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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/471/2012

ATAS/1423/2012 (3) du 22.11.2012 ( LCA ) , ADMIS

Descripteurs : LOI FÉDÉRALE SUR LE CONTRAT D'ASSURANCE ; ASSURANCE COMPLÉMENTAIRE EN CAS D'HOSPITALISATION ; MATERNITÉ ; GROSSESSE ; ACCOUCHEMENT ; PRINCIPE DE LA CONFIANCE(INTERPRÉTATION DU CONTRAT) ; INTÉRÊT(FRUIT CIVIL) ; EXIGIBILITÉ ; DEMEURE ;
Normes : LCA 33; LCA 41 al. 1
Résumé : Lorsqu'une assurance complémentaire a pour but de couvrir les frais supplémentaires de traitement et de pension en cas de séjour hospitalier en division semi-privée liés à la maladie et que les conditions générales d'assurance excluent la couverture du risque « grossesse ou accouchement », les parties peuvent en principe considérer que les notions communes en matière d'assurance complémentaire et d'assurance de base ont la même signification. La jurisprudence assimile le traitement de troubles de la santé survenant au cours de la grossesse à une maladie alors que l'art. 29 LAMal n'alloue des prestations spécifiques de maternité que lorsque la grossesse se déroule sans complications. Par conséquent, l'assurée pouvait comprendre de bonne foi que cette clause d'exclusion vise exclusivement les cas de grossesse et d'accouchement se déroulant normalement et non pas celui d'une grossesse non-évolutive nécessitant un curetage évacuateur.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/471/2012 ATAS/1423/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 novembre 2012

 

 

En la cause

Madame H__________, domiciliée à Thônex, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Guillaume MARTIN-CHICO

 

 

demanderesse

 

contre

INTRAS ASSURANCE SA, sise rue Blavignac 10, 1227 Carouge

 

défenderesse

EN FAIT

1.        Madame H__________ (ci-après: l'assurée ou la demanderesse), née en 1984, est affiliée pour l'assurance obligatoire des soins auprès d'INTRAS ASSURANCE-MALADIE SA (ci-après: la caisse ou la défenderesse). Elle a également souscrit auprès de la même compagnie d'assurance l'assurance complémentaire "OPTIMA+" semi-privé.

2.        Consultée par l'assurée le 22 juin 2010, la Dresse L__________, gynécologue FMH, a diagnostiqué l'existence d'une grossesse non-évolutive nécessitant une intervention médicale consistant en un curetage évacuateur.

3.        Étant donné qu'une telle intervention médicale pouvait être pratiquée le 5 juillet 2010 à la Clinique Générale Beaulieu, la Dresse L__________ s'est adressée au médecin-conseil de la caisse pour connaître sa position à ce sujet.

4.        Par courrier du 2 juillet 2010, la caisse a signifié à la Dresse L__________ qu'elle donnait son accord pour la prise en charge de cette hospitalisation selon le forfait journalier de la division commune, soit 692 fr. 40, pour une durée de deux jours, par l'assurance obligatoire des soins. Il était ajouté que les dépenses personnelles ainsi que les frais non obligatoirement à charge des assureurs-maladie étaient exclus.

5.        Par courrier du 2 juillet 2010 à l'assurée, la caisse a repris les termes de son courrier du même jour à la Dresse L__________ en ajoutant que "selon l'art. 6 des conditions spéciales de votre assurance complémentaire OPTIMA +, INTRAS n'alloue aucune prestation si le séjour hospitalier est en rapport avec une grossesse ou un accouchement. De ce fait, nous ne pourrons pas participer à la prise en charge de ce séjour, par le biais de cette assurance".

6.        Le 5 juillet 2010, l'assurée a été admise à la Clinique Générale Beaulieu pour y subir l'intervention médicale préconisée par la Dresse L__________. Elle a séjourné jusqu'au 6 juillet 2010 dans la division semi-privée de cette clinique.

7.        Le 5 juillet 2010, Mme H__________, mère de l'assurée, a téléphoné à la caisse pour faire savoir qu'elle désapprouvait le refus de cette dernière de prendre en charge l'intervention du 5 juillet 2010 à la Clinique Générale Beaulieu par le biais de l'assurance complémentaire OPTIMA+. Lors de cet entretien téléphonique, l'assurance complémentaire a confirmé son refus de prendre en charge ce séjour en clinique au moyen de l'assurance complémentaire OPTIMA+.

8.        Le 16 juillet 2010, la Clinique Générale Beaulieu a envoyé à l'assurée une facture dont le total de 4'311 fr. 85 représentait les frais d'hospitalisation et de pension en division semi-privée du 5 au 6 juillet 2010. Compte tenu d'une participation de la caisse aux frais de l'assurée à concurrence de 1'384 fr. 80, le solde à la charge de celle-ci s'élevait à 2'927 fr. 05.

9.        Par courrier du 29 juillet 2010, la caisse a retourné en annexe l'envoi que l'assurée lui avait fait parvenir concernant son hospitalisation à la Clinique Générale Beaulieu, motif pris que l'assurance complémentaire OPTIMA+ ne prévoit pas de remboursement pour ce genre de frais.

10.    Par correspondance du 30 août 2011 adressée au Conseil de l'assurée, la caisse a persisté dans son refus de prendre en charge l'intégralité de la facture de la Clinique Générale Beaulieu du 16 juillet 2010. Pour justifier sa position, elle a indiqué que l'assurance complémentaire OPTIMA+ semi-privé ne couvre pas les frais supplémentaires de traitement et de pension en cas de séjour hospitalier, lorsque celui-ci est en rapport avec une grossesse ou un accouchement.

11.    Le 10 février 2012, l'assurée a saisi la Cour de céans d'une demande en paiement à l'encontre de son assurance complémentaire. La demanderesse conclut à ce que l'assurance complémentaire soit condamnée à lui verser la somme de 2'927 fr. 05 au titre de remboursement des frais résultant de son hospitalisation à la Clinique Générale Beaulieu des 5 et 6 juillet 2010, plus intérêts à 5% à compter du 1er septembre 2010. En substance, la demanderesse conteste le fait que ce séjour hospitalier ait eu un rapport avec une grossesse au sens de la définition courante de ce terme. Elle soutient que la cause de l'hospitalisation est un curetage évacuateur, acte thérapeutique rendu nécessaire par le risque d'hémorragie qu'elle encourait en l'absence d'une telle intervention.

12.    Invitée à se déterminer, la défenderesse, dans sa réponse du 12 mars 2012, a conclu au rejet de la demande sous suite de frais et dépens. Se référant à l'hospitalisation de l'assurée à la Clinique des Grangettes les 5 et 6 juillet 2010, la défenderesse rappelle avoir donné son accord pour la prise en charge du forfait journalier de la division commune, soit 692 fr. 40, pour une durée de deux jours, par l'assurance obligatoire de soins. La défenderesse relève que les conditions spéciales d'assurance de l'assurance complémentaire OPTIMA+ excluent toute prestation si le séjour hospitalier est en rapport avec une grossesse ou un accouchement. Elle soutient que le curetage évacuateur subi par la demanderesse est "manifestement lié à une grossesse, malheureusement non menée à terme". De son point de vue, il en découle que l'hospitalisation des 5 et 6 juillet 2010 en division semi-privée ne saurait être mise à sa charge par le biais de l'assurance complémentaire OPTIMA+.

12. Le 10 avril 2012, la Cour de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        a) Conformément à l'art. 134 al. 1 let. c de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociales prévue par la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal; RS 832.10), relevant de la loi fédérale sur la contrat d'assurance, du 2 avril 1908 (LCA; RS 221.229.1).

Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

b/aa) L'art. 46a LCA prescrit que le for se définit selon la loi du 24 mars 2000 sur les fors (LFors). Depuis le 1er janvier 2011, la LFors est toutefois abrogée et il convient d'appliquer le Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC; RS 272), dont l'art. 31 prévoit que le tribunal du domicile ou du siège du défendeur ou celui du lieu où la prestation caractéristique doit être exécutée est compétent pour statuer sur les actions découlant d'un contrat.

b/bb) Selon l'art. 132 al. 1 CPC, le tribunal fixe un délai pour la rectification des vices de forme telle que l'absence de signature ou de procuration. À défaut, l'acte n'est pas pris en considération. Toutefois, lorsque l'erreur est mineure ou ne prête pas à discussion, le juge la rectifie, d'office ou sur requête de son auteur, sans requérir de celui-ci qu'il la redresse formellement. Il en va ainsi de la désignation incomplète ou inexacte d'une partie qui ne laisse place à aucun doute (BOHNET, HALDY, JEANDIN, SCHWEIZER, TAPPY, Code de procédure civile commenté, 2011, n. 24 ad art. 132 CPC et les réf. citées).

En l'espèce, la demande est dirigée contre "INTRAS Société du Groupe CSS, Service Clientèle Romandie, Route de la Pierre 22, 1024 Ecublens" en lieu et place d'INTRAS Assurance SA, société anonyme ayant son siège à Carouge (GE). Nonobstant cette erreur de désignation, il ne fait aucun doute que la demande est en réalité dirigée contre INTRAS Assurance SA qui, par ailleurs, s'est déterminée par acte du 12 mars 2012 sans invoquer l'informalité en question. En conséquence, la Cour de céans rectifiera d'office la désignation de la défenderesse.

b/cc) La défenderesse ayant son siège dans le canton de Genève, la compétence ratione loci de la Cour de céans pour juger de la demande en paiement est par conséquent également donnée.

c) L'art. 197 CPC prévoit que la procédure au fond est précédée d'une tentative de conciliation devant une autorité de conciliation. L'art. 198 CPC mentionne des exceptions à la tentative obligatoire de conciliation, notamment pour les instances cantonales uniques prévues par l'art. 5 CPC et les tribunaux spéciaux statuant en instance unique sur les litiges commerciaux que les cantons peuvent instituer en application de l'art. 6 CPC (art. 198 let. f CPC). Les instances cantonales uniques que les cantons peuvent instituer pour les litiges portant sur les assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale, conformément à l'art. 7 CPC, ne sont pas mentionnées en tant qu'exceptions à l'art. 198 CPC.

À Genève, le Tribunal de première instance est l'autorité compétente pour la tentative de conciliation (art. 86 al. 2 let. b LOJ).

Néanmoins, la Cour de céans a jugé que c'était par une inadvertance évidente que le législateur fédéral n'avait pas mentionné à l'art. 198 let. f CPC les tribunaux statuant en tant qu'instance cantonale unique sur les litiges portant sur les assurances-maladie complémentaires, conformément à l'art. 7 CPC, et que cet oubli créait une situation contraire au but de la loi et était partant insatisfaisante. La Cour de céans a dès lors comblé cette lacune proprement dite et exempté également ces litiges de la procédure de conciliation obligatoire, à l'instar des autres instances cantonales uniques mentionnées à l'art. 198 let. f CPC (ATAS/577/2011 du 31 mai 2011, consid. 4).

Par conséquent, la demande est directement recevable par-devant la Cour de céans.

d) Pour le surplus, la demande en paiement respecte les réquisits de recevabilité prévus par l'art. 59 CPC.

2. Le litige porte sur le montant à charge de la défenderesse, suite à l'hospitalisation de la demanderesse dans la division semi-privée d'une clinique privée du 5 au 6 juillet 2010.

3. Pour les contestations relatives aux assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale au sens de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10), la procédure simplifiée s'applique quelle que soit la valeur litigieuse (art. 243 al. 2 CPC) et le tribunal établit les faits d'office (art. 247 al. 2 let. a CPC).

La maxime inquisitoire prévue par l'art. 247 al. 2 CPC correspond au concept de maxime inquisitoire sociale ou atténuée, ou encore simple, développé par la doctrine et la jurisprudence à propos des dispositions fédérales spéciales abrogées au 1er janvier 2011 (cf. notamment l'art. 274d CO en matière de bail et l'art. 343 CO en matière de contrat de travail; cf. également l'art. 85 al. 2 de la loi fédérale du 17 décembre 2004 sur la surveillance des entreprises d'assurances - LSA; RS 961.01).

La maxime inquisitoire prévue par l'art. 247 al. 2 CPC implique la possibilité pour le juge de se fonder sur tous les faits pertinents et établis, même si les parties ne les ont pas invoqués; BOHNET, HALDY, JEANDIN, SCHWEIZER, TAPPY, op. cit., n. 16 ad art. 243 et n. 17, 22 et 23 ad art. 247 CPC).

Selon la jurisprudence rendue en matière de contrat de travail et de bail, le juge doit rechercher spontanément les faits, mais les parties sont tenues de collaborer activement à la procédure, notamment en lui présentant toutes les pièces nécessaires à l'appréciation du litige. Ce principe n'est pas une maxime officielle absolue, mais une maxime inquisitoire sociale. Le juge ne doit pas instruire d'office le litige lorsqu'une partie renonce à expliquer sa position. En revanche, il doit interroger les parties et les informer de leur devoir de collaboration et de production des pièces; il est tenu de s'assurer que les allégations et offres de preuves sont complètes uniquement lorsqu'il a des motifs objectifs d'éprouver des doutes sur ce point. L'initiative du juge ne va pas au-delà de l'invitation faite aux parties de mentionner leurs moyens de preuve et de les présenter. La maxime inquisitoire sociale ne permet pas d'étendre à bien plaire l'administration des preuves et de recueillir toutes les preuves possibles (ATF 130 III 102; ATF 125 III 231 consid. 4a p. 238).

Par ailleurs, la maxime inquisitoire laisse le juge libre dans sa manière d'apprécier les preuves et ne lui interdit pas de renoncer à un moyen de preuve par appréciation anticipée. Ni la maxime inquisitoire, ni d'ailleurs le droit à la preuve d'une partie ne sont violés lorsque le juge refuse une mesure probatoire parce qu'il est déjà convaincu qu'une allégation de fait a été établie ou réfutée (en matière de droit à la preuve, ATF 129 III 18 consid. 2.6 et les arrêts cités). Le principe de la libre appréciation des preuves signifie que le juge apprécie librement les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse. Dès lors, le juge doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux (ATF 4A_253/2007 du 13 novembre 2007, consid. 4.2).

4. a) En matière d'assurances complémentaires, les parties sont liées par l'accord qu'elles ont conclu dans les limites de la loi, les caisses-maladie pouvant en principe édicter librement les dispositions statutaires ou réglementaires dans les branches d'assurances complémentaires qui relèvent de la liberté contractuelle des parties (ATF 124 V 201 consid. 3d; ATAS/1104/2006).

Les conditions générales, lorsqu'elles ont été incorporées au contrat, en font partie intégrante; elles doivent être interprétées selon les mêmes principes que les autres dispositions contractuelles (ATF 133 III 675 consid. 3.3 et ATF 122 III 118 consid. 2a ainsi que les références).

Les principes généraux de l'interprétation des contrats s'appliquent au contrat d'assurance, autant que la loi spéciale ne contient pas de dispositions particulières : l'art. 100 al. 1 LCA renvoie au droit des obligations (cf. ATF 118 II 342 consid. 1a). Il s'ensuit qu'en présence d'un litige sur l'interprétation d'une disposition contractuelle, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO).

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si leurs volontés intimes divergent, le juge doit interpréter les déclarations faites et les comportements selon la théorie de la confiance; il doit donc rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances; le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même s'il ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 133 III 675 consid. 3.3 et ATF 130 III 417 consid. 3.2).

Le sens d'un texte, apparemment clair, n'est certes pas forcément déterminant, de sorte que l'interprétation purement littérale est prohibée. Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît limpide à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que le texte de ladite clause ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu. Il n'y a cependant pas lieu de s'écarter du sens littéral du texte adopté par les cocontractants lorsqu'il n'existe aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1).

b) Dans le domaine particulier du contrat d'assurance, l'art. 33 LCA précise que l'assureur répond de tous les événements qui présentent le caractère du risque contre les conséquences duquel l'assurance a été conclue, à moins que le contrat n'exclue certains événements d'une manière précise, non équivoque. Il en résulte que le preneur d'assurance est couvert contre le risque tel qu'il pouvait le comprendre de bonne foi à la lecture des conditions générales; si l'assureur entendait apporter des restrictions ou des exceptions, il lui incombait de le dire clairement. Savoir si une telle condition est remplie dans le cas concret se détermine d'après le sens généralement donné dans le langage courant aux termes utilisés. Il ne s'agit pas de s'en tenir d'emblée à la solution la plus favorable à l'assuré. Il est vrai, néanmoins, qu'une clause d'exclusion doit être interprétée "restrictivement" (ATF 118 II 342 consid. 1a et ATF 116 II 189 consid. 2a ainsi que les références). Conformément au principe de la confiance, c'est à l'assureur qu'il incombe de délimiter la portée de l'engagement qu'il entend prendre et le preneur n'a pas à supposer des restrictions qui ne lui ont pas été clairement présentées (ATF 133 III 675 consid. 3.3).

L'art. 33 LCA concrétise l'adage in dubio contra stipulatorem qui veut dire que, de façon subsidaire, soit lorsqu'il subsiste un doute sur le sens des dispositions rédigées par l'assureur, ainsi dans les conditions générales préformulées, celles-ci sont à interpréter en défaveur de leur auteur ("Unklarheitsregel"; ATF 122 III 118 consid. 2a; 119 II 368 consid. 4b; 118 II 342 consid. 1a). Selon la jurisprudence et la doctrine, pour que cette règle trouve à s'appliquer, il ne suffit pas que les parties soient en litige sur la signification à donner à une déclaration; encore faut-il que celle-ci puisse être comprise de différentes façons ("zweideutig") et qu'il soit impossible de lever le doute créé par les moyens d'une interprétation ordinaire (ATF 122 III 118 consid. 2d; 118 II 342 consid. 1a ainsi que les références).

c) Comme leur nom l'indique, le but des assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale est clairement de compléter l'assurance obligatoire des soins. Dans ce contexte, l'art. 12 al. 2 LAMal dispose que "les caisse-maladie ont le droit de pratiquer, en plus de l'assurance-maladie sociale au sens de la présente loi, des assurances complémentaires; elles peuvent également pratiquer d'autres branches d'assurance, aux conditions et dans les limites fixées par le Conseil fédéral".

Dans le cas particulier, une telle complémentarité ressort également de l'art. 1er ch. 1 des conditions spéciales de l'assurance OPTIMA+ (ci-après: CSA), qui prévoit que "la présente assurance complémentaire permet de couvrir les frais supplémentaires de traitement et de pension en cas de séjour hospitalier, selon la variante assurée (division privée = chambre à un lit ou semi-privés = chambre à plus d'un lit), dans un établissement hospitalier public ou privé". De plus, conformément à l'art. 16 ch. 1 CSA, "les prestations garanties dans les présentes conditions spéciales sont versées en plus de celles prévues par l'assurance obligatoire des soins LAMal conclue auprès d'INTRAS ou d'un autre assureur".

d) Lorsqu'une assurance complémentaire a pour but d'offrir les mêmes prestations que la LAMal et de les compléter, les parties peuvent en principe considérer que les notions communes en matière d'assurances complémentaires et d'assurance de base ont la même signification (ATAS/529/2012 du 10 avril 2012, consid. 10a; voir également ATAS/772/2011 du 24 août 2011, consid. 7c).

Dans l'assurance de base, l'art. 5 de la loi sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (ci-après: LPGA) dispose que la maternité comprend la grossesse et l'accouchement ainsi que la convalescence qui suit ce dernier. Une maternité se déroulant sans complications n'est pas considérée comme une maladie (ATF 127 V 271, 112 V 304; SVR 2005 KV No 5). Ainsi, "les examens de contrôle, effectués par un médecin ou une sage-femme ou prescrits par un médecin, pendant et après la grossesse" (art. 29 al. 2 let. a LAMal) sont considérés comme des "prestations spécifiques de maternité" (art. 29 al. 1 LAMal) pour lesquelles l'assureur ne peut exiger aucune participation de l'assurée (art. 64 al. 7 LAMal). En revanche, le traitement de troubles à la santé survenus au cours de la grossesse est assimilé à une maladie à laquelle le régime ordinaire de participation aux coûts s'applique de par la loi (art. 64 al. 1, 3, 5, 6 et 8 LAMal). Le Tribunal fédéral s'est prononcé en ce sens en considérant qu'une fausse couche suivie d'une hospitalisation pour un curetage constituait un cas de maladie (ATF non publié K 157/01 du 16 juin 2004, in SVR 2005 KV No 5; KIESER, ATSG-Kommentar, 2ème éd. 2009, n. 12-14 ad art. LPGA et les références citées).

5. Dans le cas particulier, la défenderesse refuse la prise en charge de l'hospitalisation de la demanderesse en division semi-privée, en se fondant sur l'art. 6 ch. 1 CSA aux termes duquel "INTRAS n'alloue aucune prestation dans le cadre de la présente assurance complémentaire, si le séjour hospitalier est en rapport avec une grossesse ou un accouchement". Elle soutient que le séjour de la demanderesse à la Clinique Générale Beaulieu était en rapport avec une grossesse ou un accouchement (art. 6 ch. 1 CSA), puisque le curetage évacuateur subi par la demanderesse était lié à sa grossesse, peu importe le caractère non évolutif de cette dernière.

Pour sa part, la demanderesse considère que dans le langage courant, l'on ne parle de grossesse que lorsqu'il s'agit d'une grossesse évolutive et qui, à terme, se concrétise par un accouchement. En conséquence, elle est d'avis que l'art. 6.1 CSA est ambigu et qu'il se justifie, en pareil cas, d'interpréter la clause d'exclusion qu'il renferme en défaveur de la caisse, le doute devant profiter à l'assurée.

En l'espèce, la Cour de céans constate que l'assurance complémentaire OPTIMA+ souscrite par la demanderesse a pour objet de couvrir les frais supplémentaires de traitement et de pension en cas de séjour hospitalier en division semi-privée, les prestations étant fournies en cas de maladie, mais non en cas de grossesse et d'accouchement. En ce qui concerne les termes "grossesse" et "accouchement" de l'art. 6 ch. 1 CSA, la Cour de céans considère qu'ils peuvent être compris de différentes façons. S'il est vrai que la grossesse est "l'état d'une femme enceinte de la conception à l'accouchement" (Le Petit Robert 1, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 1990, p. 895), il n'en demeure pas moins que les qualificatifs employés dans le langage courant distinguent les cas ordinaires, extraordinaires ou anormaux. En effet, la source précitée mentionne entre autres la "grossesse interrompue", "utérine" ou "extra-utérine", la "grossesse nerveuse ou fausse grossesse" (Le Petit Robert 1, ibidem).

Dès lors que le langage courant distingue plusieurs types de grossesse, y compris les cas pathologiques, l'emploi par la défenderesse du terme "grossesse" en l'absence de tout autre qualificatif est d'autant plus de nature à instiller le doute que l'assurance complémentaire OPTIMA+ a précisément pour objet de compléter les prestations de l'assurance de base en cas de maladie. Or, du moment où l'assurance de base assimile le traitement de troubles à la santé survenant au cours de la grossesse à une maladie et n'alloue de prestations spécifiques de maternité qu'en cas de maternité se déroulant sans complications, il est permis de comprendre de bonne foi que la clause d'exclusion de l'art. 6 ch. 1 CSA vise exclusivement les cas de grossesse et d'accouchement se déroulant normalement.

En application du principe de la confiance, il eût appartenu à la défenderesse de délimiter la portée de l'engagement qu'elle entendait prendre sans laisser la demanderesse supposer des restrictions qui ne lui ont pas été clairement présentées à la conclusion du contrat. En conséquence, cette dernière pouvait comprendre de bonne foi que son hospitalisation à la Clinique des Grangettes du 5 au 6 juillet 2010 en division semi-privée constituait un événement assuré par son contrat d'assurance complémentaire "OPTIMA+" semi-privé.

6. Reste à déterminer si la demanderesse a droit à la somme de 2'927 fr. 05 plus intérêts à 5% l'an.

La clause d'exclusion de l'art. 6 ch. 1 CSA n'étant pas opposable à la demanderesse dans le cas particulier, il convient de s'en tenir à la règle générale de l'art. 3 CSA, en vertu de laquelle la caisse est tenue, en cas d'hospitalisation, de prendre en charge selon la couverture convenue (privée ou semi-privée) la totalité des frais de traitement et de pension, sans limite de durée ni de montant.

Comme en l'espèce, la défenderesse ne s'est acquittée de la facture de la Clinique Générale Beaulieu du 16 juillet 2010 qu'à concurrence de 1'384 fr. 80 sur un total de 4'311 fr. 85, la demande sera admise et la défenderesse condamnée à payer à la demanderesse le solde de ladite facture qui s'élève à 2'927 fr. 05 (4'311 fr. 85 sous déduction de 1'384 fr. 80).

La demanderesse réclame également le paiement d'intérêts moratoires à 5% l'an à compter du 1er septembre 2010 sur le montant de 2'967 fr. 05 figurant dans ses conclusions.

Aux termes de l'art. 41 al. 1 LCA, la créance qui résulte du contrat est échue quatre semaines après le moment où l'assureur a reçu les renseignements de nature à lui permettre de se convaincre du bien-fondé de la prétention. Ce délai de délibération de quatre semaines laissé à l'assureur ne commence pas à courir si l'ayant droit n'a pas suffisamment fondé sa prétention; tel est par exemple le cas lorsque, dans l'assurance contre les accidents, l'état de santé véritable de l'ayant droit n'est pas éclairci parce que ce dernier empêche le travail des médecins (NEF, Basler Kommentar, Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, 2001, n. 15 ad art. 41 LCA). En revanche, dès que l'ayant droit a suffisamment fondé sa prétention, celle-ci est exigible au terme du délai de quatre semaines de l'art. 41 al. 1 LCA. Seul l'assureur qui est en demeure doit l'intérêt moratoire au taux de 5% l'an (art. 104 al. 1 CO; ATF non publié 4A_307/2008 du 27 novembre 2008, consid. 6.3.1).

Pour que l'assureur soit en demeure, l'écoulement du délai de l'art. 41 al. 1 LCA ne suffit pas. En principe, l'assuré doit en outre interpeller l'assureur (art. 102 al. 1 CO). Toutefois, si ce dernier refuse définitivement, à tort, d'allouer des prestations, une interpellation n'est pas nécessaire: l'exigibilité et la demeure sont immédiatement réalisées (ATF non publié 5C.18/2006 du 18 octobre 2006, consid. 6.1; cf. NEF, op. cit., n. 20 in fine ad art. 41 LCA).

En l'espèce, la demanderesse a réitéré sa volonté de recevoir la prestation d'assurance découlant du contrat d'assurance OPTIMA+ en adressant à la défenderesse les factures relatives à son hospitalisation par un courrier du mois de juillet 2010 non versé à la procédure. Il ressort en effet des pièces produites que la défenderesse a retourné à l'assurée son envoi relatif à son hospitalisation à la Clinique Générale Beaulieu par courrier du 29 juillet 2010, renouvelant ainsi son refus exprimé dans ses courriers du 2 juillet 2010 à la Dresse L__________ et à la demanderesse ainsi que dans son entretien téléphonique du 5 juillet 2010 avec la mère de cette dernière. Au vu de ces circonstances, la Cour de céans considère qu'une interpellation n'était pas nécessaire, de sorte que l'exigibilité et la demeure étaient réalisées à réception du courrier du 29 juillet 2010, soit le vendredi 30 juillet, voire le lundi 2 août 2010. Comme pour le surplus, l'art. 58 al. 1 CPC ne permet pas de statuer ultra petita, les conclusions de la demanderesse en paiement d'un intérêt moratoire de 5% l'an à compter du 1er septembre 2010 se révèlent fondées.

7. Les cantons sont compétents pour fixer le tarif des frais comprenant les dépens (art. 96 CPC en relation avec l'art. 95 al. 3 let. b). A Genève, le règlement fixant le tarif des frais en matière civile du 22 décembre 2010 (RTFMC ; RS E 1 05.10) détermine notamment le tarif des dépens, applicable aux affaires civiles contentieuses (art. 1 RTFMC).

8. La demanderesse, représentée par un conseil, obtenant gain de cause, la défenderesse est condamnée à lui verser une indemnité de 1'000 fr. à titre de dépens, TVA et débours inclus (art. 106 al. 1 CPC; art. 16 à 21 de la loi d'application du code civil et du code des obligations du 7 mai 1981 [LaCC ; RS E 1 05]; art. 84 et 85 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile [RTFC ; RS E 1 05.10]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 17 al. 3 let. b LaCC).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

conformément à l'art. 133 al. 2 LOJ

 

A la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

2.        Rectifie la qualité de la partie défenderesse en ce sens que INTRAS Société du Groupe CSS devient INTRAS Assurance SA.

Au fond :

3.        L'admet.

4.        Condamne la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 2'927 fr. 05 avec intérêts à 5% l'an à compter du 1er septembre 2010.

5.        Condamne la défenderesse à verser à la demanderesse la somme de 1'000 fr., TVA et débours inclus, à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (Tribunal fédéral suisse, avenue du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14). Lorsque la valeur litigieuse minimale de 30'000 francs n'est pas atteinte, le recours n'est recevable que si la contestation soulève une question juridique de principe (art. 74 al. 2 let. a LTF). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoqués comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

La valeur litigieuse des conclusions pécuniaires est en l'espèce, au sens de la LTF, inférieure à 30'000 fr.

 

 

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Juliana BALDE

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) par le greffe le