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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/370/2019

ATAS/989/2020 du 22.10.2020 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/370/2019 ATAS/989/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 octobre 2020

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Carouge GE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Cyril MIZRAHI

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

1.        Monsieur A______ (ci-après l'assuré), né en ______ 1958, d'origine portugaise, arrivé en Suisse en 1982, a travaillé comme maçon jusqu'en 1991, avant de débuter une activité de nettoyeur.

2.        Le 19 avril 1992, il a été victime d'un accident de la route à l'origine d'une fracture des pédicules en C2, sans lésion neurologique.

3.        Le 2 mars 1993, il a déposé une première demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI), que cette autorité a rejetée par décision du 15 décembre 1993, compte tenu d'un degré d'invalidité de 25%.

4.        L'assuré a ensuite alterné des périodes de chômage et des contrats de travail de courte durée, puis commencé une nouvelle activité dans le domaine du jardinage et de la maçonnerie en juin 1998.

5.        En arrêt de travail depuis le 19 décembre 2000, l'assuré a déposé une nouvelle demande de prestations le 12 juin 2001.

6.        Après avoir recueilli l'avis des médecins traitants, l'OAI a adressé l'assuré à un centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI).

Les doctoresses B______, spécialiste FMH en rhumatologie, et C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, ont rendu leur rapport le 27 décembre 2004, après avoir examiné l'assuré.

Elles ont retenu les diagnostics de cervicalgies chroniques post-fracture des pédicules de C2 et de lombalgies chroniques. Elles ont également mentionné, à
titre de diagnostics sans répercussion sur la capacité de travail, une fibrillation auriculaire paroxystique, une obésité, un diabète de type II et une hypercholestérolémie.

En revanche, l'assuré ne présentait ni trouble psychique pouvant altérer sa capacité d'adaptation, ni limitations de la capacité de travail sur les plans psychique et mental.

Étaient contre-indiqués : le port de charges lourdes, les activités à risque traumatique (c'est-à-dire coups, chocs ou déchirures musculaires) et les tâches impliquant des mouvements/extensions fréquents de la nuque.

Au vu des lombalgies, des cervicalgies et du risque de traumatisme, l'assuré ne pouvait plus travailler sur les chantiers, mais l'exercice d'une activité adaptée (comme celle de nettoyeur, par exemple) restait exigible à 80%, sans diminution de rendement, depuis décembre 2000.

7.        Par décision du 8 mars 2005, l'OAI a considéré que, dans la mesure où l'assuré avait conservé une capacité de travail quasiment entière dans une activité adaptée, pouvant lui procurer un revenu au moins équivalent à celui qu'il aurait pu obtenir sans atteinte à sa santé, les conditions d'octroi d'une mesure de reclassement n'étaient pas réalisées.

8.        Le 20 avril 2005, l'assuré s'est opposé à cette décision.

9.        Le 21 mai 2007 - soit avant que l'OAI ne statue sur ladite opposition -, l'assuré a déposé une nouvelle demande de prestations et produit des documents faisant état d'une péjoration de son état de santé sur le plan somatique.

10.    Le 8 janvier 2008, la doctoresse D______, médecin auprès du Service médical régional (SMR), a estimé que l'activité de nettoyeur n'était plus exigible, vu les troubles de la colonne cervicale. Elle a préconisé un examen rhumatologique afin d'évaluer la capacité de travail résiduelle.

11.    Cet examen a été effectué le 22 janvier 2008 par la doctoresse E______, médecin auprès du SMR.

Dans un rapport du 29 février 2008, elle a diagnostiqué des cervicalgies droites dans le cadre d'une hernie discale C3-C4 non compressive et un status post fracture C2 (en 1992) sans séquelles neurologiques, des lombosciatalgies chroniques non déficitaires dans le cadre d'un trouble statique et dégénératif avec une insuffisance posturale et un status post neurolyse du nerf cubital du coude et du nerf médian au poignet gauche (2005), avec trouble sensitif et faiblesse résiduelle.

Les différents examens montraient que le travail de maçon n'était plus exigible. Une capacité de travail de 80% comme nettoyeur avait été attestée par l'expertise du 27 décembre 2004.

Procédant à une comparaison avec ce dernier rapport, la Dresse E______ a noté une péjoration courant 2006 et la mise en évidence d'une hernie discale non compressive en juillet 2007. Elle a évalué la capacité de travail dans une activité adaptée à 75% en précisant que celle de nettoyeur n'était pas exclue.

12.    Le 18 mars 2008, le docteur F______, médecin auprès du SMR, s'est rallié à l'appréciation de la Dresse E______.

13.    Par décision sur opposition du 26 janvier 2009, l'OAI a refusé l'octroi de mesures d'ordre professionnel, considérées comme vouées à l'échec et disproportionnées. Non contestée, cette décision est entrée en force.

14.    Par décision du 25 février 2010, il a par ailleurs nié à l'assuré le droit à une rente, au motif que l'intéressé avait recouvré, depuis décembre 2000, une capacité de travail de 80% dans une activité adaptée, réduite à 75% depuis juillet 2007. La comparaison des revenus conduisait à un degré d'invalidité de 22% en décembre 2001 (fin du délai d'attente d'un an), de 29% dès juillet 2007, taux insuffisants pour ouvrir droit à une rente.

15.    Le 16 avril 2010, l'assuré a interjeté recours contre cette décision. Il sollicitait l'octroi d'une rente entière dès décembre 2000, subsidiairement une aide au placement et la prise en charge d'un traitement de physiothérapie active.

16.    Par ordonnance du 1er novembre 2011 (ATAS/1009/2011), la Cour de céans a confié au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) le soin de procéder à une expertise pluridisciplinaire.

17.    a. Le professeur G______, pour le volet rhumatologique, le professeur H______, pour le volet neurologique et la doctoresse I______, pour le volet cardiologique, ont rendu leur rapport en date du 19 juillet 2012.

Du consilium du 18 juillet 2012, il ressort que les trois experts se sont accordés sur l'absence de troubles organiques évidents. Hormis un syndrome douloureux, le recourant ne rencontrait pas de limitation de la capacité de travail dans une profession adaptée.

Sur le plan neurologique, étaient diagnostiqués : des cervicalgies et céphalées chroniques post-traumatiques avec un remaniement érosif de l'odontoïde, une neuropathie ulnaire gauche sans corrélation clinique et un hémisyndrome sensitif sans substrat somatique d'origine fonctionnelle.

D'un point de vue rhumatologique, étaient retenus un syndrome douloureux chronique prédominant à droite et une arthrose post-traumatique.

Au niveau cardiologique, l'expert avait observé un status après deux thermoablations pour fibrillation auriculaire sans autre anomalie cardiaque, sans évidence de récidive.

Les experts se sont ralliés aux conclusions du SMR. Ils ont relevé que l'assuré avait déjà subi une électroneuromyographie (ENMG), que la recherche d'une pathologie cardiaque était restée négative et que les palpitations évoquées par le recourant étaient devenues rares, de courte durée et moins gênantes. Selon eux, la symptomatologie était stable depuis de nombreuses années et le recourant pouvait exercer son activité de jardinier à 75%, taux qui n'avait pas évolué depuis l'apparition des symptômes. Dans une activité lucrative adaptée, permettant l'alternance des positions assise et debout et une limitation du port de charges à 10 kg, la capacité de travail était entière. Toutefois, le domaine d'activité semblait difficile à définir et l'avis d'un médecin du travail était préconisé.

b. Les experts ont également établi des rapports spécifiques à leur spécialité.

Le Prof. H______ a retenu, à titre de diagnostics influençant la capacité de travail : des cervicalgies et céphalées chroniques post-traumatiques avec un remaniement érosif de l'odontoïde, ainsi qu'une enthésopathie pluriétagée au niveau dorsal et dorsolombaire probablement en lien avec une atteinte arthrosique. Le neurologue a exposé que les plaintes et l'examen clinique révélaient surtout un syndrome douloureux probablement d'origine squelettique et musculaire, sans aucune atteinte neurologique. Dans ce contexte, l'incapacité de travail était donc uniquement limitée par les douleurs.

L'expert a également mentionné, à titre de diagnostics sans influence sur la capacité de travail, une neuropathie ulnaire gauche sans corrélation clinique, un hémisyndrome sensitif sans substrat somatique d'origine fonctionnelle et une fibrillation auriculaire. Le premier n'avait aucune répercussion fonctionnelle car les plaintes du recourant ne correspondaient pas au territoire du nerf et l'examen neurologique ne mettait en évidence aucune atteinte objective. Le deuxième diagnostic n'était absolument pas organique et il n'y avait aucune atteinte fonctionnelle. Les plaintes de l'assuré étaient purement sensitives et non objectivables. Enfin, la fibrillation auriculaire ne semblait pas limiter la capacité de travail, mais il revenait à l'expert en cardiologie de se prononcer. En conclusion, d'un point de vue neurologique, il n'existait ni limitation, ni constatation objective. Une capacité de travail de 75% (en raison des douleurs) dans un travail adapté semblait adéquate.

Sur le plan cardiologique, la Dresse I______ a diagnostiqué un status après une thermoablation d'une fibrillation auriculaire en 2005 et 2007 pour une fibrillation paroxystique connue depuis 1998 avec une évolution favorable depuis 2007. Elle a également signalé, à titre de facteurs de risques cardiovasculaires, une hypertension artérielle, une hypercholestérolémie et un diabète traités à satisfaction. Depuis la seconde thermoablation, l'évolution clinique était favorable avec la quasi disparition des épisodes de palpitations. En conclusion, l'aspect cardiaque n'avait pas d'effet limitatif sur la capacité de travail.

Le Prof. G______ a considéré en substance que l'assuré présentait, sur le plan du système locomoteur, un syndrome douloureux chronique touchant essentiellement le membre inférieur droit et le membre supérieur droit. Ce syndrome douloureux se retrouvait également au niveau de la nuque et de la région lombaire. Sur le plan clinique, l'expert rhumatologue n'a mis en évidence aucune limitation significative de la mobilité articulaire, aucun gonflement articulaire et aucun trouble statique rachidien évident. Étant donné que le syndrome douloureux chronique ne pouvait pas être rattaché sur le plan rhumatologique à une cause organique définie, l'expert a conclu qu'il entrait très probablement dans le cadre d'un trouble somatoforme.

18.    Le 9 octobre 2013, la Cour de céans a ordonné un complément d'expertise auprès du Prof. G______ (ATAS/995/2013).

19.    Dans son rapport du 13 novembre 2013, ce dernier a estimé que son examen clinique du 11 novembre 2013 était superposable à celui pratiqué en 2012.

Il a retenu, à titre de diagnostics rhumatologiques : un trouble somatoforme douloureux, une arthrose discrète de la région cervicale C1-C2, une discarthrose C2-C3, une ébauche d'arthrose lombaire et un kyste osseux de l'apophyse odontoïde.

Le Prof. G______ a expliqué que la géode mise en évidence à l'apophyse odontoïde était une découverte déjà ancienne et qu'il n'y avait pas eu de progression au cours des années, si bien qu'une affection d'origine tumorale ou rhumatismale pouvait être écartée. Il retenait ainsi le diagnostic de kyste osseux. En outre, les examens complémentaires d'imagerie (CT-Scan cervical, radiographie standard de la colonne dorsale, radiographie standard de la colonne lombaire, IRM des articulations sacro-iliaques) et sanguins permettraient d'écarter de façon formelle un diagnostic de polyarthrite rhumatoïde. La spondylarthrite ankylosante évoquée par le docteur J______ pouvait être totalement écartée au vu de la normalité de l'examen clinique du rachis, de la cage thoracique, de l'IRM des articulations sacro-iliaques et du HLA-B27 négatif.

Se basant sur l'expertise des Dresses B______ et C______ de 2004, l'expert rhumatologue a considéré qu'il n'y avait eu aggravation ni des plaintes, ni de l'état clinique. Il n'y avait pas de limitation fonctionnelle décelable à l'examen clinique objectif, hormis une raideur fonctionnelle de la région lombaire. Les modifications arthrosiques cervicales et lombaires basses ne s'accompagnaient d'aucune limitation fonctionnelle objectivable.

En définitive, l'expert a exclu toute incapacité de travail justifiée médicalement dans une activité sédentaire légère. Dans une activité manuelle adaptée (travaux de nettoyage, de jardinage avec aménagement), cette incapacité était de 25%.

20.    Par courrier du 12 juin 2014, la doctoresse K______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a souligné l'existence, depuis plusieurs années d'un état anxieux important, avec un trouble dépressif jamais formellement diagnostiqué. Elle a conclu à un épisode dépressif sévère sans symptômes psychotiques et à une anxiété généralisée, trop importants pour pouvoir invoquer un trouble somatoforme.

21.    Le 18 décembre 2014, la Cour de céans a ordonné une expertise psychiatrique, confiée au docteur L______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie (ATAS/1320/2014).

22.    Le Dr L______ a rendu son rapport le 6 juillet 2015. S'étant adjoint
les services d'un neuropsychologue, Monsieur M______, l'expert psychiatre a diagnostiqué un épisode dépressif majeur, isolé, en rémission partielle, un trouble douloureux (associé à des facteurs psychologiques et à des affections médicales), un trouble de conversion avec présentation mixte et une dépendance aux anxiolytiques ; l'expert a également fait état, notamment d'un fonctionnement intellectuel limite et d'un trouble de la personnalité non-spécifié, décompensé (personnalité fruste à traits abandonniques). L'assuré disposait, d'un point de vue psychiatrique, d'une capacité de travail de 30% dans une activité adaptée après réadaptation, voire de 50% dans un atelier protégé ; il était incapable, déjà depuis 2002, de mobiliser une capacité de travail quelconque sans une aide spécialisée.

23.    Le 19 août 2015, les doctoresses N______ et O______, du SMR, ont reproché notamment à l'expert de ne pas avoir précisément indiqué depuis quand la capacité de travail n'était plus exigible. Concernant les diagnostics, elles ont relevé que l'assuré n'avait bénéficié d'aucun suivi psychiatrique suite au décès de sa mère, que les dépressions dans un contexte de deuil étaient considérées comme réactionnelles et qu'une dépression d'intensité légère n'était pas incapacitante. De plus, le code F32.5 utilisé par l'expert n'existait pas et la constatation clinique d'une « rémission partielle » imposait de préciser le degré d'intensité actuel de l'épisode dépressif. Selon elles, le tableau dépressif apparaissait tout au plus léger et n'avait pas de répercussion sur la capacité de travail. Quant au diagnostic de trouble somatoforme douloureux persistant (F45.4), il exigeait la présence d'un tableau douloureux persistant associé à un degré de détresse important. Or, dans le cas présent, la douleur apparaissait fluctuante et l'assuré ne montrait ni détresse importante, ni rétrécissement du champ de la pensée sur les douleurs. Partant, les critères pour retenir un tel diagnostic n'étaient pas remplis. La présence de fourmillements pouvait orienter vers un diagnostic d'autre trouble somatoforme (F45.8) qui prenait en compte tout autre trouble des sensations non classé ailleurs, non dû à un trouble physique, éventuellement vers un trouble somatoforme différencié (F45.1). Il n'était pas possible de retenir conjointement un trouble de conversion et un trouble douloureux car ces deux diagnostics s'excluaient mutuellement. Cela étant, les critères pour retenir un trouble de conversion mixte n'étaient pas remplis et le tableau paraissait s'intégrer clairement au diagnostic de trouble somatoforme sans précision (F45.8). Quant au diagnostic de trouble de la personnalité non spécifié décompensé, l'expertise ne permettait pas, selon elles, de comprendre sur quels critères il reposait.

24.    Le 16 octobre 2015, l'assuré a encore produit un rapport du 15 octobre 2015 de la Dresse K______.

Cette dernière y estimait que les épisodes de rémission n'excluaient pas la gravité des états dépressifs car les études montraient que plus une personne connaissait des états dépressifs, plus elle était susceptible d'en connaître d'autres et moins ceux-ci étaient alors faciles à soigner. Elle expliquait par ailleurs qu'une dépression était considérée comme guérie quand le score de Hamilton était égal ou inférieur à 7, ce qui n'était pas le cas chez l'assuré (score de 13 au moment de l'expertise). S'il était exact que le diagnostic retenu n'était pas conforme aux termes de la ICD-10 - puisque le seul trouble dépressif qui pouvait être coté en rémission était le trouble dépressif récurrent -, c'était sans doute que l'expert avait mélangé deux classifications diagnostiques, ce qui avait créé une confusion. L'appréciation du SMR concernant l'exclusion du trouble de conversion et du trouble douloureux était erronée, car il était faux d'affirmer qu'aucun test standardisé n'était disponible pour évaluer le retard mental des gens faiblement scolarisés. Selon elle, les activités évoquées par le SMR n'étaient pas adaptées à l'état somatique de l'assuré.

25.    Le 10 mars 2016, la Cour de céans, se ralliant aux conclusions du CHUV et du Dr L______ a reconnu à l'assuré le droit à une rente entière à compter du
1er janvier 2003 (ATAS/226/2016).

26.    Saisi d'un recours de l'OAI, le Tribunal fédéral a statué le 9 février 2017 (9C_286/2016 du 9 février 2017).

Il a estimé que l'appréciation rétrospective du Dr L______, remontant à 2002, reposait uniquement sur des hypothèses non étayées objectivement et qu'il n'était pas possible de saisir les raisons pour lesquelles le trouble somatoforme douloureux aurait présenté un caractère invalidant avant février 2010. Il était dès lors insoutenable de reconnaître une totale incapacité de travail pour la période antérieure à 2010 - aucune pièce ne permettant de retenir que la situation d'un point de vue psychique se serait modifiée au point d'entraîner une incapacité de travail jusqu'au moment de la décision du 25 février 2010.

En conséquence, le Tribunal fédéral a admis le recours, annulé l'arrêt du 10 mars 2016 et confirmé la décision de l'OAI du 25 février 2010. Pour le surplus, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à l'OAI et invité ce dernier à examiner si les conditions d'une éventuelle rente étaient réalisées pour la période postérieure à février 2010. Il convenait d'examiner s'il y avait eu aggravation de l'état de santé postérieurement à la décision du 25 février 2010 au vu du diagnostic de trouble somatoforme douloureux évoqué dans le rapport d'expertise du CHUV du 19 juillet 2012.

27.    Dans un rapport non daté, parvenu le 8 septembre 2017 à l'OAI, le docteur P______, spécialiste FMH en médecine interne et médecin traitant de l'assuré, a indiqué que le début de la longue maladie remontait à 2001, que la capacité de travail de son patient était nulle depuis lors, dans l'activité habituelle comme dans une activité adaptée. Énumérant les diagnostics qu'il jugeait invalidants, le Dr P______ a mentionné des cervicalgies et cervico-brachialgies, une gonarthrose gauche, une mono-arthrite de la cheville droite sur crise de goutte et un « déconditionnement ». Il a notamment joint à son rapport :

-          une radiographie du genou gauche dont la date, partiellement reproduite, ne permettait pas de connaître l'année exacte (« 14.10.201 ») ;

-          un rapport du 7 octobre 2014 du docteur Q______, rhumatologue, concluant à une mono-arthrite de la cheville droite sur crise de goutte (premier épisode, confirmé par ponction) ;

-          une lettre de sortie du 8 mars 2016 du service de chirurgie viscérale des HUG, attestant une incapacité de travail jusqu'au 13 mars 2016 en raison d'une appendicite perforée qui avait nécessité une intervention de type résection iléo-caecale ainsi qu'une anastomose iléo-colo-ascendante.

28.    Le 3 novembre 2017, la doctoresse R______, médecin auprès du SMR, a estimé au regard des nouveaux éléments transmis par le Dr P______ que seule la gonarthrose gauche et l'arthrite microcristalline de type goutte étaient susceptibles d'entrainer des limitations fonctionnelles avec répercussion sur la capacité de travail. Comme indiqué par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 9 février 2017, il était nécessaire d'évaluer le diagnostic de trouble somatoforme douloureux à la lumière des indicateurs instaurés par la jurisprudence récente en la matière. La Dresse R______ suggérait une expertise rhumato-psychiatrique tenant compte des rapports d'expertise du CHUV du 19 juillet 2012 et du complément d'expertise du Prof. G______ du 13 novembre 2013. Les volets de l'expertise pouvaient être distincts, mais un consilium entre les experts serait indispensable, leur mission étant d'évaluer l'état de santé de l'assuré postérieurement à la décision du 25 février 2010.

29.    Cette expertise a été confiée aux docteurs S______, psychiatre, et T______, rhumatologue.

30.    Le Dr S______ a reçu l'assuré en entretien le 17 avril 2018 et rendu ses conclusions le 4 mai 2018.

Au moment de l'entretien, l'assuré ne présentait aucun trouble de l'attention, de la concentration, de la compréhension ou de la mémoire, ni de troubles de la lignée .psychotique.

Concernant la lignée dépressive, il présentait une tristesse fluctuante, notamment en fonction des douleurs. L'humeur n'était pas dépressive. Il n'y avait pas de signes ou de symptômes parlant en faveur d'un ralentissement psychomoteur. Même si l'on notait la présence de sentiments de dévalorisation et de découragement par rapport à sa situation, il n'y avait pas de sentiment d'infériorité, d'inutilité ou de ruine. L'élan vital n'était pas perturbé. Il n'y avait pas d'idées noires ou d'envies suicidaires. À la connaissance de l'expert, l'assuré n'avait jamais fait de tentative de suicide et n'avait jamais été hospitalisé en milieu psychiatrique. Son sommeil était perturbé à cause des douleurs.

Concernant le registre anxieux, l'assuré présentait des tensions nerveuses et une irritabilité en fonction des douleurs. Il n'y avait ni trouble obsessionnel compulsif, ni signes de claustrophobie, d'agoraphobie ou de phobie sociale.

L'assuré disait boire 1 ou 2 verres de vin rouge pendant les repas et l'expert n'avait pu mettre en évidence de signes ou des symptômes d'une dépendance aiguë ou chronique à l'alcool, malgré une consommation d'alcool régulière, corroborée par une CDT (Carbohydrat Deficient Transferrin) mesurée à 2.68%, soit un taux supérieur aux 2.5% admis pour retenir une consommation régulière. Interrogé sur la présence d'un éventuel trouble irréversible en lien avec cette consommation, l'expert a répondu qu'il n'avait pu déceler de signes ou de symptômes de troubles cognitifs. En particulier, il n'y avait pas de signes cliniques de maladie de Korsakoff ou d'encéphalopathie de Wernicke.

Invité à distinguer, d'une part, la diminution des capacités fonctionnelles due à l'atteinte à la santé et, d'autre part, les conséquences directes de facteurs non pris en considération par l'assurance (facteur étrangers à l'invalidité tels que chômage, âge, compétences linguistiques déficientes, niveau de formation etc.), le Dr S______ a mentionné que l'assuré avait déjà été examiné à plusieurs reprises par des psychiatres et que seul le Dr L______ avait retenu, en 2015, des limitations fonctionnelles - dues à la faiblesse des moyens intellectuels de l'assuré - ainsi qu'une capacité de travail maximale de 30%. Pour sa part, le Dr S______ a indiqué n'avoir pas décelé de signes ou symptômes d'une maladie psychiatrique ou d'un trouble de la personnalité (dépendante, par exemple) ; il n'y avait dès lors aucune limitation fonctionnelle d'un point de vue psychiatrique. Il n'y avait pas non plus d'exagération des symptômes.

D'un point de vue psychiatrique, il n'y avait pas d'atteinte à la santé justifiant une invalidité. On pouvait toutefois retenir les diagnostics suivants, sans incidence sur la capacité de travail :

-          utilisation nocive pour la santé d'alcool (F1x.1) ;

-          trouble anxieux et dépressif mixte (F41.2) secondaire à la douleur.

Au moment de l'entretien et du point de vue anamnestique au moins depuis 2010, le Dr S______ n'avait pas pu déceler les signes d'une maladie psychiatrique ou d'un trouble de la personnalité. Il s'éloignait donc des conclusions du Dr L______ et ne retenait donc pas non plus de trouble somatoforme douloureux, car le critère clinique principal caractérisant ce trouble, à savoir le sentiment de détresse profonde, n'était pas réalisé chez l'assuré.

Ce dernier ne bénéficiait pas de prise en charge psychiatrique ou psychologique, hormis les médicaments Topamax et Temesta, prescrits par le Dr P______. Dans les dosages plasmatiques, les benzodiazépines étaient négatives et le Topamax très en dessous de l'intervalle thérapeutique, ce qui signifiait que l'assuré ne prenait pas le médicament à la dose prescrite par son médecin traitant, de sorte qu'il existait une mauvaise compliance médicamenteuse.

Sur le plan de la cohérence, il n'y avait aucune divergence entre les symptômes décrits et le comportement de l'assuré en situation d'examen, d'une part, et les observations de l'expert, d'autre part. Dans le ménage, les loisirs et les activités sociales, l'assuré ne présentait aucune atteinte à la santé d'un point de vue psychiatrique. Sous cet angle, sa capacité de travail était entière dans l'activité habituelle comme dans une activité correspondant à ses aptitudes. Comme il avait été peu scolarisé, il pouvait effectuer un travail manuel sans trop d'exigences, ce d'autant qu'il avait des moyens intellectuels et notamment des ressources psychologiques telles que le sens de l'humour, le fait de donner un sens à sa vie, ainsi que des mécanismes d'autocontrôle et d'auto-appréciation qui le protégeaient face à des situations stressantes de la vie.

31.    Le Dr T______ a examiné l'assuré le 20 juin 2018, s'est entretenu avec le Dr S______ le 22 juin 2018 et a rendu ses conclusions le 26 juin 2018.

D'un point de vue objectif, il a noté la présence d'un syndrome cervicobrachial et lombovertébral, sans signe radiculaire irritatif ou déficitaire. L'assuré présentait également des gonalgies, sans signe de conflit rotulien, ligamentaire ou tendineux. La mobilité des chevilles était dans la norme. Les amplitudes articulaires de toutes les articulations étaient conservées, la trophicité musculaire était également dans les normes. L'examen frappait par la présence de plusieurs signes de non-organicité selon Waddell - évoquant une légère diminution du seuil de déclenchement à la douleur - qui ne s'expliquaient pas par le socle somatique sous-jacent. Du point de vue clinique, le bilan effectué ne mettait pas en évidence de péjoration. On notait la présence de discrets remaniements tricompartimentaux, d'allure dégénérative non significative au niveau des genoux et, au niveau cervical, une spondylose antérieure en C2-C3 non significative. Sur la base de ces éléments, le médecin a retenu les diagnostics suivants, avec incidence sur la capacité de travail :

-          syndrome cervicobrachial récurrent, sans signe radiculaire irritatif ou déficitaire

o   status post fracture du pédicule postérieur droit en C2 le 12 août 1992

o   arthrose postérieure C2-C3 et discopathie à ces niveaux

o   image géodique de l'apophyse odontoïde d'allure kystique

-          syndrome dorso-lombaire sans signe radiculaire irritatif ou déficitaire

o   spondylose antérieure D12-L1 et discopathie L5-S1, peu significative

En revanche, étaient sans répercussion sur la capacité de travail :

-          les gonalgies bilatérales, sans signe d'instabilité ou ligamentaire

o   status post arthroscopie pour méniscopathie de la corne postérieure du ménisque interne droit en 2015

-          status post opération du tunnel carpien gauche et neurolyse du nerf cubital du coude gauche en 2007

-          status post ablation par radiofréquence le 25 juin 2007 pour FA (fibrillation auriculaire) récidivante

-          status post hypertension artérielle et hypercholestérolémie et diabète de type II stables sous traitement

-          status post ulcère gastrique en 2007

La diminution des capacités fonctionnelles dues à la santé résidait essentiellement dans le vécu douloureux devenu chronique, surtout au niveau rachidien, du genou droit et de l'impotence fonctionnelle que l'assuré décrivait dans ses activités de la vie quotidienne. Les limitations fonctionnelles concernaient le port de charges en porte-à-faux avec longs bras de levier de plus de 10 à 15 kg et la nécessité d'alterner les positions assise et debout.

La thérapie suivie jusqu'à présent était conduite dans les règles de l'art, avec une bonne coopération de l'assuré.

Sur le plan de la cohérence, on notait une importante divergence entre les symptômes décrits, l'examen clinique et les examens paracliniques, et le comportement de la personne lors de l'examen.

Invité à donner une analyse détaillée et critique des répercussions de l'incapacité de travail invoquée dans tous les domaines, le Dr T______ a estimé ces répercussions à :

-          25% sur le plan professionnel, comme maçon paysagiste ;

-          20% dans les tâches ménagères ;

-          20% dans les loisirs ;

-          20% dans les activités sociales.

Les différents diagnostics ayant des incidences sur la capacité fonctionnelle impliquaient, après discussion avec le Dr S______, qu'en l'absence d'atteinte à la santé handicapante du point de vue psychiatrique, l'exercice de l'activité habituelle et antérieure de paysagiste était exigible à 75%, sans diminution de rendement, et l'exercice d'une activité adaptée exigible à 100%, sans diminution de rendement également.

32.    Dans un « rapport final subséquent » du 16 août 2018, le SMR s'est rallié aux conclusions des Drs S______ et T______, s'agissant de l'absence de modification notable et durable de l'état de santé postérieurement à février 2010. En revanche, il ne pouvait suivre leur appréciation de la capacité de travail, qu'il a qualifiée d'évaluation différente d'un même état de fait (décision du 25 février 2010 entrée en force). Selon le SMR, la capacité de travail était nulle dans l'activité habituelle et de 75% dans une activité permettant d'éviter une position statique prolongée assise. Le début de la longue maladie et de l'aptitude à la réadaptation remontait au 19 décembre 2000.

33.    Le 23 août 2018, l'OAI a adressé à l'assuré un projet de décision dont il ressortait qu'il se proposait de lui nier le droit à une rente d'invalidité, motif pris que sa capacité de travail dans une activité adaptée était toujours de 75%.

34.    Le 26 septembre 2018, l'assuré a contesté ce projet en soutenant que l'expertise bidisciplinaire des Drs S______ et T______ était dépourvue de valeur probante et qu'une nouvelle évaluation médicale devait être réalisée.

Il a en outre reproché à l'OAI de ne pas se prononcer sur d'éventuelles mesures professionnelles. Si ces dernières lui avaient été refusées par décision du 26 janvier 2009, c'était en raison d'une inaptitude purement subjective. Or, à aucun moment l'OAI n'avait examiné l'opportunité d'octroyer à nouveau de telles mesures.

35.    Le 10 décembre 2018, le service de réadaptation de l'OAI a considéré que l'éloignement du marché de l'emploi et le déconditionnement observés ne s'expliquaient pas par l'atteinte à la santé, l'assuré disposant d'une capacité de travail exploitable depuis de nombreuses années, qu'il n'avait pas mise à profit. Au vu du large éventail d'activités simples et répétitives proposées par le marché du travail en général - et le marché équilibré du travail en particulier -, on devait admettre qu'un nombre significatif d'entre elles, ne nécessitant aucune formation spécifique, étaient toujours adaptées aux limitations fonctionnelles de l'intéressé.

36.    Par décision du 11 décembre 2018, l'OAI a nié à l'assuré le droit à toute prestation en réitérant les arguments avancés le 23 août 2018, ajoutant que l'état de santé de l'intéressé n'était pas à l'origine de son éloignement du marché de l'emploi et de son déconditionnement, de sorte que le lien de causalité entre la diminution de la capacité de gain et l'atteinte à la santé faisait défaut.

37.    Le 28 janvier 2018, l'assuré a interjeté recours contre cette décision, en concluant, principalement, à son annulation et au retour du dossier à l'OAI pour instruction complémentaire et nouvelle décision, subsidiairement, à la mise en oeuvre d'une expertise bidisciplinaire comprenant un volet psychiatrique et rhumatologique, encore plus subsidiairement, à l'octroi de mesures professionnelles.

38.    Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 11 février 2019, a conclu au rejet du recours.

Il considère que l'expertise bidisciplinaire des Drs S______ et T______ répond à tous les réquisits jurisprudentiels pour se voir reconnaître valeur probante.

39.    Le 3 avril 2019, le recourant a répliqué et persisté dans ses conclusions.

40.    Le 23 avril 2019, l'intimé a fait de même.

41.    Le 19 décembre 2019, la Cour de céans a invité le recourant à indiquer s'il avait d'autres éléments médicaux à faire valoir à l'appui de sa position ou des témoins à faire entendre.

42.    Le 10 janvier 2020, le recourant a répondu que tel n'était pas le cas, mais que cela n'empêchait pas l'expertise du Dr S______ d'être lacunaire, de ne pas analyser de manière sérieuse l'évolution de son état de santé depuis 2010 et de comporter des conclusions en lien avec cette évolution non motivées.

 

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

3.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pendant la période du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c LPGA et art. 89C let. c LPA), le recours est recevable (art. 56ss LPGA et 62ss LPA).

4.        Le litige porte sur le bien-fondé du rejet de la nouvelle demande de prestations du recourant, singulièrement sur la question de savoir si une aggravation de son état de santé est survenue entre le 25 février 2010 - date de la dernière décision reposant sur un examen matériel du droit à la rente - et le 11 décembre 2018, date de la décision litigieuse.

5.        a. Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d'invalidité était insuffisant, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l'assuré rend plausible que son invalidité s'est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 87 al. 2 et 3 du règlement sur l'assurance-invalidité du 17 janvier 1961 ; RAI - RS 831.201). Cette exigence doit permettre à l'administration qui a précédemment rendu une décision entrée en force, d'écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l'assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans rendre plausible une modification des faits déterminants (ATF 133 V 108 consid. 5.2, 130 V 64 consid. 5.2.3 et 117 V 198 consid. 4b et les références citées). Le juge ne doit examiner comment l'administration a tranché la question de l'entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c'est-à-dire quand l'administration a refusé d'entrer en matière et que l'assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l'autorité judiciaire n'est en revanche pas nécessaire lorsque l'administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 108 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_789/2012 du 27 juillet 2013 consid. 2.2).

b. Lorsque l'administration entre en matière sur une nouvelle demande, elle doit examiner la cause au plan matériel - soit en instruire tous les aspects médicaux et juridiques - et s'assurer que la modification du degré d'invalidité rendue vraisemblable par l'assuré est effectivement survenue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2012 du 9 juillet 2012 consid. 4). Selon la jurisprudence, elle doit procéder de la même manière que dans les cas de révision au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA et comparer les circonstances prévalant lors de la nouvelle décision avec celles existant lors de la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (cf. ATF 133 V 108) pour déterminer si une modification notable du taux d'invalidité justifiant la révision du droit en question est intervenue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_412/2010 du 22 février 2011 consid. 3).

6.        a. L'art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée.

Tout changement important des circonstances propres à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3; ATF 130 V 343 consid. 3.5). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b; ATF 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 559/02 du 31 janvier 2003 consid. 3.2 et les références). La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 406/05 du 13 juillet 2006 consid. 4.1).

b. Le point de savoir si un changement notable des circonstances s'est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l'époque de la décision litigieuse. C'est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et cas échéant - en cas d'indices d'une modification des effets économiques - une comparaison des revenus conformes au droit qui constitue le point de départ temporel pour l'examen d'une modification du degré d'invalidité lors d'une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108 consid. 5.4; ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_685/2011 du 6 mars 2012 consid. 5.1). Si l'administration constate que les circonstances prévalant lors de la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (cf. ATF 133 V 108) ne se sont pas modifiées jusqu'au moment de la nouvelle décision, et que le degré d'invalidité n'a donc pas changé, elle rejette la nouvelle demande. Dans le cas contraire, elle est tenue d'examiner s'il y a désormais lieu de reconnaître un taux d'invalidité ouvrant le droit à une prestation ou augmentant celle-ci. En cas de recours, le même devoir d'examen matériel incombe au juge (ATF 117 V 198 consid. 3a et 109 V 114 consid. 2a et b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_721/2014 du 16 juin 2015 consid. 3.1).

7.        Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V 165; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

Dans l'éventualité où des troubles psychiques ayant valeur de maladie sont admis, il y a alors lieu d'évaluer le caractère exigible de la reprise d'une activité lucrative par l'assuré, au besoin moyennant un traitement thérapeutique. À cet effet, il faut examiner quelle est l'activité que l'on peut raisonnablement exiger de lui. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société (ATF 127 V 294 consid. 4c, ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références). Ces principes sont valables, selon la jurisprudence, pour les psychopathies, les altérations du développement psychique (psychische Fehlentwicklungen), l'alcoolisme, la pharmacomanie, la toxicomanie et pour les névroses (RCC 1992 p. 182 consid. 2a et les références; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 237/04 du 30 novembre 2004 consid. 4.2).

8.        a. La reconnaissance de l'existence de troubles somatoformes douloureux persistants suppose d'abord la présence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant lege artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 396 consid. 5.3).

Le diagnostic d'un trouble douloureux somatoforme doit être justifié médicalement de telle manière que les personnes chargées d'appliquer le droit puissent vérifier que les critères de classification ont été effectivement respectés. En particulier, l'exigence d'une douleur persistante, intense et s'accompagnant d'un sentiment de détresse doit être remplie. Un tel diagnostic suppose l'existence de limitations fonctionnelles dans tous les domaines de la vie (tant professionnelle que privée). Les médecins doivent en outre prendre en considération les critères d'exclusion de ce diagnostic retenus par la jurisprudence (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1. et 2.2). Ainsi, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance.
Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (ATF 131 V 49 consid. 1.2).

Une expertise psychiatrique est, en principe, nécessaire quand il s'agit de se prononcer sur l'incapacité de travail que les troubles somatoformes douloureux sont susceptibles d'entraîner (ATF 130 V 352 consid. 2.2.2 et 5.3.2). Une telle appréciation psychiatrique n'est toutefois pas indispensable lorsque le dossier médical comprend suffisamment de renseignements pour exclure l'existence d'une composante psychique aux douleurs qui revêtirait une importance déterminante au regard de la limitation de la capacité de travail.

b. Dans un arrêt 9C_492/2014 du 3 juin 2015, publié aux ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a abandonné la présomption qui prévalait jusqu'alors, selon laquelle les syndromes du type troubles somatoformes douloureux et affections psychosomatiques assimilées peuvent être surmontés en règle générale par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65; ATF 131 V 49; ATF 130 V 352). Désormais, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant de mettre en regard les facteurs extérieurs incapacitants d'une part et les ressources de compensation de la personne d'autre part (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). Il n'y a plus lieu de se fonder sur les critères de l'ATF 130 V 352, mais sur une grille d'analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

c. Dans sa jurisprudence récente (ATF 143 V 409 consid. 4.5 et ATF 143 V 418 consid. 6 et 7), le Tribunal fédéral a modifié sa pratique lors de l'examen du droit à une rente d'invalidité en cas de troubles psychiques. La jurisprudence développée pour les troubles somatoformes douloureux, selon laquelle il y a lieu d'examiner la capacité de travail et la capacité fonctionnelle de la personne concernée dans le cadre d'une procédure structurée d'administration des preuves à l'aide d'indicateurs (ATF 141 V 281), s'applique dorénavant à toutes les maladies psychiques, y compris les troubles dépressifs de degré léger ou moyen (ATF 143 V 409 consid. 4.5.1). En effet, celles-ci ne peuvent en principe être déterminées ou prouvées sur la base de critères objectifs que de manière limitée.

d. Le diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) doit être justifié médicalement de telle manière que les personnes chargées d'appliquer le droit puissent vérifier que les critères de classification ont été effectivement respectés. Il suppose l'existence de limitations fonctionnelles dans tous les domaines de la vie (tant professionnelle que privée). Les médecins doivent en outre prendre en considération les critères d'exclusion de ce diagnostic retenus par la jurisprudence (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1. et 2.2). Ainsi, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (ATF 131 V 49 consid. 1.2).

9.        a. Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d'assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore raisonnablement exiger de l'assuré (ATF 125 V 256 consid. 4; ATF 115 V 133 consid. 2; ATF 114 V 310 consid. 3c; arrêt du Tribunal fédéral 8C_442/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2).

b. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

c. Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

c/aa. Ainsi, en principe, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

c/bb. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

c/cc. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

10.    a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n'existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

b. Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en oeuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en oeuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l'administration reste possible notamment lorsqu'il apparaît nécessaire d'élucider une question demeurée non instruite jusque-là ou qu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4 ; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

11.    En l'espèce, il convient de comparer la situation telle qu'elle se présentait lors de la décision du 25 février 2010 avec celle existant le 11 décembre 2018 pour apprécier le bien-fondé d'une éventuelle révision en application de l'art. 17 LPGA.

La décision du 25 février 2010 se fondait sur l'avis émis le 27 mars 2008 par le SMR, lequel faisait siennes les conclusions rendues le 29 février 2008 par la Dresse E______ : les atteintes incapacitantes consistaient en cervicalgies droites (hernie discale C3-C4 non compressive) en un status post-fracture C2 en 1992, sans séquelle neurologique (M50.2), en lombosciatalgies chroniques non déficitaires dans le cadre d'un trouble statique et dégénératif avec insuffisance posturale (M51.3) et en un status post-neurolyse du nerf cubital du coude et du nerf médian au poignet gauche en 2005, avec trouble sensitif et faiblesse résiduelle.

La capacité de travail était nulle, depuis 2000, dans l'activité habituelle de maçon ; dans une activité adaptée, elle était passée de 80% à 75% suite à une péjoration survenue courant 2006, avec mise en évidence d'une hernie discale C3-C4 non compressive en 2007. Pour être adaptée, une telle activité devait n'impliquer ni position statique prolongée assise, debout, en rotation-flexion du tronc, en porte-à-faux, en extension et rotation extrême, ni mouvements répétitifs de la tête.

De l'expertise rhumato-psychiatrique des Drs S______ et T______, il ressort en substance qu'en l'absence de diagnostics psychiatriques autres que l'utilisation d'alcool nocive pour la santé et un trouble anxieux et dépressif mixte (F41.2) secondaire à la douleur (tous deux sans effet sur la capacité de travail), la situation reste inchangée par rapport à l'expertise pluridisciplinaire du 19 juillet 2012 du CHUV et au complément du 13 novembre 2013 du Prof. G______, de sorte qu'il n'y a pas d'élément objectif permettant de justifier une augmentation de l'incapacité de travail. Il ressort plus particulièrement du rapport du Dr T______ que s'il existe, d'un point de vue objectif, un syndrome cervicobrachial et lombovertébral, sans signe radiculaire irritatif ou déficitaire, des gonalgies sans signe de conflit rotulien, ligamentaire ou tendineux et une mobilité des chevilles dans la norme, l'examen n'en frappe pas moins par la présence de plusieurs signes de non-organicité selon Waddell qui ne sont pas expliqués par le socle somatique sous-jacent. C'est la raison pour laquelle l'expert a estimé que la diminution des capacités fonctionnelles dues à la santé résidait essentiellement dans le vécu douloureux devenu chronique, surtout aux niveaux du rachis, du genou droit et de l'impotence fonctionnelle décrite dans les activités quotidiennes. L'indicateur de cohérence « limitation uniforme du niveau des activités dans tous les domaines comparables de la vie » (ATF 141 V 281 consid. 4.4.1) permet de considérer que les limitations du recourant se manifestent peu ou prou de la même manière dans la profession et les actes habituels de la vie puisqu'il évalue leurs répercussions à 25% sur le plan professionnel (comme maçon-paysagiste) et à 20% dans les activités ménagères, les loisirs et les activités sociales.

Pour sa part, le Dr S______ a reçu le recourant avant l'expert rhumatologue et rendu ses conclusions avant ce dernier ; il n'intègre donc pas les observations cliniques du Dr T______ (soit le fait que les douleurs physiques ne s'expliquent pas suffisamment d'un point de vue organique ; ATF 141 V 281 consid. 4.3.1.3) à son appréciation diagnostique et, par voie de conséquence, ne permet pas de vérifier pour quels motifs le degré de gravité inhérent au diagnostic de trouble somatoforme douloureux (« douleur persistante, intense, s'accompagnant d'un sentiment de détresse » ; cf. ATF 141 V 281 consid. 2.1.1) ne serait pas donné. Pour écarter le diagnostic de trouble somatoforme, l'expert se contente d'indiquer qu'« il manque le critère clinique principal qui est le sentiment de détresse » ; rapport d'expertise du Dr S______, p. 23).

Par ailleurs et surtout, l'expert S______ établit une anamnèse qui ne tient pas compte de tous les documents psychiatriques - pourtant peu nombreux - versés au dossier, à savoir le rapport du 12 juin 2014 de la Dresse K______, qui mentionne un score de 31 à l'échelle de Hamilton (sur la base d'un test effectué le 6 mai 2014) et diagnostique un épisode dépressif sévère sans symptôme psychotique (F32.2), ainsi qu'une anxiété généralisée (F41.1).

On cherche également en vain une mention et/ou une détermination, de la part de l'expert S______, du rapport du 15 octobre 2015 dans lequel la Dresse K______ s'inscrivait en faux contre l'avis émis le 19 août 2014 par le SMR et défendait le diagnostic de syndrome douloureux posé par l'expert L______, du fait de plaintes disproportionnées à leur substrat organique.

On ne trouve pas non plus de prise de position de l'expert au sujet des « autres troubles somatoformes » (F45.8) du « trouble somatoforme indifférencié » (F45.1) évoqués le 19 août 2014 par le SMR.

Compte tenu des observations qui précèdent, l'expertise du Dr S______, très lacunaire et insuffisamment motivée, ne peut se voir reconnaître pleine valeur probante. Elle est impropre à établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, quelle a été l'évolution de l'état de santé psychique du recourant depuis la décision du 25 février 2010, de sorte que les instructions données à l'intimé par le Tribunal fédéral dans son arrêt 9C_286/2016 du 9 février 2017 restent d'actualité, à tout le moins d'un point de vue psychiatrique.

En revanche, la Cour de céans considère que le volet rhumatologique de l'expertise bidisciplinaire réalisé par le Dr T______ peut se voir reconnaître valeur probante : il a été rendu sur la base d'une documentation complète, d'une anamnèse comportant un volet familial, personnel, professionnel et médical. Ce document relate les plaintes du recourant, comporte un status médical approfondi et prend position au sujet des rapports versés au dossier par le Dr P______ le 8 septembre 2017. En outre, il pose des diagnostics précis, ses constatations sont claires et ses conclusions suffisamment bien motivées, en particulier quant au caractère inchangé de la situation par rapport à l'expertise pluridisciplinaire du 19 juillet 2012 du CHUV et au complément du 13 novembre 2013 du Prof. G______ - étant souligné que ce professeur y notait déjà une absence d'aggravation des plaintes et de l'état clinique par rapport aux expertises des Dresses B______ et C______ de 2004 (cf. dossier AI, doc. 160, p. 772). Il est dès lors établi au degré de la vraisemblance prépondérante que, d'un point de vue somatique, en particulier rhumatologique, il n'y a pas eu de modification sensible de l'état de santé du recourant depuis la décision du 25 février 2010.

12.    Dès lors que les questions posées par l'intimé au Dr S______, telles qu'elles ressortent de la communication du 1er février 2018 (cf. dossier AI, doc. 228,
p. 1150) ne répondent pas à la principale injonction du Tribunal fédéral - à savoir analyser l'évolution de l'état de santé du recourant pour la période postérieure
à février 2010 - et que cet expert s'est borné pour l'essentiel à se référer à son entretien du 17 avril 2018 avec le recourant pour en déduire, au terme d'une analyse tronquée du dossier (cf. ci-dessus : consid. 11), qu'il n'y avait pas d'atteinte psychiatrique « depuis au moins 2010 », le recours est partiellement admis, la décision du 11 décembre 2018 annulée et la cause renvoyée à l'intimé pour qu'il mette en oeuvre une expertise psychiatrique auprès d'un expert indépendant (autre que les docteurs S______ et U______). Il conviendra qu'il communique préalablement à l'assuré le nom de l'expert envisagé, ainsi que la liste des questions qui lui seront soumises.

13.    Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2'850.- lui est accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Un émolument de CHF 200.- est mis à la charge de l'intimé (art. 69 al. 1bis LAI).

 

*****

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision du 11 décembre 2018 et renvoie la cause à l'intimé pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

4.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 2'850.- pour ses dépens, à charge de l'intimé.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l'intimé.

6.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le