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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/907/2020

ATA/655/2020 du 07.07.2020 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 14.09.2020, rendu le 06.07.2021, REJETE, 8D_9/2020
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;QUALITÉ POUR RECOURIR;ACTE MATÉRIEL;DÉCISION;ACCÈS À UN TRIBUNAL
Normes : Cst.29A; LPA.4
Résumé : Irrecevabilité du recours dirigé contre un cahier des charges, en l’absence de modification des droits et obligations des fonctionnaires concernées.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/907/2020-FPUBL ATA/655/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 juillet 2020

 

dans la cause

 

Madame A______

et

Madame B______

représentées par Me Romain Jordan, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE - CONSEIL ADMINISTRATIF



EN FAIT

1) Madame A______ et Madame B______ sont employées, depuis respectivement 2000 et 1998, par la Ville de Genève (ci-après : la ville), au sein du C______ (ci-après : C______), rattaché au département de la culture et des sports (ci-après : le département). Elles exercent la fonction, colloquée en classe « J » de l'échelle des traitements, de collaboratrices scientifiques dans le domaine ______, sous la direction de Madame  D______, conservatrice en chef dudit domaine.

Selon le cahier des charges de collaborateur-trice scientifique, fonction sous la direction du conservateur responsable, signé par Mmes A______ et B______ en 2001, la mission générale consistait à participer aux travaux de recherche dans le domaine, aux activités de conservation et de gestion des collections, à la mise en valeur des collections par des présentations permanentes et des expositions temporaires, à la rédaction de textes ou de publications, aux activités pédagogiques et aux animations, ainsi qu'à effectuer les tâches administratives en relation avec la fonction. Certaines des tâches décrites étaient suivies des termes « sous le contrôle » ou précédées de ceux « à la demande ».

2) Le 16 octobre 2017, la direction du C______ a reçu Mmes A______ et B______ pour un entretien, au cours duquel celles-ci ont évoqué leur situation professionnelle ainsi que leurs perspectives d'évolution. Selon la direction du C______, plusieurs pistes étaient envisageables, comme une différenciation entre les activités au travers de fonctions-type plus importantes qu'actuellement ou une modification du libellé de leur poste.

3) Par courriel du 17 avril 2019, Mme A______ a demandé à Madame E______, responsable des ressources humaines, de lui transmettre son cahier des charges, mis à jour, en vue de la collocation et de la publication du catalogue des fonctions.

4) Le 6 mai 2019, Mme B______ a présenté la même demande.

5) Par courriel du 6 mai 2019, Mme E______ a fait droit à la demande de Mme A______, lui transmettant un projet de cahier des charges personnel basé sur le cahier des charges type de « collaborateur-trice scientifique » exerçant au sein d'un domaine de conservation au C______.

6) Le 8 mai 2019, Mme E______ en a fait de même pour Mme B______, précisant que son cahier des charges ressemblait « trait pour trait » à celui remis à Mme A______, à l'exception des données personnelles y figurant.

7) Le 27 mai 2019, Mme A______ a transmis à Mme E______ une version modifiée de son cahier des charges qui reflétait, selon elle, « l'ensemble des activités qu'elle exerçait (principales, spécifiques et ponctuelles) et l'étendue de ses compétences dans le cadre des missions qui l'occupaient », qu'elle avait soumise à Mme D______, laquelle s'y était montrée favorable.

Cette version du cahier des charges détaillait de manière plus précise ses activités et ne comportait plus de mention en lien avec le contrôle ou la supervision effectuée par sa supérieure hiérarchique.

8) Le 27 mai 2019, Mme B______ en a fait de même.

9) Le 5 juin 2019, Mme A______ a saisi le conseil administratif de la ville (ci-après : le conseil administratif) d'un recours en lien avec son cahier des charges.

Le document qui lui avait été remis ne reflétait que très partiellement la réalité de sa mission et de ses tâches, et ne tenait pas compte de son expérience et des compétences acquises au sein du C______, alors même que celles-ci étaient officieusement reconnues au vu des missions et responsabilités lui étant confiées et du degré d'autonomie dont elle bénéficiait. Constaté depuis longtemps, cet écart avait fait l'objet de plusieurs réunions avec la direction, qui avait formulé des promesses d'évolution de carrière. En accord avec sa supérieure hiérarchique, elle avait transmis à Mme D______ une version remaniée de son cahier des charges, qui reflétait le cadre de sa mission et ses activités, mais n'avait reçu aucune réponse quant à ces modifications, raison pour laquelle elle usait de son droit de recours.

10) Le 5 juin 2019 également, Mme B______ en a fait de même, avec une motivation identique.

11) Le 29 août 2019, la direction du C______ a reçu Mme A______ puis Mme B______ pour un entretien, lors duquel une version finale de leur cahier des charges respectif leur a été remise.

Selon le cahier des charges de collaborateur-trice scientifique, fonction colloquée en classe J de l'échelle des traitements subordonnée à la conservatrice en chef responsable du domaine ______, sa mission, sous le contrôle de sa supérieure hiérarchique, consistait à contribuer à l'étude, à la gestion, au développement ainsi qu'à la mise en valeur des collections du domaine. S'ensuivait une description détaillée des activités principales et des responsabilités, ainsi que du champ de compétence. Plusieurs des activités mentionnées étaient précédées des termes « à la demande de sa responsable » ou comportaient la mention « sur délégation de sa responsable ».

12) Par courrier commun du 30 août 2019 au conseil administratif, Mme A______ et Mme B______ ont maintenu leur recours, sollicitant un complément d'écriture.

Elles s'étonnaient du caractère détaillé du cahier des charges leur ayant été remis, qui reconnaissait certes les nombreuses tâches et responsabilités qui leur incombaient, mais ne s'accompagnait pas des prérogatives inhérentes à ces obligations ainsi que d'une évolution de l'intitulé du poste, ce que traduisait l'emploi réitéré des termes « à la demande de sa responsable », « sous le contrôle de la conservatrice » et « selon les instructions de la conservatrice ». Il en résultait un rôle de simples exécutantes dénué de toute autonomie et de force de proposition qu'autorisait pourtant leur expertise. Par ailleurs, il était également contraire à l'égalité de traitement qu'au sein d'un même service des personnes ne remplissant pas les mêmes charges que leurs collègues soient soumises au même intitulé de fonction. Compte tenu de leur expérience et de leur expertise, l'intitulé de leur fonction devait ainsi être celui d'adjointes scientifiques.

13) Par courrier du 5 février 2020, le conseil administratif a confirmé à Mme A______ la teneur du cahier des charges de collaborateur-trice scientifique tel qu'il lui avait été transmis par la direction du C______ fin août 2019, lequel était porté avec effet à ce jour dans son dossier.

La procédure relative au cahier des charges devait être distinguée de celle concernant le processus de collocation des postes à la suite de l'adoption du catalogue des fonctions, qui constituaient deux procédures distinctes. Il appartenait à sa hiérarchie de définir les tâches à effectuer, ainsi que leur mention ou non dans un cahier des charges, en fonction notamment des besoins du service, des exigences liées au poste et de son organisation, s'agissant d'activités internes à l'administration. En outre, le cahier des charges restait un document évolutif qui avait été mis à jour de manière harmonisée et uniforme au sein du C______ afin de garantir une transparence et une équité de traitement au sein de différentes fonctions scientifiques, ce qui n'en faisait pas pour autant un document collectif, mais individuel pour chaque collaborateur dans le cadre de ses missions.

Dès lors qu'elle avait été en mesure de s'exprimer à plusieurs reprises, il ne se justifiait pas de lui accorder un délai pour produire des écritures complémentaires, étant précisé qu'elle n'avait pas non plus demandé à être entendue oralement. Elle ne prétendait pas non plus que les tâches figurant dans son cahier des charges ne correspondaient pas à celles qui lui étaient habituellement assignées et ne démontrait pas davantage que ses droits et obligations seraient lésés par la mise en oeuvre de ce document. Il ressortait au contraire du dossier que le cahier des charges qui lui avait été soumis était conforme aux tâches, responsabilités et exigences du poste occupé ainsi qu'aux besoins du service.

14) Le même jour, le conseil administratif a envoyé un courrier identique à Mme B______.

15) Par acte expédié le 9 mars 2020 et complété le 15 juin 2020, Mmes A______ et B______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le courrier du 5 février 2020 adressé à Mme A______, concluant préalablement à ce qu'un délai leur soit accordé pour compléter leur recours et, sur le fond, à l'annulation de la « décision rendue le 5 février 2020 », à ce que celle-ci soit réformée dans le sens où leur cahier des charges n'était pas modifié, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Leur droit d'être entendues avait été violé, dès lors qu'elles n'avaient pas eu accès au dossier, malgré leurs demandes répétées, ni n'avaient été entendues par le conseil administratif, alors même qu'elles avaient demandé à pouvoir compléter leurs écritures, autorité qui ne les avait pas interpellées à ce sujet.

Le courrier contesté, soit une décision individuelle et concrète qui portait atteinte à leurs droits et obligations, violait les dispositions statutaires en matière de cahier des charges, dès lors qu'elles n'avaient pas été consultées avant sa modification. Les responsabilités et certaines de leurs activités n'étaient pas mentionnées et leurs tâches étaient dévalorisées, leur rôle étant réduit à celui de simples exécutantes par la répétition systématique des termes « à la demande de » et « sur délégation de », alors que leur expertise leur permettait d'être une force de proposition pour leur hiérarchie et que l'emploi de ces tournures ne permettait pas de les distinguer des autres collaborateurs ayant moins d'expérience.

16) Le 21 avril 2020, la ville a conclu à la disjonction des causes et à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à l'octroi d'un délai pour se déterminer sur le fond du litige et la production du dossier des intéressées.

Avant de pouvoir se déterminer librement sur chaque situation et fournir l'intégralité des dossiers administratifs des collaboratrices concernées, la procédure devait être disjointe.

Le recours de Mme B______ était irrecevable, dès lors que celle-ci n'était pas concernée par le courrier adressé à Mme A______ et qu'elle n'avait pas recouru contre celui qui lui avait été envoyé, étant précisé que les intéressées avaient procédé séparément lors de la phase non contentieuse.

Il était en tout état de cause irrecevable s'agissant d'un acte administratif interne, le courrier litigieux ne constituant pas une décision sujette à recours. Ainsi, après des discussions avec leur hiérarchie, elles avaient reçu un nouveau cahier des charges qui correspondait aux tâches qu'elles devaient effectuer, sans modification de leur classe de traitement, de l'intitulé du poste, de lieu de travail ou d'affectation. La mise en oeuvre de ce cahier des charges ne violait en outre pas leurs droits ou obligations, dès lors qu'il ne leur imposait aucune nouvelle activité ni ne requérait de leur part l'exécution de tâches qui ne seraient pas de leur compétence. La rédaction du cahier des charges n'était du reste pas du ressort des employés, mais du service ou département concerné, de sorte que les griefs à caractère rédactionnel ne pouvaient être que rejetés. Il appartenait en outre à la hiérarchie, notamment pour des raisons organisationnelles et de planification du travail, de décider et de prioriser les tâches à mener et de définir celles des différents collaborateurs scientifiques, qu'ils soient nouvellement engagés ou présents au sein de l'administration depuis plusieurs années. Les intéressées ne pouvaient en outre par le biais de la contestation de leur cahier des charges obtenir une réévaluation de leur poste ou la collocation dans une classe de traitement supérieure, étant précisé qu'une procédure spécifique était prévue à cette fin.

Leur droit d'être entendues n'avait pas non plus été violé, dès lors qu'elles avaient été entendues par leur hiérarchie et avaient pu s'exprimer par écrit dans le cadre de leur recours hiérarchique.

17) Le 27 avril 2020, la chambre de céans a accordé à Mmes A______ et B______ un délai au 26 mai 2020, prolongé au 15 juin 2020, pour formuler toute requête complémentaire et/ou exercer leur droit à la réplique, après quoi la cause serait gardée à juger.

18) Le 15 juin 2020, Mmes A______ et B______ ont répliqué, sollicitant la tenue d'une audience publique et persistant dans leurs conclusions pour le surplus.

Elles réaffirmaient leur volonté d'agir de concert, déclarant lever tout secret/confidentialité concernant leurs dossiers professionnels, de sorte que la disjonction des causes ne se justifiait pas.

Le recours était dirigé contre chacun des courriers les visant, en tous points identiques, le fait que seul l'un de ceux-ci ait été annexé au recours était motivé par un souci d'économie de procédure.

Les modifications du cahier des charges envisagées portaient une atteinte grave à leurs droits, dès lors qu'elles entravaient le noyau même de leur mission, tant s'agissant de la cohérence de leur activité que de leur indépendance, de leur autonomie et de la valorisation de leur travail, sans qu'elles ne veuillent, par ce biais, se voir attribuer des compétences supplémentaires ou une classe de traitement supérieure.

19) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

20) Le 26 juin 2020, Mmes A______ et B______ ont sollicité l'audition des parties en audience publique.

EN DROIT

1) a. La chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Sauf exceptions prévues par la loi ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 ; art. 132 al. 2 LOJ).

b. Sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 4 al. 1 LPA les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d'annuler des droits et des obligations (let. a), de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations (let. c). Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

c. La décision comme acte juridique a pour objet de régler la situation d'administrés en tant que sujets de droit et donc, à ce titre, distincts de la personne étatique ou, en d'autres termes, extérieurs à l'administration. On oppose dans ce contexte la décision à l'acte interne ou d'organisation, qui vise des situations à l'intérieur de l'administration ; l'acte interne peut avoir des effets juridiques, mais ce n'en est pas l'objet, et c'est pourquoi il n'est en règle générale pas susceptible de recours. Deux critères permettent généralement de déterminer si on a affaire à une décision ou à un acte interne. D'une part, l'acte interne n'a pas pour objet de régler la situation juridique d'un sujet de droit en tant que tel et, d'autre part, le destinataire en est l'administration elle-même, dans l'exercice de ses tâches (arrêt du Tribunal fédéral 8D_2/2018 du 21 février 2019 consid. 6.2).

La distinction entre acte administratif interne et décision peut s'avérer particulièrement difficile en ce qui concerne les fonctionnaires. Doivent être considérées comme des décisions les mesures qui affectent les droits et obligations d'un fonctionnaire en tant que sujet de droit, par exemple la fixation de son salaire, ou d'indemnités diverses, les sanctions disciplinaires ou encore le changement d'affectation qui va au-delà de l'exécution des tâches qui incombent au fonctionnaire dans sa sphère d'activité habituelle ou des instructions qui lui sont données dans l'exercice de ces tâches. En revanche, un acte qui a pour objet l'exécution même des tâches qui lui incombent en déterminant les devoirs attachés au service, telles que la définition du cahier des charges ou des instructions relatives à la manière de trancher une affaire, est un acte interne. Lorsque le fonctionnaire s'oppose à un acte de ce type, ce sont les mesures disciplinaires ou autres moyens de contrainte ressortissant aux règles régissant les rapports internes qui sont susceptibles de s'appliquer (ATF 136 I 323 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_2/2018 précité consid. 6.2 et les références citées).

En ce qui concerne en particulier le cahier des charges, il ne revêt en principe pas la qualité d'une décision en tant qu'il décrit les tâches qui doivent être exécutées par les agents publics concernés et comment doivent être compris les droits et obligations fixés par la loi, les ordonnances, les décisions et ordres de service. En effet, dans la mesure où il ne comporte pas de droits ou d'obligations autres que ceux qui découlent de la réglementation topique, il ne modifie pas la situation juridique des destinataires en tant que sujets de droit (arrêt du Tribunal fédéral 8D_2/2018 précité consid. 6.3).

2) Selon l'art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire. La Confédération et les cantons peuvent, de par la loi, exclure l'accès au juge dans des cas exceptionnels. La norme constitutionnelle étend le contrôle judiciaire en principe à toutes les contestations juridiques. Il s'agit en particulier de contestations portant sur les droits et les obligations de personnes physiques ou morales (ATF 143 I 344 consid. 8.2). Ces droits et obligations ne découlent pas de la garantie de l'accès au juge elle-même, mais de ceux et celles que confère ou impose à l'intéressé un état de fait visé, notamment, par la Cst., la loi ou encore une ordonnance (ATF 136 I 323 consid. 4.3). L'art. 29a Cst. garantit l'accès à un juge disposant d'un pouvoir d'examen complet des faits et du droit (ATF 137 I 235 consid. 2.5). Elle ne s'oppose cependant pas aux conditions de recevabilité habituelles du recours ou de l'action (ATF 143 I 344 consid. 8.2). Elle ne s'applique toutefois pas, notamment, aux actes internes de l'administration qui n'ont pas le caractère d'une décision (ATF 143 I 336 consid. 4.2).

3) En l'espèce, le recours est dirigé contre le courrier que l'intimé a adressé à Mme A______ le 5 février 2020 par lequel cette autorité lui a confirmé la teneur de son cahier des charges tel qu'il lui a été transmis en août 2019, le portant à son dossier et la priant de le signer.

Les recourantes affirment que ce courrier constituerait une décision, susceptible de recours, en tant que les modifications apportées audit cahier des charges porteraient atteinte à leurs droits et obligations.

Il ne ressort toutefois pas du dossier que tel serait le cas, en l'absence de modification de leurs fonctions, de leur classe salariale ou encore de leurs tâches, ce que les recourantes n'allèguent du reste pas. Dans ce cadre, bien que les activités de la fonction de collaborateur-trice scientifique soient énumérées de manière plus détaillée et moins générale que dans le cahier des charges de 2001, cet élément ne saurait indiquer une augmentation de celles-ci, mais répond au souhait des recourantes, qui ont transmis à la responsable des ressources humaines le 27 mai 2019 une version modifiée de leur cahier des charges comprenant une liste plus détaillée de leurs activités que celle figurant dans le projet leur ayant été initialement remis.

Il n'en va pas différemment s'agissant des mots employés par ledit cahier des charges, comme « à la demande de » et « sur délégation de », qui figuraient déjà dans leur cahier des charges de 2001, ainsi que dans le projet leur ayant été soumis, duquel les intéressées ont d'ailleurs unilatéralement ôté ces termes, sans égard au fait que leur poste est hiérarchiquement subordonné à la conservatrice en chef du domaine des arts appliqués, qui, en cette qualité, doit leur donner des instructions. La modification litigieuse ne crée ainsi aucune nouvelle obligation à leur charge, étant précisé que les collaborateurs de l'État n'ont en principe aucun droit acquis ni de garantie d'immuabilité de leur cahier des charges (ATA/1738/2019 du 3 décembre 2019 consid. 5c). Le fait que l'évolution de leur situation professionnelle ait été discutée n'y change rien, aucune promesse ne leur ayant été faite dans ce cadre, mais de simples possibilités ont été évoquées par leur hiérarchie, ou qu'elles aient bénéficié d'un recours hiérarchique, prévu statutairement afin qu'elles puissent exprimer leur point de vue, qui ne permet pas d'aboutir à la qualification de décision de l'acte en cause.

Par ailleurs, en arguant que ce cahier des charges ne pourrait s'appliquer à leur situation en lien avec leur expérience et leurs compétences, les recourantes tendent bien plus, par le biais de la présente procédure, à demander une réévaluation de leurs fonctions, les intéressées ayant du reste indiqué que l'intitulé de leur poste ne devrait plus être celui de collaboratrice, mais d'adjointes scientifiques, question qui dépasse le cadre du présent litige. Le fait qu'il puisse exister un écart entre leur expérience et compétence et le cahier des charges modifié ne conduit pas à une autre conclusion.

Il s'ensuit qu'en présence d'un acte interne, le recours est irrecevable pour ce motif déjà, de sorte qu'il ne se justifie pas d'examiner plus avant la qualité pour recourir de Mme B______ ni de disjoindre les causes, par économie de procédure.

4) Au regard de cette issue et de la nature de la question à trancher pouvant être jugée de manière adéquate en procédure écrite (arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2018 du 4 juin 2020 consid. 3.2 et 3.3 et les références citées), il ne se justifie pas non plus d'ordonner la tenue d'une audience publique, demande au demeurant formulée seulement au dernier jour du délai fixé, prolongé à la requête des recourantes, pour les observations finales. À cela s'ajoute que les recourantes ont été en mesure de s'exprimer par écrit tant durant la procédure non contentieuse que devant la chambre de céans et de faire valoir leur point de vue et leurs arguments à plusieurs reprises.

À titre superfétatoire, il sera relevé que le droit d'être entendus des recourantes a été pleinement respecté, tant dans la phase de discussion du cahier des charges que dans le cadre du recours hiérarchique, puis devant la chambre administrative, étant relevé que cette dernière leur a concédé un long délai pour produire un recours complété.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge solidaire des recourantes (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée, pas plus qu'à l'intimée, qui dispose de son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 9 mars 2020 par Mesdames A______ et B______ contre le courrier de la Ville de Genève - Conseil administratif du 5 février 2020 adressé à Madame A______ ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge solidaire de Mesdames A______ et B______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat des recourantes, ainsi qu'à la Ville de Genève - Conseil administratif.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Krauskopf et Lauber, M. Mascotto, Mme Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :