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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1376/2016

ATAS/845/2020 du 07.10.2020 ( LAA ) , ADMIS

Recours TF déposé le 20.11.2020, rendu le 02.07.2021, REJETE, 8C_711/2020
Recours TF déposé le 20.05.2021, rendu le 02.07.2021, REJETE, 8C_711/2020
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1376/2016 ATAS/845/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 octobre 2020

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______ à GENÈVE, représenté par APAS - association pour la permanence de défense des patients et des assurés

 

 

recourant

 

contre

SUVA, CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUCERNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        Le 27 octobre 2014, Monsieur A______ (ci-après l'assuré ou le recourant), né ______ 1973, au bénéfice de prestations du chômage depuis 2013, a glissé dans sa baignoire et s'est blessé au dos et au genou gauche. Une incapacité de travail à 100% s'en est suivie.

2.        La SUVA, caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accident (ci-après l'assureur ou l'intimée) a pris l'accident en charge.

3.        Par rapport du 20 novembre 2014, le docteur B______, spécialiste FMH en radiologie, a constaté à l'imagerie à résonnance magnétique (ci-après IRM) des 13 et 18 novembre 2014 au genou gauche de l'assuré de multiples ulcérations cartilagineuses mettant à nu l'os sous-chondral sur le tiers moyen et supérieur de la crête de la rotule, associées à un oedème sous-chondral en regard, une ulcération cartilagineuse occupant les deux tiers de l'épaisseur du versant postérieur du plateau tibial externe sur une zone de 6 mm et à une discrète altération de signal sous-chondral en regard ainsi qu'un oedème du coin supéro-interne du plateau tibial interne, pouvant constituer une zone de contusion osseuse post-traumatique, à confronter néanmoins à la présentation clinique.

4.        Le 16 février 2015, l'assuré a indiqué à un collaborateur de la SUVA que le 27 octobre 2014, il avait glissé et était tombé en arrière dans sa baignoire alors qu'il prenait une douche. Sa tête avait heurté la baignoire et il avait perdu connaissance quelques minutes. Il avait très mal dans la région lombaire et au genou gauche.

5.        Par rapport du 23 mars 2015, le docteur C______, spécialiste FMH en radiologie, a indiqué que la radiographie du genou gauche de l'assuré avait mis en évidence une subluxation latérale de la rotule gauche sans signe de dysplasie trochléaire ou de patella alta et une discrète gonarthrose fémoro-tibiale interne et fémoro-patellaire.

6.        Par rapport du 24 mars 2015, le Dr C______ a indiqué qu'une IRM du genou gauche avait révélé une importante ulcération cartilagineuse avec mise à nu de la crête patellaire à son versant médial, associée à un remodelage oedémateux et géodique sous-chondral, une chondropathie focale de grade IV au niveau de la partie postérieure du plateau tibial externe ainsi qu'un hypersignal hétérogène au niveau de la corne postérieure du ménisque interne, sans atteinte de la surface articulaire (lésion de grade II).

7.        Le 28 avril 2015, un scanner des deux membres inférieurs a été effectué. La « TAGT » du côté droit était de 13 mm et celle du côté gauche de 14 mm. La torsion jambière à droite et à gauche était de 4°. La torsion fémorale était une antétorsion de 12° à droite et de 10° à gauche (rapport du Dr B______ du 1er mai 2015).

8.        À l'issue d'un examen du 8 juin 2015, le docteur D______, spécialiste en chirurgie orthopédique, médecin d'arrondissement de l'assureur, a diagnostiqué des lésions cartilagineuses au niveau de l'articulation fémoro-patellaire survenant dans un tableau de subluxation congénitale de rotule bilatérale. Il existait, avant l'événement du 27 octobre 2014, un état antérieur marqué sur le genou gauche, de type chondropathie fémoro-patellaire. L'événement initial avait consisté en une simple chute dans une baignoire et l'IRM du 13 novembre 2014 avait confirmé un discret oedème du plateau tibial interne. Des multiples ulcérations cartilagineuses mettaient à nu l'os sous-chondral sur la crête de la rotule. Celles-ci étaient dues à la subluxation rotulienne importante mise en évidence sur les clichés standards ultérieurement. Vu la simple chute sans lésion fracturaire associée, on était en présence d'une aggravation temporaire de l'état antérieur.

9.        Le 9 novembre 2015, les docteurs E______, chef de clinique au département de chirurgie des F______ (ci-après G______), et H______, médecin adjointe, ont pratiqué une arthroscopie diagnostique du genou gauche et un débridement articulaire (facette médiale rotulienne). Une lésion cartilagineuse facette médiale rotule gauche grade IV et une dysplasie trochléenne type B ont été diagnostiquées (rapport du 13 novembre 2015).

10.    Par rapport du 13 janvier 2016, lesdoctoresses I______, spécialiste FMH en chirurgie, et J______, spécialiste FMH en chirurgie générale et traumatologie, auprès de l'assureur, ont estimé qu'il n'existait pas de lien de causalité entre la lésion cartilagineuse de la rotule gauche ayant motivé l'intervention du 9 novembre 2015 et le traumatisme du 27 octobre 2014, lequel n'avait pas laissé d'atteinte séquellaire du point de vue organique. La lésion cartilagineuse rotulienne était d'origine maladive, due à une anomalie congénitale de la trochlée fémorale. L'accident avait entraîné une aggravation temporaire d'un état préexistant et le statu quo sine avait été atteint deux mois après l'événement assuré.

11.    Par décision du 13 janvier 2016, l'assureur, se fondant sur l'appréciation des Dresses I______ et J______, a mis fin au droit aux prestations au 8 novembre 2015.

12.    L'assuré a formé une opposition orale contre la décision de la SUVA.

13.    Par rapport du 11 février 2016 à l'assureur, la Dresse H______ a indiqué que le cas de l'assuré relevait d'un accident. Il avait subi une chute dans sa baignoire avec un traumatisme direct antérieur du genou gauche, avec une lésion chondrale de la facette rotulienne interne. A priori, il ne s'était jamais luxé la rotule puisque le ligament fémoro-patellaire interne était intact. Il présentait toujours des douleurs très importantes. Des investigations allaient être effectuées.

14.    Le 7 mars 2016, la Dresse H______ a indiqué qu'une transplantation ostéo-chondrale au niveau de la rotule était préconisée.

15.    Par décision du 24 mars 2016, l'assureur a rejeté l'opposition, se référant à l'appréciation orthopédique chirurgicale des Dresses I______ et J______.

16.    Par acte du 3 mai 2016, l'assuré, représenté par un mandataire, a interjeté recours contre cette décision, concluant, principalement, à la reconnaissance de son droit aux prestations au-delà du 8 novembre 2015.

17.    Dans sa réponse du 14 septembre 2016, l'intimée a conclu au rejet du recours.

18.    Par réplique du 20 octobre 2016, le recourant a fait valoir que le Dr E______, par rapport détaillé du 7 octobre 2016, avait précisé que la lésion cartilagineuse de la facette interne rotulienne ne pouvait pas être liée à un maltracking rotulien. Selon ce médecin, à l'IRM du 13 novembre 2014, des oedèmes sous-chondraux de la rotule sans contrecoup au niveau du fémur avaient été mis en évidence. Ce type de lésion cartilagineuse et osseuse au niveau de la rotule était seulement possible après une luxation de la rotule ou un choc axial sur la rotule en flexion. La doctoresse K______, spécialiste FMH en radiologie aux G______, partageait cet avis. Une subluxation rotulienne ne pouvait pas créer une lésion cartilagineuse de la facette interne de la rotule. En l'occurrence, il n'y avait aucun argument pour une luxation rotulienne. Par contre, l'accident avec un choc direct sur la rotule correspondait à un traumatisme adéquat pour le type de lésion constatée à l'IRM. En conclusion, la lésion cartilagineuse était strictement liée au traumatisme du 27 octobre 2014.

19.    La chambre de céans a, par ordonnance du 28 juin 2017, mis en oeuvre une expertise qu'elle a confiée au docteur L______, spécialiste FMH en orthopédie, chirurgie reconstructive du genou (ATAS/569/2017). Au vu des avis et conclusions contradictoires émis par les médecins-conseils de l'intimée et les Drs H______ et E______, elle considérait nécessaire de clarifier les aspects médicaux afin de déterminer si les atteintes au genou gauche du recourant étaient en lien avec l'événement accidentel du 27 octobre 2014.

20.    Le 27 novembre 2017, le Dr L______ a rendu son rapport qui était fondé sur un examen du recourant effectué le 27 septembre 2017. Il a notamment estimé que les caractéristiques de la lésion chondrale visibles sur l'IRM du 13 novembre 2014 évoquaient une lésion préexistante à l'événement et que les atteintes ayant nécessité l'intervention du 9 novembre 2015 étaient dues à l'accident d'une façon tout au plus possible (moins de 50%). L'intervention précitée était justifiée de manière prépondérante par l'indication pathologique. Le statu quo sine ne pouvait être déterminé avec précision. L'expert proposait douze mois. Le statu quo ante n'allait probablement jamais être atteint.

21.    Par ordonnance du 28 février 2019, la chambre de céans, considérant que les conclusions du Dr L______ manquaient de clarté et apparaissaient contradictoires, a ordonné une nouvelle expertise orthopédique du recourant qu'elle a confiée au docteur M______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

22.    Le rapport d'expertise du Dr M______ du 4 décembre 2019 se fonde sur deux examens cliniques, le dossier et l'imagerie médicale mis à disposition de l'expert ainsi que sur des pièces complémentaires requises par celui-ci. Le rapport contient une anamnèse détaillée, les constats de l'expert lors de son examen clinique, des considérations générales nécessaires à la compréhension de la situation et le résumé des radiographies.

Sous synthèse et discussion, l'expert a indiqué :

« Lésion du cartilage :

L'imagerie par IRM initiale évoque la présence d'une lésion du cartilage avec des marges arrondies et localisées dans la zone centrale de la rotule avec extension dans la facette interne. Il y a également un oedème marqué de l'os sous-chondral en zone centrale et médiale de la rotule.

Le fait que les bords soient arrondis implique que l'origine de la lésion ne peut être donnée précisément. Une origine traumatique doit être envisagée et acceptée, car un defect focal (comme celui visualisé à l'IRM) est décrit le plus souvent comme d'origine traumatique, d'autant plus que le genou opposé ne présente pas de lésion de l'épaisseur complète du cartilage. Par contre et étant donné que les bords de cette lésion ne sont pas nets mais arrondis, la survenue de cette lésion ne peut pas être datée avec précision mais a dû être présente d'une façon ou d'une autre avant le dernier traumatisme.

En revanche, cette même imagerie lorsque corrélée à celle visualisée sur le genou opposé (asymptomatique) parle en faveur d'une lésion chronique et d'usure, également déjà présente avant le traumatisme, d'autant plus que la localisation de cette dernière (genou gauche) est présente dans la zone centrale de la rotule (cette localisation est retrouvée dans 2/3 des cas d'usure fémoro-patellaire dans un contexte de mauvais guidage ou maltracking). Plusieurs publications ont du reste confirmé l'usure précoce de l'articulation fémoro-patellaire en cas de dysplasie de cette articulation même si la genèse exacte de cette usure n'est pas clairement définie.

L'anamnèse ne met pas en évidence de luxation ou de subluxation latérale de la rotule et ceci ne s'est jamais produit chez le patient. Une atteinte du cartilage n'a pas pu se faire sous cette forme.

Étant donné que la symptomatologie a débuté après un traumatisme, ce dernier a indiscutablement joué un rôle dans la problématique fémoro-patellaire. La lésion du cartilage précédemment citée peut et doit donc être reliée au traumatisme direct qui lui a été délivré lors d'une chute avec choc contre la facette interne de la rotule. L'énergie délivrée lors de ce mécanisme est relativement faible mais a dans ce cas précis été suffisante pour faire décompenser une atteinte déjà préexistante. Vu le manque de documentation suite aux deux premiers accidents de ce genou, il n'est pas possible d'affirmer quel était le degré de l'atteinte du cartilage de la facette interne de la rotule avant le dernier traumatisme du 27 octobre 2014.

Sur le plan chirurgical, l'arthroscopie réalisée une année après l'accident a permis de retirer des fragments de cartilage instable sur le côté interne de la rotule (débridement). Les opérateurs ont décrit la lésion de stade 4 selon la classification d'Outerbridge modifiée. La description de la lésion du cartilage dans le compte-rendu opératoire ne permet pas de se prononcer formellement quant à son origine. Il y a donc une différence significative dans l'altération cartilagineuse entre les deux rotules, la gauche présentant une lésion de toute l'épaisseur du cartilage alors que celle du genou droit reste dans l'épaisseur du cartilage.

Morphométrie fémoro-patellaire :

L'analyse morphométrique du membre inférieur et du genou gauche met en évidence plusieurs facteurs d'instabilité tels que :

- Signe du J à l'examen clinique

- Trochlée type A (Dejour)

- Rotule type 2 (Wiberg)

Toutefois, l'essentiel des autres mesures morphométriques du membre inférieur sont dans les limites de la norme (TAGT, antétorsion fémorale, varus du membre inférieur, rotation externe du genou, hauteur rotulienne).

Mis en relation avec l'anamnèse et le bilan clinique, toute la discussion qui concerne l'instabilité fémoro-patellaire sous forme de luxation ou subluxation avérée ne rentre pas en compte. En l'occurrence, le patient n'a jamais ressenti de tels phénomènes et ne peut donc pas être considéré comme présentant une instabilité franche de la rotule. En revanche, il présente une imagerie avec des signes de dysplasie fémoro-patellaire modérés associés à un bilan clinique qui met en évidence un signe du J. Ceci confirme qu'il y a bien une guidance de la rotule qui ne se fait pas de façon optimale et qu'une usure prématurée du cartilage peut bien survenir. Toutefois, il n'est pas possible de distinguer un élément (dysplasie, hauteur de la rotule, etc) comme étant responsable de l'usure, car les auteurs ne s'accordent pas pour expliquer la genèse de cette usure (répartition irrégulière des pressions sur le cartilage ou subluxations frustres répétées).

Impression globale

Dans la situation de (l'expertisé), il y a de façon concomitante une altération chronique de la facette articulaire centrale et médiale de la rotule gauche (asymptomatique) et une atteinte de cette même articulation (symptomatique) suite à un traumatisme précis et bien défini. L'anamnèse, la séquence des atteintes de ce genou, l'examen clinique, l'absence d'imagerie préalable, l'imagerie du genou opposé vont mener aux réflexions suivantes :

Si l'on considère la chronologie du genou de (l'expertisé), il y a eu trois épisodes de traumatismes importants en regard de ce genou dont un par écrasement. Le dernier, même d'énergie mineure, a suffi à décompenser une situation qui restait non symptomatique et stable. L'accident doit donc être incriminé comme la source primaire de la symptomatologie.

Suite à la prise en charge dans sa globalité, depuis 2014 jusqu'à la dernière chirurgie de mai 2019, il y a eu finalement une résolution de la symptomatologie. Cela va dans le sens des suivis cliniques liés à un traumatisme avec récupération de la fonction articulaire après un certain temps.

Si l'on considère des atteintes de type arthrosique, la symptomatologie a plutôt tendance à persister avec des périodes douloureuses dont l'intensité peut varier dans le temps ».

Sous réponses aux questions, l'expert a indiqué :

« Diagnostic précis

1. État après un accident par compression directe du genou, zone fémoro-patellaire, versant interne (27.10.2014)

2. Lésion cartilagineuse focale au tiers central rotule s'étendant sur le bord latéral de la facette interne de la rotule

3. Oedème osseux sous-chondral d'origine post-traumatique

4. Dysplasie modérée de l'articulation fémoro-patellaire

5. Oedème central sous-chondral chronique dont l'origine peut ne pas être incriminée au traumatisme

6. État après double traumatisme direct sur chute d'une hauteur avec impact genou gauche

(...)

Les atteintes présentes chez le recourant qui ont généré la symptomatologie douloureuse et qui ont mené aux prises en charge chirurgicale décrites au préalable sont présentes depuis l'accident du 27 octobre 2014. Il s'agit de lésions cartilagineuses patellaires associées à un oedème de l'os sous-chondral. L'évolution de ces lésions a été défavorable sous traitement conservateur et les diverses IRM effectuées par la suite n'ont pas mis en évidence de cicatrisation spontanée. Au contraire, il y a eu une persistance de lacunes cartilagineuses sur la zone d'impact.

La prise en charge chirurgicale, d'une part par arthroscopie à but diagnostic, a confirmé l'atteinte cartilagineuse visualisée à l'IRM et a, par la suite, mené à un transfert d'un cylindre ostéo-chondral de façon à recréer une surface cartilagineuse sur une zone patellaire impliquée dans la distribution des charges entre l'articulation de la rotule et de la trochlée. Malgré cette chirurgie, une symptomatologie douloureuse a persisté et a mené à une nouvelle chirurgie de libération des adhérences. Suite à cette dernière chirurgie, la symptomatologie a évolué favorablement et (l'expertisé), examiné en contrôle le 9 septembre 2019, ne présentait qu'une gêne légère au pourtour du genou.

À signaler qu'avant l'accident du 27 octobre 2014, mis à part les deux traumatismes ressentis sur ce genou, le patient était libre dans tous ses mouvements sans présenter de phénomène de subluxation ou de luxation latérale de la rotule que ce soit sur son travail de chantier ou dans les activités récréatives. Il a toujours effectué un travail lourd avec port de charges lourdes et travaillé dans des conditions difficiles (accroupi, montée et descente d'échelles etc.).

Il n'est pas possible de juger de l'évolution des atteintes chroniques, car elles sont restées quiescentes jusqu'au traumatisme. Une participation de la forme de la trochlée et de celle de la rotule ainsi que des traumatismes précédents à l'usure articulaire est indéniable. En témoigne également le genou opposé qui présente un oedème osseux sans être symptomatique (...).

Une partie de la lésion cartilagineuse diagnostiquée à la facette médiale et du tiers central de la rotule ainsi qu'une partie de l'oedème osseux sont imputables à l'accident du 27 octobre 2014.

Une partie de l'oedème osseux n'a pas été liée au traumatisme direct et a pu être déjà présente avant l'accident. Il n'est toutefois pas possible de dire précisément à quel degré cet oedème a été lié au mauvais guidage fémoro-patellaire. En effet, le patient n'a jamais eu d'instabilité fémoro-patellaire proprement dite. Un oedème résiduel, présent au préalable, a pu être lié à l'un ou l'autre des deux accidents vécus par le patient par le passé. Étant donné l'absence d'imagerie, il n'est pas possible de se prononcer à ce sujet (...).

En ce qui concerne le compartiment fémoro-tibial interne ou externe de la rotule, il n'y a aucune atteinte méniscale ou cartilagineuse préexistante.

En ce qui concerne l'articulation fémoro-patellaire, l'imagerie montre une forme d'altération de l'articulation fémoro-patellaire qui peut être imputée à l'usure (localisation centrale, oedème osseux présent dans les 2 rotules, guidage rotulien avec dysplasie). En revanche, il n'y aucun signe de luxation récent ou ancien de la rotule (...).

Les limitations fonctionnelles sont en lien avec l'articulation incriminée, à savoir la fémoro-patellaire. En ce sens toute activité excentrique ou concentrique va générer une symptomatologie douloureuse. Il s'agit typiquement de la montée ou descente d'escaliers ou d'échelles. Le port de charges lourdes et le passage de la position accroupie à debout vont également être limités. Le travail en position accroupie ou à genou sera une source de gêne.

Les diagnostics correspondant à une lésion corporelle figurant à l'art. 9 al. 2 de l'assurance LAA étaient la lésion focale, chondrale, d'épaisseur totale peut être imputée un traumatisme.

S'agissant des diagnostics qui, au genou gauche correspondent à une lésion corporelle figurant à l'art 9 al. 2 aOLAA :

Les altérations cartilagineuses et de l'os sous-chondral décrites ne sont pas d'origine exclusivement dégénérative.

La lésion décrite comme focale, associée à la réaction osseuse sous-chondrale sous-jacente, correspond à une atteinte traumatique d'autant plus lorsque cela est corrélé à l'anamnèse présentée par le patient.

La réaction osseuse plus diffuse et en chapelet, s'étendant sur une surface plus grande de la rotule, doit être associée avec une lésion plus ancienne étant donné le passé traumatique de cette articulation et de la morphométrie dysplasique de l'articulation fémoro-patellaire. Au vu de la présence d'un oedème osseux en regard de la rotule contra latérale, la nature dégénérative de cette lésion ne peut pas être occultée. En effet, la zone oedématiée de la rotule controlatérale correspond à celle présente sur le genou accidenté.

La différence réside dans la taille de la lésion du cartilage puisque le genou opposé ne présente pas de lésion cartilagineuse focale (...).

L'accident du 27 octobre a joué un rôle dans la survenue de l'atteinte ostéochondrale et focale patellaire. Un choc direct a pu générer cette symptomatologie sachant que le genou avait déjà été traumatisé. Dans cette situation, un traumatisme d'énergie moindre est suffisant pour faire décompenser la situation préalable (...).

En ce qui concerne la lésion cartilagineuse focale de la rotule, il est probable (à plus de 50%) qu'elle soit due à l'accident du 27 octobre. Cette probabilité tient compte des anciens accidents subis par ce genou. L'accident a fait décompenser un état préalablement altéré. Une probabilité plus grande n'est pas envisageable d'un point de vue objectif étant donné la présence des imageries en chapelet assez diffuses comme décrites précédemment et qui sont plus en lien avec une lésion ancienne dont l'origine peut être aussi bien accidentelle que dégénérative.

L'intervention chirurgicale reste toutefois liée de façon prépondérante à une indication d'origine traumatique (...).

L'analyse de l'anamnèse ainsi que de la situation clinique chez le patient, confrontée à l'imagerie radiologique, sont des éléments qui parlent en faveur d'une origine traumatologique et liés à l'accident du 27 octobre 2014. Il est toutefois important de préciser que les accidents anciens ont certainement joué un rôle dans l'atteinte de cette articulation, mais il n'est pas possible de préciser de quels types de lésions souffrait le patient avant l'événement du 27 octobre.

Les autres possibilités (j'imagine que la question évoque les éléments liés au tracking et à la dysplasie fémoro-patellaire) ont eu un rôle dans l'apparition d'une usure cartilagineuse. Je les retiens comme élément entrant raisonnablement en considération au vu des valeurs morphométriques et l'IRM controlatérale (...).

Il y a certainement eu des facteurs étrangers liés à cette lésion focale. À ce titre, il faut évoquer les traumatismes dans les antécédents comme une cause à la situation précédant l'accident. La configuration morphométrique de l'articulation fémoro-patellaire joue également un rôle défavorable dans l'évolution ostéo-chondrale fémoro-patellaire (...).

Au vu des antécédents de traumatisme de l'articulation du genou à gauche ainsi que de la morphométrie fémoro-patellaire, il est vraisemblable qu'une évolution vers une usure prématurée de cette articulation se développe. Toutefois, ceci n'est que corroboré par l'imagerie par IRM sans que le patient en ait ressenti une quelconque symptomatologie. Dès lors, dire à partir de quand ceci pourrait se déclencher n'est pas possible.

L'accident n'a pas fait que de déclencher un processus douloureux, il a vraisemblablement précipité l'atteinte cartilagineuse pré-existante en accentuant sa dégradation (...).

Il n'est pas possible de déterminer clairement à partir de quand ces phénomènes morphométriques deviennent les seules causes influant sur l'état de santé. Il n'y a pas non plus de corrélation possible entre l'examen clinique et l'imagerie radiologique. Le fait qu'une structure osseuse apparaisse comme oedématiée à l'IRM ne donne pas d'information sur la survenue de symptôme clinique.

Au vu de l'anamnèse ainsi que des diverses chirurgies réalisées, le statu quo ante peut être considéré comme atteint trois mois après la dernière chirurgie. Il est également possible de considérer qu'une partie de la symptomatologie et de la lésion cartilagineuse imputée aux troubles de guidance, a pu être stoppée par le transfert ostéo-chondral et a permis également de maintenir une hauteur cartilagineuse plus saine que sans cette chirurgie (...). Le fait que le patient ait trouvé un travail sans port de charges lourdes, sans position accroupie ou agenouillée et sans montée et descente d'escaliers ou échelle a certainement aussi diminué le risque de récidive de la symptomatologie pour les années à venir.

S'agissant des diagnostics ne correspondant pas à une lésion corporelle figurant à l'art. 9 al. 2 OLAA, l'accident du 27 octobre reste la cause probable (>50%) des lésions visualisées surtout à cause de l'apparition de la symptomatologie présentée par le patient suite à l'accident. Les traumatismes anciens décrits peuvent être considérés comme cause possible (<50%) étant donné qu'ils ont dû avoir un impact défavorable sur cette articulation. La morphométrie (dysplasie, tracking fémoropatellaire) a également joué un rôle mais il n'est pas possible de la quantifier (côté opposé altéré mais asymptomatique).

Comme décrit précédemment, les lésions cartilagineuses dans un contexte de maltracking sont présentes dans la localisation qui est retrouvée chez ce patient (tiers central, facette interne). Néanmoins, le lien entre la survenue de lésions de cette localisation et le maltracking n'est pas clairement établi. Les auteurs suspectent des phénomènes de subluxation répétée. Étant donné que le patient n'a jamais ressenti ces phénomènes, je ne peux pas impliquer le maltracking comme étant une cause majeure dans la survenue de cette lésion. En revanche, les accidents répétés peuvent être inclus dans la survenue de cette lésion ostéocartilagineuse en ayant fragilisé la structure ostéo-cartilagineuse (...).

Les facteurs étrangers à l'accident du 27 octobre 2014, et par ordre d'importance, sont certainement les traumatismes anciens exprimés sur ce genou suivi de la morphométrie de l'articulation. À nouveau, la dysplasie, sans phénomène de subluxation ou luxation de la rotule, n'a que peu d'impact sur la dégénérescence cartilagineuse de cette articulation. La majorité des patients développant une arthrose avancée fémoro-patellaire et symptomatique a présenté lors de l'anamnèse un historique d'instabilités, de luxations ou de chirurgies de réaxation de l'appareil extenseur du genou. Ceci n'étant pas retrouvé chez le patient, la morphométrie ne peut pas être considérée comme une cause majeure et prépondérante dans cette situation (...).

L'accident du 27 octobre a déclenché un processus lésionnel propre à cet accident. Le fait qu'il y ait eu une fragilité de cette articulation au préalable a certainement joué un rôle. De dire à partir de quand cette fragilité aurait pu devenir symptomatique n'est pas possible (...).

Je m'écarte des appréciations et conclusions des Drs D______, I______et J______ quant à la causalité et du statu quo ante chez le patient.

Lors des divers courriers que j'ai pu lire, je ne retrouve pas d'éléments de la littérature scientifique décrivant qu'il est nécessaire d'avoir une force correspondant à une chute libre de 4 m de hauteur pour générer une atteinte cartilagineuse.

Comme décrit, le cartilage a un faible taux de cicatrisation mais offre une excellente résistance aux forces de cisaillement ou de compression dans les diverses articulations. Ce qui va générer une lésion ou non est non seulement la force de l'impact mais également la morphométrie individuelle ainsi que la force musculaire du tronc et des membres inférieurs qui pourront absorber plus ou moins d'énergie délivrée lors du traumatisme.

La lésion cartilagineuse ne peut pas être exclusivement liée à une instabilité fémoro-patellaire ainsi que la dysplasie de la trochlée comme exprimé par les Drs I______ et J______ dans leur rapport de janvier 2016. À nouveau, l'absence de phénomène d'instabilité ressenti par le patient ainsi que l'absence de luxation avérée ne parle pas en faveur d'un maltracking majeur. Le fait qu'il y ait eu des accidents au préalable joue un rôle plus important par rapport à cette pathologie (...). Je rejoins l'appréciation des Drs H______ et E______ (...).

Un maltracking fémoro-patellaire peut à moyen et long terme générer une lésion cartilagineuse au niveau de la facette interne ou tiers central de la rotule. Il s'agit dans ce cas d'une pathologie de l'engagement entre 0 et 30°. La rotule n'est pas guidée et elle fait des ressauts pour revenir à sa place.

Il n'est pas vraiment possible de dire qu'une usure peut se produire sans phénomène de luxation ou subluxation.

Chez ce patient, le maltracking est effectivement présent au vu des différentes mesures retrouvées sur l'analyse morphométrique (Tilt patellaire, angle patellofémoral de Lorrain, latéralisation de la rotule). Étant donné que le genou controlatéral présente des lésions cartilagineuses sans notion de traumatisme et en présence du même type de morphométrie que le genou gauche, une partie des lésions du cartilage présentées par le patient sont d'origine dégénérative.

La littérature présentée par les médecins de la SUVA est pratiquement essentiellement germanophone et se concentre sur la classification de l'articulation fémoro-patellaire sans prendre en compte la morphométrie plus spécifique, telle que Tilt patellaire, angle patello-fémoral de Lorrain ou du bisect off-set index. Cette littérature tient surtout compte des patients présentant des luxations latérales et ne s'appuie pas vraiment sur la morphométrie de la dysplasie fémoro-patellaire.

Pour la littérature citée par les médecins des G______, les références sont celles citées de façon générale pour l'analyse des dysplasies fémoro-patellaires et du tracking fémoro-patellaire (...).

La littérature citée par les médecins de la SUVA s'applique plutôt à la catégorie de patients ayant présenté une ou plusieurs luxations latérales de la rotule.

La littérature citée par les médecins du CHUV est tout à fait pertinente car elle décrit la survenue de lésions cartilagineuses fémoro-patellaires sur des cas de dysplasie ou maltracking. Elle est particulièrement intéressante, car elle n'implique pas les éléments de luxation de la rotule. En ce sens, elle correspond davantage à la situation morphométrique chez (l'expertisé).

Toute remarque utile et proposition de l'expert

D'un point de vue général, la situation présentée par (l'expertisé) doit être considérée selon les aspects suivants :

Traumatisme du 27 octobre 2014 générant un choc direct sur la partie médiale de l'articulation fémoro-patellaire.

Présence de deux antécédents traumatiques générant une lésion traumatique du genou à gauche localisée (énergie moyenne à haute).

Dysplasie fémoro-patellaire et maltracking fémoro-patellaire.

Le but dece travail a été d'expliquer la physiologie du cartilage, du tracking fémoro-patellaire et d'intégrer la notion d'accident dans la genèse de l'atteinte ostéochondrale mentionnée.

Le rôle de l'accident est prépondérant dans la genèse de la lésion ostéo-chondrale diagnostiquée suite à l'IRM de novembre 2014. Néanmoins, cet accident seul ne peut pas être incriminé comme générant une atteinte telle que celle visualisée à l'IRM.

La difficulté est de savoir quelle est l'influence la plus défavorable dans cette situation entre les anciens traumatismes, celui du 27 octobre 2014 ou de la dysplasie modérée de cette articulation. Les phénomènes de luxation latérale de la rotule n'ont aucun rôle à jouer dans cette situation.

Le fait que le patient ait subi deux accidents au préalable de ce genou alors qu'il effectuait un travail de force a certainement généré une atteinte ostéochondrale de l'articulation fémoro-patellaire. Le fait qu'il y ait eu une symptomatologie spontanément résolutive par le passé suite à ces deux accidents ne veut pas dire qu'ils n'ont pas laissé des séquelles. Ces séquelles, de façon vraisemblable, ont dû être progressivement péjorées par le maltracking et la dysplasie présentés par le patient comme cela a été démontré. Il n'est pas possible de se prononcer quant à l'étendue de la lésion du cartilage de l'articulation fémoro-patellaire au préalable en l'absence de documentation radiologique avant l'événement du 27 octobre 2014.

Le fait aussi que le patient n'ait pas été symptomatique ne veut pas dire qu'il n'y ait pas eu de lésion visible par exemple à l'IRM.

Une partie de l'oedème sous-chondral notamment cette image décrite en chapelet et assez diffuse dans l'os sous-chondral doit plus être liée aux accidents du passé et entretenu ou péjoré par les phénomènes de dysplasie.

L'absence de fragment cartilagineux libre dans le genou à l'imagerie de novembre 2015 est un facteur allant dans le sens de l'absence d'une lésion cartilagineuse de grande taille fraîche.

En effet, lorsqu'il y a un traumatisme direct qui décolle une partie du cartilage, soit ce dernier reste accolé à l'os sous-chondral, soit il flotte sous forme de structure libre dans l'articulation et se détériore au cours du temps. Le fait que l'IRM réalisée un mois après ne le retrouve pas va dans le sens qu'il n'y a pas eu une grande surface détachée au moment de l'accident.

La lésion cartilagineuse se présente d'aspect focal et les lésions cartilagineuses liées exclusivement à une dysplasie ou à un maltracking sont plutôt diffuses et ne présentent pas un rebord net, même émoussé, comme décrit sur les documentations IRM. Les derniers éléments ici exprimés incluent la dysplasie et le maltracking comme ayant un rôle non négligeable dans la détérioration de l'articulation fémoro-patellaire. Néanmoins, la séquence traumatique adressée à cette articulation doit être considérée comme prépondérante par rapport aux atteintes morphométriques chez ce patient. »

23.    Le 14 janvier 2020, le recourant a observé que l'expertise était convaincante et qu'il fallait en conséquence considérer que l'intervention chirurgicale du 9 novembre 2015 était de manière prépondérante liée à une indication d'origine traumatique. Le statu quo ante devait être considéré comme atteint trois mois après la dernière chirurgie du 15 mai 2019.

24.    Le 10 février 2020, l'intimée a sollicité un complément d'expertise, considérant, sur la base d'un rapport établi le 7 février 2020 par la Dresse J______, que la réponse à la question relative à la correspondance d'un des diagnostics retenus à une lésion assimilée était erronée. L'expert retenait une lésion focale et chondrale pouvant être imputée à un traumatisme. En opérant de la sorte, il ne répondait pas à la question. Au surplus, la lésion à laquelle il faisait référence au vu des diagnostics retenus, soit la lésion cartilagineuse, n'appartenait pas à la liste exhaustive de l'art. 9 al. 2 aOLAA. Cette réponse n'était donc pas satisfaisante. Elle l'était d'autant moins qu'il en découlait toute une série de questions qui n'avaient donc pas de pertinence. Pour le surplus, des doutes subsistaient quant à l'existence d'une atteinte du genou gauche chez l'assuré d'origine le plus probable traumatique.

25.    Dans un complément d'expertise du 20 mai 2020, le Dr M______ a indiqué que les diagnostics énumérés dans son rapport du 4 décembre 2019 qui correspondaient à une lésion assimilée au sens des art. 9 al. 2 aOLAA étaient :

-      État après un accident par compression directe du genou, zone fémoro-patellaire, versant interne (27.10.2014) ;

-      Lésion cartilagineuse focale au tiers central de la rotule s'étendant sur le bord latéral de la facette interne de la rotule ;

-      Oedème osseux sous-chondral d'origine post-traumatique.

Il retenait ces diagnostics comme faisant suite à un traumatisme par compression directe étant donné qu'à l'imagerie IRM du 13 novembre 2014 [(p. 14) « sur la coupe 14/24, visualisation d'une perte de la ligne sous-chondrale qui évoque un petit enfoncement »], il y avait une atteinte de l'os sous-chondral et un oedème osseux d'accompagnement. Le fait d'avoir de façon concomitante un enfoncement de la ligne sous-chondrale, une perte de cartilage et un oedème sous-chondral pouvait parfaitement correspondre à un traumatisme par compression. Il s'agissait dans ce cas d'une lésion assimilable à une fracture.

Les trois diagnostics précités étaient imputables à une origine traumatique. Les diagnostics complémentaires étaient les suivants :

-      dysplasie modérée de l'articulation fémoro-patellaire ;

-      oedème central sous-chondral chronique dont l'origine pouvait ne pas être incriminée au traumatisme ;

-      état après double traumatisme direct sur chute d'une hauteur avec impact genou gauche.

Ces derniers diagnostics étaient en lien avec une guidance patellaire qui n'était pas totalement physiologique, même si elle ne répondait pas aux critères stricts d'instabilité fémoro-patellaire.

L'expert revenait encore une fois sur la thématique de cette expertise qui devait considérer une origine traumatique à la symptomatologie décrite dans un contexte de lésion fémoro-patellaire préexistante dont il n'était pas possible de quantifier la teneur, mais dont il fallait accepter qu'elle était parfaitement compensée puisqu'asymptomatique avant l'accident.

Même si le fait que l'assuré ne présentait aucune symptomatologie avant l'accident ne suffisait pas à conclure à une origine accidentelle, l'accident constituait néanmoins une cause partielle du dommage. Dans le cas de cette cause partielle, il y avait une vraisemblance prépondérante à une origine accidentelle.

L'accident avait décompensé une atteinte préexistante au degré de la vraisemblance prépondérante. Cette décompensation, confirmée par l'imagerie IRM, avait été traitée de façon conservatrice puis chirurgicale. L'évolution clinique avait clairement montré une amélioration jusqu'à une résolution de la symptomatologie survenue lors de la dernière intervention de mars 2019. Dès lors, le statu quo sine vel ante pouvait être considéré comme atteint en septembre 2019.

À ce sujet, il était également important de constater que si cette lésion ne devait être imputée qu'à un processus dégénératif, il ne pourrait y avoir eu une amélioration à ce point significative, sachant qu'aucun des paramètres de mauvaise guidance ou dysplasie n'avait été corrigé durant la prise en charge de l'expertisé.

26.    Le 9 juin 2020, l'intimée a estimé que le nouveau rapport du Dr M______ confirmait les lacunes de son expertise, qui ne pouvait pas se voir reconnaître une pleine valeur probante, sur la base d'un rapport établi le 8 juin 2020 par la Dresse J______.

Cette dernière a estimé que la réponse donnée par l'expert à la question de savoir lesquels des diagnostics énumérés sous ch. 5.4 d son expertise du 4 décembre 2019 correspondaient à une lésion assimilée au sens de l'art. 9 al. 2 OLAA, dénotait d'une méconnaissance de la liste prévue par cette disposition qui était exhaustive. Ni l'atteinte cartilagineuse, ni l'oedème osseux n'appartenait à cette liste. Les trois diagnostics évoqués par le Dr M______ n'étaient pas en soi des diagnostics, mais des descriptions anamnestiques et des constations radiologiques.

S'agissant de la question de savoir si les diagnostics correspondant à une lésion assimilée étaient manifestement imputables à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs, la Dresse J______ peinait à suivre l'expert lorsque, sans le moindre argument médical à l'appui, il arguait que les trois diagnostics cités dans sa première réponse étaient imputables à une origine traumatique et qu'il fallait simplement accepter que la lésion fémoro-patellaire était parfaitement compensée, puisqu'elle était asymptomatique avant l'accident. Ce raisonnement était dicté par le principe « après l'accident, donc à cause de l'accident », qui n'était pas considéré comme un moyen de preuve suffisant pour permettre d'établir un lien de causalité naturelle entre un accident et des plaintes.

S'agissant de la question de savoir si l'assuré présentait d'autres troubles en lien de causalité avec l'accident du 27 octobre 2014, au degré de la vraisemblance prépondérante, l'expert ne répondait pas à la question posée. La Dresse J______ ne pouvait pas à la lumière de la documentation à disposition établir quelle était l'importance de l'atteinte cartilagineuse préexistant à l'accident, faute d'imagerie antérieure à disposition. De plus, l'atteinte cartilagineuse visualisée sur l'imagerie présentait des bords émoussés et usés, « signes en défaveur d'une atteinte aiguë/récente - bords nets et acérés, voire d'une aggravation ». Cela restait une fois de plus du domaine du possible que l'événement avait entraîné même partiellement une décompensation déterminante - aggravation - de l'atteinte préexistante, mais sûrement pas au degré de vraisemblance prépondérante.

S'agissant de la question de savoir si l'accident avait, au degré de la vraisemblance prépondérante, passagèrement décompensé des atteintes préexistantes et, si oui, quand le statu quo sine vel ante avait été atteint, la Dresse J______ s'accordait avec le Dr M______ sur le fait que l'accident avait décompensé une atteinte cartilagineuse préexistante. Le Dr M______ ne qualifiait pas cette décompensation, de passagère, ni de déterminante. Il alléguait que cette décompensation avait été confirmée par l'IRM. La Dresse J______ peinait à le suivre, puisqu'il n'y avait pas d'imagerie antérieure comme comparatif, et surtout, sur l'IRM du genou gauche réalisée le 20 novembre 2014, le seul signe pouvant évoquer une atteinte accidentelle était un oedème du coin supéro-interne du plateau tibial interne, pouvant constituer une zone de contusion osseuse post-traumatique. La localisation de cette contusion osseuse n'était de loin pas en contact avec les atteintes cartilagineuses décrites - rotule et plateau tibial postérieur. Pour rappel, l'atteinte cartilagineuse sur l'IRM ne se présentait pas à l'emporte-pièce comme on devrait s'y attendre lors d'une atteinte récente/aiguë, les bords étant émoussés et usés. Cette IRM avait été réalisée à moins d'un mois de l'événement. Quant aux dires du Dr M______, selon lesquels qu'il ne pourrait y avoir eu une amélioration à ce point significative, la Dresse J______ ne pouvait tout d'abord que s'étonner du fait que l'amélioration retenue était « à ce point significative », car dans son rapport du 4 décembre 2019, en page 5, sous la rubrique anamnèse actuelle, celui-ci mentionnait « En règle générale, elle est située entre 3-4/10. Il parvient à faire des déplacements en continuité de 5-10 minutes avant de ressentir une augmentation de la symptomatologie. Il ne décrit pas d'instabilité fonctionnelle, lâchage ou blocage de ce genou. La marche en montée et en descente d'escalier se révèle symptomatique. Il ressent, lors d'une position assise prolongée, une symptomatologie en région péri-patellaire et doit alors procéder à la mobilisation de cette articulation. [...]. Occasionnellement, cette douleur le réveille la nuit ». Après la dernière intervention du 15 mai 2019 : « Il a décrit une amélioration de la situation avec disparition pratiquement complète des douleurs et n'envisage pas de suite particulière pour l'instant, car il est satisfait du résultat. Il peut se déplacer sans boiterie et ne présente pas de lâchage ou instabilité fonctionnelle. La montée et descente d'escaliers occasionnent parfois une gêne mais nettement moindre qu'avant la dernière chirurgie ». La Dresse J______ constatait que l'assuré souffrait principalement de douleurs ayant (recte : avant) l'opération, pas d'instabilité fonctionnelle, lâchage ou blocage de ce genou.

Après l'intervention, le Dr M______ parlait de disparition pratiquement complète des douleurs, qui étaient évaluées avant l'intervention sur l'échelle EVA en général à 3-4/10. Ces douleurs étaient donc plutôt mineures. Il était bien dommage qu'après l'intervention, les douleurs n'aient pas également été chiffrées sur l'échelle EVA. Toujours après l'opération, le Dr M______ relevait que « La montée et descente d'escalier occasionnent parfois une gêne mais nettement moindre que avant la dernière chirurgie », donc l'assuré n'était pas asymptomatique. De plus, en se référant une fois de plus à son expertise du 4 décembre 2019, force était de constater que les constations cliniques du genou gauche étaient identiques à l'exception du fait que l'« articulation fémoro-patellaire présente un crépitus et une symptomatologie douloureuse plutôt dans sa portion médiale » et « l'articulation fémoro-patellaire est peu symptomatique, présente un léger crépitus non douloureux », respectivement les 20 mai et 9 septembre 2019. Le terme « significative » utilisé par le Dr M______ n'informait pas de façon précise et prêtait à l'interprétation, surtout en relation avec le contenu de son expertise du 4 décembre 2019.

En conclusion, les conclusions de l'expert n'étaient pas convaincantes quant à une atteinte du genou gauche traumatique chez l'assuré. Au vu des erreurs et incohérences relevées, ses conclusions ne pouvaient être validées au plan médico-assécurologique.

27.    Le 17 juin 2020, le recourant a estimé que les explications de l'expert étaient claires et qu'elles répondaient aux questions de l'intimée. Sur la base de l'expertise, le statu quo sine avait été atteint en septembre 2019. L'intimée devait prendre en charge les frais médicaux et les indemnités journalières jusqu'à cette date. La cause devait être renvoyée à l'intimée pour qu'elle statue sur son droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité. Les dépens devaient être mis à la charge de l'intimée.

28.    Le 13 août 2020, le recourant a encore fait valoir que les critiques de l'intimée étaient insuffisantes pour remettre en cause la valeur probante de l'expertise du Dr M______. Si la chambre des assurances sociales en doutait, il demandait une audience de confrontation avec les Drs J______, M______ et E______.

29.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

2.        Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA; art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - RS/GE E 5 10).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé du refus de prise en charge par l'intimée des suites de l'événement du 27 octobre 2014 au-delà du 8 novembre 2015.

4.        Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu avant cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis à l'ancien droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016.

5.        Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel ou non professionnel. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA).

Une glissade et une chute répondent à la notion d'un accident (arrêt du Tribunal fédéral 8C_827/2017 du 18 mai 2018 consid. 3.1).

6.        Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc »; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

7.        Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

8.        Une fois que le lien de causalité naturelle a été établi au degré de la vraisemblance prépondérante, l'obligation de prester de l'assureur cesse lorsque l'accident ne constitue pas (plus) la cause naturelle et adéquate du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui serait survenu tôt ou tard même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine) (RAMA 1994 n° U 206 p. 328 consid. 3b; RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b). En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) selon le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 126 V 360 consid. 5b; ATF 125 V 195 consid. 2; RAMA 2000 n° U 363 p. 46).

9.        En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Si un accident n'a fait que déclencher un processus qui serait de toute façon survenu sans cet événement, le lien de causalité naturelle entre les symptômes présentés par l'assuré et l'accident doit être nié lorsque l'état maladif antérieur est revenu au stade où il se trouvait avant l'accident (statu quo ante) ou s'il est parvenu au stade d'évolution qu'il aurait atteint sans l'accident (statu quo sine) (RAMA 1992 n° U 142 p. 75 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.2). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il a été causé ou aggravé par l'accident (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1003/2010 du 22 novembre 2011 consid. 1.2 et 8C_552/2007 du 19 février 2008 consid. 2).

10.    L'art. 6 al. 2 LAA a conféré au Conseil fédéral la compétence d'étendre la prise en charge par l'assurance-accidents à des lésions assimilables à un accident. Aux termes de l'art. 9 al. 2 aOLAA, adopté sur la base de cette disposition, pour autant qu'elles ne soient pas manifestement imputables à une maladie ou à des phénomènes dégénératifs, les lésions corporelles suivantes, dont la liste est exhaustive, sont assimilées à un accident, même si elles ne sont pas causées par un facteur extérieur de caractère extraordinaire : des fractures (let. a), des déboîtements d'articulation (let. b), des déchirures du ménisque (let. c), des déchirures de muscles (let. d), des élongations de muscles (let. e), des déchirures de tendons (let. f), des lésions de ligaments (let. g) et des lésions du tympan (let. h).

Si l'atteinte est imputable à un événement accidentel, au sens de l'art. 4 LPGA, l'assureur-accidents est tenu de verser des prestations jusqu'à ce que l'accident ne représente plus la cause naturelle et suffisante, c'est-à-dire que l'atteinte à la santé est fondée uniquement et exclusivement sur des causes autres qu'accidentelles. Si tous les critères de la définition de l'accident au sens de l'art. 4 LPGA ne sont pas remplis, l'assureur-accidents peut être responsable pour une lésion assimilée au sens de l'art. 9 al. 2 aOLAA.

11.    a. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

b. Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

c. Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

d. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

12.    Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

13.    Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations, la règle selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (RAMA 2000 n° U 363 p. 46), entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la réalité (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références). La preuve de la disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite santé. Est seul décisif le point de savoir si les causes accidentelles d'une atteinte à la santé ne jouent plus de rôle et doivent ainsi être considérées comme ayant disparu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.3).

14.    Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en oeuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en oeuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4).

15.    En l'espèce, l'événement dont le recourant a été victime le 27 octobre 2014 doit être qualifié d'accident, au sens de l'art. 6 al. 1 LAA. Il s'est en effet blessé au genou en chutant dans sa baignoire. Partant, la condition du facteur extérieur extraordinaire est donnée, tout comme les autres conditions fixées par l'art. 4 LPGA. Il n'y a donc pas lieu d'examiner si l'intimée doit prendre en charge les suites de l'événement en cause sous l'angle de l'art. 9 al. 2 aOLAA, puisque cette disposition ne s'applique qu'à défaut de facteur extérieur de caractère extraordinaire.

16.    Pour déterminer si les lésions au genou du recourant ayant nécessité les opérations des 9 novembre 2015 et 15 mai 2019 étaient encore en relation de causalité avec l'accident du 27 octobre 2014, il convient d'examiner, en premier lieu, la valeur probante de l'expertise du Dr M______.

Le rapport de celui-ci est complet et détaillé. Il remplit a priori les exigences fixées par la jurisprudence en matière de valeur probante des rapports médicaux.

L'intimée est toutefois d'un avis contraire.

Ses critiques sur les diagnostics posés par l'expert en lien avec l'art. 9 al. 2 aOLAA ne sont pas de nature à remettre sérieusement en cause la valeur probante de son expertise, dès lors que cette disposition ne s'applique pas au cas d'espèce.

Contrairement à ce qu'a fait valoir l'intimée, le raisonnement de l'expert n'est pas seulement dicté par le principe « après l'accident, donc à cause de l'accident », car celui-ci a analysé la situation dans son ensemble et de façon détaillée, en s'appuyant notamment sur l'IRM et l'évolution clinique.

L'appréciation de la Dresse J______ ne répond pas aux réquisits pour se voir reconnaître une pleine valeur probante, dès lors que son rapport ne contient pas d'anamnèse et qu'il n'est pas fondé sur un examen du recourant. Elle se borne à exposer une opinion divergente, sans faire état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et suffisamment pertinents pour en remettre en cause les conclusions.

En conclusion, l'expertise du Dr M______ doit se voir reconnaître une pleine valeur probante.

17.    Sur cette base, l'intimée doit prendre en charge les suites de l'événement du 27 octobre 2014 jusqu'au 31 août 2019, dès lors qu'elles étaient encore en lien de causalité avec celui-ci jusqu'à cette date.

18.    Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision querellée sera réformée en ce sens.

19.    a. Selon la jurisprudence, les frais d'expertise font partie des frais de procédure (cf. SVR 2013 IV n° 1 p. 1 [9C_13/2012] consid. 3; consid. 3 non publié aux ATF 139 V 225 de l'arrêt 8C_984/2012 du 6 juin 2013). Aux termes de l'art. 45 al. 1 LPGA, les frais de l'instruction sont pris en charge par l'assureur qui a ordonné les mesures; à défaut, l'assureur rembourse les frais occasionnés par les mesures indispensables à l'appréciation du cas ou comprises dans les prestations accordées ultérieurement.

Les coûts de l'expertise peuvent être mis à la charge de l'assureur social (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2), si l'autorité administrative a procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire a servi à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres termes, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en oeuvre une expertise judiciaire. En revanche, lorsque l'autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d'une expertise qui répondait aux exigences jurisprudentielles, la mise à sa charge des frais d'une expertise judiciaire ordonnée par l'autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d'une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 consid. 4.4 p. 502 et les références).

b. En l'espèce, il se justifie de mettre les frais d'expertise du Dr L______ à la charge de l'intimée, dès lors que cette expertise a dû être ordonnée du fait que l'intimée avait statué sur la base d'un dossier insuffisamment instruit.

20.    Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

21.    Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.      L'admet.

3.      Réforme la décision sur opposition rendue par l'intimée le 24 mars 2016, en ce sens qu'elle doit prendre en charge les suites de l'événement du 27 octobre 2014 jusqu'au 31 août 2019.

4.      Met les frais de l'expertise du Dr L______, de CHF 2'750.15, à la charge de l'intimée.

5.      Alloue au recourant, à la charge de l'intimée, une indemnité pour ses dépens de CHF 2'500.-.

6.      Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral de la santé publique par le greffe le