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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1570/2020

ATA/1246/2020 du 08.12.2020 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1570/2020-AIDSO ATA/1246/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 décembre 2020

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______1980, est ressortissante d'Italie et titulaire d'un permis d'établissement.

2) Elle a bénéficié à titre individuel d'une aide financière de l'Hospice général (ci-après : hospice) au cours de diverses périodes, soit : du 1er septembre 2013 au 31 janvier 2015, du 1er août au 31 octobre 2016 et du 1er mars 2017 au
31 juillet 2019.

3) Dans le cadre de ses demandes de prestations d'aide financière, complétées et signées respectivement les 9 août 2016 et 22 août 2017, elle a notamment déclaré être célibataire et vivre seule.

4) Le 22 août 2017, lors de l'entretien de suivi du Centre d'action sociale de Trois-Chêne (ci-après : CAS), Mme A______ a demandé à son assistance sociale les incidences sur son droit aux prestations si « elle se mettait en couple ».

5) Le même jour, elle a signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'hospice » (ci-après : Mon engagement), confirmant avoir pris connaissance et avoir reçu un exemplaire du document « ce que vous devez savoir en demandant une aide financière à l'hospice », prendre acte que les prestations d'aides financière étaient subsidiaires à toute autre ressource provenant du travail, de la famille, de la fortune ou de prestation sociale, donner immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu'à l'étranger, en particulier toute information sur toute forme de revenu ou de fortune, informer immédiatement et spontanément l'hospice de tout fait nouveau de nature à entrainer la modification du montant des prestations d'aide financière, notamment de toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique et rembourser à l'hospice toute prestation exigible à teneur de la législation en vigueur.

Le document précité précisait que l'engagement portait aussi sur la situation personnelle et économique de tout membre du groupe familial, notamment le conjoint ou concubin.

6) Le 30 décembre 2017, Mme A______ a épousé M. B______en Macédoine.

7) Par courrier du 22 juillet 2019, un examinateur de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a interpellé l'hospice au sujet de M. B______. Celui-ci devait peut-être être inclus dans le calcul des prestations de Mme A______ puisqu'il l'avait épousée, vivait avec elle et travaillait à Genève depuis avril 2018.

8) Lors de l'entretien du 26 juillet 2019, Mme A______ a indiqué à son assistante sociale ne pas avoir déclaré à l'hospice qu'elle s'était mariée, car celle-ci lui avait dit des années au paravant qu'elle n'avait pas à communiquer cette information tant que son époux n'était pas au bénéfice d'une autorisation de séjour.

9) Par courrier du 30 juillet 2019, valant avertissement, le CAS a rappelé à l'intéressée ses obligations en matière d'information. Il lui a imparti un délai au 9 août 2019 pour transmettre tous les documents nécessaires à la réévaluation de sa situation personnelle, soit divers documents relatifs à son mariage et à la situation de son époux.

10) Lors d'un entretien périodique en date du 6 septembre 2019, Mme A______ a à nouveau affirmé, en présence de la responsable d'unité et de son assistante sociale, que les informations données par cette dernière l'avaient induite en erreur.

11) Par décision du 11 septembre 2019, le CAS a, après prise en compte rétroactive des charges et des ressources (salaires et indemnité SUVA), notifié à Mme A______ et à M. B______une demande de restitution de CHF 37'875.30.

Cette somme correspondait aux prestations que les précités avaient perçues indûment pour la période d'avril 2018 à juin 2019, faute d'avoir déclaré à l'hospice leur mariage célébré le 30 décembre 2017 en Macédoine, l'arrivée de M. B______à Genève et sa prise d'emploi auprès de la société E______SA en avril 2018, respectivement le fait que ce dernier ait été indemnisé par la SUVA de mars à mai 2019.

12) Lors de l'entretien du 25 septembre 2019, en présence de son conjoint, de la responsable d'unité et de son assistante sociale, Mme A______ a demandé une réduction du montant à restituer et que la dette soit uniquement mise en son nom. M. B______n'avait pas d'autres dettes. Il était en recherche d'emploi en raison de son licenciement survenu le 28 février 2019.

13) Lors de l'entretien du 8 octobre 2019, Mme A______ a réitéré ses demandes. Le couple a déclaré renoncer à l'aide de l'hospice pour ne pas mettre en péril l'issue de la demande de permis de M.A______. Celui-ci a refusé de demander son affiliation rétroactive à l'assurance-maladie, ce qui aurait permis au CAS de revoir à la baisse le montant de la décision du
11 septembre 2019.

14) Par courrier du 11 octobre 2019, Mme A______ et M. B______ont indiqué qu'ils ne contestaient pas la décision de restitution, mais ont sollicité la remise de la somme réclamée.

Mme A______ souffrait d'importants problèmes de santé depuis plusieurs années. Depuis 2014, son état n'avait cessé de se dégrader, en dépit d'une prise en charge médicale. Son état de santé l'angoissait et la stressait énormément, ce qui lui prenait l'essentiel de son énergie. Sa situation familiale était très compliquée. Elle était rejetée de ses soeurs et se faisait beaucoup de soucis pour son père, devenu invalide à la suite d'un accident de la route survenu en 2017. Elle était inquiète pour son père puisque le système hospitalier au Venezuela était mis à mal au vu de la crise politique qui sévissait dans le pays.

Elle souffrait d'angoisse causée par les nombreuses escroqueries dont elle avait été victime par ses anciens partenaires d'affaires et par des membres de son église. Elle avait déposé plainte contre les précités et était dans l'attente de l'issue des procédures judiciaires initiées. Ses dettes l'angoissaient également. Elle avait des dettes d'environ CHF 30'000.-, dont plus de CHF 27'000.- faisaient l'objet de poursuites. Ces difficultés s'étaient répercutées négativement sur sa vie de couple. Vu l'importance des dettes de Mme A______, les époux avaient dès le début géré séparément leurs finances.

M. B______l'aidait et la soutenait sans jamais avoir profité des aides financières versées par l'hospice. Celles-ci étaient uniquement utilisées pour les frais de traitement de médecine alternative et naturelle de Mme A______, non couverts par l'assurance-maladie.

Elle pensait sincèrement qu'elle ne devait pas annoncer la présence de son mari à l'hospice tant que celui-ci n'avait pas obtenu d'autorisation de séjour. L'OCPM avait délivré une autorisation de travail de trois mois. Elle ne cherchait aucunement à cacher ni la présence de son époux ni les revenus de celui-ci.

Les moyens financiers du couple étaient très limités. M. B______gagnait un salaire de CHF 2'700.- nets tandis qu'elle ne percevait aucun revenu. Le remboursement de la somme réclamée les mettrait dans une situation financière très difficile. Cette dette s'ajoutait aux autres dettes et les plongeait dans la précarité.

Ils ont produit divers rapports médicaux, un décompte du 3 juillet 2019 des poursuites et actes de défauts de biens de Mme A______, plusieurs documents en lien avec la mise en prévention de M. B______(pour entrée et séjour illégaux et exercice d'une lucrative sans autorisation) ainsi qu'une copie de la demande d'autorisation de séjour de celui-ci.

15) Interpellée par l'hospice, l'assistante sociale a confirmé avoir informé Mme A______ de son obligation de signaler tout changement de situation. Elle a précisé qu'au cours d'un entretien, Mme A______ avait affirmé avoir agi selon ses recommandations, puis par la suite elle avait reconnu avoir caché l'information sur les conseils d'un avocat pratiquant le droit des étrangers.

16) Le 5 décembre 2019, Mme A______ a complété la demande de remise en produisant deux attestations médicales, les décomptes d'indemnités de chômage de son époux pour les mois d'août et de septembre 2019 ainsi qu'une copie de deux photographies de l'accident de son père.

17) Par courrier électronique du 9 décembre 2019, M. C_____, de « D______ », a soutenu la demande de remise du couple. Il était « en charge des conditions de séjour » de celui-ci.

Une demande d'autorisation de séjour en faveur de M. B______avait été déposée en 2018. Selon lui, Mme A______ ne dissimulait pas d'informations à l'hospice. Il s'étonnait qu'aucune question n'ait jamais été posée à celle-ci sur sa situation personnelle et ce « tout au long » de sa prise en charge par l'hospice.

Mme A______ n'avait pas déclaré à l'hospice son mariage et la présence de son époux pour deux raisons. D'une part, selon les informations des services de l'hospice, elle devait attendre d'être en possession du permis de séjour de son époux avant d'en faire la communication à l'hospice et, d'autre part, son mari était en situation irrégulière en Suisse. Partant, elle craignait de causer à son conjoint des « problèmes administratifs » et de le voir quitter le territoire. Mme A______ était de bonne foi.

Par ailleurs, si l'intention du couple était de tricher, il n'aurait pas indiqué à l'OCPM l'activité professionnelle de M. B______. Ils étaient transparents envers l'OCPM. Il ne pouvait leur être reproché d'être de mauvaise foi, ce d'autant plus que l'hospice ne demandait pas à Mme A______ si sa situation personnelle évoluait. M. B______ s'étonnait du manque de communication entre l'OCPM et l'hospice.

18) Les 12 et 13 décembre 2019, Mme A______ a transmis à l'hospice une copie du courrier électronique précité.

19) Par décision en reconsidération du 7 avril 2020, le CAS a annulé sa décision de restitution de CHF 37'875.30 à l'égard de M. B______. Celui-ci n'avait pas sollicité de prestations et ne s'en n'était pas vu octroyer. La décision était en revanche maintenue en ce qui concernait Mme A______.

20) Par décision du 24 avril 2020, notifiée le 4 mai 2020, l'hospice a refusé la demande de remise de l'intéressée. Sa bonne foi ne pouvait être admise, dès lors qu'elle n'avait pas respecté son obligation de renseigner en ne déclarant pas à son assistante sociale les changements intervenus dans sa situation personnelle et financière.

21) Par acte du 3 juin 2020, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision précitée. Elle a conclu à son annulation et à être mise au bénéfice d'une remise. À titre préalable, elle a sollicité l'assistance juridique, l'exemption de l'avance de frais, l'octroi d'un délai pour compléter son recours et l'ouverture d'enquêtes.

Elle a repris les arguments déjà exposés, soulignant ses différents problèmes de santé, qui avaient des répercussions sur sa vie conjugale, sa situation familiale délicate et les escroqueries dont elle avait été victime. La situation de son époux n'était pas stable, dans la mesure où celui-ci n'avait pas de titre de séjour. Elle pensait sincèrement devoir annoncer son mariage une fois le permis de séjour délivré à son mari. Elle ne cherchait pas à cacher la présence de son conjoint en Suisse puisqu'elle avait effectué les démarches nécessaires auprès de l'OCPM.

Elle s'était enquise auprès de son assistante sociale des démarches à entreprendre auprès de l'hospice si elle venait à se marier, soit la production du permis de séjour de son époux et du livret de famille. Or, le mariage n'étant pas reconnu en Suisse, la recourante était toujours considérée comme célibataire auprès de l'OCPM. L'intimé n'admettait pas que l'assistante sociale « ait pu lui donner une information contraire » à son devoir d'annonce immédiat et spontané. Toutefois, aucun élément ne venait démontrer que la précitée ait été consultée avant le prononcé de la décision attaquée. Sa situation serait difficile si elle était amenée à rembourser la somme demandée, vu qu'elle ne disposait d'aucun revenu et faisait l'objet de poursuites.

22) L'hospice a conclu au rejet du recours.

La recourante n'était pas de bonne foi puisqu'elle n'avait pas déclaré spontanément à son assistante sociale les changements intervenus dans sa situation personnelle et financière à la suite de son mariage. L'intéressée ne contestait pas les faits reprochés. Elle soutenait avoir agi conformément aux informations transmises par son assistante sociale de ne pas informer l'hospice de son mariage, tant que son époux n'obtenait pas une autorisation de séjour.

Or, l'assistante sociale en question avait contesté cette version des faits et le document « Mon engagement » signé par le recourante contredisait ses allégations. Il apparaissait complètement contradictoire avec la législation en vigueur que de telles informations aient été données à la recourante. Dès lors, une information contraire de la part de son assistante sociale n'apparaissait pas crédible.

La recourante avait reconnu que la dépendance à l'aide sociale soit examinée par l'OCPM. Si ce fait pouvait influencer la recourante, elle ne pouvait toutefois pas ignorer son devoir d'informer son assistante sociale de son mariage, de la vie commune avec son conjoint et des revenus de celui-ci. Ces informations étaient nécessaires pour évaluer son droit aux prestations d'aide financière.

La violation du devoir d'information excluant la bonne foi était admise par la jurisprudence. Partant, il n'était pas nécessaire d'examiner si le remboursement du montant réclamé plaçait la recourante dans une situation difficile.

23) Dans sa réplique, la recourante, agissant désormais en personne, a précisé ses précédentes écritures.

Le permis de séjour en faveur de son époux avait été délivré en juillet 2020. Elle était très endettée comme le démontrait l'extrait des poursuites du 17 juillet 2020, lequel faisait état de CHF 10'148.10.- de poursuites en cours et de CHF 17'512.30.- d'actes de défauts de biens. Elle devait également près de CHF 16'000.- à des proches. Ses dettes s'élevaient à CHF 43'000.-. Elle avait déposé une demande AI.

Depuis 2017, elle souffrait de dépression sévère, de crises d'angoisses et d'anxiété survenues à la suite « de multiples abus financiers planifiés (des escrocs professionnels), de persécution et d'abus psychologique de sa paroisse ». Elle se trouvait dans un profond état de confusion l'empêchant de gérer ses affaires administratives et obligations. Vu ses difficultés personnelles, elle n'était pas capable de déterminer l'étendue de ses obligations, notamment son devoir d'information, ni de se renseigner auprès de l'OCPM ou d'honorer ses obligations envers l'intimé.

Son assistante sociale connaissait son état de santé mental et physique. C'est pourquoi la précitée l'avait adressée à l'association « Trajectoires » pour un traitement psychologie et psychiatrique. La recourante était suivie par des médecins à raison d'une fois par semaine depuis 2018. Elle souffrait également de plusieurs pathologies constatées par différents médecins (arthrose à la hanche, acouphènes, asthme, trouble du sommeil, un état dépressif, angoisse, syndrome des apnées du sommeil, syndrome de Morton et « d'attaque des crises »).

24) Le 15 octobre 2020, l'hospice a répliqué. Il a persisté intégralement dans ses précédentes conclusions.

La recourante reconnaissait avoir perçu indûment la somme de CHF 37'875.30, montant correspondant aux prestations financières d'aide sociale versées pour la période d'avril 2018 à juin (recte : juillet) 2019. L'intéressée avait manqué à son devoir d'information en ne déclarant pas spontanément à son assistante sociale son mariage, le ménage commun avec son époux - à tout le moins - depuis avril 2018 et l'exercice d'une activité professionnelle de ce dernier.

Il ne contestait pas les problèmes de santé de la recourante ni sa situation d'endettement. Seule la question de la bonne foi de la précitée, au moment des faits, soit lors de la perception des prestations indues, était litigieuse. La recourante était parfaitement informée de son obligation de signaler tout changement dans sa situation familiale de sorte qu'elle ne pouvait ignorer qu'en cas de mariage ou même de concubinage, son droit aux prestations devait être réévalué. En effet, elle avait pris renseignement auprès de son assistante sociale des conséquences financières en cas de modification de sa situation familiale et avait signé le document intitulé « Mon engagement », lui rappelant ses devoirs en matière d'informations. L'attestation de l'OCPM relevant le statut de célibataire de M. B______n'y changeait rien.

La recourante n'était pas empêchée d'honorer ses obligations eu égard de ses problèmes de santé. Durant toute la période d'aide financière, elle s'était présentée régulièrement à ses entretiens et avait pris contact téléphoniquement avec son assistante sociale lorsqu'elle avait besoin d'informations ou de documents. L'intéressée avait également transmis ponctuellement toutes les pièces nécessaires aux calculs de ses prestations, y compris les factures en lien avec ses frais médicaux.

25) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante conclut à l'ouverture des enquêtes, sans préciser quel type d'enquêtes elle souhaite voir la chambre de céans ordonner. Dans la mesure où elle cite comme preuve de ses allégués sa propre audition, il convient d'examiner s'il y a lieu de procéder à celle-ci.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l'espèce, la recourante a pu expliquer son point de vue tant devant l'autorité intimée que devant la chambre de céans, à plusieurs reprises. Elle n'expose par ailleurs pas en quoi son audition serait susceptible d'apporter des éléments complémentaires à ceux déjà exposés. La chambre administrative dispose, pour le surplus, d'un dossier complet lui permettant de statuer en connaissance de cause.

Il ne sera donc pas donné suite à la demande d'audition.

3) Le présent litige porte sur le bienfondé de refuser la demande de remise de la recourante. Celle-ci n'a pas contesté la demande de restitution.

a. La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel
(art. 1 al. 1 LIASI).

Les prestations d'aide financière versées en vertu de la LIASI sont subsidiaires à toute autre source de revenu, aux prestations découlant du droit de la famille ou de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, du 18 juin 2004, ainsi qu'à toute autre prestation à laquelle le bénéficiaire et les membres du groupe familial ont droit (art. 9 al.1 LIASI).

b. Le bénéficiaire est tenu de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière
(art. 32 al. 1 LIASI). De même, il doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau, de nature à entraîner une modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou à les supprimer (art. 33 al. 1 LIASI).

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/1083/2016 du 20 décembre 2016 consid. 7b). Le document rappelle expressément que l'engagement porte aussi sur la situation personnelle et économique de tous les membres du groupe familial.

Les bénéficiaires des prestations d'assistance sont tenus de se conformer à l'obligation de renseigner prévue par la loi, sous peine d'abus de droit. Violer le devoir de renseigner est contraire à la bonne foi (ATA/942/2020 du 22 septembre 2020 consid. 3b ; ATA/711/2020 du 4 août 2020 consid. 8 ; ATA/365/2020 du 16 avril 2020 consid. 4c ; ATA/42/2019 du 15 janvier 2019 consid. 2f).

c. Toute prestation perçue indûment, soit touchée sans droit, peut faire l'objet d'une demande de remboursement (art. 36 al. 1 LIASI). Le remboursement peut être exigé du bénéficiaire d'aides financières s'il a agi par négligence ou fautivement, ou encore s'il n'est pas de bonne foi (art. 36 al. 2 et 3 LIASI). De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment au sens de l'art. 36 LIASI (ATA/942/2020 du 22 septembre 2020 consid. 3e ; ATA/365/2020 du 16 avril 2020 consid. 4c ;ATA/42/2019 précité consid. 2f).

d. À teneur de l'art. 42 LIASI, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1) ; dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de 30 jours dès la notification de la demande de remboursement ; cette demande de remise est adressée à l'hospice (al. 2). Les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/1377/2017 du 10 octobre 2017 consid 11).

4) En l'espèce, la recourante a signé, par deux fois, le document intitulé « Mon engagement » résumant ses obligations d'informer immédiatement l'hospice de toute modification dans sa situation financière et personnelle. Or, elle ne s'est pas conformée à ces obligations. Elle n'a signalé à son assistante sociale ni qu'elle avait changé d'état civil ni que son mari l'avait rejointe en Suisse, contrairement à l'engagement pris. Si, certes, elle est atteinte dans sa santé, les certificats et documents médicaux produits ne démontrent pas ni même ne rendent vraisemblable que son état de santé l'aurait empêchée de se conformer à son obligation d'informer l'hospice de son mariage et du fait qu'elle faisait ménage commun avec son mari. Comme le relève l'hospice, l'intéressée était tout à fait en mesure de se rendre régulièrement aux entretiens de suivi qu'elle avait avec son assistante sociale et de faire parvenir les documents sollicités.

Par ailleurs, la recourante ne peut être suivie lorsqu'elle soutient que son assistante sociale lui aurait expliqué qu'elle ne devrait signaler son mariage que lorsque son mari disposerait d'un titre de séjour. D'une part, l'assistante sociale a nié avoir tenu de tels propos. Compte tenu des répercussions du changement d'état civil et de revenus dont bénéficie le ménage sur les prestations de l'hospice, il est au demeurant hautement improbable que l'assistante sociale ait donné une information selon laquelle l'obligation d'informer de ces éléments importants dépendrait du statut administratif du mari. Selon l'assistante sociale, l'intéressée lui aurait d'ailleurs dit que c'était un avocat pratiquant le droit des étrangers qui lui aurait donné une telle indication. D'autre part, le document « Mon engagement » mentionne expressément l'obligation d'informer immédiatement et spontanément l'hospice de toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique. L'allégation de la recourante allant dans le sens inverse ne paraît donc pas crédible.

La violation du devoir d'information ne permet pas de retenir l'existence de la bonne foi de la recourante. La deuxième condition, à savoir celle de la situation difficile que pourrait engendrer le remboursement, n'a pas lieu d'être traitée, les conditions posées par l'art. 42 al. 1 LIASI étant cumulatives. Dès lors que l'une des conditions à la remise fait défaut, l'hospice a rejeté à juste titre la demande de remise.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

Comme l'a indiqué l'hospice dans sa décision, la recourante conserve la possibilité, en cas de difficultés financières documentées, de contacter le service du recouvrement de l'hospice pour négocier la mise en place d'un plan de remboursement qui tienne compte de sa situation.

5) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la recourante, qui succombe (art. 87 al. 2 LPA), étant précisé que sa demande d'assistance juridique a été rejetée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 juin 2020 par Madame A______ contre la décision de l'Hospice général du 24 avril 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :