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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/451/2019

ATA/539/2020 du 29.05.2020 sur JTAPI/894/2019 ( PE ) , ADMIS

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS;RESSORTISSANT ÉTRANGER;SÉJOUR ILLÉGAL;MESURE D'ÉLOIGNEMENT(DROIT DES ÉTRANGERS);RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);PAYS D'ORIGINE;RECONSIDÉRATION;FORMATION(EN GÉNÉRAL);FAMILLE;ADOLESCENT;INTÉRÊT DE L'ENFANT;CAS DE RIGUEUR
Normes : Cst.29.al2; LPA.41; LPA.61; LPA.48.al1; LEI.30.al1.letb; OASA.31.al1.leta; RCO.20.al1; CEDH.8
Résumé : En raison de la situation scolaire de l'aînée, âgée de 13 ans, qui obtient d'excellentes notes, et du fait qu'elle est en période d'adolescence, période importante pour le développement et l'intégration d'un individu, la situation des recourants doit être considérée comme constitutive de raisons personnelles majeures. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/451/2019-PE ATA/539/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 mai 2020

1ère section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______, agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs, B______, C______, D______ et E______
représentés par Me Yves Rausis, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 octobre 2019 (JTAPI/1029/2018)


EN FAIT

1) Madame et Monsieur A______ (ci-après : les époux A______), nés respectivement le ______1990 et le ______ 1986, sont mariés depuis le ______2008 et sont les parents de B______ – née le ______ 2006 –, C______ – née le ______2010 –, D______, – née le ______2012 – et E______, né le ______ 2016. Toute la famille est ressortissante de la République du Kosovo.

M. A______ est en Suisse depuis le mois d'août 2007 et son épouse et sa fille B______ l'y ont rejoint au mois d'octobre 2008, sans être au bénéfice d'un visa. C______, D______ et E______ sont nés à Genève.

2) Le 30 août 2013, M. A______ a déposé auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande d’autorisation de séjour pour lui-même et sa famille.

3) a. Par décision du 3 juillet 2014, l'OCPM a refusé de soumettre le dossier de M. A______ et de sa famille avec préavis favorable à l'autorité fédérale en vue de l'obtention d'une autorisation de séjour pour cas d'extrême gravité et a prononcé leur renvoi de Suisse pour le 24 août 2014.

La durée du séjour du requérant et de son épouse devait être relativisée par rapport aux nombreuses années passées dans leur pays d'origine. M. A______ était arrivé en Suisse en août 2007 à l'âge de 21 ans, tandis que Mme A______ l'avait rejoint en octobre 2008 à l'âge de 18 ans. Ils avaient ainsi passé toute leur jeunesse à l'étranger, années apparaissant comme essentielles pour la formation de leur personnalité. Par ailleurs, leur séjour avait été entrecoupé de plusieurs voyages au Kosovo.

Les époux A______ n'avaient pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu'ils ne pourraient plus envisager un retour au Kosovo, pas plus qu'ils n'avaient acquis des connaissances professionnelles telles qu'ils ne pourraient plus les mettre en pratique dans leur pays d'origine.

Leur intégration ne revêtait aucun caractère exceptionnel. Certes, les époux avaient appris la langue française, assuré leur indépendance financière et su établir de bons contacts avec leur entourage. Toutefois, de tels liens ne pouvaient justifier une suite favorable à leur requête.

Leurs trois filles ne résidaient en Suisse que depuis peu de temps. Leur intégration ne se révélait pas à ce point poussée qu'elles ne pourraient plus se réadapter à leur patrie et à un régime scolaire différent. Leur jeune âge et la capacité d'intégration en découlant, ainsi que la connaissance de la langue, parlée à la maison avec leur mère, représentaient autant d'éléments qui leur permettraient de s'adapter à ce changement avec l'aide de leurs proches.

Enfin, il ne ressortait pas du dossier que l'exécution de leur renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

b. Par jugement du 5 mars 2015 (JTAPI/288/2015 ; cause A/2244/2014), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours déposé par les époux A______ à l'encontre de cette décision.

c. Le recours interjeté contre ce jugement a été rejeté par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 26 janvier 2016 (ATA/80/2016).

d. Le 1er mars 2016, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours déposé contre l'arrêt de la chambre administrative (arrêt du Tribunal fédéral 2D_9/2016).

4) Les 9 et 10 novembre 2015, les époux A______ ont déposé auprès de l'OCPM une demande d'autorisation d'établissement en faveur de leurs enfants B______, C______ et D______.

5) a. Par décision du 23 novembre 2015, l'OCPM a refusé d'octroyer aux enfants des époux A______ une autorisation d'établissement.

b. Par jugement du 22 juin 2016 (JTAPI/655/2016 ; cause A/4494/2015), le TAPI a confirmé ce refus. Aucun recours n'a été interjeté à l'encontre de ce jugement.

6) Le 29 juin 2016, l'employeur de M. A______ et lui-même ont déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour avec activité salariée en sa faveur.

7) a. Par décision du 20 juillet 2016, l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a rejeté la demande d'autorisation de séjour à l'année déposée par l'employeur de M. A______ en sa faveur. Son admission en vue de l'exercice d'une activité lucrative ne servait pas les intérêts de la Suisse. De plus, l'ordre de priorité n'avait pas été respecté. L'employeur n'avait pas démontré qu'aucun travailleur en Suisse ou dans l'UE/AELE n'avait pu être trouvé. Enfin, ledit employeur n'était pas en règle avec l'administration fiscale.

b. Par jugement du 13 avril 2017 (JTAPI/390/2017 ; cause A/3036/2016), le TAPI a confirmé ce refus de l'OCIRT.

c. Le 24 juillet 2017, la chambre administrative, à la suite du retrait du recours contre ce jugement, a rayé la cause du rôle (ATA/1118/2017).

8) Le 26 juillet 2017, les époux A______ ont déposé auprès de l'OCPM une demande reconsidération de la décision du 3 juillet 2014. Ils ont conclu que leur dossier soit réexaminé à la lumière de leur situation familiale et professionnelle, permettant d'obtenir une autorisation de séjour et de travail à titre humanitaire.

9) Le 5 décembre 2018, l'OCPM a informé les époux A______ de son intention de ne pas entrer en matière sur leur demande de reconsidération et de confirmer sa décision négative du 3 juillet 2014. Aucun fait nouveau important n'avait été présenté et la situation familiale ne s'était pas modifiée de manière notable depuis la décision du 3 juillet 2014. En outre, les recourants avaient tenté de tromper l'OCPM en fournissant de fausses attestations de non-poursuite.

10) Le 7 décembre 2018, les époux A______ ont présenté à l'OCPM une demande de permis de séjour pour cas de rigueur dans le cadre de l'opération Papyrus. Des attestations erronées leur avaient été remises par l'office des poursuites (ci-après : OP).

11) Par décision du 19 décembre 2018, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération des époux A______ du 26 juillet 2017 et a prononcé leur renvoi, leur impartissant un délai au 18 février 2019 pour quitter la Suisse.

La décision de refus et de renvoi du 3 juillet 2014 était définitive et exécutoire. Les recours interjetés auprès du TAPI et de la chambre administrative ont été rejeté les 5 mars 2015 et 26 janvier 2016. Le recours déposé auprès du Tribunal fédéral a été déclaré irrecevable le 1er mars 2016. Ils avaient ensuite enchaîné les demandes – d'octroi de permis d'établissement pour les enfants et d'autorisation de séjour avec activité lucrative pour M. A______ – requêtes qui n'avaient pas abouti à l'obtention d'un droit de séjour en Suisse.

Ils n'avaient apporté aucun fait nouveau et important à l'appui de leur demande de reconsidération et la situation de la famille ne s'était pas modifiée de manière notable depuis la décision prise en juillet 2014 et son entrée en force en mars 2016. Les éléments allégués avaient déjà été pris en compte dans la décision du 3 juillet 2014 ainsi que dans le jugement du TAPI et l'arrêt de la chambre administrative.

Les seuls éléments nouveaux étaient la naissance d'E______, né en août 2016, lequel souffrait d'une malformation de la verge depuis sa naissance qui avait nécessité une intervention en avril (recte : septembre) 2017, ainsi que l'écoulement du temps depuis la décision de refus et la mise en œuvre de l'opération « Papyrus » à Genève. Ces éléments ne sauraient être considérés comme importants au sens de la loi. En effet, aucun élément ne laissait penser que le suivi nécessaire à E______ ne pourrait se faire au Kosovo ou lors de visites ponctuelles en Suisse. Aussi, l'écoulement du temps depuis l'entrée en force de la décision de refus était uniquement dû au fait que les intéressés avaient enchaîné les demandes d'autorisation de séjour afin de ne pas quitter la Suisse. Enfin et par rapport à leur courrier du 7 décembre 2018, ils ne remplissaient manifestement pas les conditions d'octroi d'une autorisation de séjour dans le cadre de l'opération « Papyrus », faisant l'objet de nombreuses procédures auprès de l'OP. Au surplus, ils avaient tenté de tromper l'OCPM en fournissant de fausses attestations de non-poursuite. L'OP avait dénoncé ces faits au Ministère public et une procédure pénale était en cours. Leur comportement ne pouvait donc pas être qualifié d'irréprochable.

12) Par acte du 1er février 2019, les époux A______ ont interjeté recours contre cette décision auprès du TAPI. Ils ont conclu à l'annulation de la décision entreprise, à ce que l'OCPM soit condamné à leur délivrer, dans les plus brefs délais, des autorisations de séjour, avec suite de frais et dépens. Préalablement, ils ont sollicité qu'il soit dit et constaté que leur recours avait effet suspensif, subsidiairement à l'octroyer.

Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/451/2019.

13) a. Par décision du 25 février 2019 (DITAI/89/2019), le TAPI a rejeté la demande d'effet suspensif et de mesures provisionnelles.

b. Par décision du 7 novembre 2019 (ATA/1642/2019), la chambre administrative a dit que le recours formé par les époux A______ contre cette décision était devenu sans objet vu notamment le jugement du 11 octobre 2019 qui avait été prononcé sur le fond.

14) Par jugement du 11 octobre 2019, le TAPI a rejeté le recours des époux A______.

Par décision du 19 décembre 2018, l'OCPM avait refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération des recourants. Partant, le contrôle juridictionnel effectué par le TAPI ne pouvait porter que sur la question de savoir si c'était à juste titre que l'autorité intimée avait estimé ne pas être en présence d'une modification notable des circonstances au sens de l'art. 48 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), étant précisé que cet article, qui renvoyait à l'art. 80 let. a et b LPA, ne s'appliquait manifestement pas. Aussi, les conclusions réformatoires prises par les époux A______ sur le fond du litige étaient irrecevables.

En l'occurrence, à l'appui de leur demande de reconsidération, les époux A______ avaient invoqué, dans leurs écritures des 26 juillet 2017 et 1er février 2019, que la situation prévalant en 2013 avait évolué sur plusieurs points : leur séjour en Suisse était plus long et leur intégration ainsi encore meilleure, M. A______ avait construit les fondements d'une carrière prometteuse et leur réintégration au Kosovo était de plus en plus impossible. Ces faits, en admettant leur véracité, n'étaient typiquement pas « nouveaux » mais résultaient exclusivement de l'écoulement du temps et donc du comportement que les intéressés avaient décidé d'adopter en ne se conformant pas à leur renvoi.

Ils ne pouvaient dès lors pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA et, partant, fonder la reconsidération de la décision du 3 juillet 2014, confirmée en dernier lieu par le Tribunal fédéral.

Par conséquent, aucune modification notable de la situation, justifiant qu'il soit entré en matière sur la demande de reconsidération de la décision prononcée le 3 juillet 2014, n'était à relever. C'était ainsi à bon droit que l'OCPM avait refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération formée par les époux A______.

15) Par acte du 13 novembre 2019, les époux A______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI du 11 octobre 2019, concluant, préalablement, à ce que des mesures provisionnelles leur permettant de rester en Suisse jusqu'à droit connu soient prononcées, à leur audition voire à celle d'B______ et d'C______, principalement, à l'annulation du jugement précité et de la décision de l'OCPM du 19 décembre 2018. Cela fait, l'OPCM devait être invité à entrer en matière sur la demande de reconsidération et réexaminer sa décision de non entrée en matière.

De nombreux éléments relatifs à la situation de la famille A______ étaient constitutifs d'une modification notable des circonstances, depuis la décision prononcée par l'OCPM le 3 juillet 2014, à savoir l'opération « Papyrus », la naissance d'E______ en 2016, le statut actuel des trois filles A______ et le récent accident de Mme A______.

Lorsque les époux A______ avaient, le 30 août 2013, déposé leur demande d'autorisation de séjour, l'opération « Papyrus », précisant la portée de certains critères légaux, n'avait pas encore vu le jour. Il s'agissait d'un élément nouveau. Leur situation devait donc être examinée et traitée dans le cadre de cette opération au vu du principe de l'égalité de traitement. Ils remplissaient au surplus l'ensemble des critères « Papyrus », étant relevé qu'ils s'employaient, avec rigueur, à assainir leur situation financière et à régler, en un versement, l'ensemble des poursuites qu'ils avaient à leur encontre. M. A______, en particulier, avait démontré une vive volonté de prendre part à la vie économique et déployait tous ses efforts afin que sa société prospère. Il exerçait son activité en tant que menuisier indépendant.

B______ était arrivée en Suisse à l'âge de 2 ans et était désormais âgée de 13 ans. Les autres enfants étaient nés à Genève. Un départ de Suisse constituerait pour eux un déracinement. Leurs attaches sociales, personnelles et familiales étaient suisses. Ils y avaient vécu une majeure partie de leur vie et y avaient construit leur identité. Leur intérêt à demeurer en Suisse primait incontestablement l'intérêt public à les voir quitter la Suisse.

16) Le 19 novembre 2019, les époux A______ ont remis un certificat médical émis par la Doctoresse F______ du 14 novembre 2019 concernant Mme A______. Selon ce document, Mme A______ présentait des lésions importantes de l'épaule gauche à la suite d'une chute accidentelle sur son lieu de travail le 28 août 2019. Elle présentait une impotence fonctionnelle sévère et était en cours de bilan pour une vraisemblable intervention chirurgicale.

17) Le 20 novembre 2019, le TAPI a produit son dossier sans formuler d'observations.

18) Le 22 novembre 2019, l'OCPM a conclu au rejet tant de la demande de mesures provisionnelles que du recours.

Les époux A______ réitéraient les demandes et constatations juridiques nonobstant la décision de refus d'autorisation de séjour et de renvoi du 3 juillet 2014, entrée en force. Leurs arguments reposaient essentiellement sur l'écoulement du temps, lequel s'était étendu uniquement par le comportement des intéressés qui avaient multiplié les demandes et recours relatifs aux décisions de refus.

Il n'y avait ainsi pas lieu de reconnaître une modification notable des circonstances puisque les éléments avancés par les époux A______ étaient essentiellement issus d'une procédure dilatoire, respectivement de la prolongation artificielle de la durée de leur séjour en Suisse depuis l'entrée en force de la décision de refus et de renvoi du 3 juillet 2014.

19) Le 13 décembre 2019, les époux A______ ont répliqué, persistant dans leurs conclusions.

Les pièces du dossier démontraient que la scolarité des enfants était exemplaire et qu'il convenait de donner la priorité à la poursuite de leur formation en Suisse.

B______ était scolarisée en 9ème année au cycle d'orientation. Elle avait obtenu de brillants résultats malgré le contexte difficile relatif à leur situation administrative. Pour le premier semestre, sa moyenne générale était de 5,1. Son maître de classe ainsi que le conseiller social du cycle d'orientation étaient élogieux sur sa progression.

20) Par décision du 19 décembre 2019 (ATA/451/2019), la présidence de la chambre administrative a admis la demande de mesures provisionnelles, suspendu l'exécution du renvoi des époux A______ et de leurs enfants jusqu'à droit jugé au fond et réservé le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond.

21) Le 24 février 2020, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle. L'avocat des époux A______ ne s'est pas présenté à l'audience. Après un contact téléphonique avec ce dernier, le juge a informé les époux A______ qu'il allait les convoquer à nouveau pour qu'ils puissent être assistés de leur conseil. Seule B______ a été entendue.

B______ a expliqué qu'elle avait de bons résultats au cycle d'orientation et qu'elle se sentait bien intégrée en Suisse. Elle parlait français et kosovar.

Elle était retournée au Kosovo en vacances, mais pas tous les étés. Là-bas, les écoles n'avaient pas les mêmes moyens qu'en Suisse. Elle avait des contacts avec quelques cousins au Kosovo mais voyait plus ceux à Genève.

Son rêve était de devenir médecin, ce qui ne serait certainement pas possible en cas de retour au Kosovo. Un retour serait « bizarre » car elle avait grandi à Genève se sentant genevoise.

Lors des vacances au Kosovo, sa famille logeait chez ses grands-parents. Ces derniers avaient une maison dans un petit village avec un salon et deux chambres. Sept personnes y habitaient à l'année.

Son dernier bulletin indiquait qu'elle était promue dans le regroupement R3, soit celui qui lui permettait d'aller au collège.

22) Le 28 février 2020, le conseil des époux A______ a demandé à ce que ces derniers soient convoqués à nouveau.

23) Le 16 mars 2020, le juge délégué a fixé un délai au 20 avril 2020 aux époux A______ pour une ultime écriture après enquêtes, après quoi la cause serait gardée à juger.

Il avait renoncé à les entendre compte tenu notamment du fait que le dossier était en état d'être jugé.

24) Le 20 avril 2020, les époux A______ ont repris et développé leur précédente argumentation, persistant dans leurs conclusions.

B______, désormais adolescente, devait être considérée comme étant un enfant né en Suisse. Parfaitement intégrée, l'OCPM ne pouvait exiger son départ de Suisse, compte tenu de la période cruciale dans laquelle elle se trouvait. Un renvoi abrupt aurait pour conséquence de la plonger dans un système de formation étranger et constituerait un réel déracinement social et personnel. Grâce à son travail scolaire, elle avait pu intégrer le niveau le plus élevé du cycle d'orientation.

Les implications identitaires et psychologiques découlant de l'écoulement du temps commandaient d'entrer en matière sur la demande de reconsidération.

D______ et C______ étaient scolarisées en primaire, obtenant des résultats satisfaisants. Un départ au Kosovo impliquerait une réadaptation à un système scolaire inconnu. Ces dernières ne maîtrisaient au surplus pas la langue albanaise.

Quant à E______, il souffrait d'une malformation congénitale (hypospadias) et devait subir des contrôles spécialisés réguliers à tout le moins jusqu'à la fin de sa puberté.

Avant de créer sa société, M. A______ avait travaillé durant de nombreuses années pour différents employeurs leur donnant totale satisfaction. Depuis quelques années, il était indépendant. Il avait construit les fondements d'une carrière prometteuse en Suisse et bénéficiait d'une intégration professionnelle remarquable. Un départ mettrait à néant l'aboutissement de ses efforts. En termes professionnels, sa situation avait fait l'objet d'une modification notable des circonstances depuis la décision de l'OCPM du 3 juillet 2014. Il n'avait de plus jamais émargé à l'aide sociale depuis son arrivée. Il avait remboursé la somme de CHF 4'700.- à l'OP.

Mme A______ avait travaillé dès mai 2019 en qualité de femme de chambre. Malheureusement, elle avait eu un accident professionnel le 28 août 2019 et avait été déclarée inapte à travailler par son médecin. Elle devrait cependant pouvoir exercer à nouveau une activité lucrative. Un employeur était prêt à l'engager. Ce nouvel emploi permettrait de régler les poursuites qu'elle avait à son encontre.

En dépit de la non-réalisation de la condition d'absence de poursuite, la famille A______ remplissait les critères fixés par l'opération « Papyrus ».

25) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) Les recourants sollicitent leur audition.

a. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3).

Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; ATA/1111/2017 du 18 juillet 2017 consid. 2a). Le droit d'être entendu n'implique pas une audition personnelle de l'intéressé, celui-ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; ATF 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l'occurrence, les recourants ont eu l'occasion, tout au long de la procédure, d'exposer leurs arguments et de produire des pièces. L'opportunité de s'exprimer leur a ainsi été donnée. En outre, la chambre de céans a procédé à l'audition d'B______.

Ainsi, compte tenu des pièces figurant au dossier et des explications données par les recourants, la chambre de céans s'estime suffisamment renseignée pour trancher le litige en toute connaissance de cause.

Il ne sera dès lors pas donné suite à cette offre de preuve.

3) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario ; ATA/338/2020 du 7 avril 2020 consid. 2).

4) Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la LEI, et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 2C_841/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3 ; 2C_737/2019 du 27 septembre 2019 consid. 4.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit.

En l'espèce, la demande d'autorisation de séjour du 30 août 2013 a été reçue par l'OCPM le 4 septembre 2013 et la demande de reconsidération réceptionnée le 27 juillet 2017, de sorte que c'est l'ancien droit, soit la LEI et l'OASA dans leur teneur avant le 1er janvier 2019, qui s'appliquent.

5) a. Selon l'art. 48 al. 1 LPA, les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsqu'un motif de révision au sens de l'art. 80 let. a et b LPA existe (let. a) ou, alternativement, lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision (let. b). À teneur de l'al. 2, les demandes n'entraînent ni interruption de délai ni effet suspensif.

b. L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA.

Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 al. 1 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 al. 1 let. b LPA : faits nouveaux « anciens » ; ATA/245/2020 du 3 mars 2020 consid. 2b et les arrêts cités).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux », c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/245/2020 précité consid. 2b ; ATA/830/2016 du 4 octobre 2016 consid. 2a).

Une activité professionnelle récente au sein d'une association ou une mauvaise situation de santé non étayée par des certificats médicaux actualisés, alors que les maux dont le recourant se prévaut impliquent une prise en charge dans la durée, ne sont pas des faits nouveaux au sens de cette disposition (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 5). Bien que l'écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socio-professionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas non plus être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/245/2020 précité consid. 2b ; ATA/1818/2019 du 17 décembre 2019 consid. 2b ; ATA/1620/2019 précité consid. 3a). Un changement de législation peut fonder le réexamen d'une décision, à condition que l'état de fait déterminant se soit essentiellement modifié après le changement législatif (ATF 136 II 177 consid. 2.2.1).

c. Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, n. 1417). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417). L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA.

d. Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1430).

e. En droit des étrangers, le résultat est identique que l'on parle de demande de réexamen ou de nouvelle demande d'autorisation : l'autorité administrative, laquelle se base sur l'état de fait actuel, qui traiterait une requête comme une nouvelle demande, n'octroiera pas une autorisation de séjour dans un cas où elle l'a refusée auparavant si la situation n'a pas changé ; et si la situation a changé, les conditions posées au réexamen seront en principe remplies (arrêt du Tribunal fédéral 2C_715/2011 du 2 mai 2012 consid. 4.2 ; ATA/1620/2019 précité consid. 3e ; ATA/1412/2017 du 17 octobre 2017 consid. 4c).

6) a. Dans leur demande de reconsidération du 26 juillet 2017, complétée le 7 décembre 2018, les recourants font valoir comme éléments justifiant, selon eux, la reconsidération de la décision du 3 juillet 2014 notamment la nouvelle pratique administrative liée à l'opération « Papyrus ».

b. Toutefois et contrairement à ce que soutiennent les recourants et selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, la mise en œuvre du programme Papyrus ne constitue pas un fait nouveau au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA (ATA/245/2020 précité consid. 3b et les arrêts cités).

Processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emporte en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

En soi, l'existence de l'opération « Papyrus », qui constitue une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité (ATA/1415/2019 du 24 septembre 2019 consid. 9b), ne saurait ainsi justifier l'entrée en matière sur la demande de reconsidération.

7) Les recourants font également valoir que leur situation personnelle aurait changé de manière notable, au point qu'il s'imposerait d'entrer en matière sur leur demande.

a. En l'occurrence, le fait que le recourant exerce en indépendant ne peut être qualifié de notable, car il ne peut être considéré que son entreprise individuelle créée en 2017, active dans la menuiserie, représenterait un intérêt économique tel pour le canton ou la Confédération qu'il justifierait le maintien en Suisse du recourant et de sa famille.

Quant à l'accident professionnel de la recourante ayant causé des lésions importantes de l'épaule gauche (fine fissuration non transfixiante sur le versant profond du tendon supra-épineux dans son tiers moyen), les recourants ont précisé que leur assurance avait estimé que l'intéressée pourrait exercer à nouveau une activité lucrative. Ce fait ne peut donc pas être qualifié de notable, étant relevé que la recourante pourrait en outre se faire suivre au Kosovo, en cas de besoin.

Par ailleurs, les recourants font toujours l'objet de poursuites et il semble qu'une procédure pénale ait été engagée à la suite de production de fausses attestations de non-poursuite.

S'agissant d'E______, né postérieurement à l'entrée en force de la décision du 3 juillet 2014, il est encore très jeune et n'a pas encore commencé l'école obligatoire. Il n'apparaît pas non plus qu'il ne pourrait pas être pris en charge médicalement au Kosovo pour les contrôles qu'il doit subir. Quant à C______ et D______, âgées de 10 et 7 ans, elles demeurent également encore jeunes.

Ces éléments vont dans le sens de la décision de l'OCPM de ne pas entrer en matière sur la demande en reconsidération.

b. Toutefois, il ressort également de la décision de l'OCPM du 19 décembre 2018 que l'intimé s'est également déterminé sur le courrier des recourants du 7 décembre 2018 visant à obtenir une autorisation de séjour pour cas de rigueur. En effet, il a estimé que leurs observations n'étaient pas de nature à faire changer sa position.

Dans ce contexte, la situation d'B______, née le 16 novembre 2006, doit être examinée avec attention.

c. En effet, la situation des enfants peut, selon les circonstances, poser des problèmes particuliers. Comme pour les adultes, il y a lieu de tenir compte des effets qu'entraînerait pour eux un retour forcé dans leur pays d'origine. À leur égard, il faut toutefois prendre en considération qu'un tel renvoi pourrait selon les circonstances équivaloir à un véritable déracinement, constitutif à son tour d'un cas personnel d'extrême gravité. Pour déterminer si tel serait ou non le cas, il faut examiner plusieurs critères. La situation des membres de la famille ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global, dès lors que le sort de la famille forme un tout ; il serait difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère (ATF 123 II 125 consid. 4a ; ATA/434/2020 du 30 avril 2020 consid. 10a ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 6d).

D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107), entrée en vigueur pour la Suisse le 26 mars 1997 (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-636/2010 précité consid. 5.4 et les références citées).

Sous l'angle du cas de rigueur, le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 CDE (arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3592/2010 du 8 octobre 2012 consid. 6.2 ; ATA/1818/2019 précité consid. 4f).

d. Dans une jurisprudence récente, qui concernait également une problématique de demande de reconsidération en matière de droit des étrangers (ATA/1818/2019 précité), la chambre de céans a considéré qu'un départ dans leur pays d'origine présenterait pour deux enfants une rigueur excessive et équivaudrait à un véritable déracinement dans un pays étranger, ce qui leur serait particulièrement dommageable. L'un des deux enfants était arrivé en Suisse à l'âge de 7 ans. Désormais âgé de 13 ans, il était un élève studieux et obtenait de bons résultats à l'école. Le dossier était renvoyé à l'OCPM pour qu'il le transmette au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) en vue d'une régularisation de la situation des enfants, les critères exigés pour l'admission de cas individuels d'extrême gravité, étant remplis.

e. En l'occurrence, B______ est arrivée en Suisse un peu avant ses 2 ans, avec sa mère qui rejoignait son mari. Aujourd'hui âgée de 13 ans, elle poursuit sa scolarité au cycle d'orientation de G______ en 9ème année. Il ne s'agit donc pas d'un enfant en bas âge, en début de scolarité, fréquentant une garderie ou l'école enfantine.

B______ est une élève studieuse et obtient d'excellentes notes. Ses résultats ont d'ailleurs motivé une réorientation dans le niveau supérieur (R3), soit le plus haut niveau de la 9ème année du cycle d'orientation (art. 20 al. 1 du règlement du cycle d’orientation du 9 juin 2010 - RCO - C 1 10.26). Son maître de classe, dans une attestation du 12 décembre 2019, a relevé sa motivation, son assiduité, son application dans l'apprentissage, ainsi que son comportement exemplaire. Âgée de 13 ans, la jeune fille a d'ores et déjà débuté son adolescence en Suisse, étant rappelé qu'il s'agit d'une période importante pour le développement et l'intégration d'un individu. B______ est ainsi totalement intégrée en Suisse, où sa personnalité s'est formée et a évolué au fil du temps depuis son jeune âge. Elle a d'ailleurs précisé en audience avoir grandi à Genève, se sentant « d'ici ». En cas de départ au Kosovo, B______ verrait donc sa formation interrompue à un stade délicat et devrait se réadapter au système scolaire d'un pays où elle n'a aucun lien et repère, et dont les conditions de vie lui sont désormais étrangères, étant au surplus rappelé qu'elle avait quitté ce pays alors même qu'elle n'avait pas encore commencé sa scolarité. À plus long terme, son renvoi serait de nature à remettre en cause ses acquis et à compromettre sérieusement toute future formation professionnelle. Ces circonstances permettent d'admettre qu'un départ au Kosovo présenterait pour B______ une rigueur excessive et équivaudrait à un véritable déracinement, ce qui lui serait particulièrement dommageable.

Ces circonstances particulières, prises dans leur ensemble, sont de nature à faire admettre que les conditions relatives à l'art. 30 al. 1 let. b LEI dans son ancienne teneur pourraient être réalisées pour B______.

Dès lors que le sort de la famille forme un tout, le cas des recourants et de leurs enfants doit être considéré comme constitutif de raisons personnelles majeures, étant précisé que même si l'intégration des parents n'est en tant que telle pas exceptionnelle, elle est cependant suffisante, dans le cadre d'une appréciation globale, pour faire prévaloir l'intérêt d'B______ à rester en Suisse avec ses parents et ses frères et sœurs (art. 3 al. 1 CDE et art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 - CEDH - RS 0.101).

8) Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours. Le jugement du TAPI du 11 octobre 2019 sera en conséquence annulé, de même que la décision de l'OCPM du 19 décembre 2018.

9) Les critères des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 aOASA impliquant une situation représentant un cas individuel d'extrême gravité pouvant être remplis, le dossier sera renvoyé à l'OCPM pour suite de la procédure (art. 99 al. 1 et 2 LEI ; art. 85 al. 1 OASA ; art. 5 let. d de l'ordonnance du département fédéral de justice et police relative aux autorisations soumises à la procédure d'approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers du 13 août 2015 - ordonnance du DFJP - RS 142.201.1).

10) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA), et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée aux recourants à la charge de l'État de Genève (OCPM), qui obtiennent gain de cause et qui y ont conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 13 novembre 2019 Madame et Monsieur A______, agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants de leurs enfants mineurs, B______, C______, D______ et E______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 octobre 2019 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 octobre 2019 ;

annule la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 19 décembre 2018 ;

renvoie le dossier à l'office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Madame et Monsieur A______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à la charge de l'État de Genève (OCPM) ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Rausis, avocat des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Meyer

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.