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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/422/2020

ATA/641/2020 du 01.07.2020 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/422/2020-FPUBL ATA/641/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 30 juin 2020

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Christian Bruchez, avocat

contre

TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS
représentés par Me Stéphanie Fuld, avocat

 



Attendu, en fait que :

1) Monsieur A______, né en 1979, a été engagé dès le 1er mai 2012, en qualité de conducteur autobus au sein des Transports publics genevois ci-après : les TPG).

2) Les analyses des prestations et objectifs professionnels/personnels (ci-après : les APOP) réalisées au 20 avril 2013, 30 avril 2014, 30 avril 2015 et 31 décembre 2016, retiennent que M. A______ répondait aux exigences sur le plan des prestations personnelles et les dépassait s'agissant des prestations professionnelles depuis le 1er mai 2013.

3) Le 21 avril 2018, M. A______ a été victime d'un accident non professionnel. Il a subi une atteinte à sa santé, notamment à la main droite, et s'est trouvé en incapacité complète de travail.

4) Le 23 mai 2019, à l'issue d'un séjour à la Clinique romande de réadaptation de Sion de M. A______, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : SUVA) a préconisé l'organisation d'un essai de conduite de bus au sein des TPG à l'issue duquel, la capacité de travail serait reconnue.

5) L'essai de conduite a été réalisé le 9 juillet 2019.

Le Docteur B______, médecin du travail des TPG a attesté le même jour que M. A______ présentait des limitations fonctionnelles de la main droite induisant une capacité de travail nulle dans son activité habituelle mais une capacité de travail complète dans une activité adaptée.

6) Le 25 juin 2019, M. A______ a signé un accord de collaboration relatif au processus de retour au travail auprès de son employeur.

7) Par décision du 23 juillet 2019, la SUVA a prononcé l'arrêt du versement des prestations d'indemnités journalières et de soins au 31 juillet 2019, l'incapacité de travail à 100 % n'étant plus justifiée pour les seules suites du sinistre du 20 avril 2018.

8) Le 24 octobre 2019, un entretien a eu lieu, en présence de Madame C______, représentante syndicale accompagnant M. A______, Madame D______, directrice des ressources humaines (ci-après : DRH), Monsieur E______, responsable management et Madame F______, juriste.

9) Le 28 octobre 2019, M. A______ a remis aux TPG un certificat médical de reprise à 100 % moyennant une restriction de 50 % à la conduite professionnelle à partir du 4 novembre 2019.

10) Le 1er novembre 2019, un courriel émanant du service des ressources humaines des TPG précisait que M. A______ devait attendre des instructions et était libéré de l'obligation de travailler.

11) Le 19 novembre 2019, la DRH des TPG et le directeur exploitation, Monsieur G______, ont fait part à M. A______ de leur intention de procéder à son licenciement.

Un résumé de l'entretien du 24 octobre 2019 ainsi qu'un bilan de la situation professionnelle était fait. Tout au long des deux dernières années, M. A______ avait adopté des comportements ayant « définitivement rompu irrémédiablement le lien de confiance nécessaire au maintien des rapports de travail ».

Un délai de dix jours était fixé pour faire valoir son droit d'être entendu.

12) Le 19 novembre 2019, M. A______ a été mis au bénéfice d'un arrêt de travail à 100 % du 19 novembre 2019 au 8 janvier 2020 par le Docteur H______, son médecin traitant. Il a fait parvenir cette attestation aux TPG.

13) Par envoi du 29 novembre 2019, M. A______ a fait valoir sa position auprès des TPG, contestant les motifs du licenciement.

14) Le 20 décembre 2019, les TPG, par les signatures de Monsieur I______, directeur général et Mme D______, ont résilié les rapports de service de M. A______ pour le 31 mars 2020 pour motifs dûment justifiés, au sens de l'art. 71 du statut du personnel des TPG (ci-après : le SP ou le statut). La décision était déclarée exécutoire nonobstant recours.

15) Par acte déposé le 3 février 2020, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de licenciement en concluant principalement à ce que sa nullité soit constatée et subsidiairement à ce qu'il soit constaté que la décision ne reposait pas sur des motifs dûment justifiés, qu'elle était contraire au droit, que sa réintégration soit proposée et qu'en cas de refus, les TPG soient condamnés à lui verser une indemnité correspondant à huit mois du dernier traitement annuel brut comprenant le treizième salaire, soit CHF 54'085.80 avec intérêts à 5 % l'an dès le 30 mars 2020 ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure.

Préalablement, il concluait à l'audition des Drs B______ et H______.

Le licenciement avait été donné pendant une période d'incapacité de travail résultant d'une maladie, soit pendant un période de protection telle que prévue par l'art. 73 SP. La conséquence était la nullité de la décision selon l'art. 73 al. 2 SP. Il avait décompensé psychiquement à la réception du courrier des TPG du 19 novembre 2019 dont le contenu était contraire aux discussions ayant eu lieu jusqu'à cette date.

En outre, le licenciement avait été prononcé sans qu'aucun motif valable ne soit établi.

16) Le 20 mai 2019, les TPG ont répondu au recours en concluant à son rejet ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure valant remboursement des frais d'avocat engagés.

Préalablement, ils concluaient à l'audition de neuf témoins, à la production de l'intégralité des dossiers médicaux de M. A______ auprès de la SUVA et de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève ainsi qu'auprès du Dr H______.

17) Le 22 mai 2020, les TPG ont notifié à titre superfétatoire, une nouvelle décision de licenciement pour le 31 août 2020, pour le cas où la décision du 20 décembre 2019 devait être jugée nulle par la chambre administrative.

18) Le 28 mai 2020, M. A______ a informé la chambre administrative du dépôt prochain d'un recours contre la seconde décision de licenciement lequel devrait être joint à la présente cause. En outre, la date de fin des rapports de travail devant être considérée comme étant celle notifiée par la seconde décision, soit le 31 août 2020, il sollicitait la restitution de l'effet suspensif au recours.

19) Le 9 juin 2020, les TPG se sont déterminés sur la requête d'effet suspensif concluant à son rejet.

20) Sur ce, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

Considérant, en droit, que :

1) Prima facie, le recours est recevable (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La compétence pour ordonner, d'office ou sur requête, des mesures provisionnelles en lien avec un recours appartient au président, respectivement au vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge de la chambre administrative (art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020).

3) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif (art. 66 al. 1 LPA).

L'autorité décisionnaire peut toutefois ordonner l'exécution immédiate de sa propre décision nonobstant recours, tandis que l'autorité judiciaire saisie d'un recours peut, d'office ou sur requête, restituer l'effet suspensif à ce dernier (art. 66 al. 3 LPA).

En l'espèce, les TPG ont déclaré exécutoire nonobstant recours la décision de licenciement du 20 décembre 2019 fondée sur l'art. 71 SP.

4) Lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (art. 66 al. 3 LPA). Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution.

5) Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) - ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/625/2020 du 29 juin 2020 ; ATA/898/2019 du 14 mai 2019). L'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405).

Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu'aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsogliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, p. 265).

6) a. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_246/2020 du 19 mai 2020 consid 5. 1 ; 2C_990/2017 du 6 août 2018 consid. 3.1). La chambre de céans dispose dans l'octroi de mesures provisionnelles d'un certain pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).

b. Pour effectuer la pesée des intérêts en présence, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités).

c. Selon sa jurisprudence constante en la matière, lorsque le statut applicable à l'agent public ne permet pas d'imposer la réintégration en cas d'admission du recours, la chambre de céans ne peut faire droit à une demande de restitution de l'effet suspensif, car elle rendrait alors une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond (ATA/232/2017 du 22 février 2017 ; ATA/443/2016 du 26 mai 2016 ; ATA/1270/2015 du 27 novembre 2015 et les références citées).

7) En l'espèce, le recourant considère principalement que le licenciement est nul et subsidiairement qu'il ne repose pas sur un motif justifié.

Le statut prévoit qu'un congé qui a été donnée en temps inopportun est nul. Cela est le cas lorsque le congé a été donnée pendant une incapacité de travail totale ou partielle résultant d'une maladie ou d'un accident non imputable à la faute de l'employé et cela durant cent quatre-vingts jours à partir de la sixième année de service (art. 73 al. 1 let. b SP).

Selon les termes de l'art. 72 al. 1 SP, lorsque le licenciement ne repose pas sur un motif justifié, la chambre administrative ne peut imposer la réintégration d'un agent public en cas de résiliation ordinaire des rapports de travail mais peut la proposer.

8) Les TPG ont déjà indiqué qu'ils n'entendaient pas poursuivre les relations de travail avec le recourant, notamment en rendant une seconde décision de licenciement conditionnée par la constatation de la nullité de la première.

Il appert ainsi que même dans l'hypothèse la plus favorable au recourant, où la décision de licenciement devrait être considérée comme annulée par le prononcé de la seconde décision ou s'il obtenait gain de cause s'agissant de la constatation de la nullité de la première décision de licenciement ainsi que l'annulation de la seconde - laquelle ne fait toutefois pas encore l'objet d'un recours - la chambre de céans ne pourrait prononcer sa réintégration obligatoire mais uniquement condamner les TPG au versement de montants découlant de l'application du SP.

9) En conséquence, la demande de restitution de l'effet suspensif sera rejetée et le sort des frais de la procédure réservé jusqu'à droit jugée au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l'effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Christian Bruchez, avocat du recourant ainsi qu'à Me Stéphanie Fuld, avocate des Transports publics genevois.

 

 

La présidente :

 

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :