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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1632/2020

ATAS/872/2020 du 13.10.2020 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1632/2020 ATAS/872/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 13 octobre 2020

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à CAROUGE

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant) s'est annoncé à l'Office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE ou l'intimé) et un cinquième délai-cadre d'indemnisation a été ouvert en sa faveur le 1er juin 2019.

2.        Le 20 juin 2016, lors d'un précédent délai-cadre, l'assuré avait signé un plan d'action par lequel il s'était engagé à effectuer dix recherches d'emploi par mois au minimum en qualité de metteur en scène et comédien et à les remettre à l'OCE le 5 du mois suivant au plus tard.

3.        Le formulaire concernant les recherches effectuées durant le mois d'octobre 2019 a été envoyé par la Poste le 8 novembre 2019, selon le timbre apposé sur l'enveloppe. Il faisait état de onze recherches, effectuées entre le 1er et le 24 octobre 2019.

4.        Par décision du 26 novembre 2019, l'OCE a prononcé la suspension du droit à l'indemnité de l'intéressé pour une durée de dix jours au motif que les recherches d'emploi d'octobre 2019 avaient été remises tardivement. La quotité de la sanction tenait compte du fait qu'il s'agissait-là du deuxième manquement reproché à l'assuré.

5.        Le 24 décembre 2019, celui-ci s'est opposé à cette décision en s'excusant de son oubli.

Il a fait valoir que la sanction infligée le mettait dans une situation financière difficile. Il savait d'ores et déjà qu'une autre lui serait bientôt notifiée dès lors qu'il s'était trompé et avait rendu pour novembre 2019 neuf recherches au lieu des dix convenues.

L'assuré a invoqué une importante fatigue consécutive à ses responsabilités. Il n'était pas déprimé mais sentait qu'un certain nombre d'éléments lui échappaient, malgré sa volonté de remplir ses obligations.

Il a produit une lettre rédigée le 23 décembre 2019 par Madame B______, docteur en psychologie clinique, expliquant qu'elle l'avait examiné à plusieurs reprises depuis le 15 octobre 2019, qu'il avait accumulé une grande fatigue due à une surcharge de travail, que cela avait entraîné une perte de ses capacités de concentration, raison pour laquelle il n'avait pas été en mesure de rendre ses recherches d'emploi dans le délai imparti, mais qu'il ne présentait aucun danger, ni pour sa santé, ni pour celle des autres, raison pour laquelle elle l'avait encouragé à poursuivre normalement son activité de comédien et de pédagogue : un arrêt de travail serait contre-productif. Ses nombreux oublis et erreurs ne cesseraient que s'il retrouvait le calme et le repos nécessaires.

6.        Par décision du 12 mai 2020, l'OCE a rejeté l'opposition.

Il a fait remarquer que l'assuré disposait, pour remettre ses recherches, d'un délai de remise large, allant du 25 du mois concerné au 5 du mois suivant. Dès lors, l'assuré, nonobstant ses activités, avait le temps de s'exécuter.

Il n'y avait eu aucun arrêt de travail médicalement attesté.

Dès lors, c'était à juste titre qu'une sanction avait été prononcée et la durée de suspension de dix jours respectait le barème applicable et le principe de la proportionnalité s'agissant d'un deuxième manquement.

7.        Par courrier du 9 juin 2020, l'intéressé a interjeté recours contre cette décision en reprenant en substance les explications déjà formulées dans son opposition.

Il explique qu'une immense fatigue est à l'origine de son oubli, consécutive à ses obligations familiales, d'une part, à la nécessité d'entretenir au quotidien son niveau professionnel par un entraînement physique, mais également par l'apprentissage de textes et la recherche permanente d'emplois comme comédien ou metteur en scène.

8.        Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 9 juillet 2020, a conclu au rejet du recours.

9.        Une audience de comparution personnelle s'est tenue en date du 1er octobre 2020, à l'occasion de laquelle le recourant a réitéré ses excuses et réaffirmé que ses oublis n'étaient pas le fruit d'une négligence délibérée de sa part mais la conséquence d'une surcharge administrative.

Cela étant dit, il a déploré le durcissement récent intervenu, n matière de chômage, dans le traitement des intermittents du spectacle, dont il a souligné la situation particulière et difficile.

A cet égard, il a allégué qu'aujourd'hui âgé de 62 ans, il est en situation de gain intermédiaire en permanence et, depuis des années, en recherche constante d'emploi.

L'assuré a également souligné l'importance des conséquences financières de la sanction infligée.

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l'assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté en temps utile et dans la forme prévue par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de dix jours du droit à l'indemnité du recourant, pour remise tardive des recherches effectuées en octobre 2019, étant précisé qu'il s'agissait-là d'un deuxième manquement.

4.        Selon l'art. 17 al. 1 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger ; il lui incombe en particulier de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment ; il doit apporter la preuve des efforts qu'il a fournis.

Selon l'art. 26 al. 2 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), dans sa teneur en vigueur dès le 1er avril 2011, l'assuré doit remettre la preuve de ses recherches d'emploi pour chaque période de contrôle au plus tard le 5 du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date ; à l'expiration de ce délai, et en l'absence d'excuse valable, les recherches d'emploi ne sont plus prises en considération.

5.        La suspension du droit à l'indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d'exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 2ème éd. 2007, p. 2424 n. 825). Selon l'art. 30 al. 1 let. d LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu lorsqu'il est établi que celui-ci n'observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l'autorité compétente.

La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute
(art. 30 al. 3 LACI). L'OACI distingue trois catégories de faute - à savoir les fautes légères, moyennes et graves - et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI).

La durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est fixée compte tenu de la faute, mais aussi du principe de proportionnalité (Thomas NUSSBAUMER, op. cit., p. 2435, n° 855).

En tant qu'autorité de surveillance, le Secrétariat d'État à l'économie (ci-après : SECO) a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution (SECO - Bulletin janvier 2014 LACI IC/D72). Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas d'espèce, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_601/2012 du 26 février 2013 consid. 4.1, non publié in ATF 139 V 164 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_537/2013 du 16 avril 2014 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

6.        a. Le défaut ou l'insuffisance de recherches d'emploi et la remise tardive de recherches d'emploi effectuées représentent des inobservations des prescriptions de contrôle du chômage ou des instructions de l'autorité compétente, visées par l'art. 30 al. 1 let. d LACI. Ces manquements n'atteignent pas forcément le degré de gravité des exemples de telles inobservations que cite cette disposition légale, comme le refus d'un travail convenable, le fait de ne pas se présenter à une mesure de marché du travail ou de l'interrompre sans motif valable, ou encore de compromettre ou empêcher, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but. Il y a en outre une différence de gravité, pouvant appeler à différencier la mesure de la sanction, entre le fait, pour un assuré, de n'effectuer aucune recherche d'emploi ou de produire ses recherches d'emploi après le délai (surtout en cas de léger retard seulement).

b. Le Tribunal fédéral a jugé qu'une sanction identique ne devait pas s'imposer lorsque l'assuré ne faisait aucune recherche d'emploi ou lorsqu'il produisait ses recherches après le délai, surtout s'il s'agissait d'un léger retard qui avait lieu pour la première fois pendant la période de contrôle. Il a ainsi confirmé qu'un formulaire de recherches remis pour la première fois avec cinq jours de retard alors que l'assurée avait fait des recherches de qualité justifiait une sanction, non pas de cinq jours de suspension du droit à l'indemnité, mais uniquement d'un seul jour (arrêt du Tribunal fédéral 8C_2/2012 du 14 juin 2012).

Dans un arrêt du 26 juin 2012 (8C_64/2012), le Tribunal fédéral a confirmé la réduction de la sanction de cinq à un jour de suspension du droit à l'indemnité au motif que l'assuré avait remis ses recherches d'emploi avec un jour de retard seulement.

Dans un autre arrêt du 26 juin 2012 (8C_33/2012), le Tribunal fédéral a rappelé qu'une sanction identique ne s'imposait pas lorsque l'assuré ne faisait aucune recherche d'emploi ou lorsqu'il produisait ses recherches après le délai, surtout qu'il s'agissait d'un léger retard qui avait lieu pour la première fois pendant la période de contrôle ; il a confirmé la réduction de la sanction de cinq à trois jours de suspension du droit à l'indemnité d'une assurée qui avait remis ses recherches d'emploi, lesquelles étaient faites en qualité et en quantité, avec quatorze jours de retard alors qu'il s'agissait d'un premier manquement. En effet, pour juger de la suffisance des efforts consentis par l'intéressé dans ses recherches d'emploi, il doit être tenu compte non seulement de la quantité, mais aussi de la qualité des démarches entreprises (ATF 124 V 231 consid. 4). L'assuré doit cibler ses recherches d'emploi, en règle générale, selon les méthodes de postulation ordinaires et fournir à l'office compétent la preuve des efforts qu'il entreprend pour trouver du travail (cf. art. 26 al. 1 et 2 OACI dans sa teneur en vigueur depuis le 1er juillet 2003).

7.        En ce qui concerne la preuve, le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2). Il n'existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

8.        En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a remis tardivement son formulaire de recherches relatif à octobre 2019, le vendredi 8 novembre en lieu et place du mardi 5 novembre 2019. Ses recherches ne peuvent donc plus être prises en compte (art. 26 al. 2 OACI).

Cette omission constitue non pas le premier manquement du recourant depuis son inscription au chômage, mais le second.

Certes, les recherches d'emploi ont été dûment effectuées et l'intimé ne conteste pas qu'elles correspondent, en termes de qualité et de quantité, à ce qui était demandé. Il n'en demeure pas moins qu'elles ont été remises tardivement, de sorte que le prononcé d'une sanction était justifié en l'occurrence.

Quant à la quotité de celle-ci, elle apparaît proportionnée au vu du barème suggéré par le SECO et du fait qu'il s'agit du second manquement reproché à l'assuré. En effet, le SECO, dans son barème, prévoit une sanction de cinq à neuf jours pour une remise tardive des recherches, augmentée à 10-19 jours en cas de deuxième manquement (cf. Bulletin LACI, D79 let. 1D). On relèvera que la sanction a donc été fixée ici au minimum prévu par le barème.

Eu égard aux considérations qui précèdent, le recours est rejeté.

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le