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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2070/2020

ATA/1346/2020 du 22.12.2020 ( DIV ) , REJETE

Descripteurs : ACCUEIL PARASCOLAIRE;ENFANT;GARDERIE;MAMAN DE JOUR;PRISE EN CHARGE DE L'ENFANT;PLACEMENT À LA JOURNÉE
Normes : Cst.5.al2; Cst.27.al1; Cst.27.al2; LAPR.30.al1; LAPR.31; LEJ.32.leta; LEJ.32.letc; RSAPE.10.al3; RSAPE.11.al1; RSAPE.11.al2; RSAPE.11.al3
Résumé : Les personnes qui publiquement s'offrent à accueillir régulièrement des enfants jusqu'à douze ans dans leur foyer, à la journée et contre rémunération sont soumises à autorisation du département compétent. Celui-ci peut interdire à une personne, pour une durée déterminée ou indéterminée, l'accueil de mineurs soit à titre personnel, soit dans le cadre d'un groupe ou d'une institution et cela notamment pour les recevoir, les réunir, les héberger, leur donner un enseignement, organiser ou diriger leurs loisirs. Se soustraire aux conseils, recommandations, injonctions et décisions de l'autorité compétente de ne pas exploiter une structure d'accueil sans autorisation peut être considéré comme un motif fondant une telle interdiction. Il en est de même de l'incapacité de se conformer aux exigences légales, de la volonté de mettre l'autorité devant le fait accompli ou de la violation, constatée à réitérées reprises, de normes sur la sécurité et l'hygiène compromettant les buts de protection, de bon développement et de bien-être des bébés et jeunes enfants.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2070/2020-DIV ATA/1346/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 décembre 2020

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Robert Assaël, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1) a. Madame A______, née le ______1989, et son compagnon habitent dans un appartement comprenant quatre chambres, une cuisine et un salon, situé avenue B______, à C______. Ils sont parents de trois enfants, nés entre 2012 et 2020.

Mme A______ est titulaire de l'équivalent d'un certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) d'assistante socio-éducative, accordé par le secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation (ci-après : SEFRI) à la suite de la reconnaissance, le 14 janvier 2013, d'un certificat d'aptitude professionnelle de la petite enfance obtenu à D______, en 2012. Elle a été, par contrat de travail de durée déterminée du 20 janvier 2016 au 20 janvier 2017, employée comme éducatrice remplaçante dans une crèche.

b. La « E______ » (ci-après : l'association) est une association au sens de l'art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), non inscrite au registre du commerce et ayant son siège à C______. Elle a pour but notamment d'offrir une alternative de garde des enfants de ses membres et de créer un lieu d'accueil et de bien-être pour les enfants moyennant la participation active de leurs parents dans leur prise en charge.

Selon le règlement de l'association, celle-ci accueille dans une crèche des enfants dès leur naissance jusqu'à leur quatrième année. Elle propose aussi une garde d'enfants à domicile par des personnes qualifiées notamment en cas de maladie d'un enfant ou le week-end.

c. F______, inscrite au registre du commerce du canton de Genève depuis le 25 juin 2020, dont Mme A______ est l'unique associée gérante, a pour but notamment d'exercer en Suisse et à l'étranger toutes les activités dans le domaine de l'exploitation de crèches, jardins d'enfant et écoles et d'organiser des activités parascolaires.

2) Le 11 novembre 2016, le service d'autorisation et de surveillance de l'accueil de jour (ci-après : SASAJ ou service) de l'office de l'enfance et de la jeunesse (ci-après : OEJ) du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP ou département) a, à la suite d'un signalement, effectué une visite non annoncée au domicile de Mme A______.

a. Mme A______ a déclaré s'occuper des enfants avec l'aide de deux adultes. Huit enfants pouvaient être accueillis en même temps, dix étaient inscrits.

b. Selon les constatations du SASAJ, sept enfants âgés d'un à trois ans étaient présents, surveillés par deux adultes. Sur la base des casiers et un tableau de noms, treize enfants pouvaient être accueillis dont ceux de Mme A______. Les produits de nettoyage et de cuisine étaient à la portée des enfants. Les draps de lits étaient sales et tachés. Une forte odeur de « chien mouillé » était perceptible dans le local d'accueil des enfants. Une forte odeur de selles était également ressentie dans une des chambres où un enfant dormait. Les enfants pleuraient, s'agitaient, tournaient en rond, semblaient fatigués et stressés. Le lieu n'était pas au bénéfice d'une autorisation d'exploiter un accueil familial.

3) Le 14 novembre 2016, le SASAJ a effectué une visite annoncée au domicile de Mme A______.

Un chien non propre faisait ses besoins dans l'appartement et se déplaçait librement dans les locaux où les enfants étaient accueillis.

4) Le 15 novembre 2016, le service a informé Mme A______ qu'il lui était interdit d'accueillir des enfants et d'exploiter une structure de la petite enfance avant d'obtenir une autorisation. L'accueil d'enfants dans une structure non autorisée constituait une infraction et était sanctionnée par une amende.

5) Le 24 novembre 2016, le SASAJ a reçu Mme A______ en entretien.

a. Elle avait commencé l'accueil familial chez elle dès le 22 août 2016. Elle offrait aux parents deux options d'accueil de leurs enfants, à savoir une garde en crèche à son domicile ou celle au domicile des parents. Ses diplômes d'éducatrice et d'assistante socio-éducative obtenus en France avaient été reconnus par le SEFRI. Elle était responsable du lieu d'accueil.

b. Selon le service, Mme A______ accueillait huit enfants sans autorisation, dans des conditions inadaptées. Le lieu présentait plusieurs manquements au niveau de l'hygiène et de la sécurité. Les enfants avaient échappé à la surveillance des adultes à plusieurs reprises et grimpaient sur des jeux et des meubles. Le matériel utilisé n'était pas adapté. L'hygiène était insuffisante dans l'espace de sieste et dans la cuisine. Mme A______ employait deux personnes non qualifiées et sans permis de travail.

c. Mme A______ devait fournir au SASAJ une copie de ses diplômes, la liste des enfants accueillis dans sa structure et les contrats de placement passés avec les parents depuis son ouverture.

6) Le 1er décembre 2016, Mme A______ a transmis au SASAJ un « Diplôme de fin d'études théoriques » en « psychologie de la petite enfance » et un « Diplôme d'État d'Éducateur de Jeunes Enfants ».

7) Le 22 décembre 2016, le SASAJ a dénoncé Mme A______ auprès du Ministère public (ci-après : MP) pour avoir fabriqué et fait usage desdits diplômes afin d'exercer une activité d'éducatrice de la petite enfance.

8) Par demande du 25 janvier 2016 (recte : 2017), reçue par le SASAJ le 30 janvier 2017, Mme A______ a requis des renseignements concernant les autorisations nécessaires et les démarches à entreprendre pour mettre en place un projet d'accueil d'enfants.

9) Le 2 février 2017, le SASAJ a reçu une demande de Mme A______ d'autorisation pour l'accueil familial de jour, datée du 26 janvier 2017.

10) Le 10 mars 2017, le SASAJ a rappelé à Mme A______ qu'il lui était interdit d'accueillir des enfants et d'exploiter une structure d'accueil de la petite enfance sans autorisation.

Certains faits la concernant avaient été dénoncés au MP. Son dossier de demande d'autorisation était mis en suspens jusqu'à l'issue de la procédure pénale.

11) Par ordonnance pénale du 14 février 2017, le MP a déclaré Mme A______ coupable de faux dans les certificats et l'a condamnée à une peine pécuniaire de cent cinquante jours-amende à CHF 40.- l'unité.

Mme A______ avait reconnu les faits. Elle avait eu l'idée de créer ces faux diplômes en raison de difficultés financières. Ses motivations relevaient d'une convenance personnelle.

12) Le 13 mars 2017, Mme A______ a demandé au SASAJ la réactivation de son dossier ou une décision motivée en cas de refus de lui délivrer l'autorisation requise, relevant que sa condamnation pénale était intervenue.

13) Le 4 mai 2017, le SASAJ a effectué une visite non annoncée au domicile de Mme A______.

a. Des parents y avaient amené des enfants à garder entre 8h00 et 8h38.

b. Selon l'intéressée, les enfants n'étaient pas sous sa responsabilité, mais sous celle de l'association.

14) Le 16 mai 2017, le SASAJ a reçu en entretien la présidente de l'association et Mme A______.

Selon le service, l'activité de l'association était soumise à autorisation. Mme A______ était responsable des enfants qui étaient accueillis chez elle. Elle cumulait plusieurs agissements peu recommandables, notamment l'utilisation de faux diplômes et la récidive dans la garde d'enfants sans en avoir l'autorisation.

15) Le 30 mai 2017, l'association a déposé une requête en autorisation d'exploiter une structure de la petite enfance au domicile de Mme A______.

16) Par ordonnance du 6 juin 2017, le SASAJ a condamné Mme A______ à une amende de CHF 600.- pour avoir accueilli des enfants à son domicile sans autorisation.

Mme A______ persistait à proposer aux parents placeurs d'accueillir leurs enfants. L'accord des parents ne permettait pas de déroger aux exigences légales. L'intéressée n'avait pas, en toute connaissance de cause, suivi la procédure prévue pour l'obtention d'une autorisation d'exploiter une structure d'accueil familial. L'infraction intervenait après une interdiction du département d'accueillir des enfants à son domicile sans autorisation.

17) Par décision du 8 juin 2017, qui n'a pas fait l'objet d'un recours, le SASAJ a refusé d'accorder à Mme A______ l'autorisation pour exploiter un accueil familial de jour de la petite enfance.

Elle n'avait pas la capacité de se conformer à l'exigence de se soumettre à une autorisation pour garder des enfants. Ses mensonges répétés mettaient en doute son intégrité et sa fiabilité. Les conditions d'accueil à son domicile étaient insatisfaisantes. La sécurité et le bon développement des enfants accueillis ne pouvaient pas être garantis.

18) Le 14 juin 2017, le service a effectué une nouvelle visite non annoncée au domicile de Mme A______.

a. Selon ses constatations, une camionnette avait livré des repas. Un homme était venu accompagné de sa fille et reparti seul. Mme A______ était seule à son domicile avec deux enfants.

b. Selon l'intéressée, la petite fille arrivée avec son père était repartie chez elle accompagnée d'une baby-sitter. Les repas livrés étaient destinés à sa famille.

19) Les 15 et 20 juin 2017, l'association a complété son dossier de demande d'autorisation d'exploiter une structure d'accueil familial.

Des baby-sitters et des parents gardaient les enfants selon des critères différents de ceux appliqués dans des crèches. L'association proposait une forme alternative de garde collective d'enfants. Plusieurs de ses membres, professionnels dans la protection de la petite enfance, étaient disponibles pour conseiller ou partager leur expérience.

20) Le 27 juin 2017, le service a effectué une nouvelle visite impromptue au domicile de Mme A______.

Selon un voisin, des enfants étaient accueillis chez elle. Le service n'a néanmoins pas constaté de présence d'enfants sur place.

21) Le 29 juin 2017, le service a effectué une autre visite impromptue au domicile de Mme A______.

Entre 7h58 et 8h32, trois enfants y avaient été amenés. Des repas avaient été livrés. Une femme avait quitté les lieux avec deux voire trois enfants dans une poussette double. Une autre femme, qui avait refusé de donner son identité, l'avait rejointe. Selon les observations d'un représentant du SASAJ, les deux femmes et cinq enfants étaient restés dehors durant une heure. Les enfants étaient peu vêtus et n'avaient pas de protection contre la pluie ni de couverture pour un bébé, par temps d'averses et une température de dix-sept degrés. Sur vingt casiers disponibles dans le lieu d'accueil, seize étaient occupés par des affaires d'enfants. Des étiquettes avec des prénoms étaient placées au-dessus des casiers.

22) Le 6 juillet 2017, l'association a adressé au service un courrier explicatif sur son concept d'accueil familial et a souhaité avoir une réponse à sa demande d'autorisation.

Elle cherchait à résoudre le problème de la garde des enfants qui n'avaient pas trouvé de place dans des crèches. Elle s'insurgeait contre l'espionnage autour des activités des enfants de ses membres et l'acharnement du SASAJ contre Mme A______.

23) Le 12 juillet 2017, le service a reçu en entretien la présidente de l'association accompagnée d'un membre.

a. Pour le service, le projet proposé par l'association devait être de qualité et conforme au cadre légal existant notamment aux normes en matière d'encadrement professionnel des enfants et d'aménagement des structures collectives. Il devait être clarifié. Trois cas de figure étaient envisageables, soit une garde au domicile des parents, non soumise à autorisation, un accueil familial de jour, soumis à autorisation, ou une structure de la petite enfance, soumise à autorisation également. Les aspects pédagogiques et le pilotage devaient encore être réglés. Le lien de confiance avec Mme A______ était rompu. Elle ne pouvait pas faire partie du projet de l'association. Le lieu d'accueil familial ne pouvait pas se situer à son domicile.

b. Pour l'association, son projet était novateur et ne rentrait pas dans des schémas existants. Il n'était pas une crèche. Il proposait des activités faisant appel aux nounous pour garder les enfants.

24) a. Le 17 juillet 2017, le service a accusé réception d'une nouvelle requête de l'association en autorisation d'exploiter une structure de la petite enfance dénommée « E______ » qui a été mise en suspens à la suite d'une dénonciation pénale du 6 juillet 2017 auprès du MP à l'encontre de Mme A______ pour insoumission à une décision de l'autorité.

b. Le 18 septembre 2017, le MP a refusé d'entrer en matière sur cette dénonciation.

25) Le 15 novembre 2017, le SASAJ a une nouvelle fois reçu en entretien Mme A______ et la présidente de l'association.

a. Un nouveau projet conçu par Mme A______ était en cours. Celle-ci souhaitait quitter son appartement pour le consacrer uniquement à l'accueil familial. Une équipe éducative porterait à sa place la responsabilité de l'institution.

b. Selon le SASAJ, la confiance n'était pas garantie dans la collaboration avec Mme A______. Comme vice-présidente de l'association, elle restait impliquée dans le projet.

26) Le 14 janvier 2018, l'association a informé le SASAJ qu'elle disposait d'un local, situé avenue G______, mis en location par la mairie de C______.

27) Le 21 mars 2018, le SASAJ a requis une évaluation de la salubrité de ce local auprès de la police du feu et de l'office des autorisations de construire.

28) Le 9 avril 2018, le SASAJ a précisé à l'association les modifications à mettre en place pour qu'il entre en matière sur la demande en autorisation d'exploiter la structure de la petite enfance « E______ ».

Les locaux devaient avoir une capacité d'accueil de seize enfants. Une évaluation de salubrité devait être faite. Des aménagements dans certains espaces comme les sanitaires, la cuisine, « la biberonnerie », l'espace dévolu au personnel, la buanderie, le local des poussettes, celui des poubelles et du nettoyage devaient être effectués. Le budget devait être recalculé pour tenir compte de la capacité d'accueil et du montant de la pension prévue. L'affiliation à la convention collective de travail de la commune de C______, la liste du personnel éducatif et les documents y afférents devaient être fournis. En revanche, les qualifications du titulaire présumé de l'autorisation répondaient aux exigences en la matière.

29) Le 3 octobre 2018, le SASAJ a informé l'association de la suspension de sa requête.

Il attendait la démission de Mme A______ du poste de vice-présidente et son interdiction d'occuper tout autre poste au sein de l'association ou de la future structure à exploiter. Il attendait aussi l'envoi d'un courrier individuel manuscrit et signé par chaque membre confirmant son adhésion à l'association. Depuis le début de la procédure, des difficultés de collaboration s'étaient accumulées, particulièrement avec Mme A______. La poursuite de l'évaluation de la demande d'autorisation d'exploiter une structure d'accueil familial se ferait si une collaboration fiable dans le respect du cadre légal était garantie.

30) Le 10 octobre 2018, Mme A______ a dénoncé le SASAJ et sa cheffe de service à la conseillère d'État en charge du DIP.

Depuis deux ans, elle était en lutte contre le service et particulièrement sa cheffe. Elle avait, en 2017, dénoncé ses agissements à ses supérieurs hiérarchiques. Elle avait été victime de surveillance, de harcèlement, d'intimidation et de diffamation.

31) Le 17 octobre 2018, l'association a informé le SASAJ qu'elle renonçait à son projet et qu'elle retirait sa demande d'autorisation d'accueil familial.

32) Le 7 mai 2019, le SASAJ a rappelé à Mme A______ qu'il lui était interdit d'accueillir des enfants et d'exploiter une structure d'accueil de la petite enfance avant la délivrance d'une autorisation.

Le service avait appris, via son compte Facebook et l'espace réservé aux informations des associations dans le journal de la ville de C______, l'ouverture d'une crèche de l'association à la rentrée 2019, située route H______, à I______.

33) Le 4 juin 2019, Mme A______ a indiqué au service qu'elle ne faisait plus partie du comité de l'association. Elle avait uniquement la charge de certains aspects administratifs.

Elle examinait la possibilité de déposer une demande d'autorisation. Cependant, elle n'avait pas l'intention d'accueillir des enfants ni d'exploiter une structure d'accueil de la petite enfance avant la délivrance d'une autorisation.

34) a. Le 19 juin 2019, Mme A______ a informé le SASAJ d'un projet d'accueil familial envisagé à J______, l'association prévoyant de mettre en place une crèche pour quinze enfants répartis en trois groupes en fonction de leur âge.

b. Selon un échange de courriers entre le SASAJ et Mme A______, la création d'une crèche à C______ était en bonne voie. Le comité de l'association discutait de la mise en oeuvre des projets.

35) Le 30 janvier 2020, le SASAJ a procédé à une visite non annoncée à un local situé chemin K______, à C______, à la suite d'une information reçue le 29 janvier 2020 d'un parent faisant état du placement de son enfant dans une crèche « E______ » dont la directrice était Mme A______.

Douze enfants, dont quatre bébés surveillés par quatre nounous, étaient présents. Vingt-huit casiers et crochets portaient des prénoms d'enfants. Mme A______ avait indiqué être la coordinatrice de la structure. Elle s'occupait de certaines tâches administratives et était l'interlocutrice privilégiée des parents membres de l'association. Elle ne s'occupait pas personnellement des enfants qui étaient sous la garde des nounous, lesquelles n'étaient pas ses employées, mais étaient au service des parents.

De fortes odeurs se dégageaient du lieu d'accueil. Le sol était sale. L'aménagement et l'organisation des espaces n'étaient pas propices à l'accueil d'enfants. Les matelas n'étaient pas séparés comme l'exigeaient les normes d'hygiène. Un produit à vaisselle et une boîte contenant des pastilles pour le lave-vaisselle étaient à portée des enfants. Le matériel éducatif n'était ni varié ni suffisant.

36) Le 3 février 2020, le SASAJ a demandé à Mme A______ de lui fournir la liste des enfants accueillis le 30 janvier 2020 avec leurs coordonnées complètes de même que celles des personnes les encadrant et une copie des diplômes de celles-ci.

37) Par décision du 7 février 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours, qui n'a pas été contestée en justice, le DIP a fait interdiction à Mme A______ et à l'association, ainsi qu'à tout autre tiers, d'accueillir des enfants dans les locaux sis au ______, chemin K______, à C______. Il a également prononcé la fermeture immédiate du lieu.

En date du 30 janvier 2020, le SASAJ avait constaté la présence de plusieurs enfants accueillis collectivement par quatre adultes sans autorisation de l'autorité compétente. La conception et l'aménagement des locaux concernés étaient affectés de nombreux défauts. L'association et sa coordinatrice n'entendaient pas collaborer avec les services compétents ni respecter leurs obligations légales.

38) Par décision du 7 février 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'office des autorisations de construire a ordonné, avec effet immédiat, l'interdiction d'exploiter le local situé chemin K______, à C______, comme lieu d'accueil de type « crèche ».

39) a. Le 13 février 2020, le SASAJ a informé Mme A______ avoir reçu un signalement d'accueil illégal et de garde d'enfants. Il lui a rappelé la fermeture de la crèche.

b. Le même jour, Mme A______ a adressé au SASAJ deux courriels.

Les nounous qui gardaient des enfants au domicile des parents n'étaient pas soumises à la surveillance du service. La cheffe de service du SASAJ avait tout fait pour l'empêcher de mettre en place ses projets.

40) Le 17 février 2020, l'association a informé le SASAJ de la cessation de ses activités et de son processus de dissolution.

41) Par ordonnance pénale du 25 février 2020, non contestée en justice, le SASAJ a infligé à Mme A______ une amende de CHF 1'000.- et décidé de la fermeture immédiate du local situé chemin K______, à C______.

42) Le 5 mars 2020, le SASAJ a informé Mme A______ que le DIP envisageait de lui interdire de s'occuper d'enfants, à titre personnel ou dans le cadre d'un groupe ou d'une institution, notamment pour les recevoir, les réunir, les héberger, leur donner un enseignement, organiser ou diriger leurs loisirs. Un délai lui était fixé pour exercer son droit d'être entendue.

43) Par décision du 4 juin 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours et doublée d'une menace d'une peine comminatoire au sens de l'art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), le DIP a fait interdiction à Mme A______ d'accueillir des mineurs pour une durée de deux ans, à titre personnel, dans le cadre d'un groupe ou d'une institution et cela notamment pour les recevoir, les réunir, les héberger, leur donner un enseignement, organiser ou diriger leurs loisirs.

Depuis 2016 et à réitérées reprises, Mme A______ ne s'était pas conformée aux exigences légales, notamment de se soumettre à une autorisation pour accueillir des enfants en âge préscolaire dans une structure d'accueil ou à son domicile. Elle avait tenu des propos mensongers, erronés ou contradictoires au sujet de ses compétences en matière d'accueil d'enfants, des structures mises en place sans autorisation, des enfants gardés à son domicile et du personnel employé. Durant quatre ans, les conditions de prise en charge des enfants avaient été jugées insatisfaisantes. Les éléments disponibles mettaient en doute son intégrité, sa fiabilité et ses aptitudes éducatives. La sécurité et le bon développement des enfants accueillis par ses soins ne pouvaient pas être garantis.

44) Par acte expédié le 9 juillet 2020, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, en concluant à son annulation et à la levée de l'interdiction d'accueillir des enfants à titre personnel ou dans le cadre d'un groupe ou d'une institution.

Le local situé chemin K______, à C______, était loué par une association dont elle était seulement membre active. Elle avait démissionné de son poste de vice-présidente et n'était plus membre du comité. Elle ne pouvait pas être tenue responsable des actes de l'association. Elle effectuait uniquement des tâches administratives et se rendait de temps en temps dans le local situé chemin K______, à C______, pour s'assurer du bon déroulement des activités. Elle n'avait pas l'obligation de requérir une autorisation pour exploiter une structure de la petite enfance, au nom de l'association. Aucun enfant n'avait été mis en danger, ni blessé dans les structures dans lesquelles elle avait été active. Elle n'avait jamais porté atteinte à l'intégrité physique ou sexuelle d'un mineur. La décision attaquée violait le principe de la proportionnalité. Elle entravait en outre sa liberté économique. Les faits qui lui étaient reprochés ne justifiaient pas l'interdiction qui lui avait été signifiée. Par ailleurs, elle ne gardait pas personnellement les enfants.

45) Dans sa réponse, le DIP a conclu au rejet du recours.

Mme A______ avait été depuis 2016 incapable de se conformer aux conseils, recommandations, injonctions et décisions concernant ses activités d'accueillante familiale et de directrice de crèche. Elle avait continué d'accueillir des enfants dans le cadre de structures d'accueil diverses. Elle n'était pas au bénéfice d'une formation qui lui permettait de diriger une institution d'accueil préscolaire. La décision attaquée était de nature à atteindre le but d'intérêt public du bien-être des enfants. Les mesures contraignantes prises auparavant, comme le refus d'autorisation d'une structure d'accueil, les amendes, les dénonciations pénales au MP et la fermeture d'une crèche, n'avaient pas dissuadé Mme A______ qui avait persisté dans ses activités.

La législation en vigueur dans le domaine permettait de restreindre la liberté économique des personnes qui violaient le devoir de protection de l'enfance en ne garantissant pas la sécurité, l'intégrité et le bien-être des enfants accueillis dans leurs structures. La décision attaquée interdisait à l'intéressée de diriger une structure d'accueil préscolaire ou de garder des enfants en qualité de maman de jour. En revanche, elle ne lui interdisait pas d'être employée dans une structure autorisée d'accueil de la petite enfance.

46) Dans sa réplique, Mme A______ a allégué que les nounous qui gardaient les enfants n'étaient pas ses employées et avaient les qualifications nécessaires.

47) Le DIP n'ayant pas dupliqué, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile, devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5).

2) Le litige porte sur l'interdiction de deux ans faite le 4 juin 2020 à la recourante d'accueillir des mineurs à titre personnel, ou dans le cadre d'un groupe, voire d'une institution.

3) Selon l'art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (al. 1 let. a), pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

4) La recourante reproche d'abord à l'autorité intimée d'avoir violé l'art. 32 let. c de la loi sur l'enfance et la jeunesse du 1er mars 2018 (LEJ - J 6 01).

a. Les règles sur le placement d'enfants sont énoncées au niveau fédéral dans l'ordonnance sur le placement d'enfants du 19 octobre 1977 (OPE - RS 211.222.338). À Genève, l'accueil de jour est réglé notamment dans la loi sur l'accueil préscolaire du 12 septembre 2019 (LAPr - J 6 28), qui a remplacé l'ancienne loi sur les structures d'accueil de la petite enfance et sur l'accueil familial de jour du 14 novembre 2003 (aLSAPE - J 6 29), ainsi que dans le règlement sur les structures d'accueil de la petite enfance et sur l'accueil familial de jour du 21 décembre 2005 (RSAPE - J 6 29.01), qui reprennent les principes énoncés par la législation fédérale. Pour les mêmes motifs, la LEJ, qui a abrogé l'ancienne loi sur l'office de l'enfance et de la jeunesse du 28 juin 1958 (aLOEJ - J 6 05) et de l'ancienne loi sur l'accueil et le placement d'enfants hors du foyer familial du 27 janvier 1989 (aLAPF - J 6 25), est applicable dans sa teneur en vigueur depuis le 1er mars 2018. Au demeurant, la LAPr et la LEJ reprennent les dispositions topiques des lois précitées qu'elles ont abrogées.

b. La LAPr s'applique à toutes les structures d'accueil soumises à surveillance autorisées à exercer une activité conformément à la législation fédérale et cantonale sur le placement d'enfants hors du milieu familial (art. 1 al. 1). Elle s'applique également à l'accueil familial de jour ainsi qu'aux structures qui en assurent la coordination (al. 2). Elle a notamment pour but de développer l'offre de places d'accueil de jour pour les enfants en âge préscolaire afin d'atteindre un taux d'offre d'accueil adapté aux besoins (art. 2 let. a LAPr) et de s'assurer de la qualité des prestations offertes pour le bien des enfants accueillis (let. b).

c. Les personnes qui publiquement s'offrent à accueillir régulièrement des enfants jusqu'à douze ans dans leur foyer, à la journée et contre rémunération, sont soumises à autorisation du département (art. 31 LAPr ; art. 10 RSAPE). Le département chargé de l'instruction publique autorise et surveille les structures d'accueil préscolaire sur tout le territoire cantonal en application des dispositions fédérales et cantonales relatives aux mineurs placés hors du foyer familial (art. 30 al. 1 LAPr ; art. 32 let. a LEJ). Il subordonne l'octroi de l'autorisation au respect des dispositions de l'OPE, ainsi qu'à celles de la LAPr et de son règlement d'application, afin d'assurer notamment la sécurité et le bien-être des enfants (al. 2). L'autorisation ne peut être délivrée que si les qualités personnelles, les aptitudes éducatives, l'état de santé de la personne pratiquant l'accueil familial de jour et des autres personnes vivant dans son ménage ainsi que les conditions de logement offrent toute garantie que l'enfant placé bénéficie de soins adéquats, d'une prise en charge respectant ses besoins fondamentaux et favorisant son développement et que le bien-être des autres enfants vivant dans la famille est sauvegardé (art. 10 al. 3 RSAPE).

d. L'autorité de surveillance fait, au domicile des personnes pratiquant l'accueil familial de jour, des visites aussi fréquentes que nécessaires, mais au moins une visite par an. Elle peut, en tout temps, effectuer des visites domiciliaires impromptues. La personne pratiquant l'accueil familial de jour doit collaborer avec l'autorité de surveillance et notamment lui donner accès à son domicile pour lui permettre d'effectuer ces visites (art. 11 al. 1 RSAPE). L'autorité de surveillance s'assure que les conditions auxquelles est subordonnée l'autorisation sont remplies. Lorsque la personne pratiquant l'accueil familial de jour est employée par une structure de coordination, l'autorité peut prendre l'avis auprès de la structure de coordination (art. 11 al. 2 RSAPE). La visite fait l'objet d'un rapport écrit, incluant d'éventuelles recommandations ou injonctions. Ce rapport est communiqué à la personne titulaire de l'autorisation avec, cas échéant, copie à la structure de coordination à laquelle la personne pratiquant l'accueil familial de jour est rattachée (art.11. al. 3 RSAPE).

e. Les compétences accordées au département sont exercées par le SASAJ (art. 2 al. 1 RSAPE).

5) Le département est l'autorité compétente pour interdire à une personne, pour une durée déterminée ou indéterminée, l'accueil de mineurs soit à titre personnel, soit dans le cadre d'un groupe ou d'une institution et cela notamment pour les recevoir, les réunir, les héberger, leur donner un enseignement, organiser ou diriger leurs loisirs. Cette compétence s'étend également aux personnes et institutions dispensées d'autorisation ou de surveillance (art. 32 let. c LEJ). Toute décision prise en vertu de la LEJ doit l'être dans l'intérêt supérieur de l'enfant ou du jeune (art. 3 al. 1 LEJ).

Les buts inscrits à l'art. 1 LEJ visent notamment à promouvoir des conditions propres à favoriser la santé des enfants qui, entre autres, fréquentent les structures d'accueil préscolaire (Projet de loi sur l'enfance et la jeunesse du 25 janvier 2017 [ci-après : PL 12054], p. 29). La délivrance et le maintien de l'autorisation d'ouvrir une structure d'accueil préscolaire ou une institution de placement d'enfants sont notamment subordonnés au respect des normes relatives à la santé des enfants, en particulier la prévention des maladies transmissibles, l'hygiène et l'alimentation. L'interdiction d'accueil de mineurs à titre personnel ou dans le cadre d'un groupe ou d'une institution vise notamment les moniteurs, répétiteurs, entraîneurs sportifs, éducateurs, enseignants, etc. qui auraient commis des actes de violence ou d'abus sexuels sur des mineurs (PL 12054, p. 43).

6) En l'espèce, la recourante a exercé l'activité d'accueil familial des enfants dans une structure préscolaire à titre personnel, à son domicile, dans le cadre d'une association, sans être au bénéfice d'une autorisation d'exploiter une telle institution ce, au plus tard à compter du mois de novembre 2016. L'autorité intimée a, par le biais du SASAJ, effectué plusieurs visites à compter du 11 novembre 2016, notamment à son domicile et l'a reçue en entretiens à diverses reprises. À toutes ces occasions, la recourante a été rendue attentive à l'obligation de disposer d'une autorisation pour exercer l'accueil familial des mineurs. Elle n'a cependant pas respecté ces injonctions, allant au contraire jusqu'à présenter le 1er décembre des « diplômes » en raison desquels elle a été condamnée pour faux dans les titres le 14 février 2017.

Par ailleurs, les différentes visites annoncées ou impromptues ont montré que les conditions dans lesquelles les enfants étaient accueillis n'étaient pas appropriées et ne respectaient pas les exigences de sécurité et de salubrité (saleté, produits « dangereux » à portée des enfants, chien se déplaçant librement parmi les enfants en bas âge, etc), que ce soit à son domicile ou par la suite dans diverses structures d'accueil où en définitive, bien qu'elle s'en défende, elle avait un rôle actif et une présence effective. La LEJ n'énumère certes pas les conditions pouvant entraîner une interdiction d'accueil, ni la liste des personnes concernées. Toutefois, les travaux préparatoires de la LEJ, dans une liste non exhaustive, donnent quelques exemples de cas. Le comportement de la recourante, qui s'est soustraite à plusieurs conseils, recommandations, injonctions et décisions de l'autorité intimée de ne pas exploiter une structure d'accueil sans autorisation et démontrant son incapacité de se conformer aux exigences légales et sa volonté de mettre l'autorité devant le fait accompli doivent, comme retenu par le département être considérés au titre de motifs fondant une telle interdiction. Il en est de même de la violation, constatée à réitérées reprises, de normes sur la sécurité et l'hygiène compromettant les buts de protection, de bon développement et de bien-être des bébés et jeunes enfants. S'y ajoute la présence de nounous, dont certaines sans permis de travail, qui ne disposaient d'aucun titre ou autorisation pour s'occuper de l'accueil d'enfants en bas âge, étant relevé que la recourante ne peut valablement s'exempter de toute responsabilité à leur égard, en soutenant notamment qu'elle n'était pas leur employeur, dans la mesure où elles offraient leur prestation à son domicile.

L'interdiction visant la recourante est ainsi fondée. L'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation au vu des circonstances du cas d'espèce.

Ce grief sera écarté.

7) La recourante soutient aussi que la décision attaquée viole l'art. 27 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et le principe de proportionnalité.

a. Aux termes de l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1). Celle-ci comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). La liberté économique comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice. Dans le cadre de sa fonction individuelle, elle assure une protection contre les mesures étatiques restreignant la liberté d'exercer toute activité économique privée, exercée aux fins de production d'un gain ou d'un revenu, à titre principal ou accessoire, dépendant ou indépendant (arrêt du Tribunal fédéral 2C_380/2016 du 1er septembre 2017 consid. 5.1 ; Jacques DUBEY, Droits fondamentaux, vol. II, 2018, n. 2764 ss, 2821 ss, 2844 ss ; Pascal MAHON, Droit constitutionnel, 3ème éd., vol II, 2015, n. 121 ss et n. 123 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 2013, n. 882 ss, 904 ss et 909 ss ; Klaus A. VALLENDER, in Bernhard EHRENZELLER et al. [éd.], Die Schweizerische Bundesverfassung, St-Galler Kommentar, 3ème éd., 2014, p. 594 ss ad art. 27 Cst.). La liberté économique peut, à l'instar des autres droits fondamentaux, être limitée conformément à l'art. 36 Cst.

b. À teneur de l'art. 5 al. 2 Cst., l'activité de l'État doit répondre à un intérêt public et être proportionnée au but visé. Toute restriction d'un droit fondamental doit être proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en oeuvre soient propres à atteindre le but visé - règle de l'aptitude - et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante - règle de la nécessité - ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis - principe de la proportionnalité au sens étroit -, impliquant une pesée des intérêts (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 134 I 221 consid. 3.3 ; 132 I 49 consid. 7.2). Il commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu'elle soit raisonnable pour la personne concernée (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2).

c. En l'espèce, et pour autant qu'elle souhaite se conformer aux exigences légales, la recourante est libre en tout temps de travailler comme assistante socio-éducative dans le cadre d'une institution exploitant une structure d'accueil familial notamment une crèche. Son interdiction d'accueillir des mineurs soit à titre personnel, soit dans le cadre d'un groupe ou d'une institution pour notamment les recevoir, les réunir, les héberger, leur donner un enseignement, organiser ou diriger leurs loisirs est limitée à deux ans. Comparativement à la période durant laquelle la recourante a refusé de se soumettre aux injonctions de l'autorité intimée, de 2016 jusqu'à la date de la décision attaquée, l'interdiction ne porte pas flanc à la critique. Elle ne peut dans ces circonstances se prévaloir d'une violation du principe de la liberté économique.

Le DIP a effectué une pesée des intérêts entre celui de la recourante à accueillir des enfants à la journée à titre personnel ou dans le cadre de l'association et celui de ces derniers à être placés en conformité avec les exigences légales en matière d'hygiène et de sécurité notamment. Tenant compte de tous les éléments du dossier, il a interdit à la recourante d'accueillir des mineurs durant deux ans, tout en lui laissant la possibilité de travailler comme assistante socio-éducative dans une institution d'accueil familial. La mesure prise est apte et nécessaire à sauvegarder le bien-être des enfants en les protégeant d'un placement dans une institution ou au domicile de la recourante qui les exposerait à des conditions d'hygiène et de sécurité inappropriées. Elle permet aussi à la recourante de continuer à exercer son métier d'assistante socio-éducative comme employée.

Dans ces conditions, la décision querellée respecte le principe de proportionnalité et en définitive est conforme au droit.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

8) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000. - sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juillet 2020 par Madame A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 4 juin 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Robert Assaël, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme Lauber, Mme Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :