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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2966/2019

ATA/1249/2020 du 08.12.2020 sur JTAPI/549/2020 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : DROIT FISCAL;IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL;IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT;SOUSTRACTION D'IMPÔT;CHARGES COMMERCIALES(DROIT FISCAL);FARDEAU DE LA PREUVE;APPRÉCIATION DES PREUVES;MAXIME INQUISITOIRE;AMENDE;FIXATION DE L'AMENDE;FAUTE;INTENTION;PRINCIPE DE LA CÉLÉRITÉ;PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : LIFD.152.al1; LIFD.53.al2; LPFisc.61.al1; LIFD.152.al3; LHID.53.al3; LPFisc.61.al3; LIFD.184.al1.letb; LIFD.184.al2; LHID.58.al2; LIFD.184.al1.letb.ch1; LHID.58.al2.leta; LIFD.205f; LHID.78f; LIFD.151.al1; LHID.53.al1.par1; LPFisc.59.al1; LIFD.151.al2; LPFisc.59.al2; LIPM.11; LHID.24.al1.leta; LIFD.57; LIPM.12.al2.lete; LIFD.58.al1.letb; LIFD.175.al1; LHID.56.al1; LPFisc.69.al1; CP.12.al2; CP.333.al1; CP.104; CP.12.al3; LIFD.181.al1; LPFisc.74.al1; LIFD.175.al2; LHID.56.al2; LPFisc.69.al2; CP.333.al1; CP.48.lete; Cst.9; Cst.5.al3; Cst.5.al1; Cst.127.al1; Cst.29.al1
Résumé : Examen des conditions d’ouverture d’une procédure en rappel et soustraction d’impôts, du bien-fondé des reprises ainsi que du principe et du montant des amendes. Confirmation que les reprises effectuées par l’AFC-CH dans le cadre d’un contrôle portant sur l’impôt anticipé, reprises intégralement par l’AFC-GE, sont justifiées, tout comme les amendes. Pas de violation des principes de la bonne foi et de la célérité malgré l’ouverture des procédures trois ans après la connaissance des faits justifiant lesdites procédures.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2966/2019-ICCIFD ATA/1249/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 décembre 2020

4ème section

 

dans la cause

 

A______ SA
représentée par Mes Pietro Sansonetti et Julien Witzig, avocats

contre


ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
29 juin 2020 (JTAPI/549/2020)


EN FAIT

1) Le litige concerne l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) pour les années 2009 à 2013 de la société A______ SA (ci-après : A______), sise à Genève et inscrite au Registre du commerce le 18 juillet 1996, laquelle a pour but la distribution, la commercialisation et l’exportation de produits, en particulier de montres, joaillerie, bijouterie, ainsi que les opérations analogues liées à ces domaines.

2) Par courrier du 7 octobre 1998, A______ a demandé à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) à pouvoir obtenir un statut fiscal de société auxiliaire jusqu’au 31 décembre 2000. Elle faisait partie d’un groupe de sociétés possédant et exploitant à Moscou plusieurs boutiques de luxe. Elle agissait en tant que commissionnaire à l’achat, chargée de vérifier les marchandises arrivant à Genève et de les expédier à Moscou, celles-ci étant négociées, achetées et payées par les autres sociétés du groupe situées en Russie.

Le 13 octobre 1998, l’AFC-GE a donné son accord pour autant que le bénéfice ne soit pas inférieur à 5 % du coût des dépenses.

3) Le 25 juin 2002, faisant suite à une demande de renseignements de
l’AFC-GE, A______ a expliqué que la commission de 3 % qu’elle percevait tenait compte de la répartition de l’activité commerciale entre les sociétés du groupe. Elle a également indiqué avoir pris à bail une villa à B______ (ci-après : la villa), utilisée par les actionnaires et dirigeants du groupe lorsqu’ils venaient à Genève dans le cadre des affaires de la société. Le choix s’était porté sur la location d’une villa de luxe « comme les contacts avec des fournisseurs suisses ou étrangers prestigieux le [commandaient] ».

4) Le 16 novembre 2010, A______ a déposé sa déclaration fiscale 2009.

5) Le 8 mars 2012, A______ a déposé sa déclaration fiscale 2010.

6) Par courriel du 29 février 2012 de la fiduciaire C______ SA, A______, a remis, suite à un entretien téléphonique avec un collaborateur de l’AFC-GE, les annexes A et G complétant sa déclaration fiscale 2010, ainsi que le détail des intérêts calculés sur le « compte de liaison sociétés du groupe ». Les opérations comptabilisées sur ce compte n’étaient pas d’ordre privé et ne concernaient pas ses actionnaires. Pour des raisons de confidentialité, leur identité ne pouvait pas être fournie. Il s’agissait toutefois de personnes physiques domiciliées à l’étranger.

7) A______ a été taxée sur la base des déclarations remises pour les années 2009 à 2013 respectivement par bordereaux ICC et IFD 2009 du 8 mars 2012, par bordereaux ICC et IFD 2010 du 8 mars 2012, par bordereaux ICC et IFD 2011 du 18 avril 2013, par bordereaux ICC et IFD 2012 du 2 avril 2014 et par bordereaux ICC et IFD 2013 du 14 janvier 2015.

8) Tous les bordereaux ICC et IFD 2009 à 2013 sont entrés en force.

9) En 2014, l’administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a procédé à une révision des comptes de A______.

10) Par courriel du 9 octobre 2014, l’AFC-CH a indiqué à A______ que suite à la révision des comptes de la société, trois points allaient faire l’objet d’investigations supplémentaires.

Le fait que la commission facturée n’était calculée qu’une seule fois par année au 31 décembre avait pour conséquence que le solde moyen du compte courant (ci-après : c/c) était artificiellement réduit. Si, comme dans le cadre d’une opération entre tiers indépendants, la commission avait été exigée périodiquement, le montant moyen du c/c aurait été augmenté de la moitié de la commission annuelle. Il en résultait qu’un intérêt complémentaire aurait dû être calculé sur ces montants.

À teneur du contrat de travail du 1er avril 2011 de l’employé engagé en qualité de « vice president sales and marketing » et du « business model » de A______, il apparaissait que cette charge salariale aurait dû être supportée par une autre société du groupe.

En sus du loyer du Port Franc à Genève, elle avait supporté en 2009 et 2010 la location et les charges relatives à une villa. La prise en charge de ces frais apparaissait « totalement improbante ».

11) Par courrier du 2 juillet 2015, l’AFC-CH a notifié à A______ le montant de l’impôt anticipé (ci-après : IA) dû pour les années 2009 à 2013 suite au contrôle opéré. Elle avait constaté d’une part, durant cette période sous contrôle, que les commissions encaissées et certaines charges supportées par la société n’avaient pas respecté le principe de pleine concurrence en matière de prix de transfert. D’autre part, la société avait accordé un prêt déguisé en renonçant à réclamer des intérêts à un débiteur. Dans ces deux cas, les différences constatées étaient assimilées à des prestations appréciables en argent, soumises à l’IA. Le montant total des prestations faisant l’objet de la reprise s’élevait à CHF 689'951.85. Elle prenait note de l’acceptation de ses prétentions par les organes de la société, avec la précision que la procédure de contrôle prendrait fin dès le règlement de la taxation.

12) Par courriers des 7 et 18 août 2015, l’AFC-CH a communiqué à l’AFC-GE l’existence des prestations appréciables en argent accordées par A______ à ses actionnaires et aux sociétés appartenant au groupe A______ durant les années 2009 à 2013.

13) Par courrier du 14 octobre 2015, A______ a remis à l’AFC-GE une copie du courrier de l’AFC-CH du 2 juillet 2015 et lui a fourni des précisions sur les trois éléments ayant fait l’objet de reprises d’IA, à savoir l’absence de perception d’intérêts débiteurs sur le montant de la commission durant l’année ainsi que le fait que la moitié du loyer de la villa et le salaire d’un des employées entre 2011 et 2013 devaient être considérés comme des prestations appréciables en argent.

Le fonctionnement de la société et les charges supportées par celle-ci, en particulier celles en lien avec la location de la villa, avaient été décrits en détail à
l’AFC-GE lorsqu’elle avait sollicité un statut fiscal.

Elle recevait une commission calculée sur la base du chiffre d’affaires annuel des achats effectués en application du contrat de commissionnaire. En raison de cette méthode de calcul, la commission était versée annuellement. En raison du paiement annuel de la commission, l’AFC-CH considérait qu’elle aurait dû requérir le paiement d’intérêts durant les exercices concernés. Le principe d’une computation annuelle avait été présenté à l’AFC-GE lors des discussions relatives à son statut fiscal en 1998 et 2002.

Jusqu’à la fin de l’année 2010, ses actionnaires se chargeaient eux-mêmes d’entretenir, pour le compte de la société, des relations commerciales avec les fabricants suisses et étrangers. Les rencontres avec ces derniers étaient organisées dans la villa qu’elle avait pris en location et dont l’usage n’était pas privé.
L’AFC-CH avait toutefois estimé que la moitié de la charge de loyer devait être considérée comme une prestation appréciable en argent en faveur de ses actionnaires. La location de la villa avait également été mentionnée lors des discussions sur le renouvellement de son statut fiscal en 2002.

Suite à la résiliation du bail de la villa, elle avait engagé un employé afin de la représenter auprès des fournisseurs suisses et européens pour les tâches qu’effectuaient précédemment les actionnaires du groupe. Contrairement à ce qu’avait considéré l’AFC-CH, cette activité était exercée pour le compte de la société et non pas pour celui des sociétés du groupe.

14) Par courrier recommandé du 13 septembre 2018, l’AFC-GE a annoncé à A______ l’ouverture de procédures en rappel et soustraction d’impôt pour les années fiscales 2009 à 2013. La division principale de l’IA de
l’AFC-CH l’avait informée qu’elle avait accordé à des inconnus des prestations appréciables en argent sous forme de charges non justifiées et d’absence
d’intérêts. En cas de déclaration inexacte, les reprises suivantes seraient
effectuées : CHF 279'228.- pour 2009, CHF 217'072.- pour 2010, CHF 393'989.- pour 2011, CHF 528'780.- pour 2012 et CHF 552'112.- pour 2013.

15) Dans son courrier du 28 septembre 2018, A______ a reproché à l’AFC-GE d’avoir attendu près de trois ans avant d’ouvrir des procédures en rappel et soustraction d’impôt. Cette dernière connaissait les faits sur lesquels elle s’était basée pour ouvrir ces procédures, de sorte qu’en l’absence de faits nouveaux les conditions de leur ouverture n’étaient pas remplies. Aucun comportement répréhensible (intentionnel ou par négligence) ne pouvait lui être reproché, dès lors qu’elle avait communiqué bien avant à l’AFC-GE l’ensemble des faits sur lesquels l’IA avait été prélevé.

16) Une entrevue s’est déroulée le 3 décembre 2018 dans les locaux de
l’AFC-GE.

17) Par courrier du 28 février 2019, A______ a complété son argumentation.

18) Par lettre recommandée du 3 avril 2019, l’AFC-GE a informé l’intéressée que les procédures en rappel et soustraction d’impôt concernant les années fiscales 2009 à 2013 étaient terminées et lui a remis les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende pour ces années.

Le montant total des bordereaux de rappel d’impôt s’élevait à
CHF 459'839.75 et celui des bordereaux amendes à CHF 230'916.-. La motivation des amendes était la suivante : en comptabilisant des charges non justifiées et en omettant de comptabiliser des intérêts (produits), la société n’avait pas été imposée sur sa réelle capacité contributive. Il en résultait une soustraction d’impôt qui était due à une faute commise par négligence. Compte tenu de sa bonne collaboration, la quotité de l’amende était fixée à la moitié du montant de l’impôt soustrait.

19) Par courrier du 2 mai 2019, A______ a formé une réclamation à l’encontre de ses bordereaux de rappel d’impôt et d’amende 2009 à 2013.

20) Par décision sur réclamation du 17 juillet 2019, l’AFC-GE a maintenu les reprises et les amendes pour les années 2011 à 2013, mais a modifié les taxations et amendes 2009 et 2010 tout en maintenant la quotité de ces dernières.

Le statut fiscal annuel avait été accordé jusqu’au 31 décembre 2000, selon la lettre du 7 octobre 1998. Le courrier du 25 juin 2002 n’avait pas de portée juridique dès lors qu’aucun accord n’avait été donné pour les années consécutives. Ces lettres ne pouvaient engager l’AFC-GE pour les années fiscales 2009 à 2013, ce d’autant plus que la validité usuelle d’un accord fiscal était de cinq ans, renouvelable sur demande du contribuable si les conditions demeuraient satisfaites. En l’occurrence, elle n’avait pas bénéficié d’un ruling pour les années 2009 à 2013 ni reçu aucune assurance de la part de l’AFC-GE sur les trois objets des reprises. Celle-ci n’était pas non plus tenue d’aller chercher des renseignements complémentaires dans des taxations entrées en force depuis au moins huit ans. Faute de motif de rappel d’impôt, elle avait admis un dégrèvement pour les années fiscales 2009 et 2010, compte tenu des renseignements à sa disposition concernant l’absence d’intérêts sur le compte courant.

Concernant le principe de la bonne foi, les trois ans écoulés entre la reprise faite par l’AFC-CH et l’ouverture des procédures en rappel et soustraction d’impôt ne donnait pas à l’intéressée l’assurance qu’il n’y aurait aucune correction des taxations concernées.

En ne demandant aucune confirmation à l’AFC-GE sur les trois objets de reprises, l’administrateur vice-président de la société avait pour le moins agi par négligence en ne prenant pas les précautions commandées par les circonstances. L’amende fixée à la moitié de l’impôt soustrait apparaissait ainsi modérée et justifiée.

21) Par acte du 16 août 2019, A______ a recouru contre cette décision sur réclamation par-devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), en concluant principalement à son annulation et à ce qu’il soit dit et prononcé que les conditions d’ouverture des procédures en rappel et soustraction d’impôt n’étaient pas réalisées.

Alors qu’elle avait spontanément et aussitôt informé l’AFC-GE de l’issue du contrôle en matière d’IA afin de s’assurer qu’aucune correction des taxations concernées ne serait effectuée, l’AFC-GE avait attendu trois ans avant d’ouvrir les procédures en rappel et soustraction d’impôt. Ce délai était contraire au principe de la bonne foi et justifiait l’annulation de la décision sur réclamation attaquée.

Elle avait communiqué tous les éléments ayant fait l’objet de la décision de l’AFC-CH bien avant les périodes fiscales concernées. Ces renseignements faisaient partie du dossier en mains de l’AFC-GE ou à tout le moins censés faire partie de sa « sphère de possession ».

Le principe du calcul des commissions et de leur versement annuel avait été porté à la connaissance de l’AFC-GE dans le courrier du 25 juin 2002. Cette dernière avait en outre requis et obtenu des explications sur la manière dont les commissions et les intérêts avaient été calculés sur le compte litigieux dans le cadre de la taxation 2010. Ce mode de calcul avait été accepté par l’AFC-GE tant dans sa décision de taxation 2010 que dans sa décision sur réclamation du 17 juillet 2019 qui, curieusement, n’avait procédé aux dégrèvements correspondants que pour 2009 et 2010, à l’exclusion des périodes 2011 à 2013.

Dans son courrier du 25 juin 2012 (recte : 25 juin 2002), elle avait dûment informé l’AFC-GE sur les motifs de la location de la villa et sur le fait que celle-ci n’avait jamais été utilisée à titre privé. L’AFC-GE ne lui avait jamais posé de questions ou demandé de renseignements complémentaires à ce sujet dans le cadre des taxations 2009 à 2013.

Le nouvel employé engagé après la résiliation du bail de la villa travaillait effectivement pour son compte dans le cadre de son activité de commissionnaire d’achat. L’AFC-GE ayant été dûment informée de cet engagement et des charges salariales qui en découlaient lors des périodes fiscales concernées, elle ne pouvait contester avoir reçu tous les éléments nécessaires à une taxation complète et exacte. En outre, une interprétation différente de l’AFC-CH ne constituait pas un cas de rappel d’impôt. C’était par gain de paix qu’elle avait convenu d’une reprise partielle au titre de prestations appréciables en argent avec l’AFC-CH. Par conséquent, faute d’éléments nouveaux, les conditions du rappel d’impôt n’étaient pas réalisées.

Il en allait de même de la procédure en soustraction d’impôt. Elle ne voyait pas la nécessité qu’il y avait à demander une confirmation à l’AFC-GE sur les trois objets des reprises, car elle n’en avait « pas vu l’utilité, tant la situation était évidente ». On ne pouvait dès lors pas parler de négligence coupable dans son cas.

22) Dans sa réponse du 13 décembre 2019, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Ni l’existence des charges non justifiées par l’usage commercial, ni les montants des reprises n’étaient contestés. Le principe de la bonne foi n’était pas violé.

La procédure de rappel d’impôt avait été ouverte à bon droit. La connaissance des éléments indiqués par A______ lors des négociations sur son statut fiscal en 1998 et 2002 avec la direction des affaires fiscales ne pouvait être imputable aux service de taxation. Sur la base de ses déclarations fiscales 2009 à 2013, l’AFC-GE ne pouvait pas s’apercevoir que la société avait pris en charge la moitié du loyer d’une villa pour le compte des actionnaires, ni que le salaire d’un employé aurait dû être à la charge du groupe de sociétés A______, ni qu’il résultait une diminution artificielle des intérêts dus en raison du choix opéré dans la fréquence des versements de la commission. C’était d’ailleurs à tort que
l’AFC-GE avait dégrevé dans sa décision sur réclamation du 27 juillet 2019 les reprises relatives à l’absence d’intérêts pour les années fiscales 2009 et 2010. Elle s’en rapportait à justice concernant l’annulation du dégrèvement de ces reprises.

Les éléments objectifs et subjectifs de l’infraction de soustraction fiscale étaient réunis dans le cas présent. La quotité des amendes (moitié de l’impôt soustrait) était extrêmement mesurée. Elle tenait compte de la négligence des organes de la société, de leur bonne collaboration et des montants importants soustraits sur plusieurs années.

23) Par réplique du 31 janvier 2020, A______ a persisté dans les conclusions de son recours. Les bordereaux de taxation 2014 à 2016 notifiés après l’annonce du résultat de la révision opérée par l’AFC-CH, lui permettaient d’interpréter comme une confirmation le fait que ses taxations 2009 à 2013 ne seraient pas remises en question. En n’émettant aucune réserve lors des taxations des années subséquentes et en n’ouvrant les procédures litigieuses que trois ans après avoir reçu son courrier du 14 octobre 2015, l’AFC-GE avait eu un comportement contradictoire et donc contraire au principe de la bonne foi. Ce comportement contradictoire était également constaté dans la réponse de l’AFC-GE, lorsque cette dernière reconnaissait avoir procédé à tort à des dégrèvements pour les années fiscales 2009 et 2010. La connaissance des faits communiqués dans ses courriers des 7 octobre 1998 et 25 juin 2002 était imputable aux taxateurs. En outre, l’ouverture des procédures litigieuses n’était pas fondée sur des faits nouveaux, mais sur une nouvelle appréciation des faits. Enfin, sa culpabilité n’était pas démontrée.

24) Par duplique du 31 mars 2020, l’AFC-GE a persisté dans ses conclusions.

25) Par jugement du 29 juin 2020, le TAPI a rejeté le recours.

L’ouverture des procédures en rappel et en soustraction d’impôt trois ans après la réception du courrier de l’intéressée du 14 octobre 2015 ne pouvait être interprétée comme un silence valant acceptation tacite de l’AFC-GE qu’il n’y aurait pas de correction des années fiscales litigieuses. Aucune promesse dans ce sens n’avait été faite. La notification des bordereaux de taxation 2014 à 2016 après l’annonce du résultat de la révision opérée par l’AFC-CH n’était pas une confirmation que ses taxations 2009 à 2013 ne seraient pas remises en question.

Les courriers des 7 octobre 1998 et 25 juin 2002 adressés à la direction générale des affaires fiscales ne précisaient pas le calcul des commissions et la manière dont les intérêts étaient calculés. Le courrier du 16 mars 2011 et le courriel du 29 février 2012 adressés à l’AFC-GE ne permettaient pas non plus de comprendre comment étaient calculés précisément les intérêts sur ces commissions. La lettre du 25 juin 2002 mentionnait, certes, que la recourante louait une villa de luxe pour les dirigeants et actionnaires du groupe, mais pas qu’elle servait également à un usage privé. Sur la base des déclarations fiscales des années en cause, les taxateurs ne pouvaient pas se rendre compte que le salaire d’un employé ne devait pas être pris en charge par l’intéressée. Ces déclarations fiscales ne contenant pas d’inexactitudes flagrantes, l’AFC-GE n’avait pas à se livrer à des investigations complémentaires au moment de procéder aux taxations et on ne pouvait lui reprocher une négligence grave. Les conditions permettant l’ouverture de la procédure de rappel d’impôt étaient donc remplies.

Compte tenu des montants relativement faibles des dégrèvements mentionnés dans les bordereaux ICC et IFD 2009 et 2010 du 17 juillet 2019 et dès lors que l’AFC-GE s’en était rapportée à justice sur ce point, il était renoncé à une reformatio in pejus.

Les conditions objectives et subjectives de la soustraction d’impôt étaient réalisées. La société avait transmis à l’AFC-GE des déclarations fiscales inexactes ou incomplètes dans la mesure où elle avait pris à sa charge des frais non justifiés commercialement et n’avait pas comptabilisé des intérêts sur des commissions en sa faveur. Les organes de la société ne s’étaient pas assurés de la justification commerciale des charges comptabilisées, de sorte qu’il y avait lieu de considérer que la société, par l’intermédiaire de ses organes, était coupable de soustraction par négligence. L’AFC-GE n’avait pas excédé ni abusé de son pouvoir d’appréciation en fixant la quotité de l’amende à la moitié de l’impôt soustrait.

26) Par acte du 29 juillet 2020, A______ a interjeté recours contre le jugement précité par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant à son annulation ainsi qu’à celle de la décision sur réclamation du 17 juillet 2019, à ce qu’il soit dit que les conditions du rappel d’impôt et de la soustraction fiscale n’étaient pas réalisées pour les périodes fiscales 2009 à 2013, à ce que les frais de procédure soient mis à la charge de l’AFC-GE et à ce que cette dernière soit condamnée à lui allouer une indemnité équitable de procédure.

Reprenant l’argumentation déjà développée devant le TAPI, la recourante a précisé que contrairement à ce qu’avait retenu le TAPI, elle contestait tant le
bien- fondé que le montant des reprises.

Le principe du calcul des commissions et son versement annuel avait été exposé à l’AFC-GE il y avait plus de vingt ans déjà, tant par écrit que par oral. C’était d’ailleurs à la requête de l’autorité qu’elle avait détaillé le fonctionnement de la commission de 3 % dans son courrier du 25 juin 2002. Ces éléments avaient été acceptés par l’AFC-GE tant dans sa taxation 2010 que dans la décision sur réclamation du 17 juillet 2019. L’administration avait ainsi admis avoir connu la méthode de computation de la commission et des intérêts y relatifs. Par ailleurs, l’AFC-GE n’avait pas demandé d’informations complémentaires suite à la réception du courriel du 29 février 2012, de sorte que l’on pouvait comprendre qu’elle se contentait des réponses apportées. L’AFC-GE était donc au courant du principe et du fonctionnement de la commission. S’il devait être retenu que tel n’était pas le cas, il fallait considérer que l’autorité avait failli à son devoir d’analyse complémentaire.

L’utilisation à titre privé de la villa n’avait jamais été établie. Elle avait toujours contesté que tel état le cas, mais avait accepté une remise partielle au titre de prestations appréciables en argent sur ce poste à titre de compromis avec l’inspecteur en charge de la révision afin d’éviter un litige en matière d’IA avec l’AFC-CH. L’AFC-GE ne pouvait toutefois rien en déduire. La location de la villa lui avait permis d’organiser des événements d’affaires. Les charges en lien avec la villa avaient figuré come telles dans ses états financiers et l’AFC-GE n’avait jamais posé de question. Aucun élément factuel ne permettait de remettre en cause l’utilisation commerciale de la villa. Compte tenu du fardeau de la preuve, l’administration avait échoué à prouver la supposée utilisation privée de la villa.

L’AFC-GE avait été dûment informée de l’engagement d’un nouvel employé en 2011 à la suite de la résiliation du contrat de bail de la villa ainsi que des charges salariales y relatives. L’autorité n’était ainsi légitimée à contester l’exactitude et la complétude des indications fournies. Elle avait convenu d’une reprise partielle sur ce point avec l’AFC-CH par gain de paix pour éviter une procédure contentieuse en matière d’IA.

Les conditions objectives et subjectives de la soustraction d’impôt n’étaient pas non plus réalisées. Elle avait fourni toutes les indications nécessaires à sa taxation complète et exacte, soit en particulier la méthode de calcul de sa commission et des intérêts sur celle-ci, les charges et explications sur la location de la villa ainsi que les activités de l’employé et les charges salariales y relatives. Elle ne s’était dès lors pas rendue coupable d’un comportement illicite. Le fait que l’AFC-CH ait procédé à une analyse différente de la situation, sous l’angle de l’IA, ne suffisait pas à apporter la preuve du caractère illicite de ses agissements. Il était évident à la lecture du dossier qu’elle pensait agir conformément à la loi, raison pour laquelle elle avait immédiatement informé l’AFC-GE du « caractère particulier des résultats de sa négociation avec [l’AFC-CH] ». Les administrateurs de la société ne se doutaient par ailleurs pas que les éléments repris par l’AFC-CH pouvaient constituer des prestations appréciables en argent susceptibles d’affecter son imposition. Si l’AFC-GE soutenait le contraire, elle devait le prouver de manière concrète.

Un délai de trois ans entre la prise de connaissance des faits par l’AFC-GE et l’ouverture de la procédure était manifestement excessif. Ce délai de latence et la tardiveté de la procédure contestée avaient eu pour conséquence de générer des intérêts moratoires excessivement élevés, lesquels représentaient une véritable sanction qu’elle ne devait pas assumer à la lumière de son absence totale d’influence sur le retard de l’AFC-GE.

27) Dans sa réponse du 28 août 2020, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours, relevant qu'aucun argument nouveau ni aucune nouvelle pièce déterminante susceptible d'influer sur le sort du litige n'avait été avancé ou produit par la recourante dans son recours, de sorte qu'elle priait la chambre administrative de se référer à sa réponse devant le TAPI.

28) Les parties ont été informées le 29 septembre 2020 que la cause était gardée à juger.

29) Pour le surplus, les arguments des parties seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Le litige concerne les périodes fiscales 2009 à 2013, tant en matière d’ICC que d’IFD, de sorte qu’il convient au préalable d’examiner le droit matériel applicable.

b. De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues en fonction du droit en vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (ATA/191/2020 du 18 février 2020 consid. 4b ; ATA/379/2018 du 24 avril 2018 et les références citées). Le rappel d’impôt relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (ATA/859/2018 du 21 août 2018 et les références citées).

c. Le présent litige porte sur la procédure en rappel et en soustraction d’impôt ouverte en 2018 concernant les périodes fiscales 2009 à 2013. La cause est ainsi régie par le droit en vigueur durant ces périodes, à savoir respectivement les dispositions de la LIFD et celles de la loi sur l’imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15), sous réserve de l’amende, pour laquelle le principe de la lex mitior s’applique (ATA/1270/2017 du 12 septembre 2017).

d. Par ailleurs, la question étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme l'admet la jurisprudence (ATA/463/2020 du 7 mai 2020 consid. 6b).

3) a. La prescription ou la péremption sont des questions de droit matériel que la chambre administrative, à l'instar du Tribunal fédéral, examine d'office lorsqu'elles jouent en faveur du contribuable (ATF 138 II 169 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_760/2017 du 15 juin 2018 consid. 4 ; ATA/600/2020 du 16 juin 2020 consid. 4b).

b. Le droit d'introduire une procédure de rappel d'impôt s'éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète
(art. 152 al. 1 LIFD ; art. 53 al. 2 LHID ; art. 61 al. 1 LPFisc). Le droit de procéder au rappel d'impôt s'éteint quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 152 al. 3 LIFD ; art. 53 al. 3 LHID ; art. 61 al. 3 LPFisc), ce délai étant un délai de péremption.

c. Avant le 1er janvier 2017, la poursuite pénale de la soustraction consommée se prescrivait dans tous les cas par quinze ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'avait pas été effectuée ou l'avait été de façon incomplète, ce délai ne pouvant être prolongé (art. 184 al. 1 let. b et al. 2 LIFD et art. 58 al. 2 LHID, dans leur teneur avant le 1er janvier 2017, cum art. 333 al. 6
let. b CP, en relation avec l'ATF 134 IV 328 ). La prescription était en outre interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite du contribuable
(art. 184 al. 2 LIFD et 58 al. 3 LHID, dans leur teneur avant le 1er janvier 2017). Depuis le 1er janvier 2017, la poursuite pénale se prescrit, en cas de soustraction d'impôt consommée, par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou l'a été de façon incomplète (art. 184
al. 1 let. b ch. 1 LIFD ; art. 58 al. 2 let. a LHID). La prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente (184 al. 2 LIFD ;
art. 58 al. 3 LHID) avant l'échéance du délai de prescription. En vertu des
art. 205f LIFD et 78f LHID, le nouveau droit est applicable au jugement des infractions commises au cours de périodes fiscales précédant le 1er janvier 2017 s'il est plus favorable que le droit en vigueur au cours de ces périodes fiscales (arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 4.3 ; 2C_11/2018 du 10 décembre 2018 consid. 5.2 ; 2C_333/2017 du 12 avril 2018 consid. 8).

d. En l'occurrence, la question de la péremption et de la prescription n'est problématique ni pour les procédures en rappel d'impôt, ni pour les amendes tant sous l'angle du nouveau que de l'ancien droit pour les années 2009 à 2013, compte tenu notamment de la décision d’ouverture des procédures litigieuses de l’autorité du 13 septembre 2018.

4) La recourante conteste le principe de l'ouverture d'une procédure en rappel d'impôt. Il convient ainsi d'examiner si les conditions pour procéder à celle-ci étaient réalisées pour les périodes fiscales considérées.

a. Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque-là inconnus de l'autorité fiscale lui permettent d'établir qu'une taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou qu'une taxation entrée en force est incomplète ou qu'une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou à un délit commis contre l'autorité fiscale, cette dernière procède au rappel de l'impôt qui n'a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 151 al. 1 LIFD ; art. 53 al. 1 phr. 1 LHID ;
art. 59 al. 1 LPFisc). Lorsque le contribuable a déposé une déclaration complète et précise concernant ses éléments imposables et que le département en a admis l'évaluation, un rappel d'impôt est exclu, même si cette évaluation était insuffisante (art. 151 al. 2 LIFD ; art. 59 al. 2 LPFisc).

b. Le rappel d'impôt n'est soumis qu'à des conditions objectives et implique qu'une taxation n'a, à tort, pas été établie ou est restée incomplète, de sorte que la collectivité publique a subi une perte fiscale. Il suppose également un motif de rappel d'impôt, qui peut résider dans la découverte de faits ou de moyens de preuve qui ne ressortaient pas du dossier dont l'autorité disposait au moment de la taxation, une faute du contribuable n'étant pas exigée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_292/2020 du 19 juin 2020 consid. 4.1 ; 2C_416/2013 du 5 novembre 2013 consid. 8.1).

Le rappel d'impôt ne peut porter que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale dispose de nouveaux éléments (arrêts du Tribunal fédéral 2C_3/2019 du
4 juillet 2019 consid. 6.1 ; 2C_760/2017 du 15 juin 2018 consid. 6.1 et les références).

En d'autres termes, au moment de procéder à la taxation, l'autorité fiscale peut se fonder sur les éléments déclarés sans se livrer à des investigations complémentaires. Elle n'a cette obligation que si la déclaration contient des inexactitudes flagrantes. Ce ne sont que ces défauts évidents qui conduisent à reconnaître une violation du devoir d'instruction de l'autorité et qui ont pour conséquence de retenir qu'il n'existe pas de « faits inconnus », au sens de l'art. 151 al. 1 LIFD notamment, pour justifier un rappel d'impôt (arrêt du Tribunal fédéral 2C_803/2019 du 26 février 2020 consid. 4.2 et les références citées). Lorsque l'autorité fiscale aurait dû se rendre compte de l'état de fait incomplet ou inexact, par exemple à la lecture des indications contenues dans la déclaration ou des pièces déposées par le contribuable, celui-ci n'est plus censé être inconnu et le rapport de causalité adéquate entre la déclaration lacunaire et la taxation insuffisante est interrompu, de sorte que les conditions pour procéder ultérieurement à un rappel d'impôt font défaut (ATF 144 II 359 consid. 4.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_258/2017 du 2 juillet 2018 consid. 4.5.1 ;
Hugo CASANOVA, Le rappel d'impôt, RDAF 1999 II 3, p. 11). Cette rupture du lien de causalité est soumise à des exigences sévères, à savoir une négligence grave imputable à l'autorité fiscale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 et 2C_1089/2018 du 20 décembre 2019 consid. 9.1 ; 2C_674/2016 du 5 décembre 2017 consid. 4.1). Il n'y a pas de négligence grave de l'autorité de taxation qui n'a pas connaissance d'informations à disposition d'un autre secteur de l'administration, sauf s'il est établi que ces informations ont effectivement été communiquées, notamment entre les taxateurs du service des personnes physiques et ceux du service des personnes morales (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 et 2C_1089/2018 précités consid. 9.1 ; 2C_1018/2015 du
2 novembre 2017 consid. 6.1 et les références citées).

Des inexactitudes qui ne sont que décelables, sans être flagrantes, ne permettent pas de considérer que certains faits ou moyens de preuve étaient déjà connus des autorités au moment de la taxation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_632/2012 du 28 juin 2013 consid. 3.4 ; 2C_26/2007 du 10 octobre 2007 consid. 3.2.2). En effet, l'autorité fiscale peut en principe considérer que la déclaration d'impôt est conforme à la vérité et complète. Elle n'a pas l'obligation, en l'absence d'indice particulier, de se mettre à la recherche de renseignements supplémentaires. En particulier, que l'autorité de taxation puisse déduire de l'augmentation de fortune d'une année à l'autre qu'il y a eu des revenus non déclarés ne remplace pas une déclaration complète du revenu (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 précité consid. 5.1 ; 2P.15/2004 du 22 décembre 2004 consid. 5.3), tout comme il ne peut être exigé de l'autorité fiscale qu'elle confronte les déclarations remplies par les sociétés, traitées par un service, à celles remplies par un contribuable, personne physique, examinées par un autre de ses services (arrêt du Tribunal fédéral 2C_898/2015 du 12 octobre 2016 consid. 3.7 ; Hugo CASANOVA, op. cit., p. 12). À cet égard, le grand nombre de décisions à prendre rend illusoire une vérification de toutes les indications du contribuable (Hugo CASANOVA, op. cit., p. 11).

En revanche, dans la mesure où le contribuable déclare de manière complète, sur un plan quantitatif, les éléments imposables et que leur évaluation a été acceptée sans changement lors de la taxation, une procédure en rappel d’impôt n’est plus possible, même si l’évaluation était insuffisante (Circulaire n° 21 de l’AFC-CH, Le droit de rappel d’impôt et le droit pénal fiscal dans la LIFD, 7 avril 1995, ch. 2.2). De plus, de manière générale, la découverte d’une mauvaise appréciation des preuves ou une mauvaise application du droit ne saurait donner lieu à un rappel d’impôt, tout comme celle d’une simple sous-évaluation des éléments imposables pour laquelle les art. 151 al. 2 LIFD et 53 al. 1 LHID excluent explicitement l’adaptation ultérieure de la taxation (Hugo CASANOVA, op. cit., p. 12).

5) a. Selon les art. 11 LIPM, 24 al. 1 let. a LHID et 57 LIFD, l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Les amortissements et les provisions qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial sont considérés comme bénéfice net imposable (art. 12 al. 1 let. e LIPM et 58 al. 1 let. b LIFD). L'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net, tel qu'il découle du compte de pertes et profits établi selon les règles du droit commercial (art. 57, 58, al. 1 LIFD ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 224).

D'après l'art. 58 al. 1 let. b LIFD, le bénéfice net imposable comprend tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l'usage commercial, au nombre desquels figurent les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial.

Selon la jurisprudence, il y a distribution dissimulée de bénéfice, lorsqu'une personne morale fait à ses actionnaires ou à toute personne la ou les touchant de près, sans contre-prestation équivalente, une prestation appréciable en argent, qu'elle n'aurait pas consentie à des tiers dans les mêmes circonstances (ATF 131 II 593 consid. 5.1 p. 607) et que les organes de la société auraient pu reconnaître le caractère insolite de cette prestation (ATF 119 Ib 431 consid. 2b p. 435; 115 Ib 274 consid. 9b p. 279 et la jurisprudence citée).

La question de savoir si la prestation appréciable en argent est intervenue à la suite de l'absence de comptabilisation d'un revenu ou de la comptabilisation d'une charge infondée est en revanche sans importance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_777/2019 du 28 avril 2020 consid. 5.1 et les arrêts cités).

b. Dans le domaine des prestations appréciables en argent, telles que des distributions dissimulées de bénéfice, le fardeau de la preuve se répartit comme suit : les autorités fiscales doivent apporter la preuve que la société a fourni une prestation et qu'elle n'a pas obtenu de contre-prestation ou une contre-prestation insuffisante ; si les preuves recueillies par l'autorité fiscale fournissent suffisamment d'indices révélant l'existence d'une telle disproportion, il appartient alors au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations contraires (arrêts du Tribunal fédéral 2C_207/2019 du 16 juillet 2019 consid. 4.2 ; 2C_1157/2016 du
2 novembre 2017 consid. 4.2.3). Par ailleurs, une fois qu’un fait est tenu pour établi, la question du fardeau de la preuve ne se pose plus (ATF 137 III 226 consid. 4.3). Les autorités doivent en effet pouvoir s'assurer que seules des raisons commerciales, et non les rapports personnels et économiques étroits entre la société et le bénéficiaire de la prestation, étaient déterminantes pour le choix de la prestation présentant un caractère insolite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_18/2011 du 31 mai 2011 consid. 5.2 et les références citées ; ATA/222/2019 du 5 mars 2019 consid. 7). La répartition du fardeau de la preuve susmentionnée s'applique le cas échéant également à la procédure ouverte en lien avec d'éventuelles infractions fiscales (arrêts du Tribunal fédéral 2C_11/2018 du 10 décembre 2018 consid. 6.2 ; 2C_1157/2016 du 2 novembre 2017 consid. 4.2.3).

Dans la taxation des sociétés, s’agissant de charges représentant des prestations insolites, il appartient à la société contribuable d’établir leur caractère de charge justifiée par l’usage commercial, afin que les autorités fiscales puissent s’assurer que seules des raisons commerciales, et non les étroites relations personnelles et économiques entre la société et le bénéficiaire de la prestation, ont conduit à la prestation en cause (ATF 119 Ib 431 consid. 2c ; ATA/222/2019 précité consid. 7 et les références citées). Des explications générales et non étayées ne suffisent pas à établir que l’usage commercial justifie les frais en cause. En effet, conformément à la répartition du fardeau de la preuve, il incombe au contribuable d’apporter la preuve que la totalité des dépenses comptabilisées est en relation directe avec l’acquisition ou le maintien du chiffre d’affaires (arrêt du Tribunal fédéral 2A.461/2001 du 21 février 2002 consid. 3.1 ; ATA/222/2019 précité consid. 7 et les références citées).

6) À titre préalable, il convient de relever que la recourante semble confondre les motifs d’ouverture de la procédure de rappel d’impôt, pour laquelle de simples soupçons quant à l'exactitude de la déclaration fiscale sont suffisants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_760/2017 du 15 juin 2018 consid. 6.4 ; 2C_104/2008 du
20 juin 2008 consid. 3.4.1), avec le bien-fondé matériel des rappels.

En l’occurrence, l’AFC-GE a ouvert une procédure en rappel d'impôt et une procédure pénale en soustraction d'impôt pour l'ICC et l'IFD 2009 à 2013 à l'encontre de la recourante le 13 septembre 2018 à la suite d’informations communiquées par l'AFC-CH postérieurement à un contrôle effectué par celle-ci et ayant donné lieu à des reprises en matière d’IA , selon lesquelles la société avait accordé des prestations appréciables en argent sous forme de charges non justifiées et d’absence d’intérêts à ses actionnaires et aux sociétés du groupe A______. Ce simple fait permet de retenir qu’il existait un motif justifiant l’ouverte d’une procédure en rappel d’impôt.

7) a. La recourante prétend que les informations communiquées par l’AFC-CH à l’AFC-GE étaient déjà connues de cette dernière lorsque les taxations ordinaires pour les années litigieuses ont été notifiées. Elle allègue, d’une part, avoir fourni toutes les informations en lien avec le principe et le fonctionnement de la commission dans ses courriers des 7 octobre 1998 et 25 juin 2002 échangés dans le cadre de l’obtention, respectivement du renouvellement de son statut fiscal, et dans son courriel du 29 février 2012, faisant suite à une demande de renseignements de l’AFC-GE relative à l’année fiscale 2010. Elle relève, d’autre part, que les charges liées à la location de la villa et au salaire de l’employé engagé après la résiliation du contrat de bail figuraient dans les états financiers remis en annexe à ses déclarations fiscales. L’AFC-GE avait par ailleurs été dûment informée de la location de la villa dans son courrier du 25 juin 2002.

À titre préalable, il sied de constater qu’il ne peut être retenu comme imputable à l’autorité, et plus particulièrement aux taxateurs de la direction des personnes morales en charge des taxations fiscales de la recourante, la connaissance des différentes informations transmises par celle-ci dans ses courriers des 7 octobre 1998 et 25 juin 2002. D’une part, ces écrits ont été adressés plusieurs années avant les périodes fiscales litigieuses, de sorte qu’en vertu du principe d’étanchéité des exercices notamment, il ne peut être reproché à l’intimée de ne pas s’y être rapportée. D’autre part, lesdites informations ont été transmises à la direction des affaires fiscales dans un contexte bien précis, à savoir celui de l’octroi d’un statut fiscal particulier. Compte tenu de la jurisprudence précitée, il ne peut être retenu une négligence grave de la part des taxateurs du fait qu’ils n’aient pas eu connaissance des informations détenues par la direction des affaires fiscales, étant précisé qu’il n’est ni allégué ni établi qu’une transmission d’informations ait effectivement eu lieu entre ladite direction et celle des personnes morales chargées de la taxation de la recourante. Cette dernière ne saurait en particulier être suivie lorsqu’elle allègue que la jurisprudence susvisée s’appliquait entre les services de taxation des personnes physiques et morales, mais pas entre la direction des affaires fiscales et les services de taxation. Si le Tribunal fédéral se réfère effectivement aux services de taxation des personnes physiques et morales, l’utilisation de l’adverbe « notamment » permet d’en déduire que le même raisonnement s’applique aux autres services de l’autorité fiscale.

b. En ce qui concerne la commission, il ressort du recours devant la chambre de céans et des écritures précédentes de la recourante qu’elle ne conteste pas, en tant que tel, le motif des reprises, à savoir l’absence de perception d’intérêts débiteurs qu’elle aurait dû requérir au vu du paiement annuel de la commission, ou le montant de celles-ci, mais uniquement le fait que le principe de computation annuelle était connu et avait été validé par l’AFC-GE dans les taxations 2009 à 2013, de sorte qu’il n’existerait pas de lien de causalité adéquate entre la supposée déclaration lacunaire et la taxation insuffisante.

Or, comme mentionné ci-dessus, il ne peut être reproché à l’autorité intimée de ne pas avoir eu connaissance, dans le cadre de l’établissement des taxations pour les années 2009 à 2013 de la recourante, des informations transmises les 7 octobre 1998 et 25 juin 2002 en lien avec le fonctionnement de ladite commission. S’agissant du courriel du 29 février 2012, envoyé par la recourante suite à un entretien téléphonique avec un collaborateur de l’AFC-GE dans le cadre de sa taxation 2010 et qui n’aurait donc de portée que dans le cadre de ladite période fiscale la chambre de céans ne peut que souscrire à la conclusion de l’instance précédente selon laquelle il ne permettait pas, pas plus que les annexes qui l’accompagnent, de comprendre comment étaient versés et calculés précisément la commission litigieuse et les intérêts y relatifs. Le fait que ce courriel soit intervenu suite à une demande de l’AFC-GE comme le relève la recourante n’y change rien. Par ailleurs, si la recourante se réfère notamment au « commission agent contract » conclu le 1er mai 2010 avec une société de son groupe pour expliciter dans le cadre de son recours la méthode de calcul de la commission, il ne ressort pas du dossier et les parties ne le prétendent pas que celui-ci aurait été transmis en annexe aux déclarations fiscales litigieuses. Ainsi, contrairement à ce que sous-entend la recourante, il ne peut être retenu que l’absence de perception d’intérêts débiteurs de la part d’une société de son groupe était connue et avait été acceptée dans le cadre de ses taxations.

Pour le surplus, la recourante n’a jamais explicitement indiqué que l’absence de perception d’intérêts sur les commissions ne justifiait pas les reprises litigieuses, mais uniquement qu’il ne s’agissait pas d’un fait nouveau inconnu de l’autorité. Ainsi, dès lors que les reprises de l’AFC-GE ont été établies sur la base de celles retenues par l’AFC-CH lesquelles n’ont pas été contestées par la recourante et que la recourante ne remet pas formellement en cause le motif et le montant des reprises, celles-ci seront confirmées.

c. S’agissant de la villa louée en 2009 et 2010 et de l’employé engagé en 2011, il n'est pas contesté que ces charges figurent dans les comptes d'exploitation et le bilan des années litigieuses de la recourante remis en annexe à ses déclarations fiscales 2009 à 2013.

En l'absence d'indices particuliers, l’AFC-GE pouvait considérer que les déclarations fiscales 2009 à 2013 mentionnant ces charges étaient conformes à la vérité. Elle n'avait donc, à ce moment-là, aucun motif de procéder à un contrôle ou de se mettre en quête de renseignements plus précis. Par ailleurs, les informations contenues dans le courrier de la recourante du 25 juin 2002 ne peuvent être considérées comme ayant été connues des taxateurs lors de l’établissement des taxations litigieuses pour les motifs susmentionnés. Ce n'est ainsi qu'ultérieurement, après que l’AFC-CH lui a communiqué l’existence de prestations appréciables en argent consentie par la recourante, qu'elle a eu connaissance de la comptabilisation de charges infondées. Il s'agissait donc bien de faits nouveaux, soit de faits inconnus de l’AFC-GE lors de la procédure de taxation qui n'ont été découverts qu'à posteriori, ce qui justifiait l'ouverture de la procédure de rappel d'impôt.

L'AFC-CH a constaté et retenu, lors de son contrôle en matière d’IA ouvert en 2014, que la recourante avait pris à sa charge des frais non justifiés par l’usage commercial à savoir le salaire de l’employé et les charges liées à la location de la villa et que c’étaient ses actionnaires ou des personnes proches qui en avaient profité, sans contre-prestation équivalente. Il ressort notamment de ce contrôle que les charges salariales auraient dû être supportées par une autre entité du groupe et que la justification de la prise en charge des frais de la villa par la recourante n’était pas probante. Ledit contrôle a donné lieu à des reprises de la part de l’AFC-CH. Il n’est pas contesté que la recourante a accepté lesdites reprises et s’est acquittée de l’IA y relatif. Dans un tel contexte, la recourante ne peut se contenter d'alléguer – sans apporter aucune preuve ni pièce à l’appui de ses déclarations que la villa n’avait jamais été utilisée à titre privé par ses actionnaires ou des proches et que les activités de l’employé l’avaient été en sa faveur. Il lui incombait, au contraire, compte tenu des règles sur le fardeau de la preuve susmentionnées, de fournir, et ce dès l'ouverture de la procédure fiscale, des explications circonstanciées et étayées permettant d'envisager, de manière cohérente et plausible, des hypothèses autres que celles avancées par l'AFC-GE.

C'est donc à raison que le fardeau de la preuve a été mis à la charge de la recourante et qu'en l'absence de critiques détaillées et étayées des reprises litigieuses, le TAPI a admis que ces reprises dont les montants sont identiques à ceux de la taxation de l’AFC-CH pour l’IA se justifiaient sur le plan de l’impôt direct. Ces reprises seront donc également confirmées.

d. Au surplus, contrairement à ce que semble alléguer la recourante, les rappels d'impôt litigieux ne sont pas dus à une évaluation insuffisante ou à une appréciation différente de certains points de ses comptes de pertes et profits, mais bien à une absence de comptabilisation des intérêts qu'elle aurait dû percevoir de la part d’une société du groupe compte tenu du versement annuel de la commission ainsi qu’à la comptabilisation à tort d’éléments en qualité de charges justifiées par l’usage commercial.

8) La recourante conteste également le bien-fondé et, le cas échéant, le montant des amendes qui lui ont été infligées pour les années 2009 à 2013.

9) a. Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (art. 175 al. 1 LIFD ;
art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 1 LPFisc).

Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent dès lors être réunis : la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier. Les deux premières conditions sont des éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, tandis que la faute en est un élément constitutif subjectif (ATA/1850/2019 du 20 décembre 2019 consid. 4a).

La soustraction est punissable aussi bien qu’elle ait été commise intentionnellement que par négligence. Agit intentionnellement celui qui le fait avec conscience et volonté (art. 12 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0, applicable par renvoi des art. 333 al. 1 et 104 CP). La preuve d'un comportement intentionnel doit être considérée comme apportée lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que le contribuable était conscient que les indications fournies étaient erronées ou incomplètes. Si cette conscience est établie, il faut admettre qu'il a volontairement cherché à induire les autorités fiscales en erreur, afin d'obtenir une taxation moins élevée, ou du moins qu'il a agi par dol éventuel pour ce faire (ATA/1727/2019 précité consid. 7c).

La notion de négligence des art. 175 al. 1 LIFD et 56 LHID est identique à celle ressortant de l'art. 12 CP : commet un crime ou un délit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte (négligence inconsciente) ou sans tenir compte des conséquences de son acte (négligence consciente). L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées objectivement par les circonstances et subjectivement par sa situation personnelle, par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles, sa situation économique et sociale ainsi que son expérience professionnelle (art. 12 al. 3 CP ; ATA/1727/2019 précité consid. 7c ; ATA/30/2009 du 20 janvier 2009). Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_129/2018 du 24 septembre 2018 consid. 9.1 et les références citées).

Lorsqu’une soustraction fiscale est commise par une personne morale,
celle-ci est elle-même punissable d’une amende en matière d’IFD et d’ICC
(art. 181 al. 1 LIFD et 74 al. 1 LPFisc) et le comportement de ses organes lui est imputable pour examiner les éléments subjectifs de l'infraction (ATF 135 II 86 consid. 4.2 ; ATA/71/2019 du 22 janvier 2019 consid. 8b).

b. La quotité de l'amende est, en général, fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 2 LHID ; art. 69 al. 2 LPFisc). Il convient notamment de réduire le montant de l'amende lorsque le contribuable a agi par négligence, celle-ci devant être considérée comme un cas de faute légère au sens de l'art. 175 LIFD (ATA/1002/2020 du 6 octobre 2020 consid. 9a).

La quotité précise de l'amende doit par ailleurs être fixée en tenant compte des dispositions de la partie générale du CP, qui ont vocation à s'appliquer en droit pénal fiscal, à moins que la législation applicable ne contienne des dispositions sur la matière (art. 333 al. 1 CP). Ainsi, conformément à l'art. 106 al. 3 CP, l'amende doit être fixée en tenant compte de la situation de l'auteur, afin que la peine corresponde à la faute commise. Les principes régissant la fixation de la peine prévus à l'art. 47 CP s'appliquent. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l'impôt éludé, la manière de procéder, les motivations, ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l'auteur. Les circonstances atténuantes de l'art. 48 CP sont aussi applicables par analogie en droit pénal fiscal (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1 et les références citées).

Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales disposent d'un large pouvoir d'appréciation lors de la fixation de l'amende (ATF 114 Ib 27 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013 consid. 5.2) et l'autorité de recours ne censure que l'abus ou l'excès du pouvoir d'appréciation (ATA/1002/2020 précité consid. 9b et les références citée).

c. En l’espèce, la recourante conteste la réalisation des conditions objectives et subjectives de la soustraction d'impôt principalement au motif qu’aucun comportement illicite de sa part n’avait été démontré et que ses administrateurs successifs ne se doutaient pas que les éléments repris par l’AFC-CH pouvaient constituer des prestations appréciables en argent susceptibles d’impacter son imposition.

Il ressort du dossier et des considérants qui précèdent que les comptes de la recourante et les déclarations déposées par celle-ci pour les années 2009 à 2013 étaient entachées d'irrégularités ou inexactes, dans la mesure où d’une part elles comportaient des charges en déduction du bénéfice qui n'étaient pas justifiées commercialement (pour la villa et l’employé engagé en 2011), et d’autre part elles ne contenaient pas des montants que la recourante aurait dû percevoir (intérêts débiteurs), lesquels correspondaient à des distributions dissimulées de bénéfice. Par ce biais, elle a ainsi engendré une perte financière pour la collectivité équivalente au montant des reprises. Si ses organes avaient usé des précautions commandées par les circonstances, ils auraient comptabilisé et déclaré des intérêts en lien avec la commission et n’auraient pas accepté la comptabilisation de charges non justifiées commercialement.

La recourante allègue toutefois que ses organes ne se doutaient pas que les éléments ayant fait l’objet des reprises pouvaient être considérés comme des prestations appréciables en argent. Ce raisonnement ne résiste toutefois pas à l’examen. Il ressort du dossier que la recourante était assistée d’une fiduciaire dans le cadre de ses déclarations fiscales, auprès de laquelle elle était d’ailleurs domiciliée durant les années litigieuses. Or, selon le site internet de ladite fiduciaire (http://www.C______.ch/ fiduciaire_geneve_direction.html, consulté le 10 novembre 2020), l’administrateur-président et l’administrateur secrétaire de la recourante durant les années litigieuses lesquels ont signé les déclarations fiscales litigieuses de même que l’administrateur vice-président de celle-ci dès 2010 exercent tous au sein de ladite fiduciaire, respectivement en qualité d’avocat titulaire du diplôme fédéral d'expert fiscal, d’expert réviseur, qui plus est vice-président du conseil d'administration, et d’expert réviseur, président du conseil d'administration. La recourante ne saurait plaider de bonne foi que ses organes n’étaient pas en mesure de se rendre compte des prestations appréciables en argent accordées. Dans ces conditions, il apparaît que l’autorité intimée a fait preuve de clémence en retenant que la société, par le biais de ses organes, avait agi par négligence.

Les conditions objectives et subjectives de la soustraction d'impôt étant réalisées, le principe de l’amende est ainsi acquis.

S’agissant de la quotité des amendes que la recourante ne conteste pas en tant que telle il convient de relever que la soustraction a perduré durant plusieurs années, à savoir cinq ans, et a porté sur des montants importants. Ces éléments pèsent en défaveur de la recourante. Il y a cependant lieu de tenir compte, à sa décharge, de sa bonne collaboration durant la procédure de rappel d'impôt et de l'ancienneté des infractions (art. 48 let. e CP ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_78/2019 précité consid. 9.4), celles-ci remontant, pour les plus anciennes, à 2009.

Au regard de l'ensemble de ces circonstances, la quotité des amendes, fixée à la moitié de l’impôt soustrait, ne saurait être qualifiée de disproportionnée et ne relève pas d'une violation du droit ou d'un excès du pouvoir d'appréciation. Par conséquent, le jugement du TAPI et les décisions de l'AFC-GE seront, sur ce point également, confirmés.

10) La recourante se plaint d’une violation des principes de la célérité et de la bonne foi du fait que l’autorité intimée aurait ouvert les procédures litigieuses trois ans après avoir été informée de la décision de l’AFC-CH et des reprises y relatives.

a. Le principe de la bonne foi consacré aux art. 9 et 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale et leur commande de s'abstenir, dans leurs relations de droit public, de tout comportement contradictoire ou abusif (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1). Le principe de la confiance s'applique aux procédures administratives. Selon ce principe, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent être compris dans le sens que son destinataire pouvait et devait leur attribuer selon les règles de la bonne foi, compte tenu de l'ensemble des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître
(ATF 135 III 410 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du
14 octobre 2004 consid. 2.2.1 in RDAF 2005 71 ; ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 3d ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 569 s). L'interprétation objectivée selon le principe de la confiance sera celle d'une personne loyale et raisonnable (ATF 116 II 431 consid. 3a ; ATA/399/2019 du 9 avril 2019 consid. 2).

Toutefois, en droit fiscal, qui est dominé par le principe de la légalité
(art. 5 al. 1 et 127 al. 1 Cst.), le principe de la bonne foi n'exerce qu'une influence limitée dans le domaine du droit administratif, surtout s'il vient à entrer en conflit avec le principe de la légalité (ATF 131 II 627 consid. 6.1 ; 118 Ib 312
consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1120/2015 du 26 avril 2017
consid. 6.3.2 ; ATA/861/2019 du 30 avril 2019 consid. 6).

b. La notification d’une décision de taxation est un acte juridique effectué d'office par l'autorité fiscale. Cet acte ne constitue pas une assurance de l'autorité qui donne au contribuable le droit d'exiger qu'elle s'y conforme en vertu de la bonne foi (sur les conditions de la protection de la bonne foi (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; 141 V 530 consid. 6.2). Une telle assimilation viderait du reste de leur portée les dispositions sur le rappel d'impôt (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 et 2C_1089/2018 précités consid. 9.4). 

c. Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Le caractère raisonnable ou adéquat s'apprécie au regard de la nature de l'affaire et de l'ensemble des circonstances. L'art. 29 al. 1 Cst. consacre le principe de la célérité, dans le sens où il prohibe le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 130 I 312 consid. 5.1 ; ATA/956/2020 du 29 septembre 2020 ; ATA/1017/2017 du 27 juin 2017 consid. 7a).

d. Le Tribunal fédéral a déjà eu l’occasion de relever que se posait la question de savoir si un droit à la constatation d'une éventuelle violation du principe de la célérité subsistait tout de même sous l'angle de l'art. 29 al. 1 Cst., indépendamment du déni de justice formel. Outre en matière pénale où la violation de ce principe peut avoir une influence sur la durée de la peine, le Tribunal fédéral a à quelques reprises estimé que le grief relatif au principe de la célérité était recevable même si l'autorité concernée avait finalement rendu sa décision. Il a relevé que la constatation de la violation dudit principe sanctionne le dépassement du délai raisonnable ou adéquat et constitue une forme de réparation pour celui qui en est la victime; cette constatation peut également jouer un rôle pour la répartition des frais et dépens (arrêt du Tribunal fédéral 2P.333/2005 du
18 avril 2006 consid. 3.2 et les références citées).

Dans sa jurisprudence subséquente, le Tribunal fédéral a plutôt considéré que la violation du principe de la célérité en matière fiscale était possible mais ne libérerait de toute façon pas le contribuable du paiement de l'impôt qui était dû (arrêts du Tribunal fédéral 2C_642/2008 du 12 décembre 2008 consid. 4.2 ; 2A.455/2006 du 1er mars 2007 consid. 3.3.2).

Dans un arrêt récent, la chambre administrative a considéré qu’il était certes regrettable que l'AFC-GE ait attendu le mois d'août 2018 pour entreprendre une procédure en rappel d'impôts et une procédure pénale pour soustraction d'impôts à l'encontre du recourant, alors même qu'elle connaissait l'existence de revenus devant être taxés dans le canton de Genève qui n'avaient pas été déclarés depuis décembre 2015. Cela étant, le comportement de l'AFC-GE ne pouvait être considéré comme une négligence grave permettant de reléguer à l'arrière-plan le comportement fautif du recourant. Elle a ainsi considéré que toutes les conditions de la soustraction étant remplies, les amendes infligées étaient justifiées dans leur principe (ATA/1002/2020 du 6 octobre 2020 consid. 8).

e. En l'occurrence, il est certes regrettable que l'AFC-GE ait attendu le mois de septembre 2018 pour ouvrir une procédure en rappel d'impôt et une procédure pénale pour soustraction d'impôts pour les années litigieuses à l'encontre de la recourante, alors même qu'elle connaissait l'existence de prestations appréciables en argent devant être réintégrées depuis août 2015 déjà ce qu'elle ne conteste pas.

Cela étant, il ne ressort pas du dossier que la recourante aurait reçu une quelconque garantie quant au fait qu’aucune procédure en rappel d’impôt ou en soustraction ne serait ouverte à son encontre. Le fait que l’administration ait tardé à ouvrir lesdites procédures ne saurait en particulier permettre d’admettre qu’elle pouvait s’attendre de bonne foi à ce qu’aucune action ne soit entreprise. Il ne ressort par ailleurs pas du dossier que la recourante se serait renseignée auprès de l’AFC-GE après l’envoi de son courrier du 14 octobre 2015, pour lequel elle indique elle-même n’avoir reçu aucune réponse, pas même un accusé de réception.

Il ne peut ainsi être retenu l'existence d'une violation du principe de la bonne foi ou du principe de célérité, justifiant d'annuler la décision litigieuse.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

11) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2’500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 juillet 2020 par A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 juin 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'500.- à la charge de A______ SA ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Pietro Sansonetti et Julien Witzig, avocats de la recourante, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :