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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2341/2020

ATA/1213/2020 du 01.12.2020 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2341/2020-AIDSO ATA/1213/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er décembre 2020

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL

 



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______1962, a été mise au bénéfice de prestations d'aide de l'Hospice général (ci-après : l'hospice) du 1er mars 2017 au 30 avril 2018, pour un montant total de CHF 27'800.40.

Elle a été suivie au centre d'action sociale (ci-après : CAS) de B______.

2) Mme A______ a signé, le 27 février 2017, le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » (ci-après : « Mon engagement ») et s'est engagée à :

- informer immédiatement et spontanément l'hospice de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière, notamment de toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu'à l'étranger ;

- rembourser à l'hospice toute prestation exigible à teneur des dispositions légales en vigueur.

3) L'hospice lui a envoyé un courrier le 27 février 2017 pour lui rappeler le principe de subsidiarité des prestations d'aide financière sur toute autre source de revenu dans la mesure où au début de son suivi, il avait été question qu'elle puisse bénéficier de l'assurance-invalidité.

4) Sur le formulaire intitulé « Demande de prestations d'aide sociale financière », elle avait indiqué disposer d'un compte Postfinance N° 1______ et être séparée judiciairement de son mari.

5) Ce dernier est décédé le 29 août 2017.

6) Lors des entretiens qui se sont déroulés avec son assistante sociale les 19 septembre et 2 novembre 2017, Mme A______ n'a évoqué ni le décès de son mari ni l'existence d'un second compte Postfinance.

7) Mme A______ a mentionné à son assistante sociale le 4 janvier 2018 le décès de son mari survenu en Italie en « décembre 2017 » (sic). Dans la mesure où tous deux n'étaient pas divorcés, elle était en train d'effectuer des démarches, avec l'aide d'une association italienne, pour toucher une rente de veuve AVS de CHF 1'700.- par mois.

Son assistante sociale lui a alors indiqué qu'elle devait lui transmettre toutes les décisions relatives à cette rente. Par ailleurs, si elle devait hériter de feu son époux, l'aide qui lui était versée serait remboursable.

Le même jour, elle a adressé un courrier dans ce sens à Mme A______.

8) Le 13 mars 2018, Mme A______ a remis à son assistante sociale l'extrait d'un compte Postfinance n° 2______, sur lequel celle-ci a constaté le versement d'un montant de CHF 1'730.- le 7 février 2018 de la C______.

Mme A______ a indiqué percevoir cette rente depuis septembre 2017, sur ce compte dont elle avait tu l'existence au motif qu'elle souhaitait s'en servir pour régulariser ses dettes.

9) Lors d'un entretien du 13 avril 2018, Mme A______ a remis à son assistante sociale les documents attestant de l'ouverture de son compte Postfinance, n° 2______ le 30 août 2017 et de l'arrivée sur ledit compte de CHF 6'920.- le 29 décembre 2017 et CHF 1'730.- le 9 janvier 2018, en provenance de la C______, respectivement de CHF 3'410.- le 25 janvier 2018 et CHF 682.- les 23 février et 23 mars 2018, en provenance de la Caisse de pension D______. Mme A______ en avait retiré CHF 1'000.- les 12, 13 puis 14 janvier 2018, de même que le 21 février 2018, CHF 400.- le lendemain puis CHF 5'000.- le 26 février 2018.

Mme A______ a alors également remis à son assistante sociale un courrier de la Caisse de pension D______ du 20 janvier 2018 l'informant de la réception sur ce compte Postfinance d'une rente de CHF 682.- à laquelle elle avait droit à compter du 1er septembre 2017.

10) Au vu de ces nouveaux éléments, Mme A______ a été informée qu'elle se trouvait en-dehors des barèmes d'intervention de l'hospice pour le mois de mai 2018.

11) Le 26 février 2019, le CAS lui a adressé une décision de demande de restitution de CHF 16'200.30 à titre de prestations perçues indument pour la période de septembre 2017 à mars 2018. Mme A______ avait caché à son assistante sociale avoir reçu une rente de veuve de la C______ depuis décembre 2017 et d'D______ depuis janvier 2018 ainsi que le rétroactif de ces rentes.

12) Mme A______ en a demandé la remise le 21 mars 2019.

Elle était consciente qu'elle était redevable de la somme de CHF 16'000.-mais se trouvait dans une situation qui ne lui permettait pas de la rembourser. À fin août 2017 elle s'était retrouvée à l'assistance sociale suite à une opération d'un anévrisme, qui l'avait rendue invalide. Elle avait annoncé immédiatement à son assistante sociale le décès de son époux. Cette dernière étant très occupée, elle-même avait dû faire appel à un organisme patronal italien pour recevoir sa rente de veuve. Elle avait transmis tous les documents à son assistante sociale en lien avec le décès de même que ses demandes de rentes AVS et auprès de la caisse de pension. On lui avait conseillé d'ouvrir un compte pour que ces rentes y soient créditées afin d'éviter qu'elle ne les dépense. Son assistante sociale lui avait dit que ce n'était pas une bonne idée et elle lui avait répondu qu'elle ne toucherait pas à cet argent et le virerait dès réception à l'hospice. Les mois avaient passé et elle n'avait rien reçu. En janvier 2018, elle avait constaté que l'argent avait été viré mais elle n'avait alors pas de rendez-vous avec l'hospice. Elle était aussi dans l'attente du numéro de compte de l'hospice sur lequel virer ces montants. Elle avait ensuite eu le rendez-vous avec son assistante sociale qui lui avait dit qu'elle sortait du barème et qu'elle serait convoquée le moment et venu. Elle lui avait demandé de bien garder cet argent, le calcul n'étant pas encore fait. Rendre cet argent était devenu une obsession pour elle et l'assistante sociale lui avait dit de garder son calme et que les choses étaient en cours.

Elle avait conservé cet argent pendant presque un an et avait attendu en vain la lettre qui lui aurait permis de la libérer moralement en restituant l'argent perçu indûment. « La lenteur de la décision, les événements qui l'[avaient] frappée ces derniers temps sans compter les frais médicaux liés à sa rééducation et nombreux besoins vitaux toujours grandissants et la perte d'un être cher [l'avaient] conduit (sic) à prélever cet argent pour assouvir certains besoins ».

Il devait être tenu compte qu'elle avait annoncé ses avoirs, de la lenteur administrative et de sa bonne foi.

13) La remise lui a été refusée par le directeur de l'hospice par décision du 13 juillet 2020.

Mme A______ ne remettait pas en cause, ni dans son principe, ni dans sa quotité, la demande de remboursement du montant de CHF 16'200.30. Lorsqu'un bénéficiaire percevait un arriéré de prestations sociales ou d'assurances sociales pour une période durant laquelle il avait perçu des prestions selon la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), il ne pouvait ignorer qu'il devait rembourser l'hospice à concurrence du montant de l'aide financière, dès lors qu'il ne pouvait toucher des prestations à double. Pour cette première raison déjà, la demande de remise ne pouvait être accordée. Par surabondance, Mme A______ ne pouvait être considérée comme de bonne foi. Elle avait caché à son assistante sociale le fait qu'elle avait perçu des rentes ainsi que l'existence du compte sur lequel elles avaient été versées et avait ce faisant intentionnellement violé son devoir de renseigner.

Dans ces conditions, il n'était point besoin d'examiner la seconde condition de l'art. 42 al. 1 LIASI, à savoir que le remboursement la mettrait dans une situation difficile.

Enfin, ni l'action en restitution ni le droit au remboursement n'étaient prescrits.

14) Mme A______ a formé recours le 7 août 2020 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) et a demandé à ce que la décision, qu'elle estimait injustifiée, soit revue.

Elle était de bonne foi, n'avait jamais voulu cacher le compte et n'avait touché aucune rente à l'insu de sa conseillère.

Elle revenait sur l'intervention chirurgicale subie suite à un anévrisme, en janvier 2017 et qui l'avait laissée invalide. Ses divers traitements avaient été intégralement pris en charge. Elle avait tenu au courant sa conseillère du décès de son mari, des démarches s'agissant de la rente C______ puis de la caisse D______. Lors d'un entretien, « le » collaborateur de l'hospice, qui avait constaté qu'elle se rendait régulièrement chez un « neuro-psy », lui avait conseillé d'ouvrir un compte pour ne pas utiliser l'argent dès qu'il serait versé dans la mesure où il risquait de lui être réclamé. Sa conseillère avait « toujours » été au courant de l'existence de ce compte. Petit à petit, elle avait commencé à s'acquitter de ses frais de rééducation avec l'argent se trouvant sur ledit compte. Était ensuite survenu le décès de sa mère et elle avait utilisé un petit peu d'argent pour ses obsèques.

Elle était consciente de sa dette envers l'hospice mais niait le fait qu'elle ait voulu cacher le compte et les rentes. Il fallait reconnaître une forte lenteur administrative et à quel point cela lui avait pesé d'avoir une telle somme en sa possession si longtemps. Elle vivait actuellement avec une rente de veuve de CHF 2'300.- et était invalide. Elle reconnaissait qu'elle devrait d'une manière ou d'une autre rembourser la dette et risquait de solliciter encore de l'aide tout en la payant.

15) Au terme de sa réponse du 21 septembre 2020, l'hospice a conclu au rejet du recours, reprenant les arguments développés dans la décision querellée.

Par surabondance de moyens, il relevait que Mme A______ n'avait informé son assistante sociale du décès de son époux survenu en août 2017 et de ses démarches en vue de l'obtention d'une rente qu'en janvier 2018. Ce n'était qu'au mois de mars 2018 qu'elle avait annoncé à son assistante sociale l'existence du compte Postfinance litigieux, ouvert le 30 août 2017 sur lequel elle avait reçu des rentes à compter du 29 décembre 2017. Elle avait par ailleurs déclaré à deux reprises à son assistante sociale avoir eu l'intention de rembourser ses dettes et non l'hospice au moyen de ses rentes de veuve.

L'argument de Mme A______ selon lequel la situation était due au temps mis par l'hospice pour lui adresser la demande de remboursement n'apparaissait pas crédible puisqu'il ressortait de relevés du compte Postfinance litigieux qu'elle en avait retiré la somme totale, en espèces, de CHF 8'000.-, entre janvier et février 2018, soit avant même d'avoir informé l'hospice de la perception de ses rentes.

16) Mme A______ n'a pas exercé son droit à la réplique et la cause a été gardée à juger le 8 octobre 2020.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 52 LIASI ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/1718/2019 du 26 novembre 2019 consid. 2 ; ATA/1243/2017 du 29 août 2017 consid. 2a ; ATA/518/2017 du 9 mai 2017 consid. 2a). Ainsi, une requête en annulation d'une décision doit être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu'elle ne déploie pas d'effets juridiques (ATA/1243/2017 précité consid. 2a).

c. En l'espèce, la recourante n'a pas pris de conclusions formelles dans son recours. La chambre administrative comprend toutefois qu'elle en demande l'annulation, puisque ladite décision doit être « revue ».

3) Le litige porte sur le refus de l'hospice général d'accorder à la recourante une remise sur le montant de CHF 16'200.30 dont la restitution lui a été demandée et correspondant à une partie des prestations perçues alors qu'elle bénéficiait d'une rente de veuve AVS et d'une rente de la caisse de pension suite au décès de son époux.

La recourante allègue sa bonne foi et considère que la situation serait différente si l'hospice lui avait, dans un délai raisonnable, indiqué quel montant et sur quel compte elle devait lui restituer le trop-perçu.

4) a. Aux termes de l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté, et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

Le droit constitutionnel fédéral ne garantit toutefois que le principe du droit à des conditions minimales d'existence ; il appartient ainsi au législateur fédéral, cantonal et communal d'adopter des règles en matière de sécurité sociale qui ne descendent pas en dessous du seuil minimum découlant de l'art. 12 Cst. mais qui peuvent aller au-delà (arrêts du Tribunal fédéral 2P.318/2004 du 18 mars 2005 consid. 3 ; 2P.115/2001 du 11 septembre 2001 consid. 2a ; ATA/790/2019 du 16 avril 2019 et les références citées). L'art. 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst- GE - A 2 00) reprend ce principe : « toute personne a droit à la couverture de ses besoins vitaux afin de favoriser son intégration sociale et professionnelle ».

b. En droit genevois, la LIASI et le règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01) mettent en oeuvre ce principe constitutionnel.

La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Ses prestations sont fournies sous forme d'accompagnement social et de prestations financières (art. 2 LIASI). Ces dernières sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI) et leurs bénéficiaires doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l'aide financière est subsidiaire (art. 9 al. 2 LIASI ; ATA/790/2019 précité et les références citées).

Ont droit à des prestations d'aide financière les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève, ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et répondent aux autres conditions de la loi (art. 11 al. 1 LIASI). Les conditions financières donnant droit aux prestations d'aide financière sont déterminées aux art. 21 à 28 LIASI.

En contrepartie des prestations auxquelles il a droit, le bénéficiaire s'engage, sous forme de contrat, à participer activement à l'amélioration de sa situation (art. 14 LIASI). Il est tenu de participer activement aux mesures le concernant (art. 20 LIASI), de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI) et de se soumettre à une enquête de l'hospice lorsque celui-ci le demande (art. 32
al. 2 LIASI).

De même, il doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau, de nature à entraîner une modification du montant des prestations d'aide financière qui lui sont allouées ou à les supprimer (art. 33 al. 1 LIASI).

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/1083/2016 du 20 décembre 2016 consid. 7b).

c. Les bénéficiaires des prestations d'assistance sont tenus de se conformer à l'obligation de renseigner prévue par la loi, sous peine d'abus de droit. Violer le devoir de renseigner est contraire à la bonne foi (ATA/419/2017 du 11 avril 2017 consid. 5c ; ATA/265/2017 du 7 mars 2017 consid. 15b ; aussi ATA/239/2015 et ATA/1024/2014 du 16 décembre 2014;).

La juridiction de céans a déjà jugé que ne pouvait se prévaloir de sa bonne foi l'administrée qui avait dépensé l'intégralité de la somme qui devait revenir de droit à l'hospice suite au versement par son mari du rétroactif de pensions alimentaires, alors qu'elle avait signé un ordre de paiement en faveur de l'hospice (ATA/419/2017 du 11 avril 2017 consid. 5d ; ATA/825/2015 du 11 août 2015 consid. 11).

d. Toute prestation perçue indûment, soit touchée sans droit, peut faire l'objet d'une demande de remboursement (art. 36 al. 1 LIASI). Le remboursement peut être exigé du bénéficiaire d'aides financières s'il a agi par négligence ou fautivement, ou encore s'il n'est pas de bonne foi (art. 36 al. 2 et 3 LIASI).

e. De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment au sens de l'art. 36 LIASI (ATA/365/2020 du 16 avril 2020 consid. 4c ; ATA/306/2017 du 21 mars 2017 consid. 5b ; ATA/72/2017 du 31 janvier 2017 consid. 5).

A fortiori, il en est de même pour toute prestation obtenue en violation d'une obligation de rembourser à l'hospice des prestations sociales constituant des revenus au sens de l'art. 22 LIASI, perçues avec effet rétroactifs (art. 35 al. 1 let. f LIASI) - et donc aussi de rembourser des prestations conformément à l'art. 37 LIASI -, indépendamment d'une violation de l'obligation de renseigner (ATA/419/2017 du 11 avril 2017 consid. 5a).

f. Aux termes de l'art. 37 LIASI, si les prestations d'aide financière prévues par ladite loi ont été accordées à titre d'avances, dans l'attente de prestations sociales ou d'assurances sociales, les prestations d'aide financière sont remboursables, à concurrence du montant versé par l'hospice durant la période d'attente, dès l'octroi desdites prestations sociales ou d'assurances sociales (al. 1) ; il en va de même lorsque des prestations sociales ou d'assurances sociales sont versées au bénéficiaire avec effet rétroactif pour une période durant laquelle il a perçu des prestations d'aide financière (al. 3) ; l'action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l'hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement ; le droit au remboursement s'éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 4).

5) Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161
consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2015 du 28 avril 2016 consid. 3.1 ; ATA/393/2018 du 24 avril 2018 consid. 6b). Ne peut prétendre à être traité conformément aux règles de la bonne foi que celui qui n'a pas lui-même violé ce principe de manière significative. On ne saurait ainsi admettre, dans le cas d'espèce, de se prévaloir de son propre comportement déloyal et contradictoire (arrêt du Tribunal fédéral 2A.52/2003 du 23 janvier 2004 consid. 5.2, traduit in RDAF 2005 II 109 ss, spéc. 120 ; ATA/112/2018 du 6 février 2018 consid. 4 ; ATA/1004/2015 du 29 septembre 2015 consid. 6d ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 580).

6) En l'espèce, la recourante a bénéficié de prestations d'aide sociale du 1er mars 2017 au 30 avril 2018 pour un montant total de CHF 27'800.40. Elle a signé, le 27 février 2017, le document intitulé « Mon engagement » résumant ses obligations d'informer l'hospice immédiatement de toute modification dans sa situation financière et s'engageant à rembourser toute prestation exigible à teneur des dispositions légales en vigueur. Dans la mesure où la question se posait alors d'une éventuelle rente-invalidité, l'hospice lui a rappelé, par courrier du 27 février 2017, le principe de subsidiarité de l'aide financière, à laquelle elle prétendait, sur toute autre source de revenu.

Ce nonobstant, alors qu'elle a eu des entretiens avec son assistante sociale les 19 septembre et 2 novembre 2017, et alors qu'elle pouvait par ailleurs le faire par écrit, elle a tu à l'hospice le décès de son mari le 29 août 2017. Elle a de même tu l'ouverture d'un second compte Postfinance le 30 août 2017, soit un jour seulement après la disparition de son époux. Le 4 janvier 2018, elle a prétendu à son assistante sociale que son époux était décédé en décembre 2017. C'est à cette occasion qu'elle lui a annoncé les démarches en cours pour toucher une rente de veuve AVS. Elle n'a en revanche pas évoqué une rente issue d'une caisse de pension. Son assistante sociale lui a alors, le même jour, dit oralement, ce qui lui a été confirmé dans une lettre, qu'elle devait lui transmettre toutes les informations en relation avec la rente AVS.

Or, au 4 janvier 2018, la recourante avait déjà touché CHF 6'920.-, crédités le 29 décembre 2017 sur le compte Postfinance susmentionné, correspondant à un arriéré de quatre mensualités de rentes AVS. Elle n'a pas parlé de cette arrivée de fonds à son assistante sociale, alors même que celle-ci lui rappelait son devoir d'information tant en lien avec des décisions relatives à cette rente AVS, qu'à un possible héritage. Ces seuls éléments permettent de retenir qu'elle n'avait d'emblée pas l'intention de rembourser l'hospice avec ce montant, respectivement ceux qui y ont été crédités par la suite.

Ce n'est que le 13 mars 2018, soit plus de six mois après l'ouverture du compte litigieux, qu'elle a remis à son assistante sociale un extrait sur lequel celle-ci a constaté l'arrivée d'un montant de CHF 1'730.-. C'est uniquement à l'occasion de cet entretien qu'elle a concédé avoir touché cette rente depuis septembre 2017, sur ce compte dont elle avait tu l'existence à l'hospice, dans la mesure où elle entendait utiliser les fonds y crédités pour rembourser ses dettes. Le 13 mars 2018 encore, elle n'a pas dit à son assistante sociale que les CHF 1'730.- par mois de rente de veuve n'étaient pas ses seuls revenus. Ce n'est en effet que le 13 avril 2018, que l'hospice a appris, à la lecture d'un relevé dudit compte, que la recourante avait touché depuis le 25 janvier 2018 déjà plus de CHF 4'700.- de la caisse de pension D______.

Ainsi, la recourante a violé son devoir d'information ce qui exclut déjà qu'elle ait été de bonne foi.

En outre, elle n'a pas remboursé le montant total de CHF 9'400.- arrivé sur ce compte entre le 29 décembre 2017 et le 23 mars 2018, alors même que son obligation de remboursement lui a été rappelée le 4 janvier 2018 en lien avec un héritage dont elle pourrait bénéficier des suites du décès de son époux.

La recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle explique ne plus être en mesure de rembourser le montant finalement chiffré à CHF 16'200.30 puisqu'elle demeurait dans l'attente du calcul dudit montant, qui lui a été communiqué par décision du 26 février 2019 seulement. Certes, ce délai de plus de dix mois entre le moment où l'hospice a été au courant du versement des deux rentes et où il a informé la recourante du montant à rembourser pourrait être problématique. Il ne l'est toutefois pas dans le cas d'espèce dans la mesure où au 26 février 2018, soit avant même que l'assistante sociale réalise sur la base d'un relevé qu'une rente AVS était créditée sur le compte caché, la recourante en avait déjà retiré CHF 9'400.-, dont CHF 5'000.- le 26 février 2018. Elle bénéficiait alors encore de l'aide de l'hospice.

Elle ne peut dans ces circonstances prétendre, ce qu'elle ne démontre au demeurant pas, avoir interpellé et été dans l'attente d'un numéro de compte de l'hospice pour lui verser les montants perçus suite au décès de son époux. Au contraire, comme déjà relevé, elle a d'emblée indiqué à son assistante sociale qu'elle avait caché ces revenus parce qu'elle entendait s'en servir pour rembourser des dettes. Force est de retenir qu'elle a retiré près de CHF 9'400.- dont elle n'étaye par aucune pièce ce qu'il en est advenu.

Pour autant qu'il s'agît, en tout ou partie, de rembourser des dettes, la chambre de céans a déjà considéré à plusieurs reprises qu'il n'appartenait pas à l'État et indirectement à la collectivité, de désintéresser d'éventuels créanciers. En effet, tel n'est pas le but de la loi, qui poursuit celui de soutenir les personnes rencontrant des difficultés financières, en les aidant à se réinsérer socialement et professionnellement, étant rappelé que l'aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource. Il n'est ainsi pas acceptable d'être au bénéfice d'une aide sociale ordinaire et d'utiliser sa fortune personnelle et récemment acquise pour désintéresser ses créanciers (ATA/479/2018 du 15 mai 2018 consid. 6 et les références citées).

7) a. À teneur de l'art. 42 LIASI, le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1) ; dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de trente jours dès la notification de la demande de remboursement ; cette demande de remise est adressée à l'hospice (al. 2). Les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/1377/2017 du 10 octobre 2017 consid 11).

b. En l'espèce, il a été établi ci-dessus que la recourante a violé son obligation de renseigner l'intimé à laquelle elle avait expressément souscrit en signant le document « Mon engagement », ce dont elle était pleinement consciente ou devait l'être compte tenu de ses engagements. Pour cette raison, à teneur de la jurisprudence constante en la matière, l'intéressée ne peut se prévaloir de la bonne foi.

La deuxième condition, à savoir celle de la situation difficile que pourrait engendrer le remboursement, n'a pas lieu d'être traitée, les conditions posées par l'art. 42 al. 1 LIASI étant cumulatives.

La demande de remboursement étant fondée et son montant de CHF 16'200.30 n'étant pas contesté, le recours sera rejeté.

8) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87
al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Il ne sera pas alloué d'indemnité (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 août 2020 par Madame A______ contre la décision de l'Hospice général du 13 juillet 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure.

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :