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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/951/2020

ATA/1218/2020 du 01.12.2020 sur JTAPI/676/2020 ( LCR ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/951/2020-LCR ATA/1218/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er décembre 2020

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Guillaume Étier, avocat

contre

SERVICE CANTONAL DES VÉHICULES

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 août 2020 (JTAPI/676/2020)


EN FAIT

1) Monsieur A______ est titulaire du permis de conduire (catégorie B) depuis le 14 avril 2000. Il est directeur de B______ SA (ci-après : B______), dont le siège est à Carouge et le but :« toutes activités d'import-export, de représentation, de distribution et de vente de produits de la pêche, de produits agro-alimentaires et de comestibles ».

2) L'intéressé a fait l'objet des mesures suivantes :

- par décision du service cantonal des véhicules (ci-après : SCV) du 28 mars 2008, un avertissement à la suite de la commission d'une infraction aux règles de la circulation routière qualifiée de légère ;

- par décision du 2 octobre 2012 du service des automobiles et de la navigation de Lausanne (ci-après : SAN), un avertissement en raison d'une autre infraction légère ;

- par décision du SAN du 18 décembre 2015, le retrait de son permis de conduire pour une durée de trois mois en raison d'une infraction qualifiée de grave, cette mesure ayant pris fin le 11 septembre 2016 ;

- par décision du SAN du 7 octobre 2016, le retrait de son permis de conduire pour une durée de douze mois en raison d'une nouvelle infraction grave, cette mesure ayant pris fin le 2 août 2017.

3) Aux termes d'un rapport établi par la police le 27 novembre 2019, il a été contrôlé par un radar le 18 juin 2019 à 11h04, au volant d'une voiture, à la hauteur du 53, route de Mon-Idée, à Thônex, en localité, alors qu'il circulait à 66 km/h sur un tronçon sur lequel la vitesse était limitée à 30 km/h. Marge de sécurité déduite, le dépassement retenu s'élevait ainsi à 31 km/h. Était annexé audit rapport un formulaire intitulé « Reconnaissance d'infraction - procès-verbal d'audition », daté du 22 novembre 2019 et signé de sa main, à teneur duquel il reconnaissait être l'auteur de l'infraction.

4) Par courrier du 2 janvier 2020, le SCV lui a fait savoir que la police lui avait transmis le rapport précité et qu'une mesure administrative pouvait être prise à son encontre, indépendamment de l'amende ou d'une autre sanction pénale. Un délai lui était imparti pour produire ses observations écrites.

5) Par ordonnance pénale du 31 janvier 2020, le Ministère public l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 - LCR - RS 741.01).

Cette ordonnance n'a pas été contestée.

6) Par courrier du 4 février 2020, l'administré a fait part au SCV de ses besoins professionnels et personnels de conduire, soulignant le fait que, malgré l'infraction qu'il avait commise, il n'avait mis à aucun moment en danger la vie d'autrui, de sorte qu'il espérait une suite favorable à son dossier.

7) Par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du 12 février 2020, prise en application de l'art. 16c al. 2 let. d LCR, le SCV a retiré le permis de conduire de M. A______ pour une durée indéterminée, mais d'au minimum deux ans.

Le prononcé de cette mesure s'imposait au vu de l'infraction grave et de ses antécédents, même s'il justifiait d'un besoin professionnel de conduire au sens défini par la jurisprudence.

8) Par acte du 13 mars 2020, l'intéressé a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, dont il a requis l'annulation, concluant à ce que son permis de conduire soit retiré pour une période d'un mois seulement. À titre préalable, il a sollicité la restitution de l'effet suspensif au recours.

Il travaillait en tant que livreur pour B______, dont il était également le directeur, pour un salaire mensuel brut de CHF 4'000.-. Il était domicilié à Onex et se rendait tous les jours à son travail en voiture. En tant que livreur travaillant « sur le terrain », il éprouvait le besoin quotidien d'utiliser un véhicule pour effectuer des livraisons chez ses clients. B______ livrait des produits alimentaires à des restaurants, qui devaient recevoir leurs commandes avant 11h30, afin de servir le repas de midi. Il s'agissait d'une petite structure, dans laquelle il évoluait depuis plusieurs années. L'organisation de la société ne permettait pas son remplacement. Privé de son véhicule, il se retrouverait empêché d'accomplir son travail. Il était père d'un garçon scolarisé dans le canton de Vaud, qu'il était amené à déposer et à récupérer à la sortie de l'école.

L'infraction en cause avait été commise pendant qu'il travaillait. Les conditions météorologiques étaient excellentes, permettant une visibilité dégagée, et la densité du trafic était particulièrement faible. Soudainement, habitué à emprunter fréquemment la route en question, il n'avait pas remarqué, ou trop tardivement, un panneau de signalisation limitant la vitesse à 40 km/h en raison de travaux. Il s'était alors fait « flasher » par un radar. La voie étant dégagée, aucun usager de la route n'avait été perturbé par son comportement.

Il n'avait pas formé opposition à l'ordonnance pénale, considérant qu'il avait effectivement dépassé la limite autorisée. Cela étant, il contestait que la vitesse fût limitée à 30 km/h le jour de l'infraction. Comme l'attestaient les photographies qu'il produisait, prises par lui à la suite de la réception de la décision querellée, les panneaux de signalisation posés sur cette route indiquaient d'abord une limitation à 50 km/h, puis une limitation à 40 km/h en raison des travaux. Ainsi, bien qu'il s'agît d'un tronçon limité à 30 km/h (ce qu'il avait appris en consultant le site Internet du canton de Genève), aucun panneau ne le signalait ; il n'avait donc pu que se fier à la signalisation limitant la vitesse à 40 km/h. Rien ne lui permettait de douter de l'adéquation du panneau y relatif et, donc, de savoir que le tronçon était en fait limité à 30 km/h. Dès lors, en roulant à 61 km/h, il avait dépassé la vitesse autorisée de 21 km/h, susceptible, au vu de ses antécédents, de donner lieu à un retrait de permis d'un mois seulement, en application de l'art. 16b LCR.

À titre subsidiaire, il s'est plaint d'une violation du principe de la proportionnalité en relation avec l'art. 16c LCR, à supposer que cette disposition fût applicable. La mesure prononcée était disproportionnée puisqu'elle s'écartait du minimum légal. La durée de retrait de son permis ne pouvait dépasser deux ans, et la sanction devrait s'en tenir au minimum légal. Il n'avait commis aucune infraction durant près de trois ans, de sorte que, malgré le dépassement de vitesse, le pronostic ne saurait être considéré comme défavorable.

Aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'opposait à la restitution de l'effet suspensif, le seul intérêt touché étant le sien. Il avait impérativement besoin de son permis de conduire, étant précisé qu'il parcourait en moyenne 40'000 km à 50'000 km par année et que son recours avait de grandes chances de succès. En outre, s'il ne pouvait plus travailler, un nouveau livreur devrait être employé par B______, ce qui engendrerait des frais supplémentaires pour celle-ci.

9) Par décision du 30 mars 2020, le TAPI a rejeté la requête de restitution de l'effet suspensif.

10) Le SCV a conclu au rejet du recours.

11) Dans sa réplique, l'administré a relevé que l'excès de vitesse retenu dans l'ordonnance pénale était erroné, le Ministère public ayant considéré qu'il était de 31 km/h, alors qu'il n'était que de 21 km/h, ce que les photographies qu'il avait produites attestaient.

Non assisté d'un conseil, il n'avait alors pas jugé utile de s'opposer à cette ordonnance, étant donné qu'il reconnaissait avoir effectivement dépassé la vitesse autorisée sur le tronçon de la route de Mon-ldée, et ne pouvait connaître les conséquences, hormis pécuniaires, de cette décision. Il ne pouvait pas non plus savoir que cette différence de 10 km/h pouvait induire une modification majeure des conséquences administratives.

L'acceptation de la sanction pénale ne signifiait pas encore qu'il eût accepté les faits tels que décrits par le Ministère public. S'il avait reconnu le dépassement de vitesse, il n'avait pas reconnu la présence d'un panneau de signalisation de 30 km/h sur la route de Mon-ldée.

Il était fort probable, au vu des éléments de faits nouveaux qu'il apportait dans le cadre de la présente procédure, qu'une appréciation autre que celle du SCV pouvait être retenue ; il serait inadmissible, voire insoutenable, que le TAPI ne statue pas de manière indépendante de la juridiction pénale et élude des éléments de faits pertinents.

12) Dans sa duplique, le SCV a maintenu sa position.

Afin de clarifier la question de la vitesse maximale autorisée le jour des faits sur la route de Mon-ldée, à proximité du numéro 53, il avait adressé une demande de renseignements auprès de la brigade judiciaire et radar de la police routière, à l'attention du Sergent C______. Ce dernier avait confirmé que la vitesse sur ce tronçon était limitée à 30 km/h le 18 juin 2019 à 11h04. Un plan ainsi que des photographies prises le jour de l'infraction avaient été fournis. On y constatait que la signalisation en place indiquait la limitation de vitesse à 30 km/h. Par ailleurs, les photographies produites par le conducteur n'étaient pas datées et n'attestaient pas que la vitesse était limitée à 40 km/h le jour de l'infraction. Comme l'avait relevé M. C______, les arbres sur la photographie fournie par l'intéressé étaient sans feuilles alors que le contrôle de vitesse avait eu lieu au début de l'été. La question de savoir à quelle période la vitesse avait été limitée à 40 km/h sur la route de Mon-ldée pouvait ainsi rester indécise.

13) Par jugement du 19 août 2020, notifié le 21 août 2020, le TAPI a rejeté le recours.

Il était lié par l'ordonnance pénale. Les pièces produites par le SCV démontraient, au demeurant, que la limitation de vitesse était fixée à 30 km/h le jour de l'infraction. Par ailleurs, aucun élément ne permettait de considérer le cas comme de moindre gravité. Compte tenu des antécédents de conducteur et de la gravité de l'infraction, aucune dérogation à l'art. 16c al. 2 let. d LCR n'était possible. Enfin, le besoin professionnel du permis de conduire ne pouvait être pris en considération en présence d'un retrait de sécurité.

14) Par acte expédié le 21 septembre 2020 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), M. A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l'annulation. Il a conclu, principalement, au renvoi de la cause au TAPI pour nouvelle décision et, subsidiairement, à l'annulation de la décision du SCV et à la limitation de la durée du retrait de permis à quatre mois.

Le TAPI avait omis d'examiner la légalité du panneau provisoire de signalisation et l'impact de la décision de retrait sur le recourant. Il était temps que les tribunaux s'écartent des errements de la jurisprudence considérant qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte des besoins professionnels des conducteurs n'étant pas chauffeurs à titre professionnel. Le recourant risquait de perdre son emploi, ce qui était susceptible de mettre en péril la survie de B______ et d'affecter lourdement sa vie familiale. Lorsque la loi était mal conçue et entraînait des conséquences « ubuesques », il appartenait au juge d'être garant des droits individuels et d'accepter d'en faire une interprétation, fût-elle contraire à son sens littéral.

La décision de retrait violait les art. 16b et 16c LCR et les art. 107 al. 1 et 1bis et 108 al. 5 let. d de l'ordonnance sur la signalisation routière du 5 septembre 1979 (OSR - RS 741.21) et était disproportionnée.

15) Le SCV a conclu au rejet du recours.

Le recourant aurait dû se plaindre de la non-conformité du panneau de signalisation devant le TAPI. Si la chambre administrative entrait en matière sur ce nouveau grief, il convenait de constater que la mise en place de la limitation de vitesse avait été décidée par arrêté du 5 juin 2019 et était, ainsi, valable. L'excès de vitesse de plus de 25 km/h en localité impliquait une mise en danger grave justifiant le retrait prononcé.

16) Dans sa réplique, le recourant a relevé que le fait de ne pas contester l'ordonnance pénale ne signifiait pas qu'il acceptait l'ensemble des faits retenus dans celle-ci. En outre, les autorités administratives pouvaient procéder à une analyse juridique différente des faits que celle effectuée par le juge pénal, notamment quant à la mise en danger et la faute au sens des art. 16ss LCR.

17) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant invoque à titre de preuve son audition.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 144 I 11 consid. 5.3). Ce droit n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

Le droit d'être entendu n'implique pas non plus une audition personnelle de l'intéressé, celui-ci devant uniquement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (ATF 140 I 68 consid. 9.6 et les références citées).

b. En l'espèce, le recourant a pu se prononcer par écrit devant l'autorité intimée, le TAPI et, par deux fois, devant la chambre de céans, et il n'explique pas en quoi son audition permettrait d'apporter un quelconque élément décisif supplémentaire par rapport aux pièces produites ou ses observations écrites. En outre, l'audition proposée portant sur des faits déjà établis, non contestés ou dont la pertinence pour la solution du litige n'est pas établie, il sera renoncé à y donner suite.

Pour le surplus, la chambre de céans dispose d'un dossier complet lui permettant de statuer en connaissance de cause.

3) Le recourant conteste la légalité du panneau temporaire signalant la limitation de vitesse.

La question de savoir si cet argument a été soulevé tardivement peut demeurer indécise, dès lors qu'il doit de toute manière être rejeté.

En effet, la limitation temporaire de la vitesse a fait l'objet d'un arrêté du département des infrastructures le 5 juin 2019, publié dans la Feuille d'avis officielle le même jour, exposant la justification et les bases légales et réglementaires l'autorisant. La limitation de la vitesse à 30 km/h était justifiée par le fait qu'un chantier était en cours et que les voies de circulation étaient « redistribuées ». Elle avait été proposée par le responsable du secteur de la signalisation verticale et marque du service technique de l'office cantonal des transports. La réduction de la vitesse autorisée était, en outre, limitée dans le temps. Elle respectait, conformément à l'art. 108 al. 5 let. d OSR, la gradation par 10 km/h.

Reposant sur une base légale, ayant été prononcée et publiée par l'autorité compétente, sur proposition d'une personne disposant des compétences techniques nécessaires et respectant le principe de la proportionnalité, l'abaissement temporaire de la limitation de vitesse était valable.

4) Le recourant ne semble, à juste titre, plus contester qu'il a circulé à une vitesse de 66 km/h, en localité, à un endroit où celle-ci était temporairement limitée à 30 km/h.

Eu égard au principe de l'unité et de la sécurité du droit, le conducteur ne peut plus contester, dans le cadre de la procédure administrative, les faits établis au terme d'une procédure sommaire, pour lesquels il a été sanctionné par une ordonnance pénale à laquelle il n'a pas fait opposition et qui est entrée en force. En effet, lorsque l'intéressé sait ou doit escompter qu'une procédure de retrait de permis sera engagée contre lui, il doit faire valoir ses moyens de défense lors de la procédure pénale déjà (ATF 121 II 214).

En l'espèce, le recourant devait s'attendre à ce qu'une mesure administrative soit prononcée, compte tenu de l'important excès de vitesse qui lui était reproché. Son attention avait été attirée par le SCV sur le fait qu'une procédure de retrait de permis était engagée. L'ordonnance pénale n'ayant pas été contestée, il y a lieu de tenir pour établi le fait que le recourant a commis un excès de vitesse de 31 km/h, dans une localité.

5) Il convient encore d'examiner si la durée du retrait de permis prononcée à son encontre est conforme au droit.

a. Selon l'art. 16a al. 1 let. a LCR, commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation, met légèrement en danger la sécurité d'autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée. À teneur de l'art. 16b al. 1 let. a LCR, commet une infraction moyennement grave la personne qui, en violant les règles de la circulation, crée un danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque. Conformément à l'art. 16c al. 1 let. a LCR, commet une infraction grave la personne qui, en violant les règles de la circulation, met sérieusement en danger la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

Après une infraction grave, le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée, mais de deux ans au minimum, si, au cours des dix années précédentes, le permis a été retiré à deux reprises en raison d'infractions graves ou à trois reprises en raison d'infractions qualifiées de moyennement graves au moins; il est renoncé à cette mesure si, dans les cinq ans suivant l'expiration d'un retrait, aucune infraction donnant lieu à une mesure administrative n'a été commise (art. 16c al. 2 let. d LCR).

b. Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement entre conducteurs. Ainsi, un dépassement de la vitesse prescrite de 30 km/h ou plus hors des localités est considéré comme un cas grave, au sens de l'art. 16c al. 1 let. a LCR, nonobstant des circonstances particulières comme des conditions de la circulation favorables ou l'excellente réputation du conducteur en tant qu'automobiliste (ATF 132 II 234 consid. 3.2 ; 124 II 259 consid. 2b).

La jurisprudence admet, pour les cas d'infractions de gravité moyenne liée à un dépassement de vitesse, que l'importance de la mise en danger et celle de la faute doivent être appréciées, afin de déterminer quelle doit être la durée du retrait (art. 16 al. 3 LCR) ; il y a lieu de rechercher si des circonstances particulières ne justifient pas de considérer néanmoins le cas comme de moindre gravité, voire de gravité plus importante. Dans cette mesure, une appréciation purement schématique du cas, fondée exclusivement sur le dépassement de vitesse constaté, violerait le droit fédéral (ATF 126 II 196 consid. 2a ; 124 II 97 consid. 2c). Afin de pouvoir considérer si le cas est de peu de gravité, le conducteur doit avoir notamment des motifs sérieux de penser qu'il ne se trouve plus dans la zone de limitation de vitesse (ATF 124 II 97 consid. 2c) ou encore que signalisation était peu claire ou peu visible (ATF 142 IV 137 consid. 12).

c. Enfin, selon la jurisprudence, la signalisation routière est valable et obligatoire pour les usagers lorsqu'elle a été mise en place sur la base d'une décision et d'une publication conforme de l'autorité compétente (ATF 126 II 196 consid. 2b ; 126 IV 48 consid. 2a et les arrêts cités). Lorsque la validité formelle de la signalisation n'est pas contestée, les usagers de la route ne sont légitimés à mettre en doute ni son opportunité, ni même sa légalité matérielle (ATF 126 II 196 consid. 2b), sans quoi la sécurité et la fluidité du trafic pourraient s'en trouver gravement compromises (ATF 100 IV 71 consid. 2) ; chacun doit en effet pouvoir compter sur le respect, par autrui, de la signalisation en place, en particulier en ce qui concerne les limitations de vitesse. Il n'est fait exception à ce principe que de manière très restrictive, lorsque la signalisation n'est pas suffisamment visible (arrêt du Tribunal fédéral 6A.11/2000 du 7 septembre 2000) ou lorsqu'elle prête en soi à confusion au point qu'un usager attentif et de bonne foi ne saurait plus quel comportement adopter (ATF 126 IV 48 consid. 2b).

6) En l'espèce, le recourant a commis un excès de vitesse de 31 km/h dans une localité, ce qui, en application des règles légales et jurisprudentielles précitées, est constitutif d'une infraction grave au sens de l'art. 16c al. 1 let. a LCR.

Le panneau de signalisation indiquant une limite de vitesse de 30 km/h était tout à fait visible et ne prêtait pas à confusion, comme cela ressort de la photo prise par la police le jour de l'infraction. Le recourant était ainsi à même d'y prêter attention. Que les conditions de circulation étaient favorables n'est pas pertinent pour alléger la gravité de la faute. Le besoin professionnel qu'invoque le recourant est, certes, important. Il ne constitue toutefois pas un élément permettant de faire abstraction de la limitation de vitesse et de considérer le cas comme de gravité moyenne. Par ailleurs, le recourant s'est vu retirer le permis de conduire pour infraction grave pour une durée de trois mois en 2015 et pour une durée de douze mois en 2016. Malgré les précédents retraits de permis, le recourant ne s'est pas conformé aux règles de la circulation, ce qui tend à démontrer que seule une mesure plus incisive que les précédentes paraît apte et nécessaire à atteindre le but de préserver la sécurité des autres usagers et d'inciter le recourant à respecter les règles de la circulation routière.

Au vu de l'ensemble de ces circonstances, rien ne justifie de s'écarter - si tant est que la chambre de céans y serait habilitée - de l'art. 16c al. 2 let. d LCR, qui prévoit une durée de retrait de permis indéterminée, d'au minimum deux ans.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de procédure de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 septembre 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 août 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guillaume Étier, avocat du recourant, au service cantonal des véhicules, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :