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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1444/2020

ATA/720/2020 du 04.08.2020 ( LOGMT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1444/2020-LOGMT ATA/720/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 août 2020

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE

 



EN FAIT

1) Madame A______ est, depuis le 15 janvier 1995, locataire d'un appartement de trois pièces dans l'immeuble, soumis au régime HBM, sis rue B______ aux Acacias. Elle occupe l'appartement avec son fils C______, né le ______1993.

2) Le 27 août 2014, l'office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) a adressé à Mme A______ un avis de situation 2014, retenant notamment un loyer annuel sans charge de CHF 5'628.-, un barème de sortie de CHF 49'245.-, un taux légal d'effort de 20 %, un revenu annuel brut de CHF 50'570.-, soit CHF 37'296.- pour Mme A______ et CHF 13'274.- pour son fils, un « revenu LRD » (revenu annuel brut x 0,91) de CHF 46'018.- et, après des déductions forfaitaires de CHF 17'500.-, un « revenu déterminant LGL » de CHF 28'518.-.

Les avis de situation des 28 août 2015, 12 septembre 2016, 30 août 2017, 5 septembre 2018 et 2 octobre 2019 ont repris les mêmes revenus annuels bruts, « revenus déterminants LGL » et « revenus LRD ».

Chacun de ces avis de situation rappelait à Mme A______ qu'elle devait « en tout temps » signaler à l'OCLPF toute « modification de situation, tant dans la composition du groupe de personnes occupant le logement que dans les revenus ». À défaut, elle s'exposait à devoir restituer des prestations indûment touchées et/ou verser des surtaxes pour des périodes antérieures. En particulier, si les données indiquées dans l'avis s'avéraient « inexactes ou incomplètes », « notamment quant aux revenus actuels », il lui appartenait d'adresser à l'OCLPF toutes pièces utiles ainsi qu'une copie dudit avis. Les éléments cités étaient mis typographiquement en évidence par des caractères gras.

Ces avis de situation n'ont fait l'objet d'aucune réaction de la part de l'intéressée.

3) Par courriel du 21 décembre 2019, Mme A______ a informé l'OCLPF « très tardivement » que son fils n'habitait plus chez elle. Elle annexait l'attestation annuelle 2020 du centre de compétences du RDU faisant état d'un « RDU », fondé sur l'année de référence 2018, de CHF 39'567.-.

4) Selon les attestations dudit centre de compétences, le RDU de Mme A______ s'est élevé en 2017 à CHF 38'498.- (année de référence 2015), en 2018 à CHF 38'703.- (année de référence 2016), en 2019 à CHF 38'699.- (année de référence 2017). Pour son fils, le RDU s'est élevé en 2017 à CHF 32'296.- (année de référence 2015), en 2018 à CHF 37'281.- (année de référence 2016), en 2019 à CHF 44'683.- (année de référence 2017) et en 2020 à CHF 59'459.- (année de référence 2018).

5) À la demande de l'OCLPF, Mme A______ lui a remis copie de ses certificats de salaire et de ceux de son fils ainsi que du bail conclu par celui-ci avec effet au 1er janvier 2019.

6) Par décision du 18 février 2020, l'OCLPF, tenant compte des revenus effectivement réalisés par Mme A______ et son fils a astreint celle-ci à lui payer une surtaxe mensuelle de CHF 413.25 pour la période d'application du 1er février 2015 au 31 janvier 2016, de CHF 898.65 pour la période allant 1er février au 31 mars 2016, de CHF 938.35 pour la période allant du 1er avril 2016 au 31 janvier 2017, de CHF 1'117.15 pour la période allant du 1er février 2017 au 31 janvier 2018, de CHF 1'411.20 pour la période entre le 1er février 2018 et le 31 janvier 2019, et de CHF 1'491.15 du 1er février au 31 mai 2019.

À compter du 1er juin 2019, date du départ de son fils du logement selon les registres de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), elle n'était plus astreinte au paiement de la surtaxe.

Au total, un montant de CHF 52'434,60 lui était réclamé.

7) Dans sa réclamation, l'administrée a fait valoir que c'était par négligence et « fainéantise » qu'elle avait omis de communiquer l'adresse de son fils qui avait quitté son appartement en mai 2014. Elle travaillait à 60 %, mais ne pouvait augmenter son taux d'activité. Il lui était impossible de rembourser le montant dû. Elle pensait que le simple fait que son fils n'habite plus chez elle suffisait et qu'il n'était pas indispensable de procéder aux changements auprès de l'OCPM.

8) Le 24 avril 2020, l'OCLPF a rejeté la réclamation.

Selon les registres de l'OCPM, le fils de Mme A______ était resté domicilié auprès d'elle jusqu'au 1er juin 2019. Partant, il y avait lieu de tenir compte de leurs revenus cumulés jusqu'à cette date.

9) Par acte expédié le 23 mai 2020 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), Mme A______ a contesté cette décision.

Elle a exposé que son fils n'avait plus habité chez elle à partir de mai 2014. Il emménageait chez ses amies et s'arrangeait avec celles-ci. Comme il n'avait pas vraiment l'intention de s'y installer et que ses relations amoureuses ne duraient que quelque temps, il avait attendu d'avoir son propre logement pour procéder officiellement au changement d'adresse. Si son fils et elle avaient imaginé que « cela prendrait une telle ampleur », celui-ci « se serait déclaré chez sa grand-mère » qui habitait un logement de quatre pièces.

Elle était partie de l'idée que l'OCLPF s'était fondé sur les indications de l'administration fiscale. Elle n'avait ainsi pas cherché à comprendre ni prêté attention au contenu des avis de situation. Elle n'avait pas non plus remarqué que les RDU étaient demeurés les mêmes. Enfin, elle ne voyait pas comment elle pouvait rembourser le montant réclamé, compte tenu de son revenu.

10) L'OCLPF a conclu au rejet du recours, reprenant les arguments déjà exposés.

11) La recourante ne s'est pas manifestée dans le délai pour répliquer, de sorte que les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le bien-fondé de la décision de restitution.

a. Selon l'art. 30 al. 1 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05), les logements de la catégorie HBM sont destinés aux personnes dont le revenu, à la conclusion du bail, n'excède pas le barème d'entrée et dont le revenu, en cours de bail, n'excède pas le barème de sortie.

Il appartient au locataire de justifier sans délai au service compétent toute modification significative de revenu ainsi que tout changement dans la composition du groupe de personnes occupant le logement, survenant en cours de bail (art. 9 al. 2 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires - RGL - I 4 05.01).

b. Aux termes de l'art. 31C al. 1 let. f LGL sont considérées comme occupant le logement, les personnes ayant un domicile légal, déclaré à l'OCPM, identique à celui du titulaire du bail.

Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative en matière d'allocations, le critère choisi pour définir quelles sont les personnes qui occupent un logement est celui de l'inscription dans les registres de l'OCPM, et non celui du domicile effectif au sens des art. 23 et suivants du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CC - RS 210 ; ATA/424/2015 du 5 mai 2015 et les références citées).

Le critère de l'inscription du domicile dans les registres de l'OCPM est le seul à prendre en considération par l'autorité. Les seules situations dans lesquelles il n'a pas été tenu compte de ce critère sont des cas dans lesquels une personne n'avait pas effectué les démarches auprès de l'OCPM pour annoncer son déménagement d'un logement alors qu'elle l'avait quitté à la suite d'une séparation conjugale. En conséquence, seules les dates inscrites dans les registres de l'OCPM font foi (ATA/522/2020 du 26 mai 2020 consid. 2b ; ATA/357/2016 du 26 avril 2016 les références citées).

c. Le service compétent peut requérir du locataire la restitution de surtaxes impayées ou de prestations indûment touchées dans un délai de cinq ans (art. 34C RGL).

d. Selon l'art. 34B RGL, des remises totales ou partielles de surtaxes peuvent être accordées au locataire qui se trouve, par suite de circonstances indépendantes de sa volonté, dans une situation telle que le paiement intégral de la somme requise aurait pour lui des conséquences particulièrement dures (al. 1) ; la décision de remise peut faire l'objet d'une réclamation écrite auprès du service compétent avec indication des motifs et, s'il y a lieu, dépôt des pièces justificatives (al. 2).

3) En l'espèce, il convient, en premier lieu, de relever que la décision querellée ne portant pas sur l'éventuelle remise des montants réclamés, la chambre de céans ne peut examiner ce point. Son contrôle se limitera ainsi au bien-fondé de la décision de restitution.

La recourante ne critique ni les montants retenus par l'OCLPF pour déterminer les surtaxes dues ni le calcul effectué par celui-ci. Il apparaît, au demeurant, que l'autorité intimée a dûment tenu compte des paramètres pertinents pour le calcul des surtaxes, notamment du « revenu déterminant LGL » et du taux d'effort. Il sera ainsi retenu que le montant total de la surtaxe s'élève à CHF 52'434.60.

Par ailleurs, la recourante ne conteste pas non plus que son fils n'a annoncé son changement de domicile à l'OCPM qu'au 1er juin 2019. Elle soutient toutefois qu'il aurait déjà quitté son domicile en mai 2014. Comme exposé ci-dessus, sauf exception, seule l'inscription dans les registres de l'OCPM fait foi. Or, aucune circonstance permettant d'admettre une exception à ce principe n'est réalisée. Ni la recourante ni son fils n'ont, en effet, été empêchés, sans leur faute, de procéder plus tôt à l'annonce auprès de l'OCPM du changement de domicile.

Cela étant, quand bien même un tel empêchement aurait existé, il n'en demeure pas moins que la recourante aurait alors omis de signaler ce changement majeur dans la composition du groupe de personnes occupant le logement. Elle avait pourtant été expressément rendue attentive à chaque avis de situation que l'autorité intimée lui a fait parvenir qu'il lui appartenait « en tout temps » de signaler à celle-ci toute modification dans la composition du groupe de personnes occupant le logement et dans les revenus de celles-ci. Ces avis indiquaient clairement qu'à défaut, elle s'exposerait à devoir verser des surtaxes pour des périodes antérieures. En particulier, si les données indiquées dans l'avis s'avéraient « inexactes ou incomplètes », « notamment quant aux revenus actuels », elle devait le signaler à l'OCLPF.

Ainsi, quand bien même son fils aurait quitté son domicile en mai 2014, la recourante doit se voir reprocher de ne pas avoir signalé immédiatement qu'il ne vivait plus avec elle et de ne pas avoir réagi aux différents avis de situation qui, chaque année, continuaient à retenir la présence de son fils dans son logement.

Au vu de ces éléments, la décision de restitution est fondée et le recours sera rejeté.

4) Malgré l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 mai 2020 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal du logement et de la planification foncière du 24 avril 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à l'office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :