Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3560/2020

ATA/1225/2020 du 02.12.2020 sur JTAPI/976/2020 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3560/2020-MC ATA/1225/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 décembre 2020

en section

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Magali Buser, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 novembre 2020 (JTAPI/976/2020)


EN FAIT

1) M. A______ (également connu sous d'autres identités), né le ______ 1981, est originaire de Guinée. Il est dépourvu de document de voyage et a déposé deux demandes d'asile en Suisse, lesquelles ont abouti à des décisions de renvoi.

2) M. A______ a été renvoyé dans son pays d'origine en 2015 puis le 28 février 2017.

3) Le 19 novembre 2013, M. A______ a été condamné par ordonnance du Ministère public (ci-après : MP) à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, assortie du sursis, pour séjour illégal et délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121).

4) Le 9 juillet 2018, M. A______ a été interpellé dans le cadre d'un important trafic de cocaïne.

Il ressort du rapport d'arrestation qu'il n'avait aucune résidence fixe en Suisse ni de lien particulier avec ce pays. Il vivait en Espagne et sa famille en Afrique.

5) Le 30 octobre 2019, M. A______ a été condamné par le Tribunal correctionnel (ci-après : TCOR), en lien avec les faits ayant donné lieu à son arrestation du 9 juillet 2018, pour infraction grave à la LStup (art. 19 al. 2 LStup), à une peine privative de liberté de trois ans et six mois. Son expulsion du territoire suisse a été ordonnée pour une durée de cinq ans.

6) Par jugement du 28 octobre 2020, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a ordonné la libération conditionnelle de M. A______ pour le 7 novembre 2020.

7) Le 2 novembre 2020, M. A______ a déclaré à l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), chargé de l'exécution de la mesure d'expulsion judiciaire, vouloir être refoulé en Espagne, où il avait bénéficié d'un titre de séjour jusqu'en 2019.

8) Le 3 novembre 2020, les services de police ont adressé au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) une demande de soutien à l'exécution du renvoi. Ils ont également effectué une demande de réadmission en Espagne.

Les autorités espagnoles ne se sont pas encore prononcées sur cette question.

9) Selon les informations transmises le 5 novembre 2020 par swissREPAT, les liaisons aériennes avec la Guinée sont actuellement peu nombreuses, mais les refoulements à destination de cet État sont possibles, sur le vol hebdomadaire de la compagnie Ethiopian Arlines. À compter du 11 novembre 2020, des vols devaient reprendre chez Royal Air Maroc, via Casablanca.

10) À sa sortie de prison, le 7 novembre 2020, M. A______ a été remis aux services de police en vue de son refoulement.

11) Le même jour, il s'est vu notifier par l'OCPM une décision de non-report de la mesure d'expulsion judiciaire.

12) Le 7 novembre 2020, à 9h30, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à son encontre, pour une durée de trois mois, ordre qu'il a soumis au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le même jour.

M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Guinée, mais qu'il était d'accord de retourner en Espagne. Il était en bonne santé et n'avait aucun traitement médical.

13) Entendu devant le TAPI le 10 novembre 2020, M. A______ a confirmé son accord pour un renvoi en Espagne où il avait un titre de séjour, de la famille, notamment son oncle, et un ami. Il ne souhaitait pas être refoulé à destination de la Guinée. Il n'avait pas de famille en Suisse. Il souffrait de diabète. Il était marié et père de trois enfants vivant en Guinée. Il était arrivé en Espagne en 2003, année durant laquelle il était venu en Suisse, et y était retourné en 2004. Il y avait vécu jusqu'en 2013 où il était revenu en Suisse.

La représentante du commissaire de police a indiqué demeurer dans l'attente des réponses des autorités espagnoles et du SEM. Elle a demandé la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois, ce notamment en raison du risque de non réadmission en Espagne dans l'hypothèse où le permis de séjour de M. A______ était échu.

M. A______ a conclu principalement à l'annulation de l'ordre de mise en détention administrative et à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à la réduction de la durée de cette détention à un mois.

14) Par jugement du 10 novembre 2020, le TAPI a confirmé l'ordre de mise en détention pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 7 février 2021.

M. A______ faisait l'objet d'une décision d'expulsion pénale et avait été condamné pour trafic de cocaïne. Il n'avait pas d'attaches en Suisse ni de quelconques moyens de subsistance. Son comportement dénotait que sa présence en Suisse était uniquement motivée par le trafic de stupéfiants. Il existait un risque sérieux qu'il continue à vendre de la drogue s'il devait être laissé en liberté. L'assurance de son départ de Suisse répondait à un intérêt public certain et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devrait monter dans l'avion en vue de son renvoi.

15) M. A______ a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), par acte mis à la poste le 20 novembre 2020. Il a conclu principalement à l'annulation du jugement entrepris, à ce que soit constatée une violation de l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), à ce que sa mise en liberté immédiate soit ordonnée et à l'allocation d'une indemnité de procédure. Subsidiairement, il a conclu à une mise en détention administrative pour un mois au plus, soit jusqu'au 7 décembre 2020.

Il avait demandé sa mise en liberté au TAPI dans une lettre du 11 novembre 2020. Il n'avait pas pu se présenter à l'audience fixée le 19 novembre 2020 dans la mesure où un cas de Covid-19 avait été détecté au sein de l'établissement de C______ (ci-après : C______). Dans un échange de courriels, la direction de C______ avait averti le conseil de M. A______ que cet établissement se trouvait en quarantaine sanitaire du 16 au 27 novembre 2020 inclus, alors que lui-même ne l'avait appris que le 18 novembre 2020 en fin de journée. La direction de cet établissement avait informé le TAPI le 20 novembre 2020 des mesures prévues et mises en place pour protéger les détenus contre la propagation de ce virus. À cette date, M. A______ avait exposé des faits complémentaires au TAPI en lien avec la situation sanitaire au sein de cet établissement.

M. A______ n'avait pas encore été testé pour savoir s'il avait été contaminé par le virus et, tout comme ses codétenus, il pouvait se déplacer librement sur son étage à C______. L'accès à l'extérieur était restreint, ce qui était illogique. Il n'avait pas reçu de consigne de se confiner dans sa cellule, alors que tel devrait être le cas. Aucune mesure particulière n'avait été prise pour le protéger alors qu'il souffrait du diabète, ce qui l'exposait à tomber gravement malade, comme rappelé par l'Organisation mondiale de la santé (ci-après : OMS). On ignorait la chaîne d'infection au sein de l'établissement et M. A______ était angoissé pour son état de santé. Ces éléments étaient constitutifs d'une violation de l'art. 3 CEDH qui devait être constatée.

Il était privé de sa liberté alors qu'il était d'accord de quitter la Suisse par ses propres moyens. Il avait été condamné pour le trafic de cocaïne justifiant selon l'autorité qu'il demeure en détention administrative. Il proposait d'être assigné à un territoire en application de l'art. 74 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) dans l'attente de son renvoi, ce qui préserverait son droit à la vie et à la santé.

En tout état, une prolongation de sa détention jusqu'au 7 février 2021 ne respectait pas le principe de proportionnalité. Il ne ressortait pas du dossier que les autorités seraient en possession d'un quelconque document de voyage en faveur de M. A______ et aucun vol n'était réservé. Vu la requête du SEM du 13 novembre 2020 en vue de la délivrance d'un laissez-passer pour la Guinée, tout laissait à penser que ce document serait délivré prochainement. Rien ne s'opposait donc à la réservation d'un vol dans les prochaines semaines, étant précisé que des vols à destination de l'Afrique étaient encore possibles. Dans ces circonstances, une prolongation d'un mois serait acceptable.

16) Le TAPI a rejeté la demande de mise en liberté de M. A______ par jugement JTAPI/1009/2020 du 23 novembre 2020, lequel a été versé à la présente procédure, ce dont les parties ont été informées.

Le respect des conditions légales de la détention de M. A______ avait été confirmé par le TAPI le 10 novembre 2020, étant relevé que les circonstances ayant conduit à cette détention n'avaient pas changé. La durée de la détention telle que décidée respectait toujours le cadre légal et n'apparaissait pas disproportionnée.

L'autorité chargée du renvoi avait agi avec diligence et célérité en procédant aux démarches en vue de la réadmission de l'intéressé en Espagne ainsi qu'en parallèle, de l'obtention d'un laissez-passer de la part des autorités de Guinée. L'inaction des autorités étrangères n'était pas imputable aux autorités suisses. Les démarches en vue de l'identification de M. A______ par les autorités guinéennes étaient nécessaires uniquement parce qu'il était démuni de documents permettant son identification et de voyager. M. A______ pouvait à cet égard effectuer
lui-même des démarches auprès de la représentation diplomatique de son pays, ce qui permettrait d'abréger sa détention.

Si, certes, une date effective de vol n'avait pas encore pu être obtenue, que ce soit à destination de l'Espagne ou de la Guinée, il n'en demeurait pas moins que les démarches en vue de procéder à l'expulsion de M. A______ étaient en cours et que l'espace aérien, tant espagnol que guinéen, était ouvert. Dès lors, il ne pouvait être retenu qu'il n'y avait pas de perspectives sérieuses que l'expulsion puisse intervenir dans un délai prévisible.

Enfin, en tant que telle, la situation de mise en quarantaine dont se plaignait M. A______ ne pouvait conduire à sa mise en liberté. L'objectif de la détention administrative était de permettre l'exécution du renvoi. Les conditions évoquées par M. A______ [au sein de C______] ne conduisaient pas à considérer que les mesures prises en vue de lutter contre la propagation du virus Covid-19 seraient insuffisantes au point de l'exposer à des conditions dégradantes ou dangereuses pour sa santé. Il ressortait au contraire du courrier du 20 novembre 2020 de Mme B______, directrice de C______, que toutes les mesures étaient prises en vue de protéger tant les détenus que les personnes extérieures contre la propagation de ce virus, conformément aux règlementations en vigueur à cet égard. Le détenu testé positif avait été extrait de C______. La mise en quarantaine décidée par la médecin cantonale tendait à protéger tant les détenus que les personnes extérieures, raison pour laquelle elle avait notamment interdit tout déplacement à l'extérieur du centre.

Cet établissement serait en mesure de prendre M. A______ en charge médicalement. Sa détention se déroulait dans un établissement satisfaisant aux exigences légales de l'art. 81 LEI en matière de respect des personnes détenues administrativement et bénéficiait d'un service médical approprié, pourvoyant aux soins ambulatoires et d'urgence (art. 18 al. 2 du Concordat sur l'exécution de la détention administrative à l'égard des étrangers du 4 juillet 1996 - CEDA - F 2 12 - et art. 20 du règlement de l'établissement concordataire de détention administrative de C______ du 1er novembre 2017 - RC______ - F 2 12.09), susceptible de lui porter assistance. En aucun cas, son placement ou son maintien en détention, dans ces conditions, ne contrevenait par lui-même au droit à la vie garanti par l'art. 2 par. 1 CEDH ni à l'interdiction de la torture, des traitements inhumains ou dégradants garantie par l'art. 3 CEDH (ATA/431/2019 du 11 avril 2019 consid. 4c ; ATA/184/2017 du 15 février 2017 consid. 10b).

17) Dans sa réponse du novembre 2020, le commissaire de police a conclu au rejet du recours et s'est référé à la motivation du jugement entrepris.

Le SEM avait indiqué à l'OCPM par courriels du 25 novembre 2020 qu'il demeurait sans nouvelles des autorités espagnoles. Lorsque celles-ci devaient procéder à une comparaison d'empreintes digitales via leur service de police, cela prenait un certain temps, parfois au-delà de trente jours. Par ailleurs, la demande de laissez-passer adressée à la mission permanente de Guinée le 17 novembre 2020 suivait son cours et les vols hebdomadaires restaient possibles tant avec Ethiopian Airlines que Royal Air Maroc.

Le grief d'une violation de l'art. 3 CEDH devait être écarté, étant relevé que la situation de mise en quarantaine dont il se plaignait ne pouvait conduire à sa mise en liberté, étant rappelé que l'objectif de la mise en détention administrative était de permettre l'exécution du renvoi. Les mesures prises par les médecins cantonale et de C______ tendaient à protéger tant les détenus que les personnes extérieures contre la contamination au Covid-19.

Toute autre mesure que la détention administrative serait vaine pour assurer la présence de M. A______ au moment d'être refoulé vers l'Espagne ou la Guinée, étant rappelé qu'il avait disparu dans la clandestinité lors de son précédent refoulement. Or il ne souhaitait pas retourner dans son pays d'origine, et il ne disposait à ce stade d'aucun document lui permettant de se rendre légalement en Espagne, là où il souhaitait se rendre. Le principe de proportionnalité avait donc été respecté par le TAPI, tant s'agissant de l'exclusion de prononcer une assignation territoriale, que de prolonger pour trois mois la détention. Dans l'hypothèse où le transfert en Espagne serait refusé, une telle durée serait de toute évidence nécessaire en vue de la délivrance d'un laissez-passer pour la Guinée puis la réservation d'une place sur un vol, étant relevé que l'autorité avait fait diligence en entreprenant immédiatement des démarches vis-à-vis de ces deux pays.

18) Dans sa réplique du 30 novembre 2020, M. A______ a déploré le fait qu'il ait été en contact durant trois jours avec le codétenu infecté par le Covid-19, lequel, selon l'article de presse produit, était libre de ses mouvements au sein de l'établissement entre le 13 et le 16 novembre 2020. Sa sécurité n'avait dès lors pas été assurée alors même qu'il était atteint du diabète et dès lors une personne à risque. Le TAPI ne lui avait pas encore transmis copie de la décision de mise en quarantaine nonobstant son engagement. M. A______ avait été empêché de se rendre à l'audience du 19 novembre 2020 ce qui violait son droit d'être entendu.

19) Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées par courrier du 30 novembre 2020.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 23 novembre 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) a. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 CEDH (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 précité consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

b. En vertu de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, notamment si des éléments concrets font craindre que la personne concernée entende se soustraire à son renvoi ou à son expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de
l'art. 90 LEI ou de l'art. 8 al. 1 let. a ou al. 4 de la loi sur l'asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31 ; ch. 3), ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4), mettre en détention la personne concernée, notamment si elle a été condamnée pour crime (art. 75 al. 1 let. h LEI).

Les chiffres 3 et 4 de l'art. 76 LEI décrivent tous deux les comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition ; ils doivent donc être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Lorsqu'il examine le risque de fuite, le juge de la détention doit établir un pronostic, en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du renvoi le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions en seront réunies. Il dispose pour ce faire d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_128/2009 précité consid. 3.1).

Par crime au sens de l'art. 75 al. 1 let. h LEI, il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a), ce qui est notamment le cas de l'infraction grave à la LStup (art. 19 al. 2 LStup).

4) a. Le recourant se plaint d'être détenu administrativement alors qu'il se dit d'accord de quitter la Suisse par ses propres moyens. Il relève également que son renvoi en Guinée ne devrait pas poser de problème vu la procédure de
laissez-passer en cours et les possibilités de vol.

b. Il ne semble ainsi pas contester la réalisation des conditions d'application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI, ainsi que de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 let. h LEI, quant au principe de la détention administrative. Les considérants du TAPI à cet égard sont en tout état suffisants et convaincants, la détention administrative étant effectivement justifiée dans son principe, au vu de sa condamnation pour crime à la LStup du 30 octobre 2019.

Par surabondance, l'intention du recourant, manifestée au stade du recours seulement, de quitter la Suisse par ses propres moyens renforce le risque de fuite déjà existant au moment du prononcé du jugement du TAPI.

5) Le recourant soutient que le principe de proportionnalité serait violé, tant quant à la durée de la mesure confirmée par le TAPI, que s'agissant de la possibilité d'ordonner en lieu et place de la détention administrative une assignation territoriale.

a. La détention administrative, qui porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 § 1 let. f CEDH doit respecter le principe de la proportionnalité. Ce principe, garanti par l'art. 36 al. 3 Cst. se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé - de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

b. Selon l'art. 74 al. 1 let. b LEI, l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée lorsque l'étranger est frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion entrée en force et que des éléments concrets font redouter qu'il ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou qu'il n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire (ATF 144 II 16 consid. 2.1). L'assignation d'un lieu de résidence fondée sur l'art. 74 al. 1
let. b LEI vise à permettre le contrôle du lieu de séjour de l'intéressé et à s'assurer de sa disponibilité éventuelle pour la préparation et l'exécution de son renvoi de Suisse par les autorités (arrêts du Tribunal fédéral 2C_88/2019 du 23 août 2019 consid. 3.2 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.1), mais aussi, en tant que mesure de contrainte poursuivant les mêmes buts que la détention administrative, à inciter la personne à se conformer à son obligation de quitter la Suisse (ATF 144 II 16 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du
14 juin 2018 consid. 4.1).

c. Pour qu'une telle assignation soit prononcée, il faut que l'étranger soit frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion, que cette décision soit entrée en force et que des éléments concrets fassent craindre que l'étranger ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou qu'il soit constaté qu'il n'a d'ores et déjà pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire. La mesure doit en outre respecter le principe de la proportionnalité. Elle doit être apte à atteindre le but visé (ATF 144 II 16 consid. 2.2 ; 142 II 1consid. 2.3), ce qui implique notamment qu'une mesure fondée sur l'art. 74 al. 1 let. b LEI ne peut être prononcée que si un départ de Suisse est effectivement possible, car elle ne peut atteindre son but que dans ce cas (ATF 144 II 16 consid. 2.3). Il suffit qu'un départ volontaire soit possible (ATF 144 II 16 consid. 4.6 et 4.8 a contrario).

d. En l'espèce, on ne peut suivre le recourant lorsqu'il tente de faire valoir qu'une mesure moins incisive que la détention, telle qu'une assignation à territoire, permettrait de sauvegarder le but recherché. En effet, il s'est dit opposé à son renvoi dans son pays d'origine et indique vouloir quitter le territoire suisse par ses propres moyens. Il a manifesté le souhait de se rendre en Espagne où il disposait d'un titre de séjour jusqu'en 2019, et où vivent son oncle et un ami. Or il ne possède plus de titre de séjour et il n'est pas encore certain que ce pays accepte son retour. Il n'a de plus aucun lieu de résidence fixe en Suisse.

Il n'est ainsi pas possible de retenir qu'une assignation à territoire puisse permettre d'assurer sa présence le jour de l'exécution de son renvoi, tant il lui serait aisé de se rendre par ses propres moyens en Espagne ou simplement de retomber dans la clandestinité comme il l'a fait en marge de l'un de ses précédents renvois.

Quant à la durée de la détention administrative, la diligence et la célérité des autorités suisses n'est pas spécifiquement critiquée et ne peut l'être, dans la mesure où elles ont immédiatement entrepris les démarches en vue de la réadmission de l'intéressé en Espagne, ainsi que de l'obtention d'un laissez-passer de la part des autorités de Guinée. Il appartient au demeurant au recourant de collaborer
(art. 90 LEI), dans la mesure de ses moyens, pour obtenir les documents nécessaires, en particulier s'il entend se rendre en Espagne et non pas en Guinée.

6) a. Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative, doit la lever lorsque, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

b. Le recourant ne conteste pas la faisabilité de la mesure de renvoi vers la Guinée, où il a été renvoyé en 2015 et février 2017. Il reste à déterminer si l'expulsion pourra intervenir d'ici le 7 février 2021, date fixée dans le jugement du TAPI admettant la demande de prolongation de trois mois formée par l'OCPM.

7) a. Le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF) a eu l'occasion de préciser que le contexte actuel lié à la propagation dans le monde de la maladie à coronavirus (Covid-19) n'est, de par son caractère temporaire, pas de nature à remettre en cause l'exécution d'un renvoi. S'il devait, dans le cas d'espèce, retarder momentanément l'exécution du renvoi, celle-ci interviendrait nécessairement plus tard, en temps approprié (arrêt du TAF D-1233/2018 du 29 avril 2020). Les modalités de l'exécution du renvoi de Suisse sont cela dit du ressort de l'OCPM (ATA/613/2020 du 23 juin 2020 consid 11c ; ATA/598/2020 du 16 juin 2020 consid. 9).

b. Le Tribunal fédéral a récemment rendu plusieurs arrêts en lien avec l'application de l'art. 80 al. 6 LEI. Dans un arrêt daté du 15 juillet 2020, le Tribunal fédéral résume comme suit sa jurisprudence sur le sujet (arrêt du Tribunal fédéral 2C_512/2020 du 15 juillet 2020 consid. 3.2 et 3.3).

Si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, au sens de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention administrative en vue de renvoi n'est plus justifiée, et contrevient ainsi également à l'art. 5 § 1 CEDH. Pour savoir si l'exécution du renvoi est concrètement possible ou non, il y a lieu de poser un pronostic sur la base d'une appréciation consciencieuse du cas. L'élément cardinal est de savoir si l'exécution du renvoi apparaît ou non possible, avec une vraisemblance suffisante, dans un laps de temps prévisible. La détention contrevient à l'art. 80 al. 6 let. a LEI et est du même coup disproportionnée lorsque des raisons sérieuses donnent à penser que le renvoi ne pourra être exécuté dans un délai raisonnable. La détention ne doit toutefois être levée que lorsqu'il n'existe aucune possibilité d'exécuter le renvoi, ou qu'une telle probabilité est très mince, mais non déjà s'il existe encore une possibilité réelle - quand bien même elle serait ténue - de pouvoir procéder à cette exécution. Sous réserve d'une violation de l'ordre public par la personne concernée, la question de l'impossibilité du renvoi au sens de l'art. 80 al. 6
let. a LEI ne doit pas nécessairement être examinée en lien avec la durée maximale de la détention, mais bien plutôt au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce quant à la durée de détention admissible. La date du jugement attaqué constitue le point de référence à cet égard.

Le cas jugé concernait un ressortissant marocain ou algérien, dont l'identité n'avait pas encore été complètement éclaircie, et qui avait fait l'objet d'une condamnation pénale (34 mois de peine privative de liberté pour vol en bande et par métier, recel, ainsi que pour dommages à la propriété et violations de domicile commis à réitérées reprises). L'instance précédente n'avait pas indiqué de manière précise quand les vols avec escorte ou les vols spéciaux à destination du Maroc et de l'Algérie pourraient reprendre, mais s'était contentée de mettre en lumière les incertitudes liées à la crise sanitaire. Le SEM ne s'était pas non plus exprimé à ce sujet. Un rapport du SEM indiquant que les vols vers l'Algérie et le Maroc reprendraient respectivement le 3 et le 12 juillet 2020 ne pouvait être pris en compte, dès lors qu'il était postérieur au jugement attaqué. Enfin, la personne à renvoyer était en détention depuis plus de neuf mois. Le Tribunal fédéral a admis le recours et prononcé une libération immédiate.

c. En l'espèce, le recourant ne se prévaut à juste titre pas d'une impossibilité de renvoi dans un délai raisonnable. Il semble au contraire que toutes les démarches utiles ont été entreprises par l'autorité pour que tel soit le cas, étant relevé que la crise sanitaire ne constitue en l'état des informations disponibles, pas un frein pour un vol vers l'Espagne ou la Guinée. Enfin, le délai d'un mois ne suffit pas, contrairement à ce que soutient le recourant, dès lors qu'il arrivera à échéance le
7 décembre 2020. Le délai de trois mois échéant le 7 février 2021 doit permettre aux autorités d'obtenir les documents de voyage nécessaires et d'organiser au plus vite le vol.

8) Dans son acte de recours, le recourant développe longuement et essentiellement les mêmes motifs que ceux ayant donné lieu à sa demande de mise en liberté devant le TAPI le 11 novembre 2020, en lien avec le cas de Covid-19 découvert à C______. Il se plaint de ses conditions de détention en se prévalant de l'art. 3 CEDH.

a. Selon l'art. 3 CEDH, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

b. La chambre de céans se réfèrera à cet égard à la motivation du TAPI telle qu'elle figure dans son jugement du 23 novembre 2020 et reprise ci-dessus, laquelle est complète et convaincante, fondée notamment sur les informations spécifiques données par C______, qui a répondu aux demandes de la médecin cantonale, pour refuser la demande de mise en liberté du recourant.

Quand bien même la situation sanitaire s'avère difficile à vivre pour lui, comme pour ses codétenus et le personnel pénitentiaire, il y a lieu de retenir que les autorités ont pris les dispositions nécessaires pour empêcher la propagation de ce virus dans les murs de C______, sur la base des connaissances actuelles. Si la santé du recourant nécessite un suivi particulier en raison d'un diabète, le service médical est à même de le lui offrir et d'alerter la direction de l'établissement sur des éventuelles mesures particulières supplémentaires à prendre pour le protéger.

Enfin, le recourant ne saurait se plaindre dans la présente procédure d'une violation de son droit d'être entendu des suites d'une convocation par le TAPI dans une procédure distincte suite à sa demande de mise en liberté, de sorte que ce dernier grief sera également rejeté.

Au vu de ce qui précède, et du fait qu'il existe un risque que la réadmission du recourant en Espagne soit refusée du fait qu'il a lui-même indiqué que son permis de séjour était échu depuis 2019 il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de trois mois, durée qui permettra aux autorités d'obtenir un laissez-passer des autorités guinéennes le cas échéant et un billet d'avion.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

 

9) Nonobstant l'issue du litige, compte tenu de sa nature, aucun émolument ne sera mis à charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 novembre 2020 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 novembre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Magali Buser, avocate du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'à l'établissement C______, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.

 

 

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. Specker

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :