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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3978/2020

ATA/1303/2020 du 15.12.2020 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : DÉLAI DE RECOURS;OPPOSITION(PROCÉDURE);NOTION JURIDIQUE GÉNÉRALE
Normes : LPA.62.al1.leta; LPA.17.al1; LPA.62.al3; LPA.17.al3; LPA.16.al1; LPA.62.al5
Résumé : L’espace de quatre mois entre l’envoi de la décision querellée et l’envoi de l’opposition est de nature à indiquer qu’un délai supérieur aux trente jours prévus s’est écoulé entre la réception de la décision et l’opposition. Les problèmes de santé du recourant ne suffisent pas pour admettre l’existence d’un cas de force majeure. L'autorité intimée était fondée à déclarer irrecevable, car tardive, l’opposition de l’intéressé. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3978/2020-AIDSO ATA/1303/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 décembre 2020

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES



EN FAIT

1) Le 29 septembre 2020, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a déclaré irrecevable l'opposition formée le 8 juillet 2019 par Monsieur A______ contre une décision d'octroi de prestations d'aide sociale du 21 mars 2019.

La décision querellée avait été envoyée le 21 mars 2019. Le délai de trente jours pour s'y opposer était échu au moment de l'envoi de l'opposition, le 8 juillet 2019.

2) Par acte du 21 octobre 2020, M. A______ a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales) contre la décision du 29 septembre 2020 concluant à son annulation.

Il n'avait pas pu respecter le délai d'opposition légal pour des raisons essentiellement médicales. Il était malade depuis de nombreuses années et en état de dépression constante. Il était traité par la Doctoresse B______ à Thônex. En raison de sa situation financière précaire, il avait de nombreuses dettes. Il laissait passer de longues périodes avant de consulter son courrier. En effet, compte tenu de sa dépression, il avait peur d'y trouver des factures ou des poursuites. C'était pour ce motif qu'il n'avait pas pris connaissance du courrier reçu du SPC en temps utile pour y répondre.

3) Par arrêt du 25 novembre 2020, la chambre des assurances sociales a transmis le recours à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) comme objet de sa compétence, s'agissant de décisions relatives à de l'aide sociale.

4) Le 26 novembre 2020, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile et dûment transmis à la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Le délai de recours contre une décision finale est de trente jours (art. 62 al. 1 let. a LPA). Il court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 17 al. 1 et 62 al. 3 LPA) et, lorsque son dernier jour est un samedi, un dimanche ou un jour légalement férié, il expire le premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA).

b. La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, le cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l'intéressé en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée (ATF 113 Ib 296 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/890/2015 du 1er septembre 2015 consid. 2b).

3) a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même. Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/1068/2015 du 6 octobre 2015 consid. 5a ; ATA/918/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3a). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d'égalité de traitement et n'est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_507/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3 ; 2D_18/2009 du 22 juin 2009 consid. 4.2).

b. Lorsqu'une personne à qui une décision devait être notifiée ne l'a pas reçue, sans sa faute, le délai de recours court du jour où cette personne a eu connaissance de la décision (art. 62 al. 5 LPA). Toutefois, celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis, ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d'une communication officielle à son adresse habituelle, s'il devait s'attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_10/2015 du 2 mars 2015 consid. 4.2 ; 2C_1029/2014 du 17 novembre 2014 consid. 2).

c. De jurisprudence constante, le fardeau de la preuve de la notification d'un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L'autorité supporte donc les conséquences de l'absence de preuve en ce sens que si la notification ou sa date sont contestées et qu'il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi. La preuve de la notification peut néanmoins résulter d'autres indices ou de l'ensemble des circonstances, par exemple un échange de correspondances ultérieur ou le comportement du destinataire (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 et les arrêts cités). L'autorité qui entend se prémunir contre le risque d'échec de la preuve de la notification doit ainsi communiquer ses actes judiciaires sous pli recommandé avec accusé de réception (ATF 129 I 8 consid. 2.2).

d. Les cas de force majeure restent réservés (art. 16 al. 1 2ème phr. LPA). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (ATA/642/2015 du 16 juin 2015 consid. 4 ; ATA/105/2014 du 18 février 2014 consid. 5).

La maladie n'est admise comme motif d'excuse que si elle empêche le recourant d'agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c).

4) En l'espèce, la décision a été adressée à l'intéressé par pli simple le 21 mars 2019. La date à laquelle le recourant a reçu la décision ne ressort pas du dossier. Il ne conteste toutefois pas l'avoir reçue.

L'espace de quatre mois entre l'envoi de la décision querellée, le 21 mars 2019, et l'envoi de l'opposition, le 8 juillet 2019, quatre fois supérieur au délai pour faire opposition, laisse penser qu'un délai supérieur aux trente jours prévus s'est écoulé entre la réception de la décision et l'opposition, ce que le recourant ne conteste au demeurant pas. Les suspensions liées aux féries de Pâques, du 14 au 28 avril 2019, ne sont pas de nature à modifier la conclusion qui précède, ne s'agissant que de quinze jours.

Le recourant invoque ses problèmes de santé, principalement sa dépression et les angoisses qui y sont liées d'ouvrir ses correspondances, de sorte qu'il n'avait que tardivement eu connaissance de la décision du 21 mars 2019. Toutefois, ces explications ne remplissent pas les conditions strictes de la jurisprudence pour admettre l'existence d'un cas de force majeure. Elles ne sont pas étayées par un certificat médical et ne sont pas de nature à empêcher le recourant de confier à une tierce personne l'ouverture de sa correspondance administrative. C'est donc à juste titre que le SPC a déclaré irrecevable, car tardive, l'opposition de l'intéressé formée au mois de mars 2020.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 octobre 2020 par Monsieur A______ contre la décision sur opposition du service des prestations complémentaires du 29 septembre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ ainsi qu'au service des prestations complémentaires.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :