régulation émotionnelle depuis février 2019 et avait fait l'objet d'une première évaluation psychiatrique en mars 2018, qui avait conclu à un trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline, à un TDAH de type mixte, à un trouble lié à l'usage de l'alcool, à un trouble lié à l'usage de la cocaïne en rémission précoce et à un possible trouble affectif bipolaire en rémission ; l'état psychique actuel ne semblait pas permettre à l'assurée de s'investir dans une activité professionnelle ; si un travail était envisagé, il était suggéré d'opter pour un programme d'accompagnement et de réinsertion sociale avec reprise progressive d'un statut occupationnel ; il était recommandé de le faire lorsque l'assurée serait plus avancée dans sa thérapie, afin d'augmenter les chances de réussite de la reprise fonctionnelle ; en effet, elle paraissait pour l'heure encore fragile, avec des symptômes anxiodépressifs et des comportements impulsifs nuisant à sa réinsertion sociale ; son état psychique et ses démarches thérapeutiques intensives dans le but de retrouver une stabilité ne lui permettaient pas encore de reprendre une occupation professionnelle ;

-          un questionnaire rempli le 17 avril 2019 par la doctoresse F______, psychiatre et psychothérapeute FMH auprès du centre PHENIX, reprenant les diagnostics suivants : trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline, trouble dépressif récurrent épisode léger avec syndrome somatique, syndrome de dépendance à l'alcool abstinent, syndrome de dépendance à la cocaïne abstinent, TDAH de type mixte depuis l'adolescence ; le rythme de la patiente fluctuait de manière importante en fonction de son humeur, imprévisible ; le trouble de la personnalité avait un impact sur son fonctionnement, entravait sa capacité à se concentrer et à maintenir son attention, mais aussi ses capacités relationnelles et il réduisait passablement son rendement ; l'assurée avait malgré tout conservé un réseau psychosocial médical et social étoffé ; le TDAH ne semblait pas avoir d'impact important au niveau de la capacité de travail, contrairement au trouble de la personnalité ; d'un point de vue psychique, la capacité de travail était nulle vu l'état clinique instable ; les limitations fonctionnelles étaient liées à la sévérité du trouble de la personnalité, instable depuis 2011 ; d'ailleurs, les périodes d'activité professionnelle n'avaient jamais été très longues ; dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, la capacité de travail était réduite et ne pouvait atteindre que 50% au maximum ;

-          l'avis émis le 13 mai 2019 par le SMR, concluant que les diagnostics retenus par la Dresse E______ avaient déjà été retenus auparavant et que le tableau était comparable à celui observé lors de la précédente demande ; la Dresse E______ précisait que l'évolution était favorable et le pronostic bon ; quant à la Dresse F______, elle retenait les mêmes diagnostics et dressait un tableau similaire ; certes l'état de santé de l'assurée n'était pas bon, mais aucun médecin ne faisait état d'une éventuelle aggravation de son état psychique depuis février 2017.

6.        Par décision du 21 juin 2019, l'OAI a refusé d'entrer en matière, au motif que la situation médicale restait inchangée depuis son refus précédent.

7.        Par écriture du 21 août 2019, l'assurée a interjeté recours contre cette décision en concluant à son annulation, à ce qu'il soit entré en matière sur sa demande et à ce que lui soit reconnu le droit à des prestations de l'assurance-invalidité, sous forme de mesures d'ordre professionnel et de rente.

Selon elle, le litige porte sur la question de savoir si elle souffre d'atteintes à sa santé et, cas échéant, si celles-ci lui ouvrent droit à des prestations de l'assurance-invalidité, questions auxquelles elle estime qu'il faut répondre par l'affirmative.

Selon elle, son état de santé et sa situation personnelle se sont considérablement modifiés depuis 2017, ainsi qu'en attestent les rapports de ses médecins traitants.

8.        Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 17 septembre 2019, a conclu au rejet du recours.

Il admet que l'état de santé de l'assurée n'est pas bon, mais soutient qu'aucun médecin n'a fait état d'une éventuelle aggravation de son état psychique depuis la décision intervenue en février 2017.

Même si les médecins traitants concluent à des affections non retenues lors de la décision précédente, le tableau clinique sur lequel ils se fondent demeure significativement similaire.

9.        Dans sa réplique du 17 octobre 2019, l'assurée a persisté dans ses conclusions.

Elle allègue que sa première demande, déposée en 2012, était fondée sur un état dépressif réactionnel à un deuil et qu'elle a réussi à reprendre une activité durant le délai de carence.

Sa deuxième demande s'est soldée par un échec car elle n'a pas réussi à prouver une aggravation de son état de santé.

Lors de sa troisième demande, le Dr D______ a mis en avant un trouble de l'humeur sévère crédibilisant l'aggravation de son état de santé par rapport à 2012, aggravation toutefois ponctuelle car consécutive à une série de deuils.

En 2019, la Dresse E______ a retenu plusieurs nouveaux diagnostics et estimé que l'état psychique actuel de sa patiente ne lui permettait plus de s'investir dans une activité professionnelle. Ses conclusions ont été corroborées par la Dresse F______, qui a évalué la capacité de travail à 50% au maximum, au vu des limitations fonctionnelles liées à la sévérité du trouble de la personnalité, instable depuis 2011.

La recourante en tire la conclusion que son état de santé l'empêche désormais d'exercer une activité et ceci de manière durable, ce qui n'était pas le cas lors des précédentes demandes.

10.    Dans sa duplique du 12 novembre 2019, l'intimé a persisté dans ses conclusions.

 

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        Le recours interjeté respectant les forme et délai prévus par la loi (art. 56 à 60 LPGA), il y a lieu de le déclarer recevable.

3.        Contrairement à ce que semble croire la recourante, le litige ne porte pas sur la question de savoir si elle souffre d'atteintes à sa santé et, cas échéant, si celles-ci lui ouvrent droit à des prestations de l'assurance-invalidité, mais, à ce stade, uniquement sur celle de savoir si elle a rendu plausible une aggravation de son état de santé depuis la dernière fois que l'intimé a examiné son droit aux prestations, soit le 3 février 2017.

4.        Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l'assuré rend plausible que son invalidité s'est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 17 LPGA ; art. 87 al. 3 et 4 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI]). Cette exigence doit permettre à l'administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 130 V 68 consid. 5.2.3, 117 V 200 consid. 4b et les références).

Lorsqu'elle est saisie d'une nouvelle demande, l'administration doit donc commencer par examiner si les allégations de l'assuré sont, d'une manière générale, plausibles. Si tel n'est pas le cas, l'affaire est liquidée d'entrée de cause et sans autres investigations par un refus d'entrer en matière. A cet égard, l'administration se montrera d'autant plus exigeante pour apprécier le caractère plausible des allégations de l'assuré que le laps de temps qui s'est écoulé depuis sa décision antérieure est bref. Elle jouit sur ce point d'un certain pouvoir d'appréciation que le juge doit en principe respecter (ATF 109 V 108 consid. 2b). Ainsi, le juge ne doit examiner comment l'administration a tranché la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière en se fondant sur l'art. 87 RAI et que l'assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas nécessaire lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 114 consid. 2b).

Le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'autorité (cf. ATF 125 V 193 consid. 2, 122 V 157 consid. 1a et les références), ne s'applique pas à la procédure de l'art. 87 RAI (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5). Eu égard au caractère atypique de celle-ci dans le droit des assurances sociales, le Tribunal fédéral des assurances a précisé que l'administration pouvait appliquer par analogie l'art. 73 RAI (voir l'art. 43 al. 3 LPGA) - qui permet aux organes de l'AI de statuer en l'état du dossier en cas de refus de l'assuré de coopérer - à la procédure régie par l'art. 87 RAI, à la condition de s'en tenir aux principes découlant de la protection de la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 Cst.; ATF 124 II 265 consid. 4a).

L'exigence du caractère plausible de la nouvelle demande selon l'article 87 RAI ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir (Damien VALLAT, La nouvelle demande de prestations AI et les autres voies permettant la modification de décisions en force, RSAS 2003, p. 396 ch. 5.1 et les références).

Lors de l'appréciation du caractère plausible d'une modification déterminante des faits influant sur le droit aux prestations, on compare les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision administrative litigieuse et les circonstances prévalant à l'époque de la dernière décision d'octroi ou de refus des prestations (ATF 130 V 64 consid. 2 ; 109 V 262 consid. 4a).

Enfin, on rappellera que dans un litige portant sur le bien-fondé du refus d'entrer en matière sur une nouvelle demande, le juge doit examiner la situation d'après l'état de fait tel qu'il se présentait à l'administration au moment où celle-ci a statué. Son examen est ainsi d'emblée limité au point de savoir si les pièces déposées en procédure administrative justifiaient ou non la reprise de l'instruction du dossier. Il ne sera donc pas tenu compte des rapports produits postérieurement à la décision litigieuse (ATF 130 V 64 consid. 5.2.5 ; 121 V 366 consid. 1b et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 9C 959/2011 du 6 août 2012 consid. 4.3).

5.        Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux.

6.        En l'espèce, le rejet, par l'OAI, de la troisième demande de prestations déposée par la recourante se justifiait par le fait que le seul diagnostic alors posé était celui de dysthymie et que le médecin traitant avait, par téléphone, conclu à une pleine capacité de travail dans une activité adaptée sans grande pression hiérarchique.

Suite au dépôt de la nouvelle demande de la recourante, deux rapports médicaux ont été versés au dossier, qui font état de diagnostics nouveaux, au nombre desquels un TDAH - dont la Dresse F______ indique cependant qu'il ne semble pas avoir d'impact important sur la capacité de travail - et un possible trouble affectif bipolaire - dont la Dresse E______ précise qu'il est en rémission.

Le seul élément nouveau consiste donc dans le trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline dont il est cependant indiqué qu'il est présent depuis l'adolescence et qui transparaissait déjà de la description donnée par le Dr D______ (réactions verbales violentes alternant avec des moments d'apathie et de repli sur soi, conflits d'autorité). Cela avait d'ailleurs été relevé par le SMR à l'époque, dans son avis du 21 novembre 2016. La gravité du trouble était toutefois alors pondérée par le fait que l'assurée avait réussi à s'investir dans une nouvelle activité.

En 2019, cela ne semble plus être le cas, puisque deux spécialistes concluent désormais à une incapacité de travail de 50% au moins, au motif que l'assurée n'est précisément plus en mesure de s'investir dans une activité professionnelle.

L'intimé se réfère à l'avis du SMR, qui estime qu'une aggravation de l'état de santé n'a pas été rendu plausible parce que les éléments médicaux invoqués étaient déjà présents et connus lors de la demande précédente.

Certes, mais il semble bien, toutefois, à la lecture des rapports des deux médecins, que la gravité du trouble de la personnalité se soit amplifiée, puisque tous deux concluent à une incapacité de travail. Il est dès lors erroné de soutenir que le tableau clinique serait demeuré significativement similaire.

On ajoutera que le point de vue selon lequel la dysthymie ne peut pas être considérée comme une atteinte invalidante ne tient pas compte de la jurisprudence récente (ATF 143 V 418 consid. 8.1 p. 429 s.; arrêt 9C_146/2015 du 19 janvier 2016 consid. 3.2 et les références) : selon la jurisprudence, une dysthymie (F34.1) est susceptible d'entraîner une diminution de la capacité de travail lorsqu'elle se présente avec d'autres affections, à l'instar d'un grave trouble de la personnalité (cf. arrêts ATF 143 V 418 et 9C_146/2015, précités), comme cela semble être précisément le cas en l'espèce. Pour en évaluer les éventuels effets limitatifs, ces atteintes doivent en principe faire l'objet d'une procédure probatoire structurée selon l'ATF 141 V 281 (arrêt 9C_585/2019 du 3 juin 2020 consid. 4.1).

Dans ces circonstances, la Cour de céans considère qu'au vu de l'évaluation des médecins traitants, une aggravation de la dysthymie et du trouble de la personnalité a été rendue plausible et qu'en conséquence, il se justifie de renvoyer la cause à l'intimé afin que celui-ci entre en matière et confirme ou non cette aggravation et ses potentielles conséquences en termes de droit aux prestations.

Les questions de savoir si cette aggravation doit être confirmée et, dans l'affirmative, si elle conduit à l'augmentation du degré d'invalidité, sont des questions qui relèvent du fond et qui n'ont pas à être examinées à ce stade de la procédure.

Le recours est admis et la cause renvoyée à l'intimé pour instruction au fond.

7.        Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 1'000.- lui est accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Un émolument de CHF 200.- est mis à la charge de l'intimé (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision du 21 juin 2019.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour instruction au fond et décision.

5.        Condamne l'intimé à verser à la recourante la somme de CHF 1'000.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

7.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le