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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3607/2018

ATAS/460/2019 du 22.05.2019 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3607/2018 ATAS/460/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 mai 2019

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à CAROUGE

 

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, sise rue des Gares 12, GENÈVE

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        La société B______ SA (ci-après la société) a été inscrite au registre du commerce le 19 décembre 1986 et affiliée en qualité d'employeur auprès de la caisse cantonale genevoise de compensation (ci-après la caisse ou l'intimée) le 1er janvier 1987. Elle était active dans le domaine de l'exploitation d'un atelier d'arts graphiques et de communication visuelle. Monsieur A______ (ci-après l'administrateur ou le recourant) a exercé la fonction d'administrateur de la société du 9 juillet 2013 au 30 mai 2016, date à laquelle la faillite de la société a été prononcée. Monsieur C______ (ci-après l'administrateur président) en était l'administrateur président.

2.        Le 13 juillet 2016, la société a transmis à la caisse l'attestation des salaires 2016 dont il ressort qu'elle a versé des salaires à quatorze personnes pendant la période courant du 1er janvier au 31 mai 2016.

3.        Le 13 juillet 2016, la caisse a adressé à la société une facture finale pour les cotisations salariales du 1er janvier au 31 mai 2016 à hauteur de CHF 14'246.10, soit CHF 45'666.40 plus les frais de sommation et moins les virements à hauteur de CHF 13'846.20, la redistribution Taxe CO2 de CHF 544.10, le paiement de CHF 17'478.-.

4.        Le 10 juillet 2017, la caisse a transmis à la société, suite au contrôle auquel son réviseur avait procédé, un décompte relatif aux cotisations AVS/AI/APG/AC/Amat/AF, pour la période du 1er janvier au 31 mai 2016, intitulé « Attestation des salaires complémentaire 2016 » dont il ressort que les salaires à prendre en compte s'élevaient au total à CHF 296'197.55 pour l'AVS/AI/APG/Amat/AF et à CHF  240'197.75 pour l'AC.

5.        Le 10 juillet 2017, la caisse a établi le montant des cotisations salariales (facture rectificative), pour la période du 1er janvier au 31 mai 2016 à hauteur de CHF 51'980.-.

6.        Selon des actes de défaut de biens après faillite, du 10 février 2017, reçus par la caisse le 13 suivant, la société devait à la caisse, à la date de l'ouverture de la faillite, le 30 mai 2016 :

-          CHF 13'552.55, moins la somme payée de CHF 3'080.54, soit au total CHF 10'472.01, représentant les cotisations sur les salaires versés au 31 mai 2016 plus les frais administratifs ;

-          et CHF 695.55 au titre de taxes, de sommation, plus amendes, plus TPF et intérêts moratoires de 5% jusqu'au jour de la faillite.

7.        Le 1er février 2018, la caisse a adressé à l'administrateur une demande de réparation du dommage, en application de l'art. 52 LAVS, à hauteur de CHF 15'690.05, représentant les cotisations paritaires selon le décompte annexé, y compris les frais et les intérêts moratoires. Il s'agissait des sommes dues et exigibles, lorsqu'il avait pris ses fonctions, et échues au cours de son mandat, dont il était solidairement responsable avec l'administrateur président. La consultation de l'état de collocation publié le 20 décembre 2016 avait révélé que le dividende prévisible serait de 22,7303% de sorte que la créance de la caisse produite dans la faillite ne serait pas couverte. De ce fait, elle subissait un dommage.

À teneur du décompte annexé, le montant réclamé avait été établi en prenant en compte les cotisations salariales sur les salaires versés par la société en 2016, plus les frais administratifs et de sommation ainsi les intérêts moratoires et après déduction des versements effectués et de la redistribution Taxe CO2.

8.        Le 26 février 2018, l'administrateur a formé opposition à la décision de la caisse. Il était devenu administrateur de la société le 9 juillet 2013, à la suite de la démission abrupte de l'ex-épouse de l'administrateur président. La direction administrative et financière de la société avait été reprise par une directrice. Cette dernière avait été brutalement licenciée le 11 mars 2016 par le fils de l'administrateur président, devenu directeur de la société, aux côtés de son père, jusqu'à la mise en faillite volontaire de la société. Pendant la période durant laquelle l'opposant avait été administrateur de celle-ci, il n'avait cessé d'aider financièrement la société par des apports en compte courant actionnaire, afin que celle-ci puisse régler ses dettes, notamment sociales. Il n'avait en revanche joué aucun rôle dans la gestion et l'administration de la société. Ses interventions s'étaient limitées à des apports d'argent à bien plaire, et à la tenue des assemblées générales aux côtés de l'administrateur président. Il n'avait fait preuve ni d'intention ni de négligence grave dans le préjudice subi par la caisse, le sien s'élevant à quelques CHF 550'000.-. L'administrateur président était parfaitement capable financièrement d'assumer la responsabilité qui lui incombait, c'est-à-dire de payer la totalité de la créance de la caisse. C'était lui qui avait fait le choix de ne pas payer les charges sociales. Pour sa part il n'y était pour rien. L'administrateur président disposait de biens immobiliers importants et notamment d'une maison de luxe en France estimée à plus de EUR 2'000'000.-. L'opposant considérait qu'il n'était pas juste que la caisse s'en prenne à lui alors qu'il était sans revenu, ruiné par les déboires qu'il avait eus et qu'il tentait de subvenir aux besoins de sa famille comme il le pouvait.

En annexe de son opposition, l'administrateur a transmis un procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires tenue au siège de la société le 15 février 2016. Il en ressort que l'administrateur, actionnaire majoritaire, avait ouvert la séance qu'il avait présidée à la demande de l'administrateur président, président du conseil d'administration. Il avait constaté que la majorité des actions était représentée. Le président avait remis aux actionnaires les comptes annuels provisoires de l'exercice 2015, tels qu'ils avaient été établis par l'organe de révision le 26 janvier 2016. Il fallait constater que le chiffre d'affaires n'était pas suffisant pour couvrir les charges fixes de la société. Le conseil d'administration avait d'ores et déjà procédé à des mesures de restructuration drastiques. Cinq collaborateurs avaient été licenciés le 1er février 2015. L'allocation peinture de CHF 2'000.- par mois versée à l'administrateur président avait été supprimée dès le mois de novembre 2015. L'administrateur président accumulait déjà quatre salaires non payés. L'administrateur président et Monsieur D______, son fils, étaient disposés à voir leur salaire diminuer. Grâce à un engagement souscrit par E______, le 29 janvier 2016, d'injecter CHF 120'000.- dans la société, la société n'était plus en cessation de paiements. Selon les prévisions du conseil d'administration, la société devrait devenir autosuffisante en cash flows dès le mois d'avril 2016, pour autant que les affaires confiées par E______ soient comparables à celles de l'exercice 2015. Le conseil d'administration avait dès lors renoncé à avertir le juge. Le fils de l'administrateur président avait indiqué que les cinq derniers collaborateurs de la société s'étaient déclarés potentiellement démissionnaires, mais qu'ils souhaitaient être licenciés. Le conseil d'administration était d'avis de ne pas donner suite à leur suggestion. L'administrateur président et son fils leur cherchait des remplaçants. Les actionnaires étaient informés des augmentations de salaire projetées. Des économies de charges supplémentaires ne pourraient être réalisées qu'en trouvant des locaux moins chers ou en partageant l'espace de travail actuel. L'administrateur président et son fils souhaitaient poursuivre les activités de développement de la société avec une petite équipe performante et motivée. Le conseil d'administration considérait qu'il avait d'ores et déjà pris toute les mesures qui s'imposaient. Il croyait dans l'avenir de la société dans une configuration nouvelle. Il devait désormais s'investir dans la recherche de nouveaux talents, l'obtention de nouveaux mandats et la diversification du chiffre d'affaires. L'assemblée extraordinaire avait approuvé à l'unanimité la nomination du fils de l'administrateur président en tant que directeur général de la société avec signature individuelle.

9.        Par décision sur opposition du 11 septembre 2018, la caisse a constaté que l'administrateur ne remettait pas en cause sa qualité d'organe de la société, qui était au demeurant incontestable, vu sa fonction d'administrateur. Il avait été administrateur de la société du 9 juillet 2013 au 30 mai 2016. Cette période couvrait donc les dettes pour les périodes de cotisation 2016, qui représentait le dommage subi par la caisse. En sa qualité d'organe de la société, il lui incombait de veiller personnellement au paiement ponctuel des cotisations et contributions paritaires ainsi que de prendre toutes mesures utiles afin que tel soit effectivement le cas. Il ne faisait pas de doute que l'intéressé avait commis une faute grave en négligeant de s'occuper du paiement des cotisations sociales et, par conséquent, des dettes envers la caisse et qu'il avait engagé sa responsabilité envers celle-ci pour l'intégralité du dommage causé. En conséquence, la caisse confirmait sa décision du 1er février 2018.

10.    Le 15 octobre 2018, l'administrateur a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Il peinait à comprendre pourquoi il serait concerné par l'ensemble de salaires de l'année 2016, dès lors qu'il avait cessé d'être administrateur de la société le 30 mai 2016. Le décompte succinct fourni par la caisse dans son courrier du 1er février 2018 ne permettait pas d'y voir plus clair. Il n'avait jamais participé à la gestion de la société se contentant d'en être un administrateur passif, mais un bailleur de fonds et un actionnaire importants. Seuls l'administrateur président et son fils exerçaient la haute direction sur la société. Pour sa part, il ne disposait même pas d'un accès aux comptes bancaires de celle-ci. Il avait été victime d'une violation de son droit d'être entendu, car depuis l'ordonnance de mise en faillite de la société par le Tribunal de première instance le 30 mai 2016, il n'avait reçu ni convocation, ni état de collocation, ni même le jugement du 13 mars 2017 déclarant la faillite clôturée. En tant qu'administrateur de la société et créancier important, son droit d'être entendu avait ainsi été grossièrement violé.

Force était de constater qu'entre début mai 2016, date à partir de laquelle la société ne s'était plus acquittée régulièrement des cotisations sociales, selon la caisse, et le 30 mai 2016, date de la fin de son mandat, le recourant ne voyait pas ce qu'il aurait pu ou dû faire et en quoi il aurait pu faire preuve d'une quelconque intention ou d'une grave négligence. La caisse avait fait preuve d'un total manque d'équité dans sa décision sur opposition. L'administrateur président était capable d'assumer financièrement la responsabilité qui lui incombait. Le recourant avait demandé à plusieurs reprises à ce dernier de contracter une hypothèque sur son bien immobilier afin que la société puisse faire face à ses obligations, mais celui-ci ne l'avait pas fait, tout comme il n'avait jamais contribué au financement alors qu'il avait perçu pendant près de quinze ans un salaire de CHF 30'000.- par mois. Le recourant concluait à l'annulation de la décision de la caisse et, subsidiairement, à des enquêtes.

11.    Par réponse du 13 novembre 2018, la caisse a conclu au rejet du recours. Le recourant ne s'était jamais occupé de la gestion de la société et n'avait jamais interpelé cette dernière pour qu'elle prenne les mesures concrètes pour remplir ses obligations à l'égard de la caisse. Il n'avait jamais pris l'initiative d'exiger de la société des informations sur sa situation financière, ni n'avait contacté directement la caisse pour connaître l'état des dettes de la société à son égard. Le recourant n'apportait aucun élément concret démontrant des dispositions prises par lui pour remplir ses obligations d'administrateur. Il était clair qu'il avait violé son obligation de diligence et qu'il était responsable du dommage causé à la caisse. Le dommage réclamé au recourant correspondait aux cotisations pour la période allant du 1er janvier au 31 mai 2016, comme cela ressortait clairement des documents relatifs aux cotisations paritaires établies pour la période précitée. Les cotisations paritaires pour l'année 2016 avaient été établies sur la base de la masse salariale communiquée le 5 juillet 2016 et adaptée à la hausse suite à un contrôle de la caisse effectué le 10 juillet 2017. Le comportement fautif du recourant à l'égard de la caisse était constitutif de négligence grave au sens de l'art. 52 LAVS.

12.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

b. Selon l'art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l'art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l'employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l'employeur en réparation du dommage, et ce quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

c. En l'espèce, la société était domiciliée dans le canton de Genève de sorte que la chambre de céans est compétente ratione materiae et loci pour juger du cas d'espèce.

2.        Interjeté dans le délai et la forme requise, le recours est recevable (art. 60 LPGA et 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985; LPA - E 5 10).

3.        Le litige porte sur la responsabilité du recourant dans le préjudice causé à l'intimée, par le défaut de paiement des cotisations sociales pour la période courant du 1er janvier au 30 mai 2016.

4.        Le recourant se plaint dans un premier grief formel d'une violation de son droit d'être entendu, car depuis l'ordonnance de mise en faillite de la société par le Tribunal de première instance le 30 mai 2016, il n'avait reçu ni convocation, ni état de collocation, ni même le jugement du 13 mars 2017 déclarant la faillite clôturée.

Force est de constater que ce grief concerne la procédure de faillite et pas celle par laquelle la caisse a demandé la réparation de son dommage au recourant, de sorte qu'il n'entre pas dans l'objet du litige.

5.        a. L'art. 14 al. 1 LAVS, en corrélation avec les art. 34 et ss RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 118 V 193 consid. 2a).

b. À teneur de l'art. 52 LAVS, l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). Le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L'employeur peut renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est applicable (al. 3). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).

6.        À titre liminaire, il convient d'examiner si la prétention de la caisse est prescrite.

a. Les délais prévus par l'art. 52 al. 3 LAVS doivent être qualifiés de délais de prescription, non de péremption, comme cela ressort du texte légal et des travaux préparatoires de la LPGA (SVR 2005 AHV n° 15 p. 49 consid. 5.1.2; FF 1994 V 964; FF 1999 p. 4422). Alors que le délai de prescription de deux ans commence à courir dès la connaissance du dommage, celui de cinq ans débute, en revanche, dès la survenance du dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.2).

Cela signifie qu'ils ne sont plus sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition ou la procédure de recours qui s'ensuit (ATF 135 V 74 consid. 4.2).

b. Le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte. Appartiennent à ce montant les cotisations paritaires (cotisations patronales et d'employés ou ouvriers) dues par l'employeur, les contributions aux frais d'administration, les intérêts moratoires, les taxes de sommation et les frais de poursuite (Directives sur la perception des cotisations - DP, n8016 et 8017). Les éventuelles amendes prononcées par la caisse de compensation ne font pas partie du dommage et doivent le cas échéant être déduites (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 142/03 du 19 août 2003 consid. 5.5).

Le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 193 consid. 2.2).

Il faut entendre par moment de la « connaissance du dommage », en règle générale, celui où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.1). En cas de faillite, le moment de la connaissance du dommage correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.1 et 2.3).

c. Le juge ne peut interrompre la prescription que par une ordonnance ou une décision, « chaque acte judiciaire des parties » suffit à produire cet effet (art. 138 al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations; RS 220). Cette notion d'acte judiciaire des parties doit être interprétée largement tout en ayant égard à la ratio legis de la disposition citée, qui est de sanctionner l'inaction du créancier. Il faut donc considérer comme acte judiciaire d'une partie tout acte de procédure relatif au droit invoqué en justice et susceptible de faire progresser l'instance (ATF 130 III 202 consid. 3.2). Par ailleurs, tant la décision que l'opposition interrompent le délai de prescription de deux ans et font courir un nouveau délai de même durée (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2).

d. En l'espèce, la caisse a eu connaissance du dommage par la consultation de l'état de collocation publié le 20 décembre 2016 qui a révélé que le dividende prévisible serait de 22,7303%, de sorte que sa créance ne serait pas couverte. En demandant au recourant le 1er février 2018 la réparation de son dommage, elle a agi en temps utile, soit pendant les délais de deux et cinq ans prescrits par l'art. 52 al. 3 LAVS.

Par la suite, ledit délai a été interrompu et un nouveau délai de même durée a commencé à courir le 26 février 2018 (opposition de l'administrateur), le 11 septembre 2018 (décision sur opposition), le 15 octobre 2018 (recours de l'administrateur) et depuis lors, par chaque acte judiciaire des parties, de sorte qu'à ce jour, la prescription n'est pas acquise.

7.        a. Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d'une personne morale signifie que la caisse de compensation doit d'abord agir contre le débiteur des cotisations (employeur). Ce n'est que lorsque celui-ci n'est plus à même de remplir ses obligations que la caisse est fondée à agir contre les organes responsables, autrement dit en cas d'insolvabilité de l'employeur (ATF 123 V 12 consid. 5b).

La notion d'organe selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l'art. 754 al. 1 CO.

En matière de responsabilité des organes d'une société anonyme, l'art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l'organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a).

b. En l'espèce, le recourant était inscrit au registre du commerce en qualité d'administrateur du 9 juillet 2013 au 30 mai 2016. Il était ainsi un organe formel de la société et il doit répondre du dommage subi par la caisse - pour autant que les autres conditions soient remplies - indépendamment de sa fonction effective, de son influence sur la volonté de la société, de son pouvoir de signature et de la raison pour laquelle il a accepté le mandat.

8.        a. L'obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l'employeur, des prescriptions régissant l'assurance-vieillesse et survivants. Il faut donc un manquement d'une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).

Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d'une négligence grave l'employeur qui manque de l'attention qu'un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s'apprécie d'après le devoir de diligence que l'on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d'un employeur de la même catégorie que celle de l'intéressé. En présence d'une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'attention qu'elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s'impose également lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l'employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d'examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l'entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l'entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l'art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).

Celui qui appartient au conseil d'administration d'une société et qui ne veille pas au versement des cotisations courantes et à l'acquittement des cotisations arriérées est réputé manquer à ses devoirs (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/03 du 30 novembre 2004 consid. 7.3.1, in SJ 2005 I 272 consid. 7.3.1). Commettent ainsi une négligence grave au sens de l'art. 52 LAVS les administrateurs d'une société qui se trouve dans une situation financière désastreuse, qui parent au plus pressé, en réglant les dettes les plus urgentes à l'exception des dettes de cotisations sociales, dont l'existence et l'importance leur sont connues, sans qu'ils ne puissent guère espérer, au regard de la gravité de la situation, que la société puisse s'acquitter des cotisations en souffrance dans un délai raisonnable (ATF 108 V 183 consid. 2; SVR 1996 AHV n°98 p. 299 consid. 3).

La négligence grave est également donnée lorsque l'administrateur n'assume pas son mandat dans les faits. Ce faisant, il n'exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur tout en sachant qu'elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195 consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l'angle de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 1 consid. 5b). Un administrateur, dont la situation est à cet égard proche de celle de l'homme de paille, ne peut s'exonérer de ses responsabilités légales en invoquant son rôle passif au sein de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2; arrêts du Tribunal fédéral des assurances H 87/04 du 22 juin 2005 consid. 5.2.2 et H 234/00 du 27 avril 2001 consid. 5d).

Commet également une faute grave celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu'il se trouvait, en raison de l'attitude du tiers, dans l'incapacité de prendre les mesures qui s'imposaient s'agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l'incapacité d'exercer son devoir de surveillance (voir par exemple : arrêt du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012).

La responsabilité d'un administrateur dure en règle générale jusqu'au moment où il quitte effectivement le conseil d'administration et non pas jusqu'à la date où son nom est radié du registre du commerce. Cette règle vaut pour tous les cas où les démissionnaires n'exercent plus d'influence sur la marche des affaires et ne reçoivent plus de rémunération pour leur mandat d'administrateur (ATF 126 V 61 consid. 4a).

b. En l'espèce, le recourant a accepté le mandat d'administrateur, mais ne s'est pas intéressé concrètement à l'administration de la société et, en particulier, au paiement des cotisations sociales de janvier à mai 2016, soit pendant son mandat. Il s'est reposé entièrement sur l'administrateur président et la direction de la société. Or, il avait le devoir de s'assurer que celle-ci payait les dettes relatives aux cotisations sociales, ce d'autant plus qu'il avait appris, à tout le moins en février 2016 - lors de l'assemblée générale extraordinaire de la société qu'il a présidée -, que la société avait des difficultés à payer ses charges. Cela suffit à retenir que le recourant a commis une négligence grave, selon la jurisprudence précitée, quand bien même il a injecté de l'argent dans la société et quels que soient les éventuels torts de l'administrateur président ou de la direction de la société.

9.        a. La responsabilité de l'employeur, au sens de l'art. 52 LAVS, suppose enfin un rapport de causalité naturelle et adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).

b. En l'espèce, l'attitude passive du recourant est en relation de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par la caisse. En effet, en acceptant le mandat d'administrateur sans l'exercer correctement, il a contribué à l'augmentation du dommage de la caisse.

10.    Le recourant n'a pas contesté les chiffres articulés dans la décision sur opposition et ceux-ci apparaissent fondés à teneur des pièces du dossier.

11.    Au vu des considérations qui précèdent, c'est à juste titre que l'intimée a réclamé au recourant la réparation du dommage à hauteur de CHF 15'690.05 et sa décision sur opposition était ainsi bien-fondée.

12.    En conséquence, le recours doit être rejeté.

13.    La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l'art. 85 LTF, s'agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à 30'000 francs (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n'atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le