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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3772/2018

ATA/843/2020 du 01.09.2020 sur JTAPI/511/2019 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : SUSPENSION DE L'INSTRUCTION;PERMIS DE CONSTRUIRE;COORDINATION(AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE OU ENVIRONNEMENT);ÉQUIPEMENT(CONSTRUCTION);ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LPA.14.al1; LAT.25a; LCI.3A.al1; LPA.12A; LAT.22.al2.letb; LAT.19.al1; LCI.14.al1; Cst.8
Parties : VAN CAUTER Stéphane et ELIAHOU David, ELIAHOU David / GEUTHER Aline, LEU Véronique, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, CARNEIRO ARCHITECTES SA & CONSORTS
Résumé : Autorisation de construire trois villas contiguës et six places de stationnement à Collonge-Bellerive (DD 110'229). Procédure distincte de la procédure DD 111'594, aucun des deux projets n'étant nécessaire à la réalisation de l'autre : pas de violation du principe de la coordination. Le TAPI, qui a procédé à un transport sur place, était fondé à retenir que l'accès, qui offrait plusieurs possibilités de croisement de véhicules à moteur et garantissait une bonne visibilité, était suffisant pour desservir les villas projetées. La situation est différente de celle prévalant dans la procédure DD 111'594 : absence de violation du principe de l'égalité de traitement. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3772/2018-LCI ATA/843/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er septembre 2020

3ème section

 

dans la cause

 

Messieurs Stéphane VAN CAUTER et David ELIAHOU
représentés par Me Serge Fasel, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

et

Mesdames Aline GEUTHER et Véronique LEU

CARNEIRO ARCHITECTES SA
représentées par Me Diane Schasca, avocate

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2019 (JTAPI/511/2019)


EN FAIT

1) a. Mesdames Aline GEUTHER et Véronique LEU sont propriétaires de la parcelle no 9'817, feuillet 54 de la commune de Collonge-Bellerive (ci-après : la commune), située en cinquième zone de construction.

b. Monsieur Robert LEU est propriétaire de la parcelle no 5'267, feuillet 54 de la commune, se trouvant directement au sud la parcelle no 9'817.

2) a. Messieurs Stéphane VAN CAUTER et David ELIAHOU sont respectivement propriétaires des parcelles nos 8'070 et 8'071, feuillet 54 de la commune, situées immédiatement au nord de la parcelle no 9'817, aux 42 et 42A, chemin de Mancy.

b. Ils figurent également parmi les copropriétaires de la parcelle no 8'072, dépendance de quatre parcelles, parmi lesquelles les leurs, et sur laquelle se trouve un chemin privatif débouchant sur l'axe principal du chemin de Mancy.

3) Par requête du 31 mars 2017, référencée sous dossier DD 110'229, Mmes GEUTHER et LEU, en qualité de propriétaires, et Carneiro Architectes SA (ci-après : Carneiro), en qualité de requérante, ont sollicité auprès du département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, devenu depuis lors le département du territoire (ci-après : DT) une autorisation de construire quatre villas contiguës avec parking souterrain, comprenant huit places de stationnement, sur la parcelle no 9'817.

L’accès aux nouvelles constructions se ferait par un chemin rectiligne sans issue, situé principalement sur la parcelle no 8'072, desservant également sept autres parcelles. L'accès au parking souterrain empièterait sur la parcelle no 5'267.

4) Par préavis du 6 avril 2017, la direction des autorisations de construire
(ci-après : DAC) s'est prononcée favorablement au projet, avec dérogations.

5) Le 29 mai 2017, la direction générale des transports (ci-après : DGT) a préavisé favorablement le projet, sans observation.

En tant qu'instruction à la DAC, elle a noté que, selon elle, le projet pouvait être autant refusé qu'autorisé car les parcelles privées desservant la parcelle jusqu'au chemin de Mancy induisaient une liaison étroite. Il s'agissait d'une question de confort vu que deux véhicules ne pouvaient pas se croiser sur l'entier du chemin mais seulement ponctuellement.

6) Le 2 mars 2018, le projet a été réduit, pour ne comprendre plus que trois villas contigües – 38A, 38B et 38C, chemin de Mancy – et six places de stationnement.

7) Le 9 mars 2018, la DAC a préavisé favorablement le projet, avec dérogations.

8) Le 15 mars 2018, la DGT a rendu un préavis positif, sans observation.

9) a. Le 28 juin 2018, la notaire mandatée par Mmes LEU et GEUTHER et M. LEU a attesté que ces derniers l'avaient chargée d'établir un acte portant sur la constitution d'une servitude de droit d'usage et à destination de verdure sur la partie nord-ouest de la parcelle no 5'627 au profit des trois villas projetées et de celle existante.

b. Par engagement du 23 août 2018, M. LEU a déclaré accepter que, pour le calcul des surfaces afférant à l'autorisation de construire DD 110'229, la surface de sa parcelle soit réduite de 754 m2 au profit de la parcelle no 9'817.

10) Par décision du 21 septembre 2018, publiée le jour même dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), le DT a délivré l'autorisation globale de construire sollicitée.

11) Par acte du 22 octobre 2018, MM. VAN CAUTER et ELIAHOU ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation.

12) Le 14 mars 2019, après un double échange d'écritures, le TAPI a procédé à un transport sur place, effectué en présence des parties et de l'auteur du préavis de la DGT – convoqué à titre de renseignement – et documenté par vingt-deux photographies.

a. Selon MM. VAN CAUTER et ELIAHOU, la sortie sur la voie publique n'était pas évidente, notamment lorsque des vélos circulaient ou des voitures arrivaient rapidement, la visibilité n'étant pas bonne. Il leur arrivait peu fréquemment d'avoir à croiser d'autres véhicules sur le chemin. Lorsque cela arrivait, ils le faisaient à la hauteur des places de stationnement de M. LEU, sur la parcelle no 8'072 ou à l'entrée du chemin. Il s'agissait des deux seules possibilités de croisement.

b. Le représentant de la DGT a confirmé le préavis favorable. Le premier préavis, du 29 mai 2017, était favorable et se référait essentiellement à une problématique de confort. Le gabarit du chemin restait conforme aux normes de l'union suisse des professionnels de la route (ci-après : normes VSS) ou, dans tous les cas, était acceptable du point de vue de ces dernières. Le projet prévoyait six places de stationnement en plus des six places existantes sur le chemin, pour un total de douze places desservies, soit un nombre relativement faible, et débouchait sur un axe de réseau de quartier, de sorte qu'il répondait à la sollicitation à laquelle il serait soumis. Le chemin étant rectiligne et la visibilité bonne, il n'y avait pas de risque d'avoir des véhicules masqués surgissant d'un angle de ce dernier. Le débouché sur l'axe principal du chemin de Mancy était relativement large et les conditions de visibilité étaient satisfaisantes pour un faible volume de véhicules. L'augmentation de trafic serait en réalité plus faible que dans ses premières estimations, dans la mesure où plus de six véhicules utilisaient déjà le chemin d'accès. Le chemin de Mancy était autorisé uniquement aux bordiers, ce qui devait restreindre le nombre de véhicules l'empruntant.

13) Par jugement du 6 juin 2019, rendu après formulation d'observations par les parties à la suite du transport sur place et expédié pour notification le 11 juin 2019, le TAPI a rejeté le recours.

L'accès aux constructions projetées se ferait par le chemin de Mancy et le prolongement privé dudit chemin, correspondant à la parcelle no 8'072 et desservant sept bâtiments d'habitation, soit les villas sises aux 34, 36, 38, 40, 40A, 42 et 42A, chemin de Mancy. Le chemin privatif avait une largeur d'environ 3 m pour sa partie carrossée et de 2,5 m aux endroits les plus étroits, offrant plusieurs possibilités de croisement entre véhicules à moteur, et suivait un tracé rectiligne, garantissant une bonne visibilité sur toute sa longueur. Son débouché sur l'axe principal du chemin de Mancy était relativement large. Sept places de stationnement pour visiteuses et visiteurs existaient à l'entrée du chemin privatif, sur lequel se trouvaient en outre six garages fermés et au moins autant de places de parc à ciel ouvert. Le représentant de la DGT avait confirmé le préavis favorable de cette dernière lors du transport sur place, relevant que le chemin privatif serait à même de répondre à la sollicitation à laquelle il serait soumis compte-tenu des nouvelles places de stationnement envisagées, notamment en termes de revêtement, que les conditions de visibilité, notamment à la hauteur du débouché, étaient satisfaisantes pour un faible volume de véhicules, comme en l'espèce, et que les conditions d'accès étaient également suffisantes pour des véhicules de chantier. Les opposants se contentaient de substituer leur appréciation à celle du DT et des spécialistes consultés. Ils n'expliquaient pas en quoi le passage de, tout au plus, six véhicules supplémentaires engendré par le projet serait source d'importantes nuisances ou d'une augmentation de trafic incompatible avec les caractéristiques d'un quartier de villas. Le DT n'avait pas outrepassé son pouvoir d'appréciation en considérant le chemin de Mancy comme un accès suffisant pour desservir les constructions projetées et le projet n'induirait pas d'inconvénients graves et durables.

La procédure DD 111'594 – construction d'un habitat groupé de douze logements sur la parcelle no 7'849, feuillet 54 de la commune, sise au sud de la parcelle no 8'072, à l'adresse 28 et 30, chemin de Mancy – concernait un projet différent, ayant des spécificités propres, notamment s'agissant des voies d'accès, et il n'était pas pertinent que le préavis de la DGT dans ce projet pose des conditions strictes en termes de gabarit du chemin d'accès.

Il ne pouvait pas être retenu que le projet ne respectait pas les aspects esthétiques, environnementaux et paysagers sur le site en question et rien ne permettait de conclure que les instances spécialisées avaient ignoré le contexte spatial dans lequel celui-ci devait s'insérer. Il apparaissait davantage que les intéressés substituaient leur appréciation à celle des instances spécialisées.

14) Par acte du 12 juillet 2019, MM. VAN CAUTER et ELIAHOU ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à la suspension de la procédure dans l'attente de l'issue donnée au chemin d'accès nécessaire au projet DD 111'594, à l'annulation du jugement attaqué et la condamnation du DT et Mmes GEUTHER et LEU en tous les frais et dépens.

Les deux projets DD 110'229 et 111'594 concernaient des chemins parallèles, très proches l'un de l'autre et débouchant tous deux sur le chemin de Mancy. La procédure DD 111'594 concernait la construction de douze logements et la procédure DD 110'229 portait le nombre de villas à neuf par la construction de trois villas. Il ne se justifiait pas de prévoir un traitement différent pour les deux voies d'accès qui desserviraient le même nombre d'habitations et il était incompréhensible que le DT exige l'élargissement du chemin à 5 m pour le projet DD 111'594 alors que des largeurs de 2,5, 3,2 ou 4 m étaient jugées suffisantes pour le projet DD 110'229. L'accroissement du trafic lié aux deux projets n'avait pas été pris en compte de manière coordonnée, alors que les deux chemins débouchaient quasiment au même endroit. Les projets étaient liés au niveau de la visibilité à l'embouchure des chemins d'accès sur le chemin de Mancy et au niveau des espaces de stationnement le long du chemin de Mancy, lesquels seraient supprimés en cas de réalisation du projet DD 111'594. Dans le cas où l'autorisation d'abattage d'arbres serait refusée pour la création du chemin d'accès dans le projet DD 111'594, des alternatives devraient être trouvées, parmi lesquelles un accès au nord de la parcelle. Tant que la configuration définitive du chemin d'accès lié à la procédure DD 111'594 n'était pas connue dans sa version définitive, les considérations du jugement querellé étaient hypothétiques et ne reposaient sur aucun élément concret.

La visibilité était problématique tant à la sortie des places de parking des parcelles nos 8'070 et 8'071 qu'à la sortie du chemin débouchant sur celui de Mancy. Le danger était d'autant plus évident en cas de chantier, voire de double chantier. À la hauteur des garages, deux places de stationnement longeaient le chemin, notamment en son passage le plus étroit, ce qui engendrait une visibilité masquée par la végétation existante aux deux angles, situation qui se péjorait encore lorsque des véhicules stationnaient sur ces places. Le chemin se rétrécissant déjà au niveau de la parcelle no 8'072, il était fortement probable que M. ELIAHOU ne puisse plus à l'avenir utiliser sa place de parking. En retenant que les places le long du chemin de Mancy permettraient de réduire le nombre de visiteurs le long du chemin privatif, le TAPI ne prenait pas en considération que les visiteurs du projet DD 111'594 feraient également usage du solde des espaces dédiés au stationnement en bordure du chemin de Mancy. Il ne s'agissait pas d'une question de confort, d'autant plus que, seuls les riverains étant autorisés, le chemin de Mancy connaissait une forte affluence, à pied, à vélo, en planche à roulettes et à trottinette. La sécurité des automobilistes et des autres usagers n'était pas assurée par le projet, au vu de la visibilité et des possibilités de croisement insuffisantes. La construction projetée n'était pas desservie de manière adaptée à l'utilisation prévue en raison notamment de sa voie d'accès inadaptée.

15) Le 16 juillet 2019, le TAPI a transmis son dossier à la chambre administrative, sans formuler d'observations.

16) Par réponse du 26 août 2019, Mmes GEUTHER et LEU ainsi que Carneiro se sont opposés à la suspension de la procédure et ont conclu au rejet du recours et à la condamnation de MM. VAN CAUTER et ELIAHOU au paiement d'une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours.

Le chemin autorisé dans la procédure DD 111'954 était de 4,5 m sur quasiment toute sa longueur, seul le débouché s'élargissant à 5 m. Le projet DD 110'229 portait sur la construction de trois villas, portant le nombre d'habitations à neuf, alors que la procédure DD 111'954 concernait la construction de douze logements. Dans cette dernière procédure, les véhicules circulaient jusqu'au bout du chemin, un seul parking étant projeté à l'issue du chemin, tandis que dans le projet DD 110'229, des places de parking étaient disséminées à l'orée du chemin et sur tout son long, la plupart des véhicules ne circulant pas sur toute la longueur du chemin, ce qui réduisait considérablement le nombre de véhicules se croisant. Le chemin ne se resserrait au-dessous des 4 m qu'après la majeure partie des habitations et la partie du chemin mesurant moins de 4 m ne s'étendait que sur une longueur de moins de 4 m ne desservant que quatre habitations. Il n'existait aucune possibilité d'élargir le chemin, de sorte qu'interdire la construction d'un projet déjà très réduit reviendrait à empêcher toute construction sur la parcelle concernée, ce qui serait disproportionné. Ces quatre raisons expliquaient le traitement différencié du chemin d'accès des deux projets. L'augmentation du trafic engendrée par les trois villas supplémentaires était négligeable. La procédure n'avait pas pour objet d'examiner la conformité du chemin d'accès permettant de circuler jusqu'au bâtiment projeté avec tout projet éventuel pouvant être réalisé à proximité.

Le préavis de la DGT du 29 mai 2017 était favorable et la réserve qui y figurait n'avait pas été répétée dans les préavis subséquents, ce qui s'expliquait par la réduction de quatre à trois villas et de huit à six places de stationnement. Le TAPI avait procédé à un transport sur place, durant lequel le représentant de la DGT avait fait des déclarations répondant aux craintes des opposants. L'accès était suffisant compte tenu du projet autorisé. La sécurité des usagers du chemin d'accès et sur l'axe principal du chemin de Mancy était garantie.

17) Par réponse du même jour, le DT s'est également opposé à la suspension de la procédure et a conclu au rejet du recours.

Le projet concernait la construction de trois habitations – venant s'ajouter aux sept existantes, portant le total à dix – et six places de stationnement supplémentaires, alors que la procédure DD 111'954 impliquait douze logements et vingt places de stationnement. L'accès au projet litigieux était existant alors que celui pour le projet DD 111'954 devait être créé. Une situation insatisfaisante préexistante ne pouvait justifier le refus d'un permis de construire, d'autant moins que le nombre de voitures supplémentaires serait faible.

Les deux projets étaient complètement indépendants, l'un pouvant exister sans l'autre. Leur proximité ne suffisait pas à imposer qu'ils soient examinés et autorisés simultanément. Au surplus, le même collaborateur avait analysé les deux projets, de sorte qu'il ne pouvait être reproché à la DGT de ne pas les avoir tous deux pris en compte.

Le TAPI s'était fondé sur l'ensemble des circonstances pour évaluer la situation et non seulement sur le préavis de l'instance spécialisée. Les allégations de visibilité insuffisante se heurtaient aux constatations lors de l'inspection des lieux et aux déclarations du représentant de la DGT et étaient purement appellatoires. La largeur du chemin et les possibilités restreintes de croisement devaient induire les utilisateurs à une prudence accrue et à une vitesse réduite qui accroissait leur sécurité. Le chemin était rectiligne et offrait une bonne visibilité, ce qui permettait à un conducteur attentif et respectueux des règles usuelles de circulation de constater la présence d'un autre véhicule survenant en sens inverse suffisamment tôt pour s'arrêter, éventuellement reculer, et le laisser passer.

18) Le 26 septembre 2019, Mmes GEUTHER et LEU ainsi que Carneiro ont maintenu leurs conclusions.

19) Le 4 octobre 2019, MM. VAN CAUTER et ELIAHOU ont persisté dans leur recours.

20) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI confirmant l'autorisation globale de construire délivrée par l'autorité intimée.

3) Les recourants demandent la suspension de la procédure jusqu'à ce que l'issue du projet de chemin d'accès lié à la procédure DD 111'594 soit clarifiée et affirment que l'accroissement de trafic lié aux projets DD 110'229 et 111'594 n'aurait pas été pris en compte de manière coordonnée, soulevant par là un grief de violation du principe de coordination.

a. Lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA).

b. Ancré à l’art. 25a de la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l’aménagement du territoire (LAT - RS 700), le principe de coordination formelle et matérielle est également expressément consacré par le droit cantonal. Selon l’art. 3A de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet de construction, la procédure directrice est celle relative aux autorisations de construire, à moins qu’une loi n’en dispose autrement ou sauf disposition contraire du Conseil d’État (al. 1). L’art. 12A LPA rappelle, quant à lui, le principe général selon lequel les procédures doivent être coordonnées lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet.

La jurisprudence a, de plus, précisé que la coordination devait être assurée entre l’autorisation nécessaire à l’édification de plusieurs constructions ou installations distinctes dont l’une était nécessaire à l’exploitation de l’autre (ATF 119 1b 174 consid. 4 ; ATA/18/2018 du 9 janvier 2018 consid. 4b).

c. En l'occurrence, la procédure DD 111'594 concerne un projet distinct du projet litigieux, aucun des deux projets n'étant nécessaire à la réalisation de l'autre.

Par conséquent, d'une part, l'autorité intimée était fondée à traiter les deux procédures séparément, le grief de violation du principe de coordination devant être écarté, et, d'autre part, la conformité au droit de l'autorisation de construire DD 110'229 ne dépendant pas de l'issue donnée à la procédure DD 111'594, il ne se justifie pas de suspendre la présente procédure.

4) Les recourants soutiennent que la voie d'accès à la construction projetée serait inadaptée.

a. Conformément à l'art. 22 al. 2 let. b LAT, l'autorisation de construire n'est délivrée que si le terrain est équipé. Tel est le cas selon l'art. 19 al. 1 LAT lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès.

Au sens de ces dispositions, une desserte routière est adaptée lorsque la sécurité des automobilistes et des autres utilisatrices et utilisateurs est garantie, lorsque le revêtement est adéquat en fonction du type de véhicules qui vont l'emprunter et lorsque la visibilité et les possibilités de croisement sont suffisantes et que l'accès des services de secours (ambulances, service du feu) et de voirie est assuré. Ces dispositions poursuivent ainsi des buts de police, tandis qu'il appartient au droit cantonal de régler avec plus de précision les caractéristiques des voies d'accès selon leur fonction (arrêts du Tribunal fédéral 1C_481/2018 du 20 mai 2020 consid. 7.1 ; 1C_430/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.1).

Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle peut accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. Un bien-fonds ne peut pas être considéré comme équipé si, une fois construit, son utilisation entraîne un accroissement du trafic qui ne peut être absorbé par le réseau routier et s'il provoque des atteintes nuisibles ou incommodantes dans le voisinage (ATF 129 II 238 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_430/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.1). La loi n'impose toutefois pas de voies d'accès idéales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (arrêts du Tribunal fédéral 1C_481/2018 précité consid. 7.1 ; 1C_318/2014 du 2 octobre 2014 consid. 7.1).

L'aptitude d'une voie d'accès à assurer la desserte d'une parcelle n'exige pas que soient garanties des possibilités de croisement sur toute sa longueur ; il suffit que ces possibilités soient suffisantes pour assurer la sécurité des usagers (arrêt du Tribunal fédéral 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.2 et l'arrêt cité).

Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation (ATF 121 I 65 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_481/2018 précité consid. 7.1). Elles peuvent également se fonder sur les normes VSS. Lorsqu'elles appliquent ces normes, en soi non contraignantes, elles le font en tenant compte des circonstances concrètes et en accord avec les principes fondamentaux du droit public, dont celui de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_155/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.1).

b. Le DT peut refuser des autorisations de construire lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu'exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l'égard des voisines et voisins ou du public (let. c), offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (let. d), peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e ; art. 14 al. 1 LCI).

Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y a pas d'abus de la part de la constructrice ou du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/461/2020 du 7 mai 2020 consid. 11b).

Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, l'accroissement du trafic routier, s'il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable au sens de l'art. 14 LCI ; de fait, l'accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone, ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l'art. 14 LCI. La chambre administrative a notamment retenu que la construction de trois villas nouvelles ne saurait générer d'inconvénients graves pour le voisinage (ATA/461/2020 précité consid. 11c et les références citées).

c. Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l’autorité inférieure suit les préavis requis, étant précisé qu’un préavis sans observation équivaut à un préavis favorable, la juridiction de recours doit s’imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige. L’autorité de recours se limite ainsi à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3a).

Le TAPI, quant à lui, se compose de personnes ayant des compétences spéciales en matière de construction, d’urbanisme et d’hygiène publique (art. 143 LCI). Formée pour partie de spécialistes, cette juridiction peut ainsi exercer un contrôle plus technique que la chambre administrative, qui exerce son pouvoir d'examen avec retenue (ATA/781/2020 du 18 août 2020 consid. 4 ; ATA/1276/2018 du 27 novembre 2018 consid. 4d).

d. En l'espèce, les recourants rappellent le contenu du premier préavis de la DGT, reprochent au TAPI de s'être fondé sur le préavis de la DGT, « sans en argumenter les raisons », et soulèvent des problèmes de visibilité et de possibilités de croisement insuffisantes, engendrant un danger bien réel.

Certes, le préavis de la DGT du 29 mai 2017 notait que, selon cette dernière, les parcelles privées desservant la parcelle jusqu'au chemin de Mancy induisaient une liaison étroite et que deux véhicules ne pouvaient pas se croiser sur l'entier du chemin, mais seulement ponctuellement. Toutefois, elle en concluait non pas que cela faisait obstacle au projet, mais que le projet pouvait être autant refusé qu'autorisé et qu'il s'agissait uniquement d'une question de confort. Le préavis était d'ailleurs favorable sans observation, ces considérations étant uniquement formulées en tant qu'instruction à la DAC. Par ailleurs, ce préavis concernait le projet initial avec quatre villas et non le projet modifié et autorisé, comportant trois villas. En outre, la DAC elle-même, destinataire de la remarque, a préavisé favorablement le projet le 9 mars 2018. Finalement, la DGT a rendu un nouveau préavis favorable le 15 mars 2018, ce préavis ne faisant plus aucune mention de la problématique.

Or, contrairement à ce qu'affirment les recourants, le TAPI, juridiction formée pour partie de spécialistes, a procédé à un contrôle approfondi de ce point, par un transport sur place durant lequel il a pu entendre l'auteur du préavis de la DGT du 15 mars 2018 et effectuer les constatations nécessaires à l'appréciation du grief des recourants.

Ainsi, à cette occasion, le représentant de la DGT a souligné que le préavis du 29 mai 2017 était favorable et se référait essentiellement à une problématique de confort. Il a en outre confirmé le préavis du 15 mars 2018 : le gabarit du chemin d'accès était au moins acceptable du point de vue des normes VSS, était appelé à desservir un nombre relativement faible de places de stationnement et débouchait sur un axe de réseau de quartier, de sorte qu'il répondrait à la sollicitation à laquelle il serait soumis. De plus, le chemin d'accès était rectiligne et la visibilité bonne et le débouché sur l'axe principal du chemin de Mancy était relativement large, de sorte que les conditions de visibilité étaient satisfaisantes pour un faible volume de véhicules.

Par ailleurs, durant ce transport sur place, le TAPI a lui-même pu constater que le chemin d'accès avait une largeur d'environ 3 m pour sa partie carrossée, respectivement 2,5 aux endroits les plus étroits, qu'il suivait un tracé rectiligne et que le débouché sur l'axe principal du chemin de Mandy était relativement large, concluant à l'existence de plusieurs possibilités de croisement pour des véhicules à moteur et à la garantie d'une bonne visibilité, ces constatations ne faisant que confirmer le bien-fondé du préavis de la DGT.

En définitive, comme l'a à juste titre constaté l'instance précédente, les recourants ne font que substituer leur appréciation à celles de l'autorité intimée et de l'instance spécialisée, auxquelles s'ajoute à présent celle du TAPI. Ils se contentent en effet de continuer à affirmer devant la chambre administrative que la visibilité serait problématique et les possibilités de croisement insuffisantes, ce qui serait dangereux, mais n'apportent aucune substance à leur allégation alors même que le transport sur place effectué par l'instance précédente a précisément démontré le contraire et confirmé le bien-fondé du préavis de la DGT, étant rappelé que le projet porte uniquement sur la construction de trois nouvelles villas et est conforme à la destination de la cinquième zone de construction.

Au vu de ce qui précède, le TAPI était fondé à retenir que l'accès était suffisant pour desservir les villas projetées. Le grief sera écarté.

5) Les recourants invoquent le principe de l'égalité de traitement.

a. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 145 I 73 consid. 5.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_468/2019 du 8 juin 2020 consid. 3.1).

b. En l'espèce, les recourants reprochent au TAPI d'avoir considéré que le préavis rendu par la DGT dans la procédure DD 111'594 posant des conditions distinctes en terme de gabarit du chemin d'accès n'était pas pertinent. Ils affirment que les deux projets auraient d'importantes similarités et qu'il ne se justifierait pas de traiter différemment les deux voies d'accès.

Cependant, la présente procédure concerne la construction de trois villas supplémentaires et six places de stationnement, accessibles depuis un chemin d'accès préexistant, tandis que la procédure DD 111'594 a pour objet la construction de douze logements et vingt places de stationnement, pour lesquels un chemin d'accès devra être créé, selon les indications non contestées de l'autorité intimée. Ces éléments suffisent à démontrer que les deux situations sont différentes, de sorte que, contrairement à ce qu'affirment les recourants, elles n'appelaient pas un traitement identique.

Le TAPI était par conséquent fondé à retenir que les recourants ne pouvaient se prévaloir du principe de l'égalité de traitement pour remettre en cause l'autorisation de construire litigieuse. Le grief sera écarté.

6) Dans ces circonstances, la décision de l'autorité intimée est conforme au droit et le recours contre le jugement du TAPI, entièrement mal fondé, sera rejeté.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée aux intimées, prises solidairement, à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 juillet 2019 par Messieurs Stéphane VAN CAUTER et David ELIAHOU contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge solidaire de Messieurs Stéphane VAN CAUTER et David ELIAHOU ;

alloue à Mesdames Aline GEUTHER et Véronique LEU ainsi qu'à Carneiro Architectes SA, prises solidairement, une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à la charge solidaire de Messieurs Stéphane VAN CAUTER et David ELIAHOU ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Serge Fasel, avocat des recourants, à Me Diane Schasca, avocate des intimées, au département du territoire - OAC, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :