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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4487/2018

ATA/617/2020 du 23.06.2020 sur JTAPI/576/2019 ( ICCIFD ) , REJETE

Recours TF déposé le 27.08.2020, rendu le 22.01.2021, REJETE, 2C_668/2020
Descripteurs : DROIT FISCAL;IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL;IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT;CONCLUSIONS;OBJET DU LITIGE;NOUVEAU MOYEN DE FAIT;SOLIDARITÉ;INSOLVABILITÉ;FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : LIFD.13.al1; aLIPP-I.12.al1
Résumé : Rejet d’un recours contre un jugement du TAPI confirmant une décision de l’AFC-GE refusant de prononcer la fin de la solidarité entre époux, ces derniers ayant échoués à prouver leur insolvabilité. Selon les extraits du registre des poursuites, aucun acte défaut de biens, ni aucune faillite n’a été enregistrée. Certaines poursuites ayant même été payées dans l’année écoulée. Définition de l’objet du litige en rapport avec une procédure ouverte auprès du TAPI concernant une autre décision de l’AFC-GE.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4487/2018-ICCIFD ATA/617/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 juin 2020

4ème section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______
représentés par Me Thierry Ador et Me Michel Cabaj, avocats

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 juin 2019 (JTAPI/576/2019)


EN FAIT

1) Monsieur A______ (ci-après : le contribuable) et son épouse, Madame A______ (ci-après : la contribuable), sont ressortissants d'Indonésie.

Ils ont été tenus pour assujettis à l'impôt dans le canton de Genève depuis l'exercice fiscal 1999 et ont été inscrits au rôle ordinaire de l'impôt dans le canton de Genève dès la période fiscale 2000.

Ils ont remis à l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) leur déclaration fiscale 2001-A, mais seulement une déclaration provisoire 2001-B. L'AFC-GE leur a alors notifié une décision de taxation d'office pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC), contre laquelle ils ont formé une réclamation. Ils ont également déposé une déclaration fiscale pour l'exercice 2002.

2) Le 28 novembre 2003, l'AFC-GE a ouvert une procédure de rappel d'impôt. Pour l'ICC, cela concernait la période 1998 à 2000, tandis que pour l'IFD, il s'agissait de la période fiscale 1999-2000.

3) Le 10 mai 2004, le Conseiller fédéral en charge du département fédéral des finances a donné l'ordre à la division des affaires pénales et enquêtes (ci-après : DAPE) de mener une enquête en raison de soupçons fondés de soustraction continue de montants importants d'impôts. Celle-ci a été close en 2009.

4) Par courrier du 15 décembre 2005, l'AFC-GE a informé le contribuable de la clôture de la procédure de rappel d'impôt ouverte le 28 novembre 2003 pour l'exercice 2000. Elle lui a notifié un bordereau ICC accompagné d'un bordereau d'amende d'un montant similaire, contre lesquels les contribuables ont formé le 19 janvier 2006 une réclamation.

5) Le 6 décembre 2006, les contribuables ont quitté la Suisse pour la Grande-Bretagne.

6) Par courrier du 16 novembre 2007, l'AFC-GE a informé les contribuables que les procédures de rappels d'impôt engagées par courrier du 28 novembre 2003 pour les années 1998 à 2000 étaient étendues aux périodes fiscales 2001-B et 2002.

7) Le 5 décembre 2007, l'AFC-GE a informé les contribuables que les bordereaux relatifs aux périodes fiscales 1998 à 2001 seraient notifiés après la reddition de son rapport par la DAPE. Pour des raisons de prescription, elle allait notifier une taxation 2002 avant la fin de l'année 2007.

8) Le 18 janvier 2008, les contribuables ont formé une réclamation à réception des deux bordereaux de taxation 2002 annoncés.

9) Le 19 décembre 2008, l'AFC-GE a notifié aux contribuables des bordereaux ICC et IFD relatifs aux exercices fiscaux 2003 à 2005, bordereaux contre lesquels les contribuables, le 16 janvier 2009, ont formé une réclamation.

10) Le 24 mars 2009, la DAPE a rendu son rapport d'enquête qui mettait en évidence des dissimulations fiscales imputables au contribuable, lequel avait été inculpé. Elle suggérait des reprises fiscales sur les revenus déclarés, dont elle chiffrait le montant concernant les périodes fiscales 2000 (ICC uniquement), 2001 et 2002 (ICC et IFD). Pour les périodes fiscales 2003 et 2004, des éléments de revenus supplémentaires allaient être ajoutés aux éléments de taxation ordinaire.

11) a. Le 18 décembre 2009, l'AFC-GE a statué d'une part sur la réclamation des contribuables du 19 janvier 2006 dirigée contre le bordereau ICC 2000 et le bordereau d'amende qui s'y rattachait. Elle a modifié le montant dudit bordereau en leur faveur, et maintenu la quotité de l'amende à concurrence du nouveau montant d'impôt. Elle a statué d'autre part sur leur réclamation contre les bordereaux de taxation relatifs aux exercices 2001 à 2005 par deux décisions, l'une concernant l'ICC et l'autre l'IFD.

b. Le 20 janvier 2010, les contribuables ont saisi d'un recours la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), dont le rôle a été repris depuis le 1er janvier 2011 par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI). Leurs conclusions en annulation portaient sur les décisions sur réclamation relatives aux exercices fiscaux 2001-B à 2005 (cause A/239/2010). Par la suite, le 11 février 2010, ils ont précisé à l'instance de recours que leur recours incluait également la décision sur réclamation du 18 décembre 2009 concernant l'exercice fiscal ICC 2000.

12) Le 15 janvier 2010, l'AFC-GE a indiqué aux contribuables que la procédure pénale pour soustraction d'impôt ouverte le 16 novembre 2007 était terminée pour l'IFD et l'ICC 2001-B et 2002 et leur a notifié un bordereau d'amende de CHF 6'952'629.75 pour l'IFD et de CHF 18'501'641.45 pour l'ICC. Par décision sur réclamation du 19 août 2010, l'AFC-GE a maintenu les deux bordereaux d'amende précités. Le 17 septembre 2010, les contribuables ont interjeté un recours auprès de la CCRA (cause A/3227/2010).

13) Le 20 août 2010, l'AFC-GE a notifié aux contribuables des bordereaux de taxation ICC et IFD 2006 pour la période du 1er janvier au 6 avril 2006, date de leur départ pour l'étranger. Les contribuables ont formé une réclamation à l'encontre de ces deux bordereaux par acte du 21 septembre 2010. Le 30 septembre 2010, l'AFC-GE a rejeté leur réclamation, et les contribuables ont interjeté un recours auprès de la CCRA contre ces deux décisions (cause A/3825/2010).

14) Le 21 mai 2012, le TAPI a ordonné la jonction des différentes causes précitées. Il a déclaré irrecevable le recours interjeté dans le cadre de la cause A/239/2010 en tant qu'il portait sur l'année fiscale 2000 et a rejeté les recours pour le surplus.

15) Le 4 mars 2013, les contribuables ont interjeté un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), en concluant à l'annulation du jugement du TAPI précité, de même que celle des bordereaux de taxation et d'amende ICC et IFD, subsidiairement à leur réduction.

16) Par arrêt du 24 novembre 2015 (ATA/1261/2015), la chambre administrative a rejeté le recours des contribuables, dans la mesure où il était recevable.

17) Saisi d'un recours des contribuables qui concluait à la mise à néant de l'arrêt de la chambre administrative précité, le Tribunal fédéral, par arrêt du 24 novembre 2016, l'a admis partiellement dans la mesure où il était recevable, selon le dispositif suivant :

« L'arrêt rendu le 24 novembre 2015 par la Cour de justice est annulé en tant qu'il concerne le prononcé de l'amende pour tentative de soustraction d'IFD et d'ICC pour les périodes 2001-B et 2002, et confirmé pour le surplus ».

18) Par arrêt du 22 août 2017 (ATA/1204/2017), la chambre administrative a annulé partiellement les décisions de l'AFC-GE du 15 janvier 2010, confirmées sur réclamation le 19 août 2010, en tant qu'elles prononçaient à l'encontre des contribuables des amendes pour tentative de soustraction d'impôt pour les périodes 2001-B et 2002, et confirmé pour le surplus et en tant que de besoin les décisions de l'AFC-GE du 18 décembre 2009, confirmées sur réclamation le 19 août 2010, relatives aux exercices 2001 à 2005, ainsi que celle du 20 août 2010 confirmée sur réclamation le 30 septembre 2010, relative à l'exercice 2006.

19) Par ailleurs, dans leurs déclarations fiscales 2007 à 2009, les contribuables ont déclaré uniquement leur bien immobilier sis à B______ et ils n'ont ainsi été imposés que sur cet élément.

20) Pour les périodes 2010 à 2014, ils ont été taxés d'office, faute d'avoir retourné leurs déclarations fiscales. Le 7 octobre 2015, ils ont élevé réclamation à l'encontre de ces taxations. Par décisions du 28 septembre 2015, l'AFC-GE a admis partiellement la réclamation des intéressés.

21) Le 28 octobre 2016, les contribuables ont recouru devant le TAPI à l'encontre de ces décisions, en faisant notamment valoir que l'immeuble de B______ devait être considéré comme sans valeur dans le revenu et la fortune, en raison du séquestre le grevant.

22) Par jugement du 7 février 2018 (JTAPI/126/2018), le TAPI a rejeté leur recours. Ce jugement a été confirmé par la chambre administrative le 5 mars 2019 (ATA/223/2019).

23) Des procédures de séquestre ont par ailleurs été engagées par l'AFC-GE. Le 9 avril 2010, l'AFC-GE a formé, à l'encontre des contribuables, quatre demandes de sûretés valant ordonnances de séquestre (fiscal) pour un montant total de CHF 139'484'026.10, afin de garantir le paiement de l'ICC 2000 à 2005 et de l'IFD 2001 à 2005.

24) Les contribuables ayant formé opposition aux commandements de payer notifiés par l'AFC-GE, celle-ci a requis la mainlevée des oppositions, procédures qui ont fait l'objet de recours jusqu'au Tribunal fédéral, lequel a statué par arrêts des 10 avril 2018 (déclarant irrecevables les recours 5A_30/2018, 5A_31/2018 et 5A_32/2018) et 3 septembre 2018 (rejetant les recours 5A_555/2018, 5A_556/2018 et 5A_557/2018).

Dans les trois premiers arrêts, le Tribunal fédéral a retenu que les recourants se contentaient d'alléguer leur insolvabilité sans nullement étayer leur propos, et de faire référence à leur « situation financière actuelle », sans la décrire, ni a fortiori la démontrer, de sorte que leur argumentation ne satisfaisait nullement aux exigences de motivation requises.

Dans les trois derniers, le Tribunal fédéral a jugé qu'il n'appartenait pas au juge de la mainlevée, en l'absence de décision de répartition prise par les autorités fiscales, de se préoccuper de l'éventuelle insolvabilité d'un époux.

25) Le 23 mai 2017, l'AFC-GE a requis quatre nouveaux séquestres contre les contribuables, également pour un montant total de CHF 139'484'026.10, avec intérêts à 5 % l'an dès le 23 mai 2017, afin de garantir les impôts susmentionnés. Ces séquestres se fondaient sur l'art. 271 al. 1 ch. 6 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1).

26) Les ordonnances de séquestres et les commandements de payer en validation du séquestre ont été communiqués aux contribuables par voie édictale. Ces derniers y ont fait opposition.

27) Les ordonnances de séquestres sont entrées en force (arrêts du Tribunal fédéral 5A_510/2018, 5A_511/2018 et 5A_512/2018 du 26 septembre 2018).

28) Par arrêts du 20 novembre 2018 (ACJC/1603/2018, ACJC/1604/2018, ACJC/1605/2018 et ACJC/1606/2018), la chambre civile a suspendu l'effet exécutoire accordé aux quatre jugements rendus par le Tribunal de première instance prononçant la mainlevée de l'opposition aux commandements de payer susmentionnés, considérant que, compte tenu de l'importance des montants litigieux, il était vraisemblable que la continuation des poursuites serait de nature à provoquer des difficultés financières pour les contribuables.

29) S'agissant des années 2015 et 2016, les contribuables ont été taxés d'office, n'ayant pas renvoyé leurs déclarations fiscales dans les délais prescrits.

30) Après avoir reçu leurs bordereaux 2015, ils ont remis une déclaration fiscale.

31) Le 4 août 2017, les contribuables ont élevé réclamation à l'encontre de leur taxation 2016. Il y avait lieu de tenir compte de leur situation patrimoniale sur le plan mondial, ainsi que de leurs dettes fiscales en Suisse, confirmées par le Tribunal fédéral. Au 31 décembre 2015, celles-ci s'élevaient à CHF 86'202'807.- pour M. A______ et à CHF 60'748'536.- pour son épouse, intérêts en sus. Pour l'année 2015, ils demandaient la prise en considération de la fortune et des revenus sis hors canton, ressortant de leur déclaration fiscale indonésienne qu'ils joignaient.

32) Par pli du 18 octobre 2017 adressé à l'AFC-GE, les contribuables ont exposé que les déclarations fiscales suisse et indonésienne 2015 faisaient apparaître une fortune de CHF 20'681'606.-, alors que les dettes « solidaires » s'établissaient à CHF 117'556'665.-. Ils n'étaient ainsi pas en mesure de faire face à leurs obligations financières, à savoir à leurs dettes fiscales excédant CHF 86'000'000.- et aux intérêts y afférents, de sorte qu'ils se trouvaient en situation d'insolvabilité. En conséquence, l'AFC-GE aurait déjà dû émettre une décision fixant la part d'impôt due pour chacun des époux.

33) Par pli du 18 janvier 2018, les contribuables ont invité l'AFC-GE à donner suite à leur requête du 18 octobre précédent.

34) Par décision du 8 février 2018, l'AFC-GE a rejeté la demande de répartition, pour le motif que les précités n'avaient pas établi qu'ils se trouvaient en situation d'insolvabilité. Les pièces remises ne permettaient pas d'attester de leur incapacité durable de remplir leurs obligations financières.

35) Les contribuables ont élevé réclamation à l'encontre de cette décision, par lettre du 15 mars 2018.

Selon le rapport de la DAPE, l'ensemble des éléments imposables du couple avait été attribué à M. A______, hormis ceux relatifs à l'immeuble de B______. L'AFC-GE était au courant de leur situation d'insolvabilité depuis 2016, à la suite du recours ayant donné lieu à l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2016. Ils avaient remis une « due diligence » mondiale de leurs actifs.

Les 4 août et 18 octobre 2017, ils avaient établi leur situation d'insolvabilité. Par ailleurs, compte tenu de la situation économique précaire prévalant en Indonésie, la valeur de leurs actifs s'était dépréciée. Leurs dettes indonésiennes se montaient à l'équivalent de CHF 157'650'000.-, auxquelles s'ajoutaient les prétentions de l'AFC-GE s'élevant à plus de CHF 86'000'000.-, alors que leurs actifs équivalaient à quelque CHF 90'000'000-. Ils ne pourraient ainsi jamais faire face à leurs obligations.

36) Le 30 avril 2018, les contribuables ont complété leur réclamation en concluant, préalablement, à la suspension des procédures de poursuites en lien avec les impôts 2000 à 2006 et, principalement, à ce que l'AFC-GE procède à la répartition des éléments imposables entre les époux.

Ils ont produit un « due diligence opinion addenda » datée du même jour, établie par une étude d'avocats de Jakarta, qui évaluait les actifs de M. A______ à USD 17'925'643.-. Ses principales dettes, envers les sociétés C______ Ldt (ci-après : C______ Ltd) et D______ (ci-après : D______), totalisaient environ USD 165'821'774.-. Dès lors, ses actifs présentaient un solde négatif de USD 147'896'131.-, sans compter leurs dettes fiscales pour les années 2000 à 2006, qui s'élevaient, pour M. A______ et pour son épouse, à respectivement CHF 130'000'000.- et à CHF 92'000'000.- environ, y compris les intérêts. Par ailleurs, si l'on défalquait des actifs de M. A______ la valeur des biens immobiliers singapouriens et suisses, propriétés de son épouse, le solde débiteur était porté à CHF 292'661'426.-, respectivement à CHF 237'825'097.- pour son épouse. Ils faisaient par ailleurs l'objet de nombreuses poursuites pour dettes en Suisse.

Leurs revenus de l'année 2016 se chiffrant à CHF 100'155.-, ils étaient incapables de faire face à leurs engagements financiers, et ils devaient être considérés comme insolvables, ne répondant plus solidairement des impôts dus.

37) Par décision du 13 novembre 2018, l'AFC-GE a rejeté la réclamation, au motif que les contribuables n'avaient pas démontré qu'ils se trouvaient en situation d'insolvabilité.

Le « due diligence opinion addenda » et leur déclaration fiscale indonésienne ne constituaient pas des éléments de preuve suffisants. Ils n'avaient produit aucun acte de défaut de biens les concernant, ni aucune pièce établissant l'existence d'une faillite ou d'un concordat par abandon d'actifs. Leurs seules poursuites, hormis celles émanant de l'AFC-GE, portaient sur de faibles montants et se rapportaient à leur villa de B______, qui n'était gagée qu'à concurrence de CHF 1'600'000.-, alors qu'elle avait été estimée à une valeur oscillant entre CHF 12'000'000.- et CHF 23'000'000.-.

En outre, ils ne faisaient pas état d'hypothèques grevant leur immeuble sis au Royaume-Uni. La prétendue diminution de valeur d'actifs mondiaux d'un richissime homme d'affaires ne saurait être assimilée à une situation de surendettement. En 2017, le magazine Forbes avait classé M. A______ au 35ème rang des personnes les plus riches d'Indonésie. Les contribuables étaient toujours représentés par des avocats réputés, qui fonctionnaient peu probablement à découvert.

Dans ses arrêts du 10 avril 2018 (5A_30/2018, 5A_31/2018 et 5A_32/2018), le Tribunal fédéral avait globalement retenu que les époux n'avaient nullement démontré leur situation d'insolvabilité.

38) Par acte du 14 décembre 2018, les contribuables ont interjeté recours devant le TAPI à l'encontre de la décision du 13 novembre 2017, concluant, principalement, à l'annulation de la décision entreprise, des bordereaux d'ICC 2000 à 2006 et d'IFD 2001 à 2006 ainsi qu'à l'ouverture d'une procédure de répartition des éléments imposables des époux. Subsidiairement, ils ont conclu à l'annulation de la décision attaquée et des bordereaux susmentionnés, en tant que Mme A______ ne devait être imposée que sur l'immeuble de B______, et à l'émission de nouveaux bordereaux.

Selon leur déclaration fiscale indonésienne pour l'année 2017, les actifs de M. A______, d'une valeur de quelques millions de francs suisses, ne couvraient de loin pas leurs dettes se chiffrant à plus de CHF 300'000'000.-, à savoir CHF 157'650'000.- auxquels s'ajoutaient des dettes fiscales et intérêts de respectivement CHF 86'000'000.- et CHF 50'000'000.-. Les actifs de son épouse étaient valorisés à CHF 20'000'000.-, tandis que ses dettes s'établissaient à CHF 220'000'000.-. Les contribuables étaient dès lors manifestement en situation d'insolvabilité.

Ils étaient par ailleurs endettés auprès des sociétés indonésiennes D______ et C______ Ltd, ainsi que des créanciers suisses, tels que des entreprises de réparation ou d'entretien, en lien avec leur immeuble de B______, ou encore des avocats.

39) Par jugement du 24 juin 2019, le TAPI a rejeté le recours.

Il découlait de leurs déclarations fiscales indonésiennes 2015 et 2016 que les dettes des contribuables excédaient leurs actifs de plusieurs dizaines de millions de CHF. Cela étant, ils n'avaient produit aucun justificatif relatif à la seule dette dont ils se prévalaient encore dans leur déclaration fiscale indonésienne 2016, à savoir la créance de C______ Ltd à leur encontre, dont l'existence paraissait au demeurant douteuse. En effet, le 25 avril 2018, C______ Ltd - qui avait des rapports de proximité avec le contribuable - avait attesté qu'outre ses liquidités, son seul actif se composait d'une participation dans la société canadienne E______, n'indiquant aucunement qu'elle serait titulaire d'une créance à l'encontre des contribuables. Ceux-ci n'avaient dès lors pas démontré se trouver de manière durable en situation d'insolvabilité.

40) Par acte posté le 29 juillet 2019, les contribuables ont interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant préalablement à l'octroi de mesures provisionnelles, à savoir qu'interdiction soit faite à l'office des poursuites (ci-après : OP) de prendre quelque mesure que ce soit à l'encontre des contribuables, et principalement à l'annulation du jugement attaqué et à ce que soit ordonnée l'ouverture de la procédure de répartition des éléments imposables entre époux s'agissant de l'ICC 2000 à 2006 et de l'IFD 2001 à 2006.

La procédure devait être renvoyée au TAPI, qui n'avait pas pris en compte une demande du 21 juin 2019 dans laquelle ils avaient fait valoir leur séparation de fait au titre de deuxième motif d'ouverture de la procédure de séparation des éléments imposables entre époux.

Ils avaient établi de manière détaillée leur insolvabilité et il incombait à l'AFC-GE et au TAPI de formuler toute demande de renseignements complémentaires nécessaire eu égard aux garanties fondamentales d'une procédure équitable et du droit d'être entendu.

Le TAPI avait retenu à tort qu'ils n'auraient pas renversé la présomption établie par le rapport de la DAPE du 24 mars 2009 quant à leur situation financière. Il n'incombait pas au justiciable de prouver un fait négatif.

Le TAPI avait retenu à tort que l'attestation des administrateurs de la société C______ Ltd du 25 avril 2018 était douteuse. S'il existait un doute sur la valeur actuelle de la société malgré les pièces produites, le TAPI aurait dû instruire ou renvoyer la cause à l'AFC-GE pour examiner plus en détail la structure des actifs de la société. Les pertes sur investissements et réductions de capital d'E______ n'avaient à tort pas été pris en compte, selon le même raisonnement que celui fait pour C______ Ltd. La créance de la société D______ n'avait à tort pas été prise en compte en violation de leur droit d'être entendu.

La preuve du sauvetage de la société F______ du frère du contribuable était donnée par une appréciation logique des faits notoires ou non contestés. Seul le contribuable pouvait rembourser cette créance.

Il était notoire que le contribuable avait financé de nombreuses oeuvres caritatives jusqu'à ce que sa situation financière se détériore.

C'est à tort que le TAPI n'avait pas admis comme preuve les déclarations fiscales indonésiennes 2015 et 2016 ainsi que la « due diligence opinion » pour admettre la créance de C______ Ltd.

Ni l'un ni l'autre n'avait de biens et d'avoirs suffisants pour couvrir ne serait-ce que les deux tiers du total des dettes. Les époux étaient chacun en situation de surendettement complet. Huit titres de créances privées portant sur un montant total d'environ CHF 400'000.- n'avaient pas été pris en compte Ils étaient criblés de dettes à l'égard de créanciers privés, de leurs sociétés, de l'agence qui avait succédé à G______ et du fisc suisse pour près de soixante fois la valeur des actifs du recourant, respectivement plus de dix fois s'agissant de la recourante.

41) Le 12 août 2019, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

42) Le 23 août 2019, l'AFC-GE a conclu à l'irrecevabilité de la demande de mesures provisionnelles.

43) Par décision du 19 septembre 2019, la chambre administrative a déclaré la demande de mesures provisionnelles irrecevable pour raison de compétence.

44) Le 20 septembre 2019 l'AFC-GE a répondu au recours en concluant à son rejet.

Les 29 juillet et 28 août 2019, les contribuables avaient demandé à l'AFC-GE de statuer en tenant compte de leur séparation de fait. Le jugement du TAPI était antérieur à ces faits et il n'y avait donc pas lieu de renvoyer la cause à celui-ci, le droit d'être entendu des contribuables n'ayant pas été violé.

45) Par observations spontanées du 30 septembre 2019, les recourants ont déposé le courrier adressé le même jour à l'AFC-GE et ses annexes valant addenda à la demande d'ouverture de la procédure de répartition des éléments imposables entre époux au motif de leur séparation de fait et de leur divorce. Une requête en divorce avait été déposée par le contribuable le 23 septembre 2019.

46) Le 22 novembre 2019, l'AFC-GE a déposé des observations. En se prévalant à un stade aussi tardif de la procédure de leur séparation de fait, les recourants tentaient de créer une situation qui avait pour seule finalité d'échapper aux impôts qu'ils devaient selon l'arrêt du Tribunal fédéral du 24 novembre 2016 devenu définitif.

La séparation de fait alléguée datait de juin 2018 et n'avait pas été invoquée dans les actes antérieurs. Tant la convention de mesures protectrices de l'union conjugale que la requête en divorce ne constituaient pas des éléments suffisants pour attester de la séparation de fait. De plus, même si un jugement de divorce devait être rendu, il faudrait encore qu'il ne viole pas l'ordre public suisse pour pouvoir être reconnu, ce qui n'était pas établi.

Plusieurs vidéos et photographies recueillies sur internet témoignaient du fait que même après leur séparation alléguée, les recourants s'affichaient publiquement comme un couple.

L'AFC-GE concluait à l'irrecevabilité de toutes les pièces non traduites en français ou traduites de manière libre et partielle ou encore d'origine non précisée.

47) Le 22 novembre 2019, les recourants ont déposé des observations.

Le courrier annonçant la séparation de fait avait été déposé à la Poste le 21 juin 2019 et reçu par le TAPI le matin du 25 juin 2019. Ces nova auraient dû être prises en compte ou alors traitées comme une demande de révision.

L'AFC-GE étant entrée en matière pour instruire la séparation de fait des recourants, la chambre pourrait décliner sa compétence sous cet angle pour préserver un maximum de degrés de juridictions.

48) Le 10 janvier 2020, les recourants se sont déterminés sur les observations de l'AFC-GE.

Leur divorce avait été prononcé le 2 décembre 2019 et était entré en force le 17 décembre 2019.

Les questions de traduction soulevées par l'AFC-GE relevaient d'un formalisme excessif.

49) Le 31 janvier 2020, les recourants ont déposé les originaux du jugement de divorce, sa traduction anglaise jurée du 2 janvier 2020 et sa traduction officielle française du 28 janvier 2020, les originaux devant être récupérés le 11 février 2020.

50) Le 28 février 2020, l'AFC-GE a déposé des observations.

Le jugement de divorce produit n'était pas muni d'un sceau officiel. Il ressortait des nombreuses photographies et vidéos disponibles sur internet, postérieures à leur séparation alléguée, que les recourants étaient toujours en couple aussi bien dans leur vie publique que privée, notamment le 23 janvier 2020, lors de leur anniversaire de mariage.

L'insolvabilité prétendue était encore contredite par des articles de presse des 18 décembre 2019 et 6 janvier 2020, lesquels portaient sur le projet de construction d'une nouvelle capitale indonésienne sur des terrains de 42'000 et de 173'400 hectares, propriétés du recourant.

51) Le 15 mai 2020, les recourants ont répliqué.

Le 21 février 2020, l'AFC-GE avait rejeté leur demande d'ouverture de la procédure de répartition des éléments imposables au motif que leur séparation n'était pas avérée. Le 9 avril 2020, l'AFC-GE avait rejeté leur réclamation pour le même motif. Ils avaient déposé un recours auprès du TAPI.

Il était notoire que la recourante était une fervente catholique pratiquante pour qui le mariage ne pouvait être dissous que par la mort. En conséquence, elle s'estimait probablement encore mariée sans préjudice de son état civil. Elle avait contraint le recourant à apparaître avec elle lors de divers événements publics après leur séparation de fait.

52) Les parties ont été informées le 22 mai 2020 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Il convient de déterminer l'objet du litige.

a. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/71/2018 du 23 janvier 2018).

b. Selon l'art. 68 LPA, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuve nouveaux qui ne l'ont pas été dans les précédentes procédures, sauf exception prévue par la loi. A contrario, cette disposition ne permet pas au recourant de prendre des conclusions qui n'auraient pas été formées devant l'autorité de première instance.

Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, l'objet d'une procédure administrative ne peut pas s'étendre ni se modifier qualitativement au fil des instances. Il peut uniquement se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés devant l'autorité de recours (ATA/239/2016 du 15 mars 2016 et les références citées). Si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions qui ont été traitées dans la procédure antérieure. Quant à l'autorité de recours, elle n'examine pas les prétentions et les griefs qui n'ont pas fait l'objet du prononcé de l'instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d'enfreindre le principe de l'épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d'un degré de juridiction (ATA/648/2016 du 26 juin 2016 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 558 et les références citées).

c. Conformément à l'art. 54 loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), la chambre administrative peut à nouveau déterminer tous les éléments imposables et, après avoir entendu le contribuable, elle peut également modifier la taxation au désavantage de ce dernier. Il s'agit d'une norme spéciale qui déroge à la réglementation du pouvoir de décision régi par l'art. 69 al. 1 LPA. En effet, l'art. 54 LPFisc permet à la chambre administrative d'aller au-delà des conclusions des parties, éventuellement au désavantage du contribuable, indépendamment des motifs invoqués.

Toutefois, la reformatio in pejus, comme la reformatio in melius, doivent respecter le cadre strict de l'objet du litige tel qu'il résulte des moyens soulevés par les parties (ATA/71/2018 précité consid. 13c ; Benoît BOVAY, op. cit., p. 610-611).

d. En l'espèce, la procédure concerne le rejet de l'AFC-GE, par décision du 8 février 2018, d'une demande de répartition des impôts dus, en raison d'une incapacité durable de remplir leurs obligations financières. Cette décision a été confirmée sur réclamation le 13 novembre 2018 puis le 24 juin 2019 par le TAPI.

Dans un deuxième temps, les contribuables ont déposé le 30 septembre 2019, à l'AFC-GE, une seconde requête de répartition des impôts dus par chacun des époux au motif d'une séparation de fait. Cette requête a été refusée par décision de l'AFC-GE du 21 février 2020, confirmée sur réclamation le 9 avril 2020 et fait actuellement l'objet d'une procédure de recours auprès du TAPI.

Parallèlement, les recourants ont informé le TAPI par envoi du 21 juin 2019 de l'existence d'un second et nouveau motif de rupture de la solidarité entre époux. Ils font valoir dans leur recours que leur séparation, qu'ils avaient faite valoir avant le jugement, aurait dû être prise en compte par le TAPI dans son jugement.

Il appert ainsi que les conséquences éventuelles de la séparation de fait des contribuables, laquelle a fait l'objet d'une seconde requête de la part des contribuables et d'une seconde décision de l'AFC-GE sont exorbitantes au litige, et c'est donc à juste titre que le TAPI ne les a pas examinées, sans qu'il soit encore nécessaire de savoir si la séparation de fait a été annoncée dans les délais fixés par le TAPI (art. 75 LPA).

Le grief des recourants doit ainsi être écarté, et il découle de ce qui précède que l'objet du litige est le refus de l'AFC-GE, confirmé par le TAPI, de considérer comme remplie la condition de l'insolvabilité des contribuables.

3) Les recourants font grief au TAPI et à l'AFC-GE de ne pas avoir admis que leur situation réalisait la condition d'insolvabilité, au sens des art. 13 al. 1 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) et 12 al. 1 de la loi sur l'imposition des personnes physiques - objet de l'impôt - assujettissement à l'impôt (aLIPP-I) du 22 septembre 2000, dont la teneur est identique, applicables en l'espèces, le litige concernant les taxations IFD 2001 à 2006 et ICC 2000 à 2006.

Cette insolvabilité entraînerait la fin de la solidarité entre époux, laquelle implique qu'ils soient considérés comme des débiteurs solidaires passifs, répondant ainsi chacun pour l'entier de la dette (arrêt du Tribunal fédéral 2C_58/2015 et 2C_59/2015 du 23 octobre 2015, consid. 5.1).

a. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'insolvabilité doit être reconnue dès l'instant où sont établis des éléments qui attestent de l'incapacité durable du débiteur de remplir ses obligations financières, par exemple, un surendettement complet, l'existence d'actes de défaut de biens (à tout le moins définitifs), l'ouverture de la faillite ou la conclusion d'un concordat par abandon d'actifs (arrêts du Tribunal fédéral 2C_58/2015 et 2C_59/2015 précités, consid. 5.2 ; 2C_709/2008 du 2 avril 2009 consid. 4.2).

b. Selon la directive de l'administration fédérale des contributions AFC, circulaire no 30 du 21 décembre 2010 (2ème éd.), l'insolvabilité doit être reconnue si des caractéristiques concluantes sont prouvées, qui attestent de l'incapacité durable du débiteur de remplir ses obligations financières. Un renvoi à la pratique et aux commentaires de doctrine relatifs aux art. 83 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220) et 897 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) est fait.

c. L'insolvabilité est reconnue si le débiteur est dans l'incapacité durable de régler ses dettes exigibles ; en d'autres termes, il ne doit plus être à même de désintéresser ses créanciers dans un avenir prévisible. Tel est le cas, par exemple lorsque le débiteur tombe en faillite ou demande un sursis concordataire, ou encore, en principe, lorsqu'il ferme ses guichets, refuse sans raison de régler ses dettes ou met abruptement un terme à son exploitation (Bénédict FOËX, Commentaire romand - Code civil II, ad. Art. 897 CC n. 2).

d. Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, le débiteur est insolvable lorsqu'il ne dispose pas de moyens liquides suffisants pour s'acquitter de ses dettes exigibles. Cet état ne doit toutefois pas être passager (ATA/260/2013 du 23 avril 2013). Il y aura insolvabilité notamment en cas de faillite, concordat ou saisie infructueuse. Seul celui dont l'insolvabilité s'est étendue sur certaines périodes sans qu'il ait pu redresser sa situation financière et amortir régulièrement ses dettes doit être considéré comme insolvable (ATA/1458/2017 du 31 octobre 2017).

4) La maxime inquisitoire est applicable à la détermination de la dette fiscale. L'administration fiscale supporte le fardeau de la preuve de l'existence d'éléments imposables et, selon un principe généralement admis en matière fiscale, il incombe à celui qui prétend à l'existence d'un fait de nature à éteindre ou à diminuer sa dette fiscale d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; ATA/223/2020 du 25 février 2020 consid. 6).

La preuve de l'insolvabilité en tant que fait de nature à diminuer ou à éteindre la dette fiscale revient à l'époux qui invoque pareille situation afin de se soustraire à la responsabilité solidaire illimitée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_709/2008 précité consid. 4.3).

En l'espèce, il appartient donc aux recourants de prouver leur insolvabilité durable.

5) En vue d'apporter cette preuve, les recourants font valoir que les actifs dont ils disposent ne couvrent pas leurs dettes.

En premier lieu, il faut constater que les recourants n'ont jamais soulevé des problèmes d'endettement, notamment dans les procédures de taxation 2007 à 2014. Or, ils allèguent aujourd'hui que leur situation financière s'est dégradée suite à la crise financière de 2008, dégradation encore aggravée entre 2014 et 2016 au point d'être aujourd'hui insolvables et ce, depuis 2018 déjà. Cette situation découlerait notamment du financement entre 2009 et 2014 des campagnes électorales parlementaires de deux de leurs enfants ainsi que de celles du frère du recourant et de l'actuel président de l'Indonésie. Ils allèguent également que les sociétés du recourant n'ont plus aucune substance, dès lors qu'il n'existe ni actifs réalisables ou susceptibles de servir de sûretés, ni réserves pouvant faire l'objet d'une distribution et qu'elles étaient sur le point d'être liquidées.

Les documents produits, censés attester de cette situation, sont des états de la situation financière internationale (due diligence opinion du 11 janvier 2016 et son addenda du 30 avril 2018) établis par une étude d'avocats indonésienne. Le premier reprend les éléments de la déclaration d'impôts indonésienne de 2014 des recourants ainsi que de divers articles de presse et le second est « une mise à jour » du précédent avis.

À titre d'exemple, pour 2016, une seule dette figure dans la déclaration fiscale, à l'égard de C______ Ltd pour un montant de IDR 1'609'520'000'000.-, soit CHF 121'406'094.- (taux de change au 31 décembre 2016 de CHF 0.007543/IDR 100). Or cette société a attesté le 25 avril 2018 l'état de ses actifs, parmi lesquels la créance à l'égard du contribuable ne figure pas. En effet, le seul actif mentionné est constitué par les participations dans la société E______.

À l'égard de cette attestation, les recourants exposent qu'elle avait été rédigée par les administrateurs de C______ Ltd en vue d'établir leur solvabilité et qu'il ne se justifiait pas de mentionner la créance en question. De plus, en cas de doute, des mesures d'instruction auraient dû être prises pour clarifier la structure des actifs de la société. Les recourants perdent ainsi de vue qu'il leur appartient de prouver ces faits dont ils entendent tirer des conséquences, à savoir la réduction de leur dette fiscale. En outre, compte tenu des liens existants entre le recourant et la société C______ Ltd, comme cela avait déjà été relevé dans le rapport du DAPE, il était douteux que cette créance, si elle existait, donnerait lieu à un recouvrement forcé. Le même raisonnement doit être fait s'agissant des griefs soulevés concernant les sociétés E______ et D______.

Quant au grief concernant le montant de USD 420'000'000.- que le recourant allègue avoir payé pour sauver la société de son frère, il n'est pas possible de retenir que la preuve de cette dépense a été faite. En effet, les recourants estiment qu'une « appréciation logique de faits notoires » suffit, renvoyant à la « due diligence opinion », laquelle se fonde sur des articles de presse au sujet de diverses campagnes électorales. Les recourants retiennent également comme notoire le financement de nombreuses oeuvres caritatives, rapporté par internet et la presse locale.

Or, s'agissant des faits dits notoires, le Tribunal fédéral a déjà précisé qu'en principe, s'agissant d'informations publiées sur internet, celles qui bénéficiaient d'une empreinte officielle, pouvaient être considérées comme notoires, tels qu'une inscription au registre du commerce ou un cours de change (ATF 143 IV 380 consid.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_569/2018 du 27 mai 2019 consid. 3.2).

Ainsi, s'il fallait adopter la définition des recourants, s'agissant des faits notoires, ceux-ci ne pourraient pas remettre en doute, comme ils le font, les publications du magazine Forbes qui mentionnent la fortune du recourant comme étant la 40ème fortune d'Indonésie et ayant de surcroît augmenté entre 2010 et 2019, en contradiction totale avec leurs allégations, ou encore le fait que les terrains et les concessions dont ils disposent en Indonésie ne seraient pas valorisés en lien avec le déplacement de la capitale, comme la presse s'en est fait l'écho.

Concernant leur situation d'endettement telle qu'elle ressort de l'extrait du registre des poursuites de l'OP du 5 février 2019, il appert qu'aucun acte de défaut de biens ni aucune faillite n'a été enregistrée.

En comparant cet extrait avec celui du 7 février 2018, deux créances pour un montant total d'environ CHF 10'000.- ont été payées (H______ SA et I______ SA) et deux autres poursuites, qui apparaissaient dans l'extrait de 2018, ont été retirées pour un montant d'environ CHF 86'000.- (J______ et garage K______ SA).

Au vu de ce qui précède, il n'est dès lors pas possible de retenir que la preuve d'une situation d'insolvabilité durable, telle que requise par l'art. 13 al. 1 1ère phr. LIFD a été fournie en l'espèce.

En conséquence, le recours sera rejeté.

6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge solidaire de Madame et Monsieur A______ (art. 87 al. 1 LPA), et il ne sera alloué aucune indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 juillet 2019 par Madame et Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 juin 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 3'000.- à la charge solidaire de Madame et Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Michel Cabaj et Thierry Ador, avocats des recourants, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :