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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2245/2020

ATA/800/2020 du 25.08.2020 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2245/2020-FORMA ATA/800/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 août 2020

1ère section

 

dans la cause

 

A______, enfant mineure, représentée par sa mère Madame B______

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1) A______, née le ______2004, représentée par sa mère Madame B______, a été promue avec tolérance de section littéraire-scientifique, au terme de sa 11ème année au cycle C______ en juin 2020, avec une moyenne générale de 4.7 et une moyenne des disciplines principales de 4.5.

En français, Mme A______ a obtenu la note de 4.6 au premier trimestre (T1) et de 4.2 au second (T2), soit une moyenne de 4.4. En allemand ces mêmes notes ont été respectivement de 4.7, 4.5 et 4.6 et en anglais de 5.0 et 5.1, d'où une moyenne de 5.1.

2) Mme A______ a formé, le 9 juin 2020, une demande d'admission par dérogation en maturité bilingue par séjour.

3) La direction générale de l'enseignement secondaire II du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : le département) a, par décision du 10 juillet 2020 et après analyse du dossier, refusé d'accéder à sa demande.

Mme A______ avait obtenu en français, au terme du deuxième trimestre, la note de 4.4 au lieu du 4.5 requis. Conformément à l'art. 13 du règlement relatif à la formation gymnasiale au collège de Genève du 29 juin 2016 (RGymCG - C 1 10.71), aucune dérogation ne pouvait lui être accordée. La crise sanitaire n'avait aucun impact en la matière dans la mesure où cette disposition tenait compte d'une moyenne de 4.5 exigée en français et dans la langue cible au terme du second trimestre de sorte que les résultats du troisième trimestre étaient sans pertinence. Les élèves ayant été évalués sur l'entier des deux premiers trimestres, la pandémie de Covid-19 n'avait eu aucun impact sur leur admission en maturité bilingue de sorte qu'il n'y avait pas lieu de déroger aux conditions d'accès. Le principe d'égalité de traitement commandait enfin que la situation d'élèves se trouvant en situation similaire soit traitée de la même manière.

4) Par acte mis à la poste le 24 juillet 2020, Mme A______ a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) contre la décision du 10 juillet 2020.

Suite à la fermeture immédiate des classes en mars 2020, son enseignante avait omis d'ajouter les 2/10èmes octroyés aux élèves dans le bulletin final, ce qui avait abouti à la décision de refus de dérogation en maturité bilingue par séjour. Elle ne comprenait pas que la conseillère d'État en charge du département ait insisté sur le fait que les demandes de dérogation seraient facilitées et qu'il serait octroyé ces 2/10èmes à chaque élève afin qu'un élève ayant une moyenne juste en dessous du seuil puisse accéder à un regroupement. Son enseignante, Madame D______, assumait cette omission, ayant toutefois pensé que la demande de dérogation serait acceptée sans complications.

Elle demandait à accéder à la filière bilingue en séjour ou, dans le pire des cas, à pouvoir faire sa première année au collège E______ et, si réussie, à passer en deuxième année bilingue par séjour.

Mme A______ a joint à son recours sa lettre du 9 juin 2020 à la conseillère d'État en charge du département, le bulletin du 18 juin 2020 comportant les notes des premiers et deuxième trimestres, ainsi qu'un courrier signé par Mme D______ du 2 juin 2020 dont il ressort que son élève s'était montrée très méritante, travailleuse et assidue durant l'année scolaire. Pendant le confinement, elle n'avait jamais manqué un rendez-vous, avait rendu tous ses travaux dans les temps et lui avait montré à de nombreuses reprises à quel point le projet de maturité bilingue par séjour comptait pour elle. Son élève s'était aussi beaucoup investie dans la vie de l'école, participant notamment au journal du cycle. Mme D______ ne pouvait donc que soutenir la demande de dérogation.

5) Dans sa réponse du 10 août 2020, le département a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision du 10 juillet 2020.

En application des dispositions réglementaires topiques, dans la mesure où Mme A______ avait obtenu une moyenne en français de 4.4 au terme des deux premiers trimestres, au lieu du 4.5 requis, elle ne satisfaisait pas aux conditions d'admission permettant son accès en maturité mention bilingue. La dérogation exceptionnelle de 2/10èmes accordée en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19 ne pouvait pas être appliquée dans le cas d'une entrée en maturité mention bilingue. En effet, dans la mesure où une moyenne de 4.5 en français et de 4.8 dans la langue cible était exigée au terme du deuxième trimestre et où les élèves avaient précisément été évalués sur l'entier du second trimestre, la pandémie n'avait aucun impact sur une admission en maturité mention bilingue. Il n'y avait donc pas lieu de déroger aux conditions d'accès dans cette filière. Ainsi, un élève non admis à l'issue du deuxième trimestre ne pourrait plus prétendre à une admission en maturité mention bilingue quels que soient les résultats obtenus au cours du troisième trimestre. À cela s'ajoutait que dans une année ordinaire, un élève prétendant à une telle admission devait en sus obtenir au terme du troisième trimestre une moyenne en français et dans la langue cible de 4.8. En raison de la pandémie et de la suppression des évaluations au troisième trimestre, seule l'exigence d'une moyenne de 4.5 en français et de 4.8 dans la langue cible avait été gardée comme norme d'entrée pour une admission en maturité mention bilingue par séjour, ce qui constituait déjà en soi un abaissement des exigences requises. À cet égard, Mme A______ aurait dû obtenir une moyenne en français de 5.5 au dernier trimestre pour parvenir à cette moyenne de 4.8. Force était dès lors de constater qu'elle ne remplissait pas les conditions d'admission à la maturité mention bilingue par séjour.

Enfin, les élèves ne disposaient d'aucun droit à être affectés à un établissement précis puisqu'ils étaient répartis en fonction de leur domicile, du profilage scolaire choisi ainsi que des places disponibles. Une telle affectation était au demeurant une mesure d'organisation interne ne pouvant pas faire l'objet d'un recours. Il était relevé qu'une admission en maturité mention bilingue n'était pas possible en cours de cursus.

6) Un délai au 18 août 2020 a été imparti à Mme A______ pour une éventuelle réplique, délai à l'issue duquel la cause serait gardée à juger. La recourante ne s'est pas manifestée dans le délai.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière par laquelle sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/821/2018 du 14 août 2018 consid. 2 ; ATA/1243/2017 du 29 août 2017 consid. 2a).

c. En l'espèce, la recourante n'a pas pris de conclusions formelles en annulation de la décision. L'on comprend toutefois de son recours qu'elle conteste le bien-fondé de la décision du département du 10 juillet 2020. Le recours est ainsi recevable.

3) a. Selon son art. 1, la loi sur l'instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10) régit l'instruction obligatoire, soit la scolarité et la formation obligatoires jusqu'à l'âge de la majorité pour l'enseignement public et privé (al. 1). Elle s'applique aux degrés primaire et secondaire I (scolarité obligatoire) et aux degrés secondaire II et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles dans les établissements de l'instruction publique (al. 3). L'instruction publique comprend notamment le degré secondaire II (art. 4 al. 1 let. c LIP).

b. Selon l'art. 12 RGymCG, sont admis en 12ème année les élèves issus de 11ème année du CO promus de section littéraire et scientifique (let. a) ; promus de la section langues vivantes et communication avec une moyenne générale de 5.0, une moyenne des disciplines principales de 4.5 et une seule moyenne, hormis les mathématiques et le français, inférieure à 4.0 (let. b).

c. Son article 13 traite de l'admission en maturité « mention bilingue » par enseignement ou par séjour, dont le parcours est destiné en priorité aux élèves non allophones qui - lors de l'admission en 12ème année - satisfont aux conditions suivantes, pour la mention bilingue par séjour : a) être admissible au collège de Genève, selon les normes d'admission en vigueur ; b) avoir obtenu une note supérieure ou égale à 4.5 en français ainsi qu'en allemand ou en anglais, en fonction de la langue choisie, au terme du 2ème trimestre de 11ème année ; c) obtenir la note de 4.8 en français et en allemand ou en anglais au terme de la 11ème année (al. 1). Selon son 2ème alinéa, aucune dérogation n'est accordée pour l'admission en maturité mention bilingue.

d. Les dispositions légales régissant l'enseignement post-obligatoire, notamment la formation gymnasiale, ne contiennent pas de règles régissant l'affectation des élèves dans un établissement ou un autre.

De telles dispositions existent uniquement pour l'enseignement obligatoire (art. 58 LIP ; art. 24 al. 3 du règlement d'application de certaines dispositions de la loi sur l'instruction publique du 12 janvier 2011 - RIP - C 1 10.03 ; art 26 du règlement du cycle d'orientation du 9 juin 2010 - RCO - C 1 10.26). Ces dispositions prévoient que les élèves sont scolarisés dans des établissements proches de leur lieu de domicile. Toutefois, dans certaines circonstances, ils peuvent être affectés dans une autre école. Cette affectation n'est pas sujette à recours. Il ressort des travaux législatifs que l'indication selon laquelle l'affectation d'un élève n'est pas sujette à recours a été ajoutée lors des travaux de la commission du Grand Conseil ayant traité le projet, dès lors que « ce n'est pas une décision au sens juridique du terme, mais une mesure d'organisation et de gestion » (PL 11470-A, p. 152).

S'agissant de l'enseignement post-obligatoire, de nombreuses formations ne sont dispensées que dans un seul établissement.

L'affectation d'un élève à un établissement est une mesure d'organisation interne, laquelle ne peut pas faire l'objet d'un recours. L'élève ne dispose pas d'un droit à être affecté à un établissement précis (ATA/1264/2019 du 21 août 2019 consid. 3).

4) En l'espèce, à juste titre, la recourante qui souhaite intégrer le parcours en maturité mention bilingue par séjour ne conteste pas en tant que telle l'application à sa situation de l'art. 13 RGymCG, lequel soumet à trois conditions cumulatives l'accession à cette filière. Si elle remplit la première des conditions, à savoir celle d'être admissible au collège de Genève en fonction des notes obtenues à l'issue de sa scolarité obligatoire, force est de constater qu'elle ne remplit pas la seconde, à savoir l'obtention d'une note supérieure ou égale à 4.5 en français au terme du deuxième trimestre de sa 11ème année. Elle a en effet achevé le deuxième trimestre avec une moyenne dans cette branche de 4.4, de sorte qu'il n'est pas pertinent de savoir quel résultat elle aurait obtenu en français et dans la langue cible au troisième trimestre. Il doit être souligné à cet égard que comme justement relevé par le département, la pandémie n'a eu aucune incidence sur ce critère dans la mesure où les élèves ont pu achever les deux premiers trimestres d'études de l'année scolaire 2019-2020, dont les résultats ont été certifiés. Ils ont ainsi valablement été évalués au regard du second critère pertinent pour un accès à la maturité mention bilingue. De plus, l'art. 13 al. 2 RGymCG prévoit expressément l'exclusion de toute dérogation pour l'admission en maturité bilingue.

Dans ces conditions, la recourante ne peut nullement se prévaloir de l'octroi des 2/10èmes accordés à chaque élève pour accéder à un regroupement, concession qui ne s'applique donc pas au cas d'espèce.

Enfin, comme retenu à juste titre par le département et déjà jugé par la chambre de céans, celle-ci n'est pas compétente pour déterminer l'établissement d'affectation d'un élève.

Mal fondé, le recours est rejeté.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA et 10 a contrario du règlement sur les frais, émoluments et indemnités de procédure administrative du 30 juillet 1986 RFPA - E 5 10.03) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 juillet 2020 par A______, enfant mineure représentée par sa mère Madame B______, contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 10 juillet 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, enfant mineure, représentée par sa mère Madame B______, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Lauber, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :