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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/742/2004

ATAS/869/2011 du 15.09.2011 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

République et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/742/2004 ATAS/869/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 septembre 2011

3ème Chambre

En la cause

Monsieur W__________, domicilié au Grand-Saconnex, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître GEIGER Bastien

Monsieur A__________, domicilié à Chêne-Bougeries, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître GROSJEAN Christian

Monsieur B__________, domicilié à Loisin, France, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître CONNOR Gregory

Monsieur C_________, domicilié à Thônex, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître ROUVINET Serge

recourants

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, Route de Chêne 54, 1208 Genève

intimée

 


EN FAIT

Créée en août 1987, la société X_________ SA (X_________.) a été rebaptisée, le 7 novembre 1996, Y_________ (ci-après : Y________.). Cette société, filiale de Z_________ (Luxembourg) SA (ci-après : Z__________.), et ayant pour but l'achat, la vente, la location, le leasing et le développement de matériel et systèmes informatiques, était affiliée à la CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION (ci-après : la CCGC ou la caisse).

Étaient inscrits au Registre du commerce (ci-après : RC) :

- Monsieur C_________ comme administrateur président (du 21 juin 1994 au 30 octobre 2003) avec signature individuelle à compter du 16 juin 1999,

- Monsieur W__________ en tant qu’administrateur secrétaire (du 21 juin 1994 au 30 janvier 2003) avec signature collective à deux,

- Monsieur A__________ en tant qu’administrateur (dès le 22 novembre 1996) avec signature individuelle à compter du 30 janvier 2003,

- Monsieur D_________ (du 22 novembre 1996 au 30 janvier 2003) en qualité d’administrateur avec signature collective à deux,

- Monsieur B__________ en tant qu'administrateur sans signature dès le 31 mai 2000.

Au cours de l’année 2001, les cotisations sociales n’ont plus été versées dans les délais légaux : à compter du mois de mai, les forfaits ont été versés tardivement. Malgré une augmentation des forfaits en question en cours d’année, il s’est avéré par la suite que les montants réellement dus sur la base de l’attestation des salaires étaient supérieurs, de sorte qu’un complément de cotisations de 72'507 fr. 75 a dû être exigé.

En 2002, aucun paiement n’a été effectué dans le délai légal.

Un conseil d’administration s’est tenu en date du 13 février 2002 - auquel ont assisté tous les administrateurs. Les comptes alors présentés par Monsieur C_________ faisaient apparaitre un bénéfice net de 207'401 fr. 65 pour l’année 2001. Monsieur C_________ a indiqué que, depuis septembre 2001, les affaires s’étaient ralenties. En conséquence, le compte de pertes et profits prévisionnel au 31 juillet 2002 prévoyait un léger déficit (cf. pce 1 chargé compl. W)

Lors du conseil d’administration du 22 mai 2002 (cf. pce 4 chargé W) - auquel ont assisté tous les administrateurs sauf Messieurs D_________ et A__________, Monsieur C_________ a informé les autres administrateurs que la situation de trésorerie de la société était « extrêmement préoccupante » et que la société risquait même d’être en cessation de paiement fin juin, date à laquelle la perte s’élèverait à près de 1,5 million de francs. Il apparaissait en effet que le chiffre d’affaires escompté trois mois plus tôt (5,7 millions) ne serait pas atteint. Monsieur C_________ a précisé que la société accusait des retards de paiement importants, à hauteur d’un million de francs environ, dont 646'000 fr. de dettes fiscales et sociales. Les autres administrateurs ont alors relevé que la crise de liquidités avait commencé en octobre 2001 et souligné qu’il aurait été préférable d’aborder cette question plus tôt. Ils ont invité Monsieur C_________ à leur faire des propositions de restructuration tout en se déclarant conscients qu’à la fin du mois de novembre 2002, le manque de trésorerie serait de 1,2 à 1,4 million et que la seule solution consistait à augmenter d’autant le capital. C’est alors que Monsieur C_________ a relevé qu’une mise en faillite serait regrettable eu égard au montant à recevoir à titre d’honoraires de maintenance - 2'050'000 fr. Enfin, il a précisé être en pourparlers avec une société susceptible de reprendre Y_________. SA.

Un nouveau conseil d’administration s’est tenu en date du 3 juillet 2002 - auquel ont assisté tous les administrateurs à l’exception de Messieurs D_________ et A__________. A cette occasion, Monsieur C_________ a indiqué avoir entrepris de nombreuses démarches en vue de sauver la société et avoir pris contact avec plusieurs personnes susceptibles de procéder à une augmentation de capital. Il a été précisé qu’à défaut de nouvelles liquidités, il faudrait envisager le dépôt de bilan.

Lors du conseil d’administration du 17 juillet 2002 - auquel ont assisté tous les administrateurs sauf Monsieur A__________ , Monsieur C_________ a mentionné avoir eu encore de nombreux contacts pour tenter de trouver une solution à la crise de liquidités de la société. Monsieur D_________ s’est déclaré favorable au dépôt immédiat du bilan. Le conseil d’administration s’y est opposé au motif qu’une telle décision causerait un dommage irréparable aux actionnaires et aux créanciers de la société; bien que le bilan n’ait pas encore été révisé au 30 juin 2002, à la lumière des chiffres connus, il ne semblait pas que la société tombait sous le coup de l’art. 725 du code des obligations (CO). Le conseil d’administration s’est donné un délai à fin juillet pour trouver une solution.

Le 23 juillet 2002, la caisse de compensation a informé la société qu'elle lui devait, pour la période de janvier à juillet 2002, 310’443 fr. à titre de cotisations paritaires, 44’331 fr. d'allocations familiales et 9’331 fr. à titre de cotisations d'assurance-maternité.

Le conseil d’administration s’est réuni une nouvelle fois le 31 juillet 2002. Tous les administrateurs étaient présent sauf Monsieur W__________. Il a été relevé que les pourparlers n’avait pas beaucoup avancé et qu’il y avait lieu de décider entre le dépôt de bilan avec effet immédiat ou l’apport de moyens financiers pour le règlement des salaires dus fin juillet 2002. Messieurs B__________ et A__________ ont accepté de faire l’avance des salaires à raison de 300'000 fr. contre cession de 27% du capital-actions de Z_________ Luxembourg, détenu par XA_________ (cela représentait un apport de 600'000 fr., correspondant aux besoins immédiats de la trésorerie de la société).

Par courrier du 1er août 2002 adressé à Messieurs C_________, A__________ et W__________, Monsieur B__________ a confirmé être prêt à avancer la somme de 200'000 fr., dont il a précisé qu’elle devrait être consacrée exclusivement à payer les salaires nets du personnel à la fin du mois de juillet 2002, ce qui permettrait de bénéficier d’un délai supplémentaire pour chercher un repreneur à même d’assumer les besoins de trésorerie de la société. Monsieur B__________ a suggéré que des prévisions de « retour sur investissement » soient établies afin d’établir un document de présentation crédible pour la recherche d’investisseurs. Il a relevé que le business plan 2002-2005 ne mettait pas en évidence le détail de l’affectation des moyens financiers recherchés et ne permettait pas de distinguer de « garantie de résultats » des budgets proposés. Selon lui, il convenait également d’examiner le développement de nouveaux produits plus simples, comme il en avait été question lors de son entrée au conseil d’administration, car il était extrêmement dangereux pour une société d’être « mono produit ».

Un nouveau conseil d’administration s’est réuni le 29 août 2002 - auquel ont assisté tous les administrateurs - au cours duquel Monsieur C_________ a précisé que les salaires du mois d’août avaient été payés, que des factures s’élevant à environ 150'000 fr. avaient été adressées aux débiteurs et qu’un ou deux contrats devraient être signés au mois de septembre; des mesures d’économie avaient été prises, qui devaient conduire à une diminution des charges de 1'200'000 fr. par an; une société française était intéressée à acquérir le groupe Y__________, dont le montant total des dettes s’élevait à 4'500'000 fr. environ.

Le 17 septembre 2002, la caisse de compensation, constatant que les procédures engagées pour obtenir le paiement des créances de cotisations pour la période du 1er janvier au 31 août 2002 (343’753 fr., frais de poursuite et intérêts non compris, dont 168’784 fr. 25 de part salariale des cotisations AVS/AI/APG/AC) étaient restées infructueuses, a menacé la société de déposer plainte pénale pour soustraction de cotisations. Copie de ce courrier a notamment été adressée à Messieurs B__________, C_________, A__________ et W__________.

Le 23 septembre 2002, Monsieur W__________ a adressé à Monsieur C_________ un courrier dans lequel il indiquait notamment :

…  « En revanche, je ne suis pas prêt à accepter la situation telle qu’elle découle du non-paiement des charges sociales ou des impôts à la source. Tu connais mon point de vue à ce sujet. Je me suis déjà exprimé et je conteste toute responsabilité. C’est pourquoi, avec les liquidités dont tu disposes, il s’impose que tu règles, en première ligne, l’arriéré des charges sociales, à tout le moins, la part pénale. A défaut d’un règlement rapide, je t’informe que je serai obligé de renoncer, avec effet immédiat, à mes fonctions d’administrateur. » …

Le 1er octobre 2002, la société a versé à la caisse de compensation 73’000 fr. puis, le 4 novembre 2002, un montant supplémentaire de 100’000 fr., s’acquittant ainsi de la part salariale (part pénale) des cotisations sociales pour la période de janvier à août 2002.

Le 8 octobre 2002, le conseil de Monsieur W__________ a adressé à la caisse un courrier dans lequel il a allégué que son mandant avait été très surpris d’apprendre quelle était la situation, convaincu qu’il était que la société se conformait aux dispositions légales en matière d’assurances sociales. Il ajoutait que les difficultés financières de la société n’étaient que passagères et que des pourparlers étaient en cours avec d’éventuels investisseurs intéressés par le rachat de la société.

Dans un courrier daté du 16 octobre 2002, le conseil de Monsieur W__________ a encore assuré que, selon les éléments en sa possession, les montants dus devaient être réglés prochainement.

Au conseil d’administration du 23 octobre 2002 - auquel ont assisté tous les administrateurs -, Monsieur C_________ a indiqué que XB_________ SA proposait d’acquérir les actifs de la société mais les administrateurs ont considéré que certaines clauses de cette proposition d’achat n’étaient pas admissibles. Monsieur C_________ a alors suggéré un concordat, procédure que le conseil d’administration a jugée prématurée tant que XC_________ SA, société italienne se disant intéressée par une prise de participation dans la société, n’aurait pas fait connaître sa décision.

Par courrier et fax des 29 et 30 octobre 2002, Monsieur C_________ a annoncé à la caisse le versement de 219'490 fr. dans un délai d’une semaine. Ce laps de temps devait permettre de finaliser un accord avec un investisseur, accord qui permettrait à la société de « faire face à tous ses engagements » à l’égard de la caisse. En réalité, seule la somme de 100'000 fr. a été versée à la caisse le 4 novembre 2002.

Par courrier du 5 décembre 2002, Monsieur W__________ a annoncé qu’il renonçait à son mandat d’administrateur avec effet immédiat.

L’organe de révision a établi en date du 12 décembre 2002 son rapport sur l’exercice comptable annuel arrêté au 30 juin 2002. Les réviseurs ont observé que, grâce aux abandons de créances des actionnaires, la perte au bilan avait été diminuée de telle sorte que l’art. 725 al. 2 CO n’était plus applicable; malgré tout, la moitié du capital-actions et des réserves n’était plus couverte. Dans l’annexe aux comptes annuels, les réviseurs ont en outre fait état d’une dette de 120'440 fr. 50 envers les institutions de prévoyance professionnelle (contre 36'717 fr. 70 lors de l’exercice précédent).

Lors de sa séance du 13 décembre 2002 - à laquelle étaient présents tous les administrateurs, exceptés Messieurs B__________ et W__________ , le conseil d’administration a pris acte de la démission avec effet immédiat de ces deux derniers de leur mandat d’administrateur, démission donnée le 5 décembre, respectivement le 9 décembre 2002. Il a été rappelé que Monsieur D_________ avait quant à lui déjà démissionné le 30 juin 2002.

Il a été constaté que les comptes du dernier exercice, clos le 30 juin 2002, laissaient apparaître une perte de 644'855 fr. au bilan après abandon de créances actionnaires pour un montant total de 1'442'339 fr.; les charges d’exploitation avaient augmenté de 43% alors que les produits avaient régressé de 6%, de sorte que la perte d’exploitation de l’exercice s’élevait à 2'072'283 fr. Il a été estimé que la politique de la société, adaptée à une période de croissance, avait trouvé ses limites avec le changement de conjoncture économique en 2000 et relevé que les actionnaires avaient refusé de pallier cette situation par un renforcement des fonds propres. Ordre avait été donné de vendre la société, mais aucun acquéreur n’avait été trouvé. Une structure représentée par Messieurs E_________ et B__________ se proposait de procéder à une reprise des actifs et des passifs. Mandat lui a été donné de négocier avec les créanciers les conditions d’un apurement de la dette. Estimant que, dans cette hypothèse de reprise, il était indispensable que l’entreprise changeât de raison sociale, le conseil a approuvé de changer cette dernière en « XD_________ SA ».

Le 18 décembre 2002, la caisse a adressé à Y________. SA une sommation concernant les cotisations dues pour novembre 2002 (soit 42'282 fr., frais de sommation compris).

Le 14 janvier 2003, une convention a été signée entre la société et Z_________. LUXEMBOURG, d’une part, XE_________ SA (XE_________.) en formation, d’autre part.

Les parties ont convenu que, suite à ses difficultés financières, la société Y_________. céderait une partie de ses actifs et passifs à XE_________ Étaient notamment compris dans les actifs le logiciel d’archivage XF_________ ainsi que les marques y relatives, estimés à 780'000 fr. La société a également cédé à XE_________. l’ensemble des droits et obligations découlant des contrats auxquels elle était partie (et le montant de la trésorerie pour les maintenances 2003 - soit 2'185'238 fr. 15). XE__________. a repris les contrats de travail, les contrats de leasing, un certain nombre de dettes (fournisseurs divers pour un montant total de 419'393 fr. 11), mais non les dettes fiscales et montants dus à titre de cotisations AVS/AI/AC (soit 572'807 fr. 35), de contributions aux allocations familiales (93'041 fr. 30) et de cotisations à l’assurance-maternité (20'788 fr. 85 ; cf. annexe 7 de la convention).

Il était convenu que XE_________ s’acquitte d’un montant de 1'280'607 fr. et remette à L.A. SA des certificats d’actions équivalent à 22,5% de son capital-actions.

Il était précisé que la cession interviendrait avec effet au 1er janvier 2003, sous réserve de certaines conditions suspensive (cf. art. 13).

Par courrier du 15 janvier 2003 adressé à Monsieur C_________, Monsieur W__________, constatant que la convention avait été signée et qu’en conséquence, la société disposait d’un montant de plus d’un million, a invité Monsieur C_________ à régler immédiatement les montants dus aux différentes institutions sociales.

Le 23 janvier 2003, XE_________ SA a été inscrite au RC avec pour but social : « conception et commerce de tous produits informatiques et de télécommunications ainsi que toutes prestations de services dans ce domaine ».

Conformément à la convention du 14 janvier 2003, certains actifs d'exploitation des sociétés Y_________. SA et Z__________ LUXEMBOURG (liquidités, créances, mobiliers et contrats de licence et de maintenance) étaient repris pour un prix maximum de 3'500’000 fr., qui était encore à définir selon critères contractuels. L'administrateur président était Monsieur B__________ avec signature collective à deux; deux autres administrateurs étaient inscrits, dont Monsieur E_________.

Le 24 janvier 2003, la caisse a adressé à Y__________ SA une sommation concernant les cotisations dues pour décembre 2002 (soit 42'282 fr., frais de sommation compris).

La société a quant à elle convoqué une assemblée générale extraordinaire qui s’est tenue en date du 27 janvier 2003, au cours de laquelle il a été décidé de transformer la raison sociale en « XD_________ SA ». Il a par ailleurs été pris acte de la démission de Messieurs W__________, D_________ et B__________ de leur fonction d’administrateur. L’assemblée leur a donné décharge et décidé de ne pas les remplacer.

Un « décompte de closing » a été établi le 29 janvier 2003 entre Y_________. SA et XE_________. SA (cf. pce 19 chargé W). Il en ressort que Y________ SA disposait alors de 1'090'000 fr. sur un compte auprès de l’étude Budin & Associés, étant précisé que, sur cette somme, 281'813 fr. 80 avaient été transférés à XE__________.

Le 30 janvier 2003, XD_________ SA a été inscrite au RC en lieu et place de Y_________ SA et tous les administrateurs ont été radiés, sauf Messieurs C_________ et A__________. Ce dernier a été inscrit en tant qu'administrateur secrétaire avec signature individuelle.

Le 4 février 2003, a été notifié à Y_________. SA un commandement de payer de 154'274 fr. 45 (cotisations paritaires de janvier à décembre 2001) avec intérêts dès le 1er janvier 2002, plus 150 fr. de frais de sommation.

Le 10 février 2003, ont été notifiés à Y________ SA les commandements de payer suivants :

- 44'349 fr. (cotisations paritaires d’octobre 2002) avec intérêts dès le 1er novembre 2002, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite de 2'834 fr. 25 versés le 1er novembre 2002.

- 44'349 fr. (cotisations paritaires de septembre 2002) avec intérêts dès le 1er octobre 2002, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite de 149 fr. 15 versés le 1er octobre 2002.

- 44'349 fr. (cotisations paritaires d’août 2002) avec intérêts dès le 1er septembre 2002, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite de 5'668 fr. 45 versés le 24 septembre 2002, de 9'125 fr. versés le 1er octobre 2002 et de 12'500 fr. versés le 4 novembre 2002.

- 44'349 fr. (cotisations paritaires de juillet 2002) avec intérêts dès le 1er août 2002, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite de 9'125 fr. versés le 1er octobre 2002 et de 12'500 fr. versés le 4 novembre 2002.

- 255'055 fr. (cotisations paritaires de janvier à juin 2002) avec intérêts, plus 900 fr. de frais de sommation.

Le 20 février 2003, Monsieur W__________ a dressé au conseil de la société un courrier s’étonnant de ce que les institutions sociales n’aient pas été désintéressées.

Par courrier du 25 février 2003, XD_________ SA lui a répondu qu’un paiement de 392'008 fr. était intervenu, qui représentait la part pénale des cotisations sociales AVS/AI/APG et assurance-maternité ainsi que les contributions aux allocations familiales. Il a été précisé que la société avait par ailleurs dû rembourser un prêt de 760'000 fr., condition préalable nécessaire pour pouvoir conclure la convention de janvier 2003, et 110'010 fr. pour payer les salaires de janvier 2003. Une fois ces sommes déduites du montant reçu (1'325'579 fr. 40), le solde disponible ne s’élevait plus qu’à 33'511 fr. 38 (cf. pce 21 chargé W).

Par courrier du 18 mars 2003, la société XE_________ SA s’est plainte auprès de XD_________ SA du fait que le portefeuille commercial promis et évalué à 4,5 millions n’avait en fait aucune réalité économique. Il s’était avéré qu’aucun des clients contactés n’était intéressé par les produits de la société. Certains auraient même assuré n’avoir jamais exprimé le moindre intérêt. Par ailleurs, les chiffres d’affaires communiqués par XD_________ SA auraient été artificiellement augmentés. Enfin, il a été relevé que l’ensemble des actifs matériels cédés avait fait l’objet d’une saisie préexistante à la convention.

Ces accusations ont été formellement contestées par le conseil de la société par courrier du 27 mars 2003.

Le 28 mars 2003, a été notifié à XD_________ SA un commandement de payer de 42'132 fr. (cotisations paritaires de novembre 2002) avec intérêts dès le 1er décembre 2002, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite de 22’000 fr. versés en date du 21 février 2003.

Par jugement du Tribunal de première instance du 8 avril 2003, XE__________. SA a été déclarée en faillite.

Le 18 juin 2003, XD_________ SA, Y________ SA et Monsieur C_________ ont conclu avec XG_________ SA un contrat de vente et de licence (du logiciel XF_________) pour un montant de 780'000 fr. XG_________ SA a alors payé un acompte de 20'000 fr., étant précisé que le solde serait réglé à la condition suspensive qu’un jugement entré en force et exécutoire constatant que l’un ou l’autre des vendeurs ou les deux, était propriétaire du logiciel.

Dans le cadre des poursuites qu’elle a dirigées contre XD_________ SA en recouvrement des cotisations paritaires, la caisse de compensation a obtenu, le 5 septembre 2003, plusieurs actes de défaut de biens datés du 25 août 2003.

Deux nouveaux commandements de payer ont été notifiés à XD_________ SA :

- un de 5'187 fr. 60 le 30 septembre 2003 (correspondant aux cotisations paritaires selon rapport de contrôle du 31 décembre 2001) avec intérêts dès le 24 janvier 2003, plus 852 fr. 25 d’intérêts moratoires calculés au 23 janvier 2003.

- un de 42'132 fr. le 7 octobre 2003 (correspondant aux cotisations paritaires de décembre 2002) et 72'507 fr. 75 (cotisations paritaires complément 2002) avec intérêts dès le 1er janvier 2003, plus 150 fr. de frais de sommation, déduction faite des 88'000 fr. versés en date du 21 février 2003.

Le 30 octobre 2003, Monsieur C_________ a été radié au RC et Monsieur A__________ a été inscrit en tant qu'administrateur avec signature individuelle de XD_________ SA.

Par décisions du 1er décembre 2003 en réparation du dommage, la caisse de compensation a réclamé à Messieurs A__________, C_________ et W__________, pris solidairement, le paiement de la somme de 237'206 fr. 70, représentant le solde des cotisations paritaires AVS/AI/APG/AC impayées pour l’année 2001, un complément selon contrôle d’employeur au 31 octobre 2001 et les cotisations impayées de l’année 2002, frais et intérêts moratoires compris. La caisse n’a en revanche rendu aucune décision à l’encontre de Monsieur B__________ au motif que, selon la base de données de l’administration cantonale, ce dernier n’était plus domicilié en Suisse depuis le 1er février 2002.

Par décisions du même jour, la caisse de compensation a en outre réclamé à Messieurs A__________, C_________ et W__________, pris solidairement, le paiement de la somme de 92'445 fr. 85, représentant les contributions aux allocations familiales impayées pour l’année 2002, un solde pour l’année 2001 et un complément selon contrôle d’employeur au 31 octobre 2001, frais et intérêts moratoires compris.

Le 23 décembre 2003, Monsieur A__________ a formé opposition aux deux décisions le concernant, alléguant en substance que l’administration de XD_________ SA et lui-même avaient des raisons sérieuses et objectives de penser pouvoir s’acquitter des dettes de cotisations sociales dans un délai raisonnable, de sorte qu’on ne pouvait lui imputer de faute intentionnelle ni de négligence grave.

Le 15 janvier 2004, Monsieur C_________ a également formé opposition aux décisions de la caisse. Il a nié avoir agi intentionnellement ou par négligence grave, alléguant avoir pris toutes les dispositions nécessaires afin que la caisse de compensation ne subît aucun préjudice. Selon lui, les organes de XE__________. seraient exclusivement responsables dudit préjudice. Monsieur C_________ s’est par ailleurs étonné que Monsieur B__________ ne fût pas recherché.

Le 16 janvier 2004, Monsieur W__________ a formé à son tour opposition aux décisions de la caisse. Il s’est défendu de toute faute intentionnelle ou négligence, soutenant que, dès le début des problèmes financiers, il avait attiré l’attention des autres administrateurs sur le fait que la priorité devait être donnée au paiement des cotisations sociales et qu’ils lui avaient assuré que la société se conformait à la législation y relative. Monsieur W__________ a ajouté que lorsqu’il avait appris que tel n’était pas le cas, il avait immédiatement pris toutes les mesures en son pouvoir pour que la société s’acquittât de l’arriéré de cotisations et était intervenu à plusieurs reprises, même après avoir démissionné de ses fonctions d’administrateur, en vain.

Par jugement du 19 janvier 2004, le Tribunal de première instance a prononcé la faillite de XD_________ SA par voie de procédure sommaire.

Par décisions sur opposition du 8 mars 2004, la caisse de compensation a confirmé ses décisions du 1er décembre 2003. Elle a considéré que les mesures prises par la société visaient sa propre sauvegarde et non pas à lui éviter un dommage. La caisse a précisé avoir renoncé à faire valoir ses prétentions vis-à-vis de Messieurs B__________ et D_________ au vu du fait que ces derniers étaient à l’étranger et que leurs domiciles lui étaient inconnus.

Par écriture du 8 avril 2004, Monsieur C_________ a interjeté recours auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales - alors compétent - en concluant, sous suite de dépens, à ce que l’intimée soit déboutée de toutes ses conclusions à son encontre. Il allègue qu’aucune négligence grave ne peut lui être reprochée. Selon lui, ce sont les agissements déloyaux des organes de la société qui sont directement responsables du préjudice causé à la caisse de compensation, préjudice dont il allègue qu’il ne peut encore être établi de manière définitive. Il en tire la conclusion qu’il n’est donc pas possible de considérer que l’intimée a subi un préjudice.

Monsieur C_________ explique que Z________. et XD_________ SA détenaient les droits d’auteur d’un logiciel d’archivage numérique dénommé « XF_________ », lequel a été commercialisé auprès d’une soixantaine d’établissements bancaires. Par convention du 14 janvier 2003, il a été convenu que Y__________ acquerrait ce logiciel. La faillite de Y_________ ayant été prononcée le 8 avril 2003, il a fallu rapidement rétablir l’exploitation et la maintenance par le biais d’une nouvelle société, dénommée XG_________ SA, pour faire face aux demandes des établissements utilisant quotidiennement le logiciel. XG_________ SA a alors fait une offre ferme de rachat du logiciel à la masse en faillite de XE_________. (pour un montant de 760'000 fr.) et, afin de garantir cet engagement, a fait émettre une garantie bancaire qui a été remise à la masse en faillite de XE_________. De son côté, XD_________ SA a revendiqué le logiciel. Finalement en juin 2003, XD_________ SA, Z_________ SA et Monsieur C_________ ont conclu avec XG_________ SA un contrat de vente et de licence pour un montant de 780'000 fr. XG_________ SA a alors payé un acompte de 20'000 fr., étant précisé que le solde serait réglé à la condition suspensive qu’un jugement entré en force et exécutoire constatant que l’un ou l’autre des vendeurs ou les deux, était propriétaire du logiciel.

Par courrier du 23 avril 2004, Monsieur W__________ a interjeté recours à son tour. Il conclut, sous suite de dépens, à ce qu’il soit dit et constaté qu’aucune responsabilité ne lui incombe s’agissant du non-paiement des cotisations paritaires au 31 décembre 2002 et qu’il ne doit donc pas le montant de 237'206 fr. 70.

Monsieur W__________ affirme n’avoir eu connaissance de la créance de la caisse qu’à la réception du courrier que cette dernière lui a adressé en date du 17 septembre 2002 et avoir alors expressément donné pour instructions à Monsieur C_________ de régler les charges sociales en priorité, au moyen des liquidités dont disposait alors Y_________ SA, dont il estime qu’elles étaient suffisantes pour régler la dette envers l’intimée. Constatant que ses instructions n’avaient pas été suivies, il a finalement donné sa démission en date du 28 novembre 2002 (démission confirmée par écrit le 5 décembre 2002).

Monsieur W__________ reproche à XE__________. de n’avoir jamais respecté ses engagements envers la société.

Il souligne que la vente du logiciel par XD_________ SA à la société XG_________ SA permettra d’obtenir la somme de 760'000 fr. et qu’il convient d’en tenir compte dans le calcul du dommage.

Monsieur W__________ ajoute n’avoir jamais agi en tant qu’organe de la société, contrairement aux autres administrateurs.

Enfin, il s’indigne du fait que l’intimée ait renoncé à faire valoir une prétention vis-à-vis de Messieurs B__________ alors qu’il considère celui-ci comme étant à l’origine du dommage.

Le même jour, Monsieur A__________ a également interjeté recours en concluant, préalablement, à la jonction de sa cause avec celle introduite par Monsieur W__________ et, principalement, à l'annulation de la décision de réparation, sous suite de frais et dépens.

Monsieur A__________ conteste avoir commis une faute, que ce soit intentionnellement ou par négligence grave, alléguant que l’administration de la société et lui-même ont tout entrepris pour assainir les finances.

Il explique que le marasme économique régnant dans le secteur bancaire a été à l’origine d’une diminution importante du chiffre d’affaires de la société et de la grave crise de liquidités que cette dernière a connu en 2002. Selon lui, la faillite de la société est imputable aux administrateurs de XE_________. SA, incapables de mettre en œuvre la convention du 14 janvier 2003. Le recourant souligne que si cette convention avait été respectée, la société aurait reçu suffisamment de liquidités pour désintéresser totalement l’intimée.

Il ajoute que, contrairement à ce que soutient cette dernière, la convention de janvier 2003 n’avait pas seulement pour objectif la sauvegarde de la société. Il en veut pour preuve le fait que XD_________ SA ait cédé la quasi-totalité de ses actifs et passifs à XE__________.

Enfin, le recourant rappelle qu’il a renoncé à ses indemnités d’administrateur en 2002.

Invitée à se déterminer, l’intimée, dans ses réponses du 25 mai 2004, a conclu au rejet des recours.

S’agissant de Monsieur C_________, l’intimée fait remarquer que ce dernier a occupé la fonction d’administrateur de 1994 à mars 2003 et que la convention de janvier 2003 - dont il se prévaut pour affirmer avoir pris toutes les dispositions nécessaires - est bien postérieure au retard pris dans le paiement des cotisations. Or, l’intéressé n’a pas apporté la preuve qu’il aurait donné des instruction relatives au paiement des cotisations.

S’agissant de Monsieur A__________, l’intimée fait remarquer que ce dernier a occupé la fonction d’administrateur de 1994 (recte : novembre 1996) jusqu’à la faillite et reprend par ailleurs la motivation développée dans la décision adressée à Monsieur C_________, ajoutant que l’intéressé n’a ni donné des instructions concernant le paiement des cotisations, ni surveillé les personnes en charge de l’aspect financier de la société comme le lui imposait son mandat d’administrateur.

S’agissant de Monsieur W__________, en revanche l’intimée a réduit ses prétentions à 187'347 fr., c'est-à-dire à concurrence des cotisations échues au moment de la démission de l’intéressé, le 31 octobre 2002. Pour le reste, l’intimée reproche à Monsieur W__________ de ne pas s’être assuré que les cotisations étaient effectivement payées et fait remarquer qu’il ne peut se dégager de sa responsabilité en alléguant qu’il faisait confiance aux personnes chargées de gérer les finances de la société, d’autant qu’il savait que la situation financière de la société était extrêmement préoccupante et qu’elle courait le risque d’être en cessation de paiement. Dès lors, l’intimée estime que les instructions données par le recourant ne l’ont été que trop tardivement, par souci d’éviter une procédure pénale, et qu’elles sont par conséquent insuffisantes. Elle ajoute que l’intéressé ne peut se prévaloir des mesures prises en vue de la restructuration de l’exploitation puisqu’il n’y a pas pris part.

Par ordonnance du 22 juin 2004, le Tribunal a ordonné la jonction sous le n°A/742/2004 des causes ouvertes suite aux trois recours susmentionnés en matière de cotisations AVS/AI/APG/AC.

Dans sa réplique du 30 juillet 2004, Monsieur W__________ a demandé la disjonction des causes, alléguant que la situation des trois recourants n’était pas du tout la même, que les faits étaient totalement distincts et qu’il n’y avait pas de cause juridique commune. Il a par ailleurs affirmé avoir attiré dès 2001 l’attention des organes dirigeants, en particulier Monsieur C_________, sur l’importance de régler en priorité les charges sociales, et les avoir interrogés à de nombreuses reprises afin de savoir si les cotisations sociales étaient payées.

Dans sa réplique du 31 août 2004, Monsieur A__________ allègue quant à lui avoir pris toutes les mesures nécessaires à sauvegarder les postes de travail et à encaisser des sommes susceptibles de permettre de rembourser l’intégralité des dettes sociales et ce, dès l’apparition des difficultés financières, c'est-à-dire dès juin 2002.

A cet égard, il explique que les premiers paiements reçus par XD_________ ont été affectés au remboursement du prêt que leur avait consenti la société XH_________, ceci afin de lever les cessions de créance qui garantissaient le prêt. Le recourant souligne être intervenu pour que le solde disponible ne serve qu’au paiement des cotisations.

Enfin, il rappelle qu’une somme de 760'000 fr. est encore consignée à l’Office des poursuites dans l’attente de l’acquisition du logiciel de XD_________ par XG_________ SA et que si la procédure de revendication aboutit, la société pourra s’acquitter intégralement de ses dettes envers l’intimée.

Dans sa duplique du 10 septembre 2004, l’intimée a fait valoir que la jonction des causes permettrait une meilleure instruction de l’ensemble des circonstances. Quant au fond, elle conteste que Monsieur W__________ ait rempli ses obligations en matière AVS, relevant que, lors des séances du conseil d’administration, il n’a ni évoqué l’obligation de payer les cotisations sociales, ni demandé la confirmation que ces cotisations étaient effectivement payées.

Le 25 octobre 2004, Monsieur C_________ a déclaré faire siens les arguments et conclusions de Monsieur A__________.

Dans son écriture du 19 novembre 2004, Monsieur W__________ a repris les arguments déjà développés dans ses écritures précédentes.

Le même jour, Monsieur A__________ a indiqué qu’il n’avait quant à lui pas d’observation supplémentaire à formuler suite à la prise de position de l’intimée.

Par écriture du 22 novembre 2004, l’intimée a relevé, s’agissant de Monsieur A__________, que les mesures prises par ce dernier pour maintenir les postes de travail n’avaient fait qu’augmenter le montant des cotisations dues. Elle a ajouté que les mesures relatives à l’encaissement des dettes auraient pu, en cas de succès, permettre de renflouer la société mais a fait remarquer que rien ne prouvait que la société aurait utilisé l’argent obtenu pour payer les cotisations sociales.

Le 17 décembre 2004, la caisse de compensation a produit provisoirement dans la faillite deux créances privilégiées en 2ème classe de 88’604 fr. 20 et 211'362 fr. 76, ainsi que deux créances à colloquer en 3ème classe, à hauteur de 5'841 fr. 65 et 35'843 fr. 95.

Le 9 mars 2005, l'Office des faillites a informé la caisse de compensation que l’état de collocation de la faillite était publié le jour même et que ses créances étaient admises à hauteur de 88’604 fr. 20 et 211'362 fr. 76 en 2ème classe et à hauteur de 5'841 fr. 65 et 35'843 fr. 95 en 3ème classe, étant précisé qu’aucun dividende n’était prévisible pour les créanciers chirographaires.

Par courrier du 17 janvier 2006, les parties, invoquant des pourparlers en cours, ont demandé au Tribunal de suspendre la procédure.

Par ordonnance du 19 janvier 2006, le Tribunal, après avoir admis sa compétence, a donc suspendu l’instance et réservé la suite de la procédure.

Le 24 février 2006, l'Office des faillites a adressé aux créanciers un courrier intitulé « consultation des créanciers et offre de cession des droits de la masse » expliquant qu’avant d’être déclarée en faillite, XD_________ SA était en litige avec XE__________. au sujet, d’une part, de la propriété d’un logiciel dénommé XI_________ (d’une valeur de 760'000 fr.) et, d’autre part, d’une créance de 400'000 fr. représentant des travaux et services prévus dans le cadre d’une convention de vente datée du 14 janvier 2003.

L’Office a informé les créanciers de la société que la revendication de propriété du logiciel avait finalement été écartée par la masse en faillite de XE_________. et qu’une procédure en contestation avait été interjetée par les revendiquants. Quant à la créance de 400'000 fr., elle avait été écartée et faisait l’objet d’une contestation de l’état de collocation de XE_________.

L’Office indiquait par ailleurs que Z__________ SA, la masse en faillite de XE__________. et celle de XD_________ SA avaient conclu en date du 17 janvier 2006 une convention. Il s’agissait pour les créanciers de XD_________ SA d’accepter le versement par XE__________. d’une somme de 50'000 fr. contre le retrait des actions en justice susmentionnées. Précisant que cet apport ne permettrait pas le versement d’un dividende aux créanciers des 2ème et 3ème classes, l’Office des faillites a invité les créanciers à faire connaître leur avis dans un délai de dix jours.

Le 16 janvier 2007, le Tribunal a demandé aux recourants de le renseigner sur l’état des pourparlers, ce à quoi il lui a été répondu, par courrier du 9 février 2007, qu’ils étaient toujours en cours. Par ordonnance du 13 février 2007, le Tribunal a donc prolongé la suspension de l’instruction de la cause et réservé la suite de la procédure.

Le 26 mars 2008, le Tribunal s’est à nouveau enquis du résultat des pourparlers entre les parties.

Le 8 avril 2008, la caisse de compensation a procédé à la production définitive dans la faillite d’une créance privilégiée en 2ème classe de 202'362 fr. 75 - correspondant au solde des cotisations AVS/AI/APG/AC au 19 janvier 2004, frais administratifs et de poursuites - et d’une créance de 34'843 fr. 95 à colloquer en 3ème classe, créance correspondant aux taxes de sommation et amendes ainsi qu’aux intérêts moratoires de 5% calculés jusqu’au jour de la faillite.

Par courriers séparés des 14 et 15 avril 2008, les recourants ont allégué devant le Tribunal que les discussions étaient toujours en cours et qu’elles étaient rendues difficiles par l’absence à la procédure de Monsieur B__________. Ils affirmaient s’efforcer de trouver une solution afin de faire une offre à l’intimée et sollicitaient le maintien de la suspension.

Le 29 avril 2008, l’Office des faillites a établi à l’intention de la caisse deux actes de défaut de biens de 202'362 fr. 75 et 34'843 fr. 95.

Par pli du 2 mai 2008, l’intimée a quant à elle sollicité la reprise de la procédure, expliquant au Tribunal qu’elle était sans nouvelles des recourants depuis février 2007 et qu’aucune discussion n’était plus en cours.

Selon inscription au RC du 16 mai 2008 et publication à la Feuille d’avis officielle (FOSC) du 28 mai 2008, XD_________ SA en liquidation a été radiée à la suite de la clôture de la procédure de faillite prononcée par jugement du Tribunal de première instance du 13 mai 2008.

Une audience de comparution personnelle a eu lieu le 12 juin 2008.

Au cours de cette audience, l’intimée a confirmé n’avoir rendu aucune décision à l’encontre de Monsieur B__________, expliquant qu’à l’époque, elle ignorait quelle était l’adresse de l’intéressé.

Monsieur A__________ a expliqué qu’une procédure civile avait abouti, dans le courant de l’année 2007, à l’octroi d’une somme dont il n’a pas précisé le montant, mais dont il a indiqué qu’elle permettait pas de désintéresser totalement l’intimée.

Il a expliqué qu’il tentait de créer un « pot commun » qui permettrait de désintéresser à la fois l’AVS et l’impôt à la source mais que Monsieur B__________ s’opposait tant à la libération des fonds qu’à une participation.

A l’issue de l’audience, il a été convenu que les administrateurs communiqueraient l’adresse de Monsieur B__________ à l’intimée afin que celle-ci puisse lui notifier une décision.

Par décisions du 18 juin 2008, la caisse de compensation a réclamé à Monsieur B__________, pris solidairement avec Messieurs C_________, W__________ et A__________, le paiement de la somme de 237'206 fr. 70 en réparation du dommage correspondant aux cotisations paritaires AVS/AI/APG/AC impayées au 31 décembre 2002.

Le 15 juillet 2008, Monsieur B__________ s’est opposé à ces décisions en invoquant tant la prescription de la prétention en dédommagement que son absence de responsabilité.

Monsieur B__________ fait valoir qu’il a démissionné de son poste en décembre 2002 en raison d’importantes divergences l’opposant à Monsieur C_________ s’agissant des restructurations à faire subir à la société. Selon lui, Monsieur C_________, administrateur président et directeur général de la société, était seul responsable du paiement des salaires et des charges sociales durant la période litigieuse, soit du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002.

Il explique qu’en janvier 2003, en association avec Monsieur  E_________, il a décidé de racheter une partie de l’activité de X__________ SA par le biais de la société XE_________. SA et que cette opération avait pour objectif d’assainir Y__________. SA et de refinancer le développement international de la société. Il affirme que, fin janvier 2003, la société disposait d’un avoir de 1'689'564 fr. dont un montant de 1'090'000 en espèces sur un compte de l’Etude BUDIN & ASSOCIES, suffisant pour désintéresser les créanciers sociaux et s’étonne dès lors de l’existence d’un arriéré de cotisations dues.

Par décision sur opposition du 12 août 2008, la caisse de compensation a confirmé sa décision du 15 juillet 2008. Elle a considéré que son droit à la réparation du dommage n’était pas prescrit puisque la faillite avait été prononcée moins de cinq ans avant la décision en réparation du dommage. Quant à la responsabilité de Monsieur B__________, la caisse a jugé qu’elle était engagée dans la mesure où il ne pouvait nier avoir été au courant de la situation - une copie du courrier du 17 septembre 2002 menaçant les administrateurs du dépôt d’une plainte pénale lui ayant été adressée - et où il apparaissait manifeste que les mesures prises par la société visaient sa propre sauvegarde et non à éviter un dommage à la caisse de compensation.

Par écriture du 15 septembre 2008, Monsieur B__________ a interjeté recours auprès du Tribunal de céans en concluant, sous suite de dépens, à ce qu’il soit dit et constaté que les prétentions en réparation de dommage sont prescrites à son égard et qu’il n’est pas redevable du montant qui lui est réclamé, subsidiairement, qu’il n’encourt aucune responsabilité dans le non-paiement des cotisations paritaires au 31 décembre 2002.

Monsieur B__________ soutient que l’intimée a eu connaissance de son dommage au plus tard le 9 mars 2005 - date du dépôt de l’état de collocation dans la faillite de XD_________ SA et que dès lors qu’elle n’a fait valoir ses prétentions contre lui qu’en juin 2008, sa créance à son encontre est prescrite.

Il conteste quoi qu’il en soit toute responsabilité en reprenant les arguments déjà développés dans son opposition. Il argue au surplus que le paiement des charges sociales incombait à Monsieur C_________, dont il affirme qu’il a toujours assuré aux administrateurs que la société respectait les règles en matière de cotisations sociales. Par ailleurs, le recourant souligne que lui-même ne disposait pas de la signature et allègue que s’il est entré au conseil d’administration, c’est dans le seul but de développer les affaires de la société et qu’il n’a jamais été chargé personnellement du paiement des salaires et charges sociales.

Dans sa réponse du 14 octobre 2008, l’intimée a conclu au rejet du recours de Monsieur B__________ et à la confirmation de sa décision à l’encontre de ce dernier. Elle a toutefois réduit ses prétentions aux montants dus au 31 octobre 2002, soit 187'347 fr. L’intimée a rappelé la sévérité de la jurisprudence à l’encontre de l’administrateur qui allègue avoir été exclu de la gestion de la société et qui s’en est accommodé.

Par ordonnance du 23 octobre 2008, le Tribunal a ordonné la jonction des procédures en matière d’AF, d’une part, de la procédure ouverte suite au recours interjeté par Monsieur B__________ s’agissant des cotisations AVS/AI/APG/AC, d’autre part, à la cause n°A/742/2004.

Une nouvelle audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 11 décembre 2008 à l’issue de laquelle un délai a été accordé aux parties.

Par écriture du 19 février 2009, Monsieur W__________ a repris les arguments déjà développés précédemment.

Il allègue que Monsieur C_________ assurait la gestion effective et quotidienne de la société, qu’il disposait d’un droit de signature individuel sur les comptes et qu’il était seul responsable du paiement des salaires et du versement des cotisations sociales.

Monsieur W__________ assure n’avoir eu connaissance des problèmes de trésorerie de la société qu’à l’occasion du conseil du 22 mai 2002 et allègue que Monsieur C_________ leur a alors expliqué que le déficit de la société pouvait être réduit par l’activation d’un logiciel, propriété de la société, que cette dernière disposait de factures d’honoraires à hauteur de 2'050'000 fr. et que le carnet de commandes était bien rempli. Il avait ajouté que des pourparlers étaient d’ores et déjà en cours en vue de céder la société. Selon Monsieur W__________, à aucun moment Monsieur C_________ n’a attiré l’attention des administrateurs sur le non-paiement des cotisations sociales.

En août 2002, Monsieur C_________ a indiqué que les salaires du mois avaient été payés, sans autre précision, « laissant ainsi entendre (…) que les charges y relatives (…) étaient payées ».

Puis, en date du 23 octobre 2002, Monsieur C_________ leur a soumis une proposition d’acquisition des actifs formulée par XB_________ SA, de sorte que l’arrivée de liquidités semblait imminente.

Selon Monsieur W__________, c’est à son insu qu’ont été menés les pourparlers en vue de la restructuration et du refinancement de l’entreprise, malgré de réitérées demandes d’informations de sa part, raison pour laquelle il a finalement donné sa démission. Il déplore que Monsieur C_________ ait choisi de transgresser ses instructions et de privilégier certains créanciers.

Par écriture du 20 février 2009, Monsieur A__________ s’est exprimé sur la prescription invoquée par Monsieur B__________.

Par écriture du même jour, Monsieur C_________ a fait de même.

Quant au fond, Monsieur C_________ allègue que la démission de Monsieur B__________ du poste d’administrateur de Y__________. SA était motivée par la reprise de XE__________. SA et non par le fait que des informations financières lui aurait été cachées. Selon le recourant, Monsieur B__________, parfaitement informé de la situation financière catastrophique de Y__________. SA, aurait refusé plusieurs offres d’achat de Y_________. SA - offres formulées par XJ_________ SA et XB_________ SA - à seule fin d’en prendre lui-même le contrôle. Par ailleurs, le recourant affirme que, malgré sa démission formelle le 9 décembre 2002, Monsieur C_________ a continué, de fait, à gérer la société, notamment en instruisant Madame G_________, chef comptable, des paiements à effectuer.

Dans son écriture du même jour, Monsieur B__________ a repris les arguments déjà développés dans son recours et allégué que l’échec de l’exécution de la convention conclue en janvier 2003 incombait uniquement à Monsieur C_________.

Il a au surplus requis l’appel en cause de Monsieur D_________. ainsi que l’apport à la procédure du contrat de prêt passé entre la société et XH_________, de l’accord de celle-ci à un remboursement en capital sans intérêt, de tous documents propres à déterminer l’existence de XH_________, son actionnariat, ses organes, ses bénéficiaires économiques ainsi que la provenance des fonds prêtés.

Monsieur B__________ souligne qu’en août 2002, il a personnellement avancé un montant de 200'000 fr. destiné à payer l’intégralité des salaires du mois de juillet 2002, le temps que la société trouve un repreneur.

Il allègue que, lors de la reprise de certains actifs et passifs de la société par XE_________., le prix de la transaction a été évalué sur la base des devis déposés pour 2003 ainsi que des services récurrents (mise à niveau des logiciels) et de la maintenance des logiciels en 2003, sous-évalués de 45% par prudence, et que le prix de la transaction avait été augmenté de 500'000 fr. pour procurer à la société les liquidités nécessaires afin de régler l’ensemble des dettes sociales. La société aurait cependant préféré privilégier le remboursement d’un prêt en faveur de XH_________ (société off-shore domiciliée aux British Virgin Islands), dont il suggère que les bénéficiaires économiques pourraient être proches des membres du conseil d’administration.

Monsieur B__________ estime que Monsieur C_________ est responsable de la faillite de XE__________. SA. Il lui reproche d’avoir dolosivement gonflé le chiffre d’affaires de la société en présentant comme des devis ce qui n’était en réalité qu’une liste de prospections et en surévaluant les services récurrents.

Le 6 mars 2009, les recourants ont sollicité l’audition de plusieurs témoins.

Le 17 septembre 2009, le Tribunal a rendu un arrêt incident (ATAS/1150/2009) aux termes duquel il a déclaré les recours recevables, s’est déclaré compétent, a constaté que la créance en réparation du dommage de la caisse n’était prescrite envers aucun des recourants, a rejeté la requête d’appel en cause de Monsieur D_________ et réservé la suite de la procédure. Cet arrêt n’a fait l’objet d’aucun recours.

Entendue à titre de témoin le 25 mars 2010, Madame G_________ a expliqué avoir travaillé pour la société Y_________.. de 1994 à 1998 puis de 2000 à mars 2003. Exerçant à titre de comptable, le témoin a dit se souvenir avoir travaillé durant les deux derniers mois avec Monsieur B__________. Elle a confirmé la présence de Messieurs B__________ et E_________ dans les locaux de la société à la fin de l’année 2002, expliquant qu’ils venaient chercher des renseignements en vue d’une éventuelle reprise.

Selon le témoin, la société facturait en fin d’année les redevances pour l’exercice suivant, ce qui représentait un montant de l’ordre de 1,3 à 1,4 million, dû au 1er janvier de l’année suivante ; en règle générale, plus de la moitié était encaissée avant la fin du mois de février. Les clients, constitués principalement d’établissements bancaires, étaient de bons payeurs.

Le témoin, chargé des décomptes AVS, a confirmé avoir été au courant de la situation, tout comme Monsieur C_________ et les repreneurs à l’intention desquels elle a établi personnellement plusieurs tableaux de trésorerie en vue d’un éventuel rachat, dans lesquels étaient mentionnées toutes les dettes de la société.

Le témoin a affirmé tenir ses instructions de Monsieur C_________, qui lui avait ordonné de donner la priorité au paiement des salaires, étant précisé que, durant le dernier trimestre, les liquidités y suffisaient tout juste.

Confronté au courriel produit par Monsieur C_________ (pce 12), le témoin a admis qu’il semblait en ressortir que Monsieur B__________ lui avait également donné des instructions mais a affirmé ne pas en avoir gardé le souvenir et avoir dû, quoi qu’il soit, demandé la permission à Monsieur C_________.

Monsieur H_________, entendu le même jour, a travaillé pour la société de juin à décembre 2002 en tant que responsable administratif et financier. Il était chargé des ressources humaines et de la comptabilité.

Le témoin a dit avoir constaté à son arrivée l’existence d’importants arriérés de cotisations sociales et de prévoyance professionnelle ; ces montants s’élevaient, à son souvenir, à 500'000 - 600'000 fr. et le retard remontait au début de l’année.

Le témoin a confirmé avoir préparé à l’intention du conseil d’administration, au cours du mois de juillet 2002 et au mois d’août de la même année, un tableau représentant la situation de la trésorerie, comportant les éléments réels et prévisionnels, puis avoir ensuite continué à communiquer régulièrement des informations.

La tâche du témoin consistait à faire le point de la situation et à évaluer les possibilités de redresser la barre, par exemple en trouvant des partenaires ou des investisseurs. Il a pour ce faire mis sur pied un « business plan » avec l’aide de Monsieur C_________.

Le témoin a par ailleurs confirmé que les revenus de la société provenaient d’une part de la vente de logiciels mais d’autre part et surtout des contrats de maintenance.

Selon le témoin, Monsieur E_________ a procédé à un audit ; il lui a fourni notamment la liste des factures à encaisser. Selon Monsieur H_________, Messieurs B__________ et M. E_________ étaient donc parfaitement au courant de la situation au niveau des charges sociales.

Le témoin a confirmé qu’au conseil d’administration de juillet 2002, Monsieur C_________ avait proposé le dépôt de bilan.

Les factures de maintenance qui ont été émises à la fin de l’année 2002 portaient sur un montant avoisinant 2 à 2,5 millions. Selon le témoin, les revenus ainsi générés auraient dû permettre de régler l’arriéré des charges sociales.

S’agissant des priorités à accorder pour le paiement des créanciers, le témoin a confirmé que la comptable demandait chaque mois des instructions à Monsieur C_________. Les priorités étaient accordées au cas par cas en fonction de la trésorerie. La priorité était donnée aux salaires.

Le dépôt de bilan ayant été refusé par le conseil d’administration, des fonds ont été demandés aux administrateurs et des partenaires extérieurs ont été recherchés. Selon le témoin, trois à quatre sociétés se sont montrées intéressées par une reprise éventuelle, notamment une société française dont les actionnaires ont finalement renoncé à poursuivre les tractations.

Entendu à son tour, Monsieur I_________ a expliqué avoir travaillé en qualité de responsable du développement et de la recherche pour la société depuis 1996 puis pour XE__________. SA.

Le témoin a dit avoir pu constater dès le début de l’été 2002 la présence de Monsieur E_________ dans la société. Son rôle était de l’auditer en vue d’un éventuel rachat. Il a également attesté de la présence de Monsieur B__________, à un comité de direction.

Selon le témoin, une réunion du personnel s’est tenue fin 2002 au cours de laquelle Messieurs B__________ et E_________ ont annoncé le rachat de la société.

Monsieur J_________ a expliqué avoir été mandataire de la société BVI XH_________, laquelle avait consenti à la société un prêt contre certaines garanties. Lorsque le prêt a été remboursé à XH_________, lesdites garanties ont été remises. Le témoin a précisé que les avoirs de XH_________ étaient considérables (supérieurs à 10 millions de dollars) et que ni Monsieur A__________ ni Monsieur C_________ n’étaient bénéficiaires ou administrateurs de cette société.

Le témoin est intervenu en 2002 en tant qu’intermédiaire financier pour le compte de XH_________. Il n’a procédé à l’audit de la société car il s’agissait d’un prêt relais de courte durée ; dès lors, ce n’était pas tant la comptabilité qui importait que les garanties fournies. Or, la société émettait à la fin de l’année des factures importantes à l’encontre d’établissements bancaires et des garanties avaient été fournies sous forme de cessions de créances.

Monsieur K_________, ancien employé de la société XK_________ (organe de révision de Y_________. SA en 2002 et 2003), a également été entendu à titre de témoin. Il a précisé qu’avant son employeur, c’était la société XL_________ dont l’administrateur était Monsieur J_________, qui était l’organe de révision de la société.

Monsieur E_________, entendu à son tour, a expliqué qu’il participait à concurrence de 50% avec Monsieur B__________ à la société XE__________. Le témoin a indiqué avoir pris contact avec la société Y_________. pour le compte d’une société établie au Luxembourg ; les négociations n’ayant pas abouti, il a ensuite commencé une procédure d’évaluation (due diligence) pour le compte de XE__________. SA durant l’automne 2002.

Les actifs qui ont été pris en considération étaient de trois types : un logiciel de gestion, un portefeuille de clients pour des contrats de maintenance et un portefeuille d’affaires en cours. Dans les passifs repris, figuraient les délais de congé des employés, qui ont été pris en charge par XE_________. Le prix de vente a été majoré de 500'000 fr. pour permettre à Y_________. de s’acquitter de ses charges sociales.

Il est cependant rapidement apparu que deux des principaux actifs, à savoir les affaires en cours et les prestations de services ad hoc, avaient été largement surévalués. Selon le témoin, cette évaluation était basée sur le business plan fourni par Monsieur C_________. 

Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 7 octobre 2010.

Monsieur C_________ a expliqué avoir discuté avec Monsieur W__________, à la fin de l'année 2002, de la manière dont devaient être affectées les sommes reçues. Il a alors été décidé de donner la priorité à certains créanciers mais seulement parce que la société comptait sur les apports qui auraient dû lui parvenir par la suite en raison des contrats de maintenance et qui ne lui sont finalement pas parvenus car, à compter du mois d'octobre 2002, tous les montants crédités sur les comptes de la société étaient systématiquement immédiatement transmis à XE_________. 

Monsieur W__________  a quant à lui réaffirmé avoir insisté pour que les cotisations sociales soient payées en priorité. Il s’est étonné que les montants reçus de la société XH_________ ne soient jamais apparus sur les comptes présentés et a fait remarquer que les comptables en avaient d’ailleurs ignoré l'existence.

S’agissant du prêt accordé par XH_________, Monsieur C_________ a expliqué que son remboursement était impératif pour permettre à la société de pouvoir encaisser le résultat des contrats de maintenance qui avaient été donnés en nantissement.

Monsieur A__________ a affirmé qu’en février 2002, les administrateurs ignoraient la situation dans laquelle se trouvait la société. C'est en mai 2002 qu'il est apparu qu'un arriéré important de cotisations sociales existait. À compter de ce moment, le conseil, qui avait pour habitude de se réunir trois à quatre fois par année seulement, a multiplié les réunions afin d'essayer de trouver une solution. C'est ainsi six réunions qui se sont tenues entre mai et juillet 2002.

Le 23 mai, l’offre de rachat de XJ_________ a été examinée. Pour payer les salaires de juin, Monsieur B__________ et Monsieur A__________ ont consenti une avance de 200'000 fr., respectivement de 100'000 fr. Finalement, XJ_________ n’a pas donné suite.

Selon Monsieur A__________ , Monsieur C_________ s’est affolé et a renoncé à une créance envers la société. C'est alors que Messieurs E_________ et B__________ se sont proposés de racheter la société. Les salaires de septembre ont été payés grâce à l'avance de XH_________. En octobre, une nouvelle avance a été nécessaire de la part de XH_________. Il en a été de même en novembre. En décembre, cela n'a pas été nécessaire car les contrats de maintenance venaient à échéance. En janvier 2003, la convention passée avec XE_________. SA a permis un apport de liquidités de 1'325'000 fr., dont 760'000 fr. ont été affectés au remboursement de XH_________, afin de permettre le levée du nantissement sur les contrats de maintenance et la signature du contrat de vente. 392'008 fr ont été affectés au paiement de différentes institutions sociales et 110'000 fr. au paiement des salaires de janvier et au règlement de certains engagements que la société avait encore envers ses salariés. Le solde, d'environ 20'000 fr., a été versé pour partie à la REGIE XM_________ et pour partie à la filiale de Singapour. La société a accepté d’accorder à XE__________. le paiement différé de 970'000 fr. - somme qu’il était prévu d’affecter au paiement des cotisations sociales. Par ailleurs 400'000 fr. ont été encaissés par XE__________. au nom de XD_________. 300'000 fr. ont été récupérés dans le cadre de la faillite de XE__________., qui ont été affectés au paiement de l'impôt à la source afin de mettre fin à une procédure pénale. 

Monsieur B__________ a confirmé avoir avancé la somme de 200'000 fr. à la société et avoir renoncé à une créance de plus de 200'000 fr. envers elle. Il a confirmé qu’en mai 2002, instruction avait été donnée à Monsieur C_________ de donner une priorité absolue au paiement des cotisations sociales, instruction qui n’a pas été protocolée au procès-verbal, mais qui a fait l'objet d'un ou deux rappels écrits de la part de Monsieur W__________.

A l’issue de cette audience, le Tribunal a fixé aux parties un délai pour produire leurs dernières pièces et un second pour lui faire parvenir leurs dernières écritures après enquêtes.

Le 8 novembre 2010, l’intimée a fait parvenir au Tribunal l’ensemble des écritures du compte paritaire AVS tenu pour la société de janvier 1999 à octobre 2003. Il en ressort notamment que :

c’est à compter de 2001 qu’un retard dans le versement des cotisations sociales est apparu ;

que fin avril 2002, le montant dû à l’intimée s’élevait approximativement à 300'000 fr. ;

que fin décembre 2002, ce montant avait été porté à près de 500'000 fr. (malgré un versement de 73'000 fr. intervenu en octobre 2002 et un autre de 100'000 fr. en novembre 2002) ;

qu’un versement d’environ 366'000 fr. est intervenu en février 2003.

Par écriture du 10 décembre 2010, Monsieur C_________ a persisté dans ses conclusions.

En substance, le recourant soutient qu’il avait toutes les raisons de penser que la société pourrait s’acquitter des cotisations dues vu la convention passée avec XE__________. SA. Il souligne que sa proposition de concordat a été purement et simplement écartée par les autres administrateurs, tout comme celle de déposer le bilan. Il rappelle qu’il a personnellement abandonné une créance de près de 950'000 fr. envers la société et fait valoir que pour pouvoir céder les actifs de cette dernière - et obtenir ainsi les fonds nécessaires à désintéresser les créanciers - il n’y avait d’autre choix que de maintenir la société en vie. Le recourant reproche à Monsieur B__________ d’avoir voulu se rembourser la perte subie en tant qu’actionnaire par le biais de XE__________. SA dont il soutient que si elle avait rempli ses obligations, elle aurait permis à la société de désintéresser totalement ses créanciers. Enfin, il fait remarquer qu’entre janvier 2002 et février 2003, 602'477 fr. ont malgré tout été versés à l’intimée.

Par écriture du 13 décembre 2010, Monsieur B__________ a persisté dans ses conclusions.

Outre les arguments déjà développés dans ses précédentes écritures, le recourant affirme qu’en janvier 2003, la société disposait des liquidités nécessaires pour régler les montants dus.

Dans ses écritures du 13 décembre 2010, Monsieur A__________ a également persisté dans ses conclusions.

Il précise avoir renoncé à toute indemnité en 2002, ajoute que plusieurs actionnaires ont abandonné leurs créances envers la société pour un montant total de 1'442'339 fr., souligne avoir personnellement consenti un apport financier de 100'000 fr. pour permettre le paiement des salaires de juillet 2002, et avoir obtenu de la société XH_________ une avance de trésorerie - en échange du nantissement des contrats de maintenance de la société - à hauteur de 760’0000 fr. (un versement de 320'000 fr. le 30 septembre 2002, un autre de 180'000 fr. le 1er novembre 2002 et un troisième de 260'000 fr. le 5 décembre 2002). Il explique que la société comptait récupérer une importante somme d’argent grâce aux contrats de maintenance en cours (entre 2 et 2,5 millions de francs). Par ailleurs, la convention finalement conclue en janvier 2003 aurait dû permettre d’encaisser par cession d’actifs des sommes suffisantes pour rembourser les dettes de la société. Afin de faciliter la transaction, la société a autorisé XE__________. à différer son paiement, mais la faillite de cette dernière a été prononcée dans l’intervalle, ce qui a entraîné la chute de XD_________.

Monsieur A__________ en tire la conclusion que XE__________. est seule responsable de la faillite de XD_________. Cette dernière ayant cédé ses actifs et passifs à XE__________., les seules entrées de liquidités devaient venir de cette dernière.

En définitive, le recourant soutient que lui et les autres administrateurs ont tout fait pour assainir les finances de la société et qu’ils avaient des raisons sérieuses et objectives de penser pouvoir s’acquitter des dettes sociales une fois les liquidités promises par XE__________. obtenues.

Dans ses écritures du 13 décembre 2010, Monsieur W__________ a également persisté dans ses conclusions.

Il allègue qu’avant le 22 mai 2002, il ne disposait d’aucun indice pouvant lui donner à penser que la société se trouvait dans une situations financière critique et qu’elle s’endettait auprès des institutions sociales et ce, alors même que la crise de liquidités remontait au mois d’octobre 2001 déjà. La réalité des faits lui aurait ainsi été dissimulée de sorte que ce n’est qu’en septembre 2002 qu’il a découvert le montant exact de l’arriéré de cotisations. Il reproche à Monsieur C_________ d’avoir violé ses instructions répétées visant à obtenir le désintéressement des créanciers sociaux et d’avoir affecté le montant que lui a versé XE________ SA à d’autres paiements.

L’intimée, quant à elle, a persisté dans ses conclusions, relevant qu’il avait été admis que le paiement des salaires et le règlement d’autres créanciers avaient été privilégiés.

S’agissant cependant de Messieurs W__________ et B__________, l’intimée admet que le dommage peut être arrêté au 31 octobre 2002 et qu’il s’établit pour eux à 187'347 fr. alors qu’il s’élève à 237'206 fr. 70 s’agissant de Messieurs C_________ et A__________.

Un dernier délai a ensuite été octroyé aux parties pour s’exprimer une dernière fois après avoir pris connaissance de l’intégralité des pièces versées à la procédure.

Seul Monsieur A__________ s’est exprimé, en date du 25 février 2011, en contestant le fait que le montant du dommage réclamé à Messieurs W__________ et B__________ puisse être arrêté au 31 octobre 2002. Il fait remarquer que les intéressés ont quitté la société le 5 décembre 2002, respectivement le 9 décembre 2002 et que leur inscription au RC n’a été radiée qu’en date du 30 janvier 2003.

Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941 en vigueur jusqu’au 31 décembre 2010 (aLOJ; RS E 2 05), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaissait, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS; RS 831.10).

Depuis le 1er janvier 2011, cette compétence revient à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice, laquelle a repris les procédures pendantes devant le Tribunal cantonal des assurances sociales (art. 143 al. 6 de la LOJ du 26 septembre 2010).

La compétence de la Cour de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

La LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant de nombreuses modifications dans le domaine de l’assurance-vieillesse, notamment en ce qui concerne l’art. 52 LAVS. Désormais, la responsabilité de l’employeur est réglée de manière plus détaillée qu’auparavant et les art. 81 et 82 du règlement du 31 octobre 1947 sur l'assurance vieillesse et survivants (RAVS; RS 831.101) ont été abrogés.

La procédure applicable auparavant (décision administrative suivie, en cas d'opposition, d'une action de la caisse en réparation du dommage [ancien art. 81 RAVS]) a été modifiée (décision puis décision sur opposition de la caisse de compensation, suivies d’un recours de droit administratif  [art. 52 al. 2 LAVS, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2003, et 56 LPGA]). En l’occurrence, c’est la nouvelle procédure qui s’applique, dès lors que la LPGA était en vigueur au moment où la caisse a rendu sa décision en réparation du dommage (cf. ATF 130 V 1).

Les questions de la recevabilité des recours et de la prescription ayant déjà été examinées par le Tribunal cantonal des assurances sociales dans son arrêt incident du 17 septembre 2009 (ATAS 1150/2009), il n’y a pas lieu d’y revenir ici.

Il convient encore de relever que la jonction des causes ouvertes en matière de contributions AF à celles concernant les cotisations AVS, avait été prononcée pour les besoins de l’instruction, le complexe de faits étant le même. Il importe à présent de disjoindre la cause 745/2004 (AF) de la cause 742/2004 (AVS) puisque les voies de droit ouvertes contre l’arrêt de la Cour de céans diffèrent. La cause 745/2004 sera suspendue en application de l’art. 14 LPA dans l’attente de l’entrée en force du présent jugement, lequel se prononcera uniquement sur la responsabilité des recourants eu égard au dommage subi par l’intimée du fait du non-paiement des cotisations AVS.

L'objet du litige porte sur la responsabilité des recourants quant au dommage subi par l’intimée en raison du défaut de paiement des cotisations sociales par la société faillie pour les années 2001 et 2002.

En vertu de l'art. 52 LAVS, l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à la caisse de compensation, est tenu à réparation.

Les prescriptions que doit respecter l'employeur sont tout d'abord celles de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants et de ses dispositions d'exécution, notamment celles concernant l'obligation de déduire, à chaque paiement de salaire, la cotisation du salarié, puis de la verser à la caisse de compensation en même temps que sa propre cotisation, ainsi que l'obligation de remettre périodiquement à la caisse les pièces comptables concernant les salaires versés aux employés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions (RCC 1985 p. 607 consid. 5; RCC 1985 p. 646 consid. 3a).

L'obligation de percevoir les cotisations et de régler les comptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. Celui qui néglige de l'accomplir enfreint les prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS et doit, par conséquent, réparer la totalité du dommage ainsi occasionné (VSI 1993 p. 83 ss consid. 2a; ATF 111 V 173 consid. 2 = RCC 1985 p. 649; ATF 108 V 186 consid. 1a; ATF 108 V 192 consid. 2a = RCC 1983 p. 100; RCC 1985 p. 646 consid. 3a).

a) Le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 195 consid. 2.2, 126 V 444 consid. 3a, 121 III 384 consid. 3bb, 388 consid. 3a). Il en va notamment ainsi lorsque la caisse de compensation, dans la procédure de poursuite par voie de saisie engagée contre l’employeur, a subi une perte. L’acte de défaut de biens selon l’art. 115 al. 1 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP; RS 281.1), en corrélation avec l’art. 149 LP, qui fixe le dommage sur les plans qualitatif et quantitatif, révèle que l’employeur ne s’est pas acquitté de son obligation de payer des cotisations et qu’il ne peut par conséquent pas non plus remplir son obligation de réparer le dommage conformément à l’art. 52 LAVS. A partir du moment où un tel acte de défaut de biens après saisie est délivré, plus rien n’empêche donc d’engager des poursuites contre les organes responsables à titre subsidiaire. A ce moment-là, en effet, la caisse de compensation a également connaissance du dommage (RCC 1988 p. 137 consid. 3c ; RCC 1988 p. 323 consid. 3b). En effet, par moment de la « connaissance du dommage », il faut entendre, en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 128 V 17 consid. 2a et ATF 121 III 388 consid. 3b ainsi que les références).

Il convient cependant de souligner que cette jurisprudence ne s’applique qu’en présence d’un acte de défaut de biens définitif selon l’art. 115 al. 1 LP, en corrélation avec l’art. 149 LP. En effet, dans la procédure de saisie, on ne peut admettre qu’un dommage est survenu parce que le montant dû ne peut plus être recouvré pour des raisons de fait que s’il appert qu’il n’existe aucun bien saisissable. En revanche, on ne peut parler de la survenance ou de la connaissance d’un dommage si c’est uniquement sur la base de l’estimation du fonctionnaire de l’office des poursuites que les biens saisissables ont été considérés comme insuffisant - biens pouvant toutefois en principe être réalisés - et qu’on ne peut par conséquent admettre que l’irrécouvrabilité soit totale. Du point de vue du droit des cotisations, l’acte de défaut de biens provisoire au sens de l’art. 115 al. 2 LP habilite et oblige la caisse de compensation à déposer une demande de réquisition de vente et à en attendre le résultat. Dès lors, la remise à la caisse d’un tel acte de défaut de biens après saisie ne coïncide en règle générale pas avec le commencement du délai de prescription (RCC 1988 p. 323s. consid. 3c).

b) En l'espèce, les actes de défaut de biens qui ont été délivrés à l’intimée en date du 5 septembre 2003 ont été établis sur la base de l’art. 115 al. 1 et 149 LP et précisaient d’ailleurs expressément que la société débitrice n’avait plus ni activité lucrative, ni employés, ni locaux, ni comptes bancaires ou postaux, ni biens saisissables. La survenance et la connaissance du dommage remontent donc au 5 septembre 2003, étant précisé par ailleurs que la connaissance d’un dommage partiel est déjà suffisante (VSI 1996 p. 169ss consid. 3c/bb).

En l’occurrence, force est de constater que l’existence d’un dommage est établie puisque la faillite de la société a été clôturée par jugement du 13 mai 2008 et sans que l’intimée n’obtienne plus que les actes de défaut de biens mentionnés supra.

Le montant des cotisations dues n’est par ailleurs pas contesté.

Si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom.

Selon la jurisprudence, les personnes qui sont - légalement ou formellement - organes d'une personne morale entrent en principe toujours en considération en tant que responsables subsidiaires aux conditions de l'art. 52 LAVS. Le Tribunal fédéral a ainsi reconnu la responsabilité non seulement des membres du conseil d'administration, mais également celle de l'organe de révision d'une société anonyme, du directeur d'une société anonyme disposant du droit de signature individuelle, du gérant d'une société à responsabilité limitée ainsi que du président, du directeur financier ou du gérant d'une association sportive (ATF du 15 septembre 2004, H 34/04, consid. 5.3.1 et les références).

Dans le cas d'une société anonyme, la notion d'organe responsable selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui ressort de l'art. 754 al. 1 du Code des obligations (CO; RS 220).

En l'espèce, il ressort de l'extrait du RC que tous les recourant ont été administrateurs de la société au moment des faits. Il est ainsi indéniable que tous avaient la qualité d'organes de la société faillie. Le fait que Monsieur B__________ n’ait pas disposé de la signature n’y change rien puisqu’il n’en était pas moins désigné par le RC comme organe formel, donc réputé chargé de l’administration et tenu par un devoir de surveillance (cura in custodiendo) à l'endroit de l'activité des autres organes de fait ou de droit - contrairement à l’organe de fait qui n’est, lui, appelé à assumer une responsabilité que pour les domaines dans lesquels il a effectivement déployé une activité (FORSTMOSER, Die aktienrechtliche Verantwortlichkeit, 2ème éd., p. 216 n° 687).

Encore faut-il examiner si les recourants se sont rendus coupables d'une violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions régissant l'AVS et s’il existe un lien de causalité adéquate entre le manquement qui leur est imputable et le préjudice subi. En effet, il n’y a pas obligation de réparer le dommage si des circonstances faisant apparaître comme justifié le comportement de l'employeur ou excluant qu'il ait commis une faute intentionnellement ou par négligence existent. Il est ainsi concevable qu'un employeur causant un dommage à une caisse de compensation en violant intentionnellement les prescriptions de l'AVS ne soit néanmoins pas tenu de le réparer, si des circonstances spéciales permettent de conclure que la non-observation desdites prescriptions était permise ou ne représentait pas une faute (RCC 1985 p. 603 consid. 2 et réf. citées).

Celui qui appartient au conseil d’administration d’une société et qui ne veille pas au versement des cotisations courantes et à l’acquittement des cotisations arriérées est réputé manquer à ses devoirs (ATF du 30 novembre 2004, H 96/03, consid. 7.3.1, publié in SJ 2005 I p. 272).

La négligence grave mentionnée à l’art. 52 al. 1er LAVS est admise très largement par la jurisprudence. Il y a négligence grave lorsque l'employeur ne se conforme pas à ce qui peut être raisonnablement exigé de toute personne capable de discernement dans une situation identique et dans les même circonstances. La mesure de ce que l'on est en droit d'exiger à cet égard donc être évaluée d'après ce que l'on peut ordinairement attendre, en matière de comptabilité, d'un employeur de la même catégorie que l'intéressé (RCC 1988 p. 634 consid. 5a; ATF 112 V 159 consid. 4 = RCC 1987 p. 217; RCC 1985 p. 51 consid. 2a; ATF 108 V 202 consid. 3a = RCC 1983 p. 106; RCC 1983 p. 377 ss).

Dans le cas d’une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l’attention que la société doit accorder, en tant qu’employeur, au respect des prescriptions de droit public sur le paiement des cotisations d’assurances sociales. Les mêmes exigences s’imposent également lorsqu’il s’agit d’apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l’employeur (arrêt du 4 mai 2006, 4C.31/2006, consid. 4.6).

Selon les dispositions du code des obligations, l'administration est tenue en particulier de surveiller les personnes chargées de la gestion et de se renseigner régulièrement sur la marche des affaires. Elle doit s'acquitter de cette obligation avec "toute la diligence nécessaire", en tenant compte des circonstances spéciales du cas particulier. Cela implique notamment, pour le conseil d'administration, l'obligation de lire d'un œil critique les rapports qui lui sont soumis, de demander au besoin des renseignements complémentaires et d'intervenir lorsque des erreurs ou des irrégularités ont été constatées. Le seul fait de méconnaître ses devoirs de membre d'un conseil d'administration représente une grave violation du devoir de diligence (Revue à l'attention des caisses de compensation [RCC] 1992 consid. 7b p. 268s). Il y a ainsi négligence grave lorsque l'administrateur n'assume pas son mandat dans les faits puisque, ce faisant, elle n'exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur tout en sachant qu'elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195, consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l'angle de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 1, consid. 5b).

On ajoutera enfin que selon la jurisprudence, il existe, en règle générale, un lien de causalité adéquate entre l’inaction de l’organe et le non-paiement des cotisations, sous réserve du cas où l’administrateur est entré en fonction alors que la société était déjà surendettée (ATF 119 V 401 consid. 4c), de sorte que celui-ci répond solidairement de tout le dommage subi par l’assurance en cas de faillite de la société (ATF 132 III 523, consid. 4.6).

S’agissant de Monsieur W__________, il convient de relever que ce dernier ne saurait se défausser au motif qu’il n’aurait pas été informé correctement par Monsieur C_________. En effet, en tant qu’administrateur, il lui appartenait d’exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, étant rappelé qu’il s’agit là d’une attribution inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Le recourant ne saurait dès lors se dégager de toute responsabilité au motif qu’il faisait confiance aux personnes chargées de la gestion.

Certes, les documents comptables remis aux administrateurs en février 2002 encore étaient de nature à les rassurer puisqu’ils faisaient état d’un bénéfice de plus de 200'000 fr. En revanche, les administrateurs - dont Monsieur W__________ - ont été clairement informés lors du conseil d’administration du 22 mai 2002 que la situation de trésorerie de la société était « extrêmement préoccupante ». A cette occasion, Monsieur C_________ a précisé que la société accusait des retards de paiement importants, à hauteur d’un million de francs environ, dont 646'000 fr. de dettes fiscales et sociales. Dès ce moment-là, au vu de la gravité de la situation évoquée (un dépôt de bilan a même été envisagé en juin 2002), les administrateurs auraient dû s’enquérir de la situation en matière de cotisations AVS, si besoin directement auprès de la caisse de compensation. Monsieur W__________ ne saurait dès lors tirer argument du fait qu’il n’aurait été mis au courant qu’en septembre 2002. Ainsi que le fait remarquer l’intimée à juste titre, lors des séances du conseil d’administration, Monsieur W__________ n’a ni évoqué l’obligation de payer les cotisations sociales, ni demandé la confirmation que ces cotisations étaient effectivement payées. Monsieur W__________ a donc commis une première négligence en ne s’informant pas de la situation en détail.

On relèvera par ailleurs que bien que destinataires du courrier adressé le 1er août 2002 aux administrateurs par Monsieur B__________, ni Monsieur W__________, ni Monsieur A__________ ni Monsieur C_________ n’ont émis d’objection au fait que les 200'000 fr. avancés soient affectés exclusivement au paiement des salaires. S’il est vrai que Monsieur W__________ a finalement expressément attiré l’attention de Monsieur C_________, quelques mois plus tard, sur la nécessité de s’acquitter des cotisations sociales, force est de constater qu’il a surtout insisté sur la part pénale.

Entre le moment où les difficultés de trésorerie ont été mises à jour (février - mai 2002) et la démission de l’intéressé, plusieurs mois se sont écoulés sans que Monsieur W__________ n’intervienne pour veiller à ce que les cotisations sociales soient effectivement payées - exceptés les deux courriers adressés à Monsieur C________ et visant plus particulièrement la part pénale.

Dans ces circonstances, la Cour de céans est d’avis que la responsabilité de Monsieur W__________ est bel et bien engagée.

S’agissant de Monsieur C_________, force est de constater au vu des faits qui ont pu être établi au cours de l’instruction qu’il n’ignorait rien des difficultés de la société, de l’ampleur de l’arriéré de cotisations sociales et qu’il était au surplus lui-même en charge de l’aspect financier. Or, à la lecture des procès-verbaux des conseils d’administration qui se sont tenus, il n’apparait nulle part qu’il aurait attiré l’attention sur la nécessité d’accorder la priorité au désintéressement des créanciers sociaux. Bien au contraire, et en dépit des instructions de Monsieur W__________, Monsieur C_________ a préféré donner la priorité au paiement des salaires (cf. audition de Madame G_________ et de Monsieur H_________ ainsi que les déclarations de Messieurs W__________ et B__________). Certes, cela permettait à la société de survivre mais au détriment de l’intimée, puisque cela n’a fait qu’augmenter le montant des cotisations dues.

Monsieur C_________ soutient qu’il avait toutes les raisons de penser que la société pourrait s’acquitter des cotisations grâce à la convention avec Y_________ SA.

Certes, on peut envisager qu'un employeur cause un dommage à la caisse de compensation en violant intentionnellement les prescriptions en matière d'AVS, sans que cela entraîne pour autant une obligation de réparer le préjudice. Tel est le cas lorsque l'inobservation des prescriptions apparaît, au vu des circonstances, comme légitime et non fautive (ATF 108 V 186 consid. 1b, 193 consid. 2b; RCC 1985 p. 603 consid. 2, 647 consid. 3a). Ainsi, il peut arriver qu'en retardant le paiement de cotisations, l'employeur parvienne à maintenir son entreprise en vie, par exemple lors d'une passe délicate dans la trésorerie. Mais il faut alors, pour qu'un tel comportement ne tombe pas ultérieurement sous le coup de l'art. 52 LAVS, que l'on puisse admettre que l'employeur avait, au moment où il a pris sa décision, des raisons sérieuses et objectives de penser qu'il pourrait s'acquitter des cotisations dues dans un délai raisonnable (ATFA 277/01 du 29 août 2002 consid. 2; ATF 108 V 188; RCC 1992 p. 261 consid. 4b).

Or, en l’occurrence, force est de constater que les perspectives ouvertes par la convention avec Y__________ SA sont bien postérieures au retard pris dans le paiement des cotisations qui remonte, lui, à la fin de l’année 2001. On est ainsi bien loin du « délai raisonnable » exigé par la jurisprudence. Celle-ci n’admet en réalité que de manière très exceptionnelle qu’un employeur puisse décider de retarder le paiement des cotisations afin de maintenir son entreprise en vie lors d’une passe délicate dans la trésorerie (ATFA 154/00 du 22 août 2000 consid. 2c).

Il est vrai que des mesures importantes ont été prises (diminution drastique des charges, abandon de créances importantes envers la société - notamment de la part de Monsieur C_________ -, négociations en vue du rachat de la société, etc.). Il n’en demeure pas moins que durant plusieurs mois, la société a privilégié d’autres créanciers que l’intimée. Qui plus est, alors que la société pouvait compter sur une rentrée de liquidités importante à la fin de l’année 2002 (paiement par les clients des montants dus pour les contrats de maintenance ; cf. déclarations de Madame G_________, notamment), elle a préféré céder ces actifs à la société XE__________ SA - et se priver ainsi des moyens de désintéresser l’intimée - tout en acceptant que sa dette envers l’intimée soit exclue des passifs repris par XE__________ SA. On peut certes comprendre le souci - louable - des administrateurs de préserver les postes de travail ; néanmoins, force est de constater que les mesures prises pour maintenir les postes de travail n’ont fait qu’augmenter le montant des cotisations dues.

Eu égard à ces considérations, la Cour de céans considère que ni Monsieur C_________, ni Monsieur A__________, ni Monsieur B__________ n’étaient légitimés à différer aussi longtemps le paiement des cotisations. Ainsi que cela a été relevé, des mesures ont certes été prises, qui ont permis de prolonger la survie de la société. Ces mesures auraient pu être qualifiées de suffisantes si elles avaient permis de rapidement remédier à la situation. Tel n’a cependant pas été le cas en l’occurrence puisque plus d’une année s’est écoulée depuis le début du retard, ce qui ne saurait être qualifié de « délai raisonnable » au sens de la jurisprudence, dont on a déjà souligné la rigueur dans un tel cas de figure.

En conséquence, la responsabilité de Messieurs C_________, A__________ et B__________ doit également être confirmée.

S’agissant de Messieurs W__________ ET B__________, l’intimée a proposé la réduction du montant réclamé à titre de réparation du dommage de 237'206 fr. 70 à 187'347 fr. (montant dû au 31 octobre 2002).

La responsabilité de l’administrateur ne dure en principe que jusqu’au moment de sa sortie effective du conseil d’administration - que ce soit à la suite d’une démission ou d’une révocation - mais non jusqu’au moment de la radiation de ses pouvoirs au registre du commerce ; cela vaut en tout cas lorsque l’intéressé n’a plus aucune influence sur la marche des affaires et qu’il n’a plus reçu de rémunération (cf. notamment ATF 112 V 5 consid. 3c). En principe, donc, l’administrateur sortant ne répond, toutes autres conditions étant remplies, que du non-paiement des cotisations échues et exigibles au moment de sa sortie effective. Demeure réservée l’hypothèse où il a provoqué - intentionnellement ou par négligence grave - l’insolvabilité de la société (ATF H 108/12000 du 21 septembre 2000 consid. 5b).

En l’occurrence, les intéressés ayant démissionné en décembre 2002, c’est à juste titre que l’intimée admet que doivent être exclues du montant qui leur est réclamé à titre de réparation les cotisations devenues exigibles ce mois-là. Les concernant, le montant du dommage doit donc être arrêté au 30 novembre 2002 (et non au 31 octobre 2002).

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Préalablement :

Disjoint la cause A/745/2004 (AF) de la cause A/742/2004 (AVS).

Prononce la suspension de la cause A/745/2004 dans l’attente de l’entrée en force du présent jugement.

Au fond :

Rejette le recours interjeté par Monsieur A__________.

Rejette le recours interjeté par Monsieur C_________.

Admet partiellement le recours interjeté par Monsieur W__________ en ce sens que le montant réclamé à ce dernier à titre de réparation du dommage doit être arrêté au 31 novembre 2002.

Admet partiellement le recours interjeté par Monsieur B__________ en ce sens que le montant réclamé à ce dernier à titre de réparation du dommage doit être arrêté au 31 novembre 2002.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

La greffière

 

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La présidente

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le