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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1388/2020

ATA/584/2020 du 12.06.2020 sur JTAPI/410/2020 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1388/2020-MC ATA/584/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 juin 2020

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Alexandre Böhler, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 mai 2020 (JTAPI/410/2020)

 


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1992, d'origine marocaine, est arrivé en Suisse en 2010.

2) Il a été condamné à plusieurs reprises entre janvier 2011 et décembre 2015, pour dommages à la propriété, violation de domicile, vols et séjour illégal.

Le 7 novembre 2013, M. A______ a été condamné par la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : CPAR), à une peine privative de liberté de sept ans pour, principalement, brigandage en bande et incendie intentionnel.

3) Il est incarcéré depuis le 2 février 2012.

4) Le 23 janvier 2012, M. A______ s'est vu notifier une décision d'interdiction d'entrée en Suisse, valable jusqu'au 15 juin 2016, que le SEM avait prise à son encontre le 16 juin 2011.

5) Le 18 mai 2017, M. A______ a été condamné par la CPAR, à une peine privative de liberté de vingt jours pour rixe.

6) Par jugement du 15 juin 2017, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a ordonné sa libération conditionnelle « avec effet au jour de son renvoi effectif de Suisse organisé par les autorités compétentes », indiquant que le solde de la peine non exécuté serait égal à la durée entre la date de son renvoi effectif et le 27 janvier 2020 et qu'il lui était fait obligation, au titre de règle de conduite, de collaborer aux formalités de son départ, de quitter le territoire suisse et de ne plus y revenir.

Son comportement en prison s'opposait clairement à sa libération conditionnelle, l'intéressé ayant fait l'objet de trente-quatre sanctions. S'agissant du pronostic, il se présentait sous un jour fort défavorable, au vu de ses mauvais antécédents, qui étaient allés crescendo, du vol d'importance mineure au vol, puis au brigandage, et des chances qui lui avaient déjà été données par l'octroi de plusieurs sursis, montrant ainsi un ancrage certain dans la délinquance. Néanmoins, ce pronostic pouvait être tempéré s'il quittait effectivement la Suisse dès sa sortie de prison pour le Maroc, étant relevé qu'il avait donné son accord à un renvoi et avait communiqué sa « véritable identité ». Le pronostic n'était ainsi, à cette condition stricte d'un retour au Maroc, plus clairement défavorable, s'agissant du risque de récidive, étant souligné qu'il avait fait valoir une volonté de se réinsérer dans son pays d'origine et qu'il bénéficierait du soutien de sa famille, avec laquelle il avait des contacts téléphoniques réguliers. Par ailleurs, le solde de la peine non exécuté, et donc susceptible de devoir être subi en cas de récidive, était important, puisque de plus de deux ans. Cela constituait un élément supplémentaire permettant de retenir qu'il se détournerait de toute nouvelle infraction.

Lors de l'audience devant le TAPEM, l'intéressé avait déclaré que sa véritable identité était B______, né le ______ 1992, A______ étant le nom de sa mère. Celle-ci pouvait envoyer son certificat de naissance.

7) Le 29 novembre 2017, une procédure tendant à son identification a été entamée à la demande des autorités zurichoises.

Dans ce cadre, un « rapport Lingua » a été effectué le 8 avril 2020.

8) Par jugement du 21 avril 2020, le Tribunal de police a condamné M. A______ notamment à une courte peine privative de liberté de trois mois, sous déduction de quatre-vingt-deux jours de détention avant jugement, pour lésions corporelles simples, voies de fait et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et, simultanément, a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans, (art. 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), tout en ordonnant, par prononce séparé, son maintien en détention pour des motifs de sûreté.

La procédure est toujours en cours auprès de la CPAR.

9) Le 14 mai 2020, le commissaire de police a fait savoir au SEM que M. A______ serait placé en détention administrative à sa sortie de prison, le 16 mai 2020, lui demandant, dans la mesure du possible, de relancer la demande d'identification le concernant.

10) Le 15 mai 2020, le SEM a indiqué qu'il était dans l'impossibilité de formuler une nouvelle demande d'identification de M. A______ sans informations complémentaires. Les autorités marocaines lui avaient fait savoir, le 16 décembre 2019, qu'ils n'avaient pas pu l'identifier sur la base de ses empreintes, seule base dont il disposait pour l'instant en vue d'une identification. Si de nouveaux éléments ouvrant de nouvelles pistes pour une possible identification devaient être trouvés, le SEM aborderait à nouveau le cas avec l'ambassade du Maroc. Par ailleurs, les renvois vers le Maroc étaient impossibles jusqu'au 31 mai 2020 compte tenu de la pandémie, les vols ayant été suspendus et les mesures de précaution étant susceptibles d'être prolongées encore.

11) À la sortie de prison de M. A______, le 16 mai 2020, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a pris à son égard une « décision de non report d'expulsion judiciaire », déclarée exécutoire nonobstant recours, par laquelle il chargeait la police de procéder à son expulsion « dès que cela sera possible ».

12) Le même jour, à 14h35, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six mois en application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), en lien avec
l'art. 75 al. 1 let. g et h LEI, indiquant que « les démarches en vue de l'identification de l'intéressé sont toujours en cours ».

Au commissaire de police, M. A______ avait déclaré qu'il était en bonne santé, ne suivait aucun traitement médical et n'était pas d'accord de retourner au Maroc, car il était « en fait franco-marocain ».

13) Lors de l'audience devant le Tribunal administratif de première instance 
(ci-après : TAPI) le 19 mai 2020, M. A______ a déclaré qu'il était toujours opposé à un retour au Maroc. Il n'avait jamais été en possession de papiers d'identité. Il était né au Maroc, mais avait grandi en France, à Evry. S'il avait indiqué être franco-marocain, c'était parce qu'il avait passé toute son enfance en France. Il avait fait de la prison en France, alors qu'il était mineur. Il était arrivé en Suisse en 2010.

Il n'avait plus aucune famille. En France, il avait vécu dans un foyer. Il souhaitait pouvoir rester en Suisse et qu'on lui donne une seconde chance. À défaut, il irait en France. Il prenait l'engagement de quitter la Suisse dès que les frontières seraient ouvertes. La police ne lui avait pas posé des questions particulières s'agissant de son identité. Il était disposé à répondre aux questions qui pourraient lui être posées à ce sujet, même s'il ne voyait pas très bien quels éléments il pourrait apporter. Il était fatigué de la prison. Il était incarcéré depuis 2011.

14) Par jugement du 20 mai 2020, le TAPI a partiellement admis le recours et a réduit la durée de la détention à deux mois, soit jusqu'au 15 juillet 2020 inclus.

M. A______ avait toujours indiqué être originaire du Maroc. Il était toutefois dépourvu de tout document d'identité et le processus tendant à son identification, initié en 2011, n'avait pas abouti à ce jour. Il n'était pas légitimé, à se rendre valablement ailleurs que dans son pays d'origine, notamment en France. Il ne saurait donc choisir lui-même son lieu de destination. La préparation de l'exécution de son refoulement de Suisse à destination du Maroc, qui, à ce stade, apparaissait être le seul État dans lequel il pourrait potentiellement se rendre légalement, ne prêtait donc en soi pas le flanc à la critique.

Même si l'exécution du refoulement de M. A______ se heurtait à deux obstacles importants, on ne pouvait raisonnablement admettre, à ce stade déjà, qu'elle serait impossible, à tout le moins dans un délai pouvant encore être qualifié de raisonnable. Si, en raison de la situation sanitaire actuelle, il n'existait en l'état aucune possibilité de voyage à destination du Maroc, il n'était pas exclu que le gouvernement marocain ouvre à nouveau ses frontières et accepte, dans les semaines qui venaient, que des avions et/ou des bateaux déchargent des passagers sur son territoire, à tout le moins ses propres ressortissants, étant rappelé que l'impossibilité prévalant à cet égard s'étendait pour l'heure jusqu'au 31 mai 2020. En outre, la possibilité que M. A______ puisse se voir délivrer un document de voyage n'était pas inexistante, puisque le processus tendant à son identification pourrait être relancé s'il collaborait.

Certes ce processus prendrait sans doute du temps. Néanmoins, il importait de s'assurer que les démarches des autorités suisses soient régulières. Dans ces circonstances, et compte tenu de la situation particulière du cas d'espèce, une limitation de la détention à une durée de deux mois apparaissait proportionnée. Pendant cette période, il devrait être déterminé si M. A______ disposait d'informations susceptibles de conduire à son identification et à la délivrance d'un document de voyage.

15) Par acte du 2 juin 2020, M. A______ a interjeté recours contre le jugement précité. Il a conclu à son annulation et à sa mise en liberté immédiate. Le jugement violait le principe de la proportionnalité. Il était en mesure de demander la nationalité française, pays dans lequel il avait grandi. Par ailleurs, lors de l'audience du 19 mai 2020, il avait immédiatement manifesté son désir de retourner par ses propres moyens en France. Il avait coopéré avec les autorités tout au long de la procédure. Sa mise en détention était donc une mesure trop incisive ne lui laissant pas la possibilité de regagner la France, pays dont il disait pouvoir devenir ressortissant.

Par ailleurs, son renvoi n'était actuellement pas possible. Les vols à destination du Maroc étaient suspendus. La situation sanitaire du pays était incertaine. Il était improbable qu'un vol permette son renvoi dans les prochains mois. Enfin, bien qu'il ait fait preuve de bonne volonté lors de la procédure visant à son identification, le SEM était toujours dans l'impossibilité de formuler une nouvelle demande d'identification. Le commissaire de police n'avait rien entrepris, en particulier en l'interrogeant pour l'identifier. La coopération avec les autorités marocaines en vue de l'identification de l'intéressé était tout autant incertaine.

Le recourant devait se voir donner l'opportunité de quitter la Suisse par ses propres moyens voire se voir impartir un délai pour quitter le territoire avant que sa détention ne soit ordonnée.

16) Le commissaire a conclu à la confirmation du jugement.

Il a produit copie de deux courriels adressés par le SEM à l'OCPM le 5 juin 2020. Il en ressortait que les démarches en vue de faire identifier M. A______ par les autorités marocaines pourraient parfaitement être reprises si l'intéressé fournissait de nouvelles pièces permettant d'établir son identité ou ses liens familiaux, notamment en produisant copie de tous documents de voyage ou d'identité délivrés à sa personne ou aux membres de sa famille ou encore d'actes de décès ou de naissance de ceux-ci. Le SEM pourrait ainsi envoyer une demande d'identification aux autorités compétentes dans les jours qui suivaient, étant précisé que des démarches avaient aussi été entreprises avec les autorités algériennes compte tenu de l'identité dévoilée lors de l'audience devant le TAPEM. Les renvois à destination du Maroc devaient pouvoir reprendre dès le mois de juillet 2020. La suspension des vols à destination du Maroc n'était ainsi que provisoire et devait être levée à proche échéance.

17) Dans le cadre de sa réplique, le recourant a persisté dans ses conclusions. Un prolongement de sa détention pour une durée de deux mois basé sur l'espoir d'une potentielle et hypothétique reprise des vols entre la Suisse et le Maroc revenait à mettre M. A______ en détention pour une durée indéterminée. Par ailleurs, rien n'avait été effectué comme démarche depuis l'audience du 19 mai 2020 en vue de son identification alors même qu'il avait exprimé son souhait de collaborer à celle-ci à plusieurs reprises. Référence était faite à son courrier au SEM du 19 mars 2018 ainsi qu'à ses déclarations du 19 mai 2020. Enfin, toutes communications avec les autorités marocaines, complexes en temps normal, étaient actuellement impossibles. Quant à une possible collaboration avec les autorités algériennes, le processus en était au début et rien ne garantissait que son identification soit possible à terme.

Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

18) Il ressort du site Internet officiel du département fédéral des affaires étrangères de la Confédération, état au 11 juin 2020, que le Gouvernement marocain avait décidé, le 9 juin 2020, de prolonger l'état d'urgence sanitaire et le confinement jusqu'au 11 juillet 2020. En parallèle, la phase 1 du dé-confinement avait débuté dans certaines zones du pays. L'octroi de l'autorisation de départ des bateaux et des avions de rapatriement était de la compétence exclusive des autorités marocaines. En dehors de ces cas, les frontières étaient fermées. Depuis mi-mars 2020, seize vols organisés par l'Ambassade de Suisse avaient décollé du Maroc permettant à des compatriotes suisses de rentrer en Suisse (site consulté le 11 juin 2020 : https://www.eda.admin.ch/eda/fr/dfae/representations-et-conseils-aux-voyageurs/maroc/maroc-representation-en-ch.html).

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile - c'est-à-dire dans le délai de dix jours - devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr -F 2 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 1ère phr. LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 3 juin 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 § 1 let. f CEDH et de
l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF
140 II 1 consid. 5.1).

4) a. En vertu de l'art. 76 al. 1 let. b LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si elle a été condamnée pour crime.

Il n'est pas nécessaire que cette décision soit entrée en force
(ATF 140 II 409 consid. 2.3.4 ; 140 II 74 consid. 2.1).

b. En l'espèce, le recourant s'est vu notifier un jugement du Tribunal de police prononçant, notamment, son expulsion pour cinq ans du territoire suisse en application de l'art. 66a CP. Il a par ailleurs été condamné pour un crime, au sens de l'art. 10 al. 2 CP, soit, notamment, pour brigandage en bande et incendie intentionnel, par arrêt de la CPAR du 7 novembre 2013.

Au vu de ces éléments, les conditions de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 cum 75 al. 1 let. h LEI pour ordonner la mise en détention administrative du recourant sont remplies sans qu'il ne soit nécessaire d'examiner la réalisation des conditions de l'art. 75 al. 1 let. g LEI.

5) a. La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

Conformément à l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder.

Aux termes de l'art. 79 LEI, la détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion visées aux art. 75 à 77 LEI ainsi que la détention pour insoumission visée à l'art. 78 LEI ne peuvent excéder six mois au total (al. 1) ; la durée maximale de la détention peut, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus et, pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, de six mois au plus, dans les cas suivants : la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (let. a) ; l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (let. b ; al. 2).

b. En l'espèce, les autorités compétentes ont entrepris avec célérité les démarches nécessaires. Elles ont obtenu le résultat de l'analyse linguistique le 7 avril 2020, soit plus d'un mois avant la libération de l'intéressé. Seule la participation du recourant, par la production de documents, permettrait de poursuivre le processus d'identification. Celui-ci avait affirmé souhaiter y contribuer lors de sa libération conditionnelle et être en mesure de produire, par le biais de sa mère, les documents idoines. Il est en conséquence aujourd'hui malvenu de se plaindre de l'absence de démarches de l'administration à son égard suite à l'audience du 19 mai 2020.

Aucune autre mesure, moins incisive que la mise en détention administrative, n'est apte à garantir la présence du recourant lors de l'exécution du renvoi, celui-ci ayant clairement affirmé sa volonté de ne pas être renvoyé dans son pays d'origine. La détention est en conséquence apte à atteindre le but voulu par le législateur, s'avère nécessaire compte tenu de l'attitude adoptée par le recourant et proportionnée au sens étroit, dès lors que conformément à la jurisprudence, si l'intérêt du recourant est grand à ne pas être renvoyé, l'intérêt public au respect des décisions de justice doit primer, s'agissant de surcroît d'une personne ayant fait l'objet de multiples condamnations pénales et de sanctions administratives pendant ses quelque huit années de détention. La détention est en conséquence proportionnée.

Par ailleurs, le recourant se prévaut de la possibilité d'obtenir la nationalité française. En l'absence de celle-ci ou de la preuve d'un titre de séjour valable en France, le recourant n'est pas habilité à s'y rendre. En conséquence, son argumentation tombe à faux.

6) a. Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative, de maintien ou de levée de celle-ci, tient compte de la situation de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention.
Celle-là doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

Selon l'art. 83 LEI, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (al. 2). L'exécution n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3). L'exécution de la décision peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

b. L'impossibilité de l'exécution d'un renvoi présuppose, en tout état de cause, que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (ATA/1176/2019 du 24 juillet 2019, ainsi que la jurisprudence citée).

En l'espèce, si pour quelques trois semaines encore le renvoi vers le Maroc ne semble pas possible, la situation est évolutive, les renvois devant pouvoir reprendre en juillet 2020 selon les informations actuelles du SEM. Il n'est en conséquence pas exclu que le renvoi puisse s'effectuer dans le délai des deux mois fixés par le TAPI. Par ailleurs, la durée de la détention, ramenée par le TAPI de six à deux mois, permettra de soumettre à un contrôle judiciaire la proportionnalité de la détention d'ici le 15 juillet 2020 si le renvoi ne devait pas pouvoir s'être effectué entretemps, les quelques semaines à venir devant permettre l'identification de l'intéressé et l'obtention d'un document de voyage.

Au vu de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, aucune autre mesure moins incisive que la détention ne peut être envisagée et l'exécution du renvoi est possible.

7) Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 et
art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA- E 5 10.03). Vu l'issue de celui-ci, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 juin 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 mai 2020 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Alexandre Böhler, avocat du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC et Curabilis, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. Cardinaux

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :