Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/920/2020

ATA/487/2020 du 19.05.2020 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/920/2020-FORMA ATA/487/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 mai 2020

1ère section

 

dans la cause


B______, enfant mineur, agissant par ses parents Madame A______ et
Monsieur C______
représenté par Me Tano Barth, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1. Madame A______, de nationalité suisse, et Monsieur C______, ressortissant espagnol, (ci-après : les parents), sont domiciliés à Ornex/Ain, en France. Mme A______ travaille à Genève en tant qu'enseignante au cycle/collège D______ à Versoix. M. GUERRERO travaille au sein de l'association vaudoise d'aide et de soins à domicile (AVASAD) à Lausanne en tant que responsable d'application.

Ils sont les parents d'B______, né le ______ 2016 et de G______, né le ______ 2018.

2. Par demande datée du 27 janvier 2020, mais reçue à la direction générale de l'enseignement obligatoire (ci-après : DGEO) le 30 janvier 2020, le couple a déposé une demande d'admission dans l'enseignement primaire public genevois d'élèves domiciliés en France voisine, rentrée 2020, auprès du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP ou département) en faveur de leur fils B______.

Il ressort de cette demande que ce dernier était scolarisé au sein de l'école maternelle E______ à Ferney-Voltaire pendant l'année scolaire 2019- 2020.

3. Le 7 février 2020, le département, soit pour lui la DGEO, a rejeté la demande d'admission dans l'enseignement primaire public genevois de l'enfant B______.

Il ne remplissait pas les conditions d'admission de l'art. 23 al. 1 let. b du règlement de l'enseignement primaire du 7 juillet 1993 (REP - 1 10.21), à savoir qu'il n'avait pas de fratrie déjà scolarisée au sein de l'enseignement obligatoire public genevois, condition nécessaire pour pouvoir l'admettre à Genève.

4. Par acte posté le 12 mars 2020, les parents ont recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Ils ont conclu, préalablement, à leur audition ainsi qu'à celle du directeur du collège des D______ et, principalement, à l'annulation de ladite décision et à l'admission de leur fils à l'école primaire genevoise pour l'année scolaire 2020-2021 ; subsidiairement, à l'annulation de la décision et au renvoi de la cause à l'autorité pour nouvelle décision ; « en tout état », à renoncer à percevoir un émolument et ordonner la restitution de leur avance de frais ainsi qu'à la condamnation du département au paiement d'une indemnité de procédure.

Ils invoquaient, premièrement, une violation de la liberté économique et du droit au respect de la vie privée et familiale, la décision attaquée les empêchant de prendre diverses vacances « notamment celles de Pâques et celles de ski » en même temps que leur enfant en raison des vacances programmées à des périodes différentes en Suisse et en France ; en second lieu, ils faisaient valoir une violation du droit à un enseignement de base suffisant et gratuit et, enfin, une violation du principe de la légalité et de la séparation des pouvoirs.

Sur le premier point, les parents invoquaient des difficultés pratiques et le fait que les spécificités de leurs emplois faisaient qu'il leur serait impossible de prendre des vacances en même temps que leur fils : Mme A______, enseignante au collège, souhaitait que son enfant puisse évoluer dans un système scolaire qui lui était familier et précisait avoir pris la décision de déménager en France, pour des raisons financières « en raison de la cherté notoire des loyers à Genève » ; de plus, elle devait obligatoirement prendre ses vacances durant les périodes de vacances scolaires suisses, qui n'étaient pas les mêmes que celles de vacances scolaires françaises. M. C______ ne pouvait prendre des vacances que si les délais imposés par les projets qu'il gérait le permettaient. Enfin, les grands-parents de l'enfant, vivant à F______, ne pouvaient pas s'occuper de lui pendant les vacances. Ils invoquaient également des difficultés au niveau des horaires : ceux de Mme A______ étaient irréguliers et ceux de M. C______ lui imposaient de partir très tôt le matin et de rentrer tard le soir « compte tenu du temps de trajet et des possibles incidents de la circulation ». À Genève, les enfants pouvaient être pris en charge par du personnel parascolaire.

S'agissant du deuxième point, la jurisprudence de la chambre administrative, qui retenait que les parents d'un enfant non domicilié en Suisse ne pouvaient se prévaloir du droit à un enseignement de base suffisant et gratuit, ne pouvait être suivie ; en effet, les droits fondamentaux ne seraient alors pas applicables à une personne si elle n'avait pas de domicile légal en Suisse ; or, « le droit à la formation de base s'appliqu[ait] aux enfants de voyageurs et même aux enfants séjournant illégalement sur le territoire suisse » et était donc, a fortiori, applicable à un enfant dont les parents exerçaient leur activité lucrative légalement en Suisse. Il fallait tenir compte du fait que Mme A______ travaillait à proximité de l'école primaire où serait vraisemblablement scolarisé son fils à Genève ; de plus, elle y payait ses impôts.

Concernant le troisième point, le raisonnement tenu par la chambre administrative dans sa précédente jurisprudence (notamment ATA/1166/2019 du 19 juillet 2019) était « critiquable » et ne pouvait être suivi, avec la précision que l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_820/2018 du 11 juin 2019 ne s'était pas prononcé sur cette problématique. En l'espèce, dans une problématique « particulièrement sensible » l'intervention du législateur apparaissait indispensable.

5. Le 30 mars 2020, le département a conclu au rejet du recours.

Le canton de Genève était légitimé juridiquement à limiter l'accès à l'école obligatoire à ses seuls résidents. Selon la jurisprudence de la chambre administrative, l'art. 23 REP ne limitait pas le droit d'accès à l'enseignement, mais élargissait le champ d'accès en instaurant deux exceptions positives au principe de non-scolarisation des enfants domiciliés hors du canton de Genève. La réglementation était conforme à l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681). Le Tribunal fédéral s'était aussi prononcé dans ce sens. Les circonstances personnelles ou souhaits mis en avant par les parents ne conféraient pas de droit à l'enfant d'être scolarisé dans le canton hors les exceptions prévues à l'art. 23 al. 1 let. a et b REP.

La DGEO « comprenait » le souhait des parents de passer les vacances scolaires avec leur enfant, mais les droits constitutionnels invoqués n'étaient nullement étayés et les intéressés tentaient d'introduire une nouvelle forme d'exception, hors de tout contexte réglementaire, estimant que leur situation était exceptionnelle au point de nécessiter l'octroi d'une dérogation individuelle ; or, si cette situation était à ce point compliquée, il leur appartenait d'en tirer les conséquences et de venir s'installer dans le canton de Genève. Les autres arguments avaient été rejetés par la chambre administrative dans ses précédents arrêts.

6. Le 7 avril 2019, les époux ont persisté dans leurs conclusions. Le raisonnement juridique du département était inexact et il avait donné pour toute réponse au problème factuel exposé : « acceptez de ne pas passer vos vacances avec votre enfant - ce qui viol[ait] le droit au respect de la vie privée et familiale - domiciliez-vous à Genève - ce qui viol[ait] le droit à la liberté d'établissement ».

7. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) À titre préalable, les recourants sollicitent leur audition et celle d'un témoin.

a. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour la personne concernée de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2). Ce droit n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.2). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1) ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; ATA/1576/2019 du 29 octobre 2019 consid. 4a).

b. En l'espèce, l'audition des recourants n'apparaît pas utile à la résolution du litige. En effet, ces derniers ont eu l'occasion, à travers leurs écritures devant la chambre de céans, de fournir toutes les explications sur leur situation personnelle et celle de leur fils ainsi que sur les circonstances, exceptionnelles qui, selon eux, justifieraient que leur enfant puisse être scolarisé à Genève. Les éléments figurant au dossier ainsi que les arguments développés par les parties permettent à la chambre de céans de trancher le litige en toute connaissance de cause. De plus, les recourants n'expliquent pas en quoi l'audition du directeur de l'établissement scolaire dans lequel travaille la recourante serait utile à la solution du présent cas. À cela s'ajoute que ledit litige est essentiellement de nature juridique.

Il ne sera donc pas donné suite aux demandes d'auditions.

3) Le litige porte sur le refus du DIP de scolariser l'enfant du couple dans l'enseignement primaire public genevois.

4) a. À teneur de l'art. 19 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit à un enseignement de base suffisant et gratuit est garanti. Au niveau cantonal, l'art. 24 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (A 2 00 - Cst - GE) dispose que le droit à l'éducation, à la formation et à la formation continue est garanti (al. 1). Toute personne a droit à une formation initiale publique gratuite (al. 2).

L'art 62 Cst. prévoit pour sa part que l'instruction publique est du ressort des cantons (al. 1). Les cantons pourvoient à un enseignement de base suffisant ouvert à tous les enfants. Cet enseignement est obligatoire et placé sous la direction ou la surveillance des autorités publiques. Il est gratuit dans les écoles publiques (al. 2). Les cantons pourvoient à une formation spéciale suffisante pour les enfants et adolescents handicapés, au plus tard jusqu'à leur 20ème anniversaire (al. 3). Si les efforts de coordination n'aboutissent pas à une harmonisation de l'instruction publique concernant la scolarité obligatoire, l'âge de l'entrée à l'école, la durée et les objectifs des niveaux d'enseignement et le passage de l'un à l'autre, ainsi que la reconnaissance des diplômes, la Confédération légifère dans la mesure nécessaire (al. 4). La Confédération règle le début de l'année scolaire (al. 5). Les cantons sont associés à la préparation des actes de la Confédération qui affectent leurs compétences ; leur avis revêt un poids particulier (al. 6).

b. Selon son art. 1, la loi sur l'instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10) régit l'instruction obligatoire, soit la scolarité et la formation obligatoires jusqu'à l'âge de la majorité pour l'enseignement public et privé (al. 1). Elle régit également l'intégration et l'instruction des enfants et des jeunes à besoins éducatifs particuliers ou handicapés de la naissance à l'âge de 20 ans révolus (al. 2). Elle s'applique aux degrés primaire et secondaire I (scolarité obligatoire) et aux degrés secondaire II et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles (ci-après : degré tertiaire B) dans les établissements de l'instruction publique (al. 3).

L'instruction publique comprend le degré primaire, composé du cycle élémentaire et du cycle moyen (art. 4 al. 1 let. a LIP). Selon l'art. 60 LIP, le degré primaire dure huit ans et comprend deux cycles d'une durée de quatre ans chacun, à savoir le cycle élémentaire (années 1 à 4) et le cycle moyen (années 5 à 8).

c. L'art. 37 al. 1 LIP prévoit que tous les enfants et jeunes en âge de scolarité obligatoire et habitant le canton de Genève doivent recevoir, dans les écoles publiques ou privées, ou à domicile, une instruction conforme aux prescriptions de ladite loi, au programme général établi par le département conformément à l'accord intercantonal sur l'harmonisation de la scolarité obligatoire du 14 juin 2007 (HarmoS - C 1 06) et à la convention scolaire romande du 21 juin 2007 (CSR - C 1 07).

Le département, avec le concours des services concernés, veille à l'observation de l'obligation d'instruction, telle que définie à l'art. 1 LIP (art. 38 al. 1 LIP). Les parents sont tenus, sur demande du département, de justifier que leurs enfants, jusqu'à l'âge de la majorité, reçoivent l'instruction obligatoire fixée par la loi (art. 38 al. 2 LIP).

La scolarité est obligatoire pour les enfants dès l'âge de 4 ans révolus au 31 juillet (art. 55 al. 1 LIP). Tout enfant, dès l'âge de 4 ans révolus au 31 juillet, doit être inscrit à l'école dans les trois jours qui suivent son arrivée à Genève (art. 57 al 1 LIP).

L'art. 58 LIP prévoit que, sous réserve des alinéas 2 à 5, les élèves sont scolarisés dans l'établissement correspondant au secteur de recrutement du lieu de domicile ou à défaut du lieu de résidence des parents (al. 1). Si les élèves de ce secteur de recrutement sont en nombre insuffisant ou sont trop nombreux pour l'organisation rationnelle de l'enseignement, le département peut les affecter à une autre école. Cette affectation n'est pas sujette à recours (al. 2). Après avoir entendu les parents concernés, la ou les directions des établissements concernés peuvent transférer un élève dans une autre classe ou un autre établissement, en cours d'année ou pour l'année scolaire suivante, lorsque le bon déroulement de la scolarité de l'élève et/ou le bon fonctionnement de la classe ou de l'établissement le commande (al. 3). Pour les élèves qui sont inscrits dans un dispositif spécifique, tel que les classes et institutions de l'enseignement spécialisé ou les classes Sport-Art-Études, notamment, des exceptions au lieu de scolarisation peuvent être prévues par voie réglementaire. Cette affectation n'est pas sujette à recours (al. 4). Enfin, le département peut, à titre exceptionnel, accorder des dérogations, notamment en cas de changement de domicile, de manière à permettre à l'élève de terminer l'année scolaire dans la classe où il l'a commencée (al. 5).

d. Au niveau réglementaire, l'art. 3 al. 1 REP prévoit que l'enseignement primaire comprend huit années de scolarité réparties de la manière suivante : le cycle élémentaire qui comprend la 1ère année (4 à 5 ans), la 2ème année primaire (5 à 6 ans), la 3ème année primaire (6 à 7 ans), la 4ème année primaire (7 à 8 ans) et le cycle moyen qui comprend la 5ème année primaire (8 à 9 ans), la 6ème année primaire (9 à 10 ans), la 7ème année primaire (10 à 11 ans) et enfin la 8ème année primaire (11 à 12 ans).

Tous les enfants en âge de scolarité obligatoire et habitant le canton de Genève doivent recevoir, dans les écoles publiques ou privées, ou à domicile, une instruction conforme aux prescriptions de la loi et au programme général établi par le département (art. 19 al. 1 REP).

L'art. 23 REP est applicable aux enfants domiciliés hors canton. Il prévoit que sont admis dans l'enseignement primaire public genevois :

- les élèves domiciliés en France voisine et déjà scolarisés dans l'enseignement public genevois, pour autant que l'un de leurs parents au moins soit assujetti à Genève à l'impôt sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton (al. 1 let. a) ;

- les frères et soeurs ainsi que les demi-frères et les demi-soeurs des enfants scolarisés au sein d'établissements scolaires publics genevois (al. 1 let. b).

Les enfants domiciliés hors canton peuvent être scolarisés très exceptionnellement à Genève, selon les termes fixés par la convention intercantonale du 20 mai 2005 réglant la fréquentation d'une école située dans un canton autre que celui de domicile (ROF 2005_097 ; https://www.ge.ch/legislation/accords/doc/0087.pdf ; ci-après : la convention intercantonale réglant la fréquentation) (al. 2).

La demande d'admission au sens de l'al. 1 doit être déposée auprès de la direction générale de l'enseignement obligatoire dans le délai fixé chaque année par le département et publié sur le site Internet de ce dernier (al. 3), en l'espèce, le 31 janvier 2020 (https://www.ge.ch/inscrire-mon-enfant-ecole-primaire/enfant-domicilie-hors-du-canton, consulté le 27 mars 2020).

5) a. L'art. 19 Cst. garantit le droit à un enseignement de base suffisant et gratuit, consacrant ainsi un droit social, justiciable, qui oblige la collectivité à fournir une prestation (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 2013, n. 1563 et la référence citée). L'art. 62 Cst. fonde quant à lui, outre la compétence cantonale en matière d'instruction publique, le caractère obligatoire de l'enseignement de base. Il en découle que l'un des corollaires du caractère obligatoire de l'enseignement primaire est que les enfants doivent fréquenter l'école du lieu où ils résident (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit.). Ainsi, sont titulaires du droit à un enseignement de base suffisant et gratuit tous les enfants domiciliés en Suisse, indépendamment de leur nationalité et du statut de résidence de leurs parents (Pascal MAHON, Droit constitutionnel, vol. II, 2015, p. 334 n. 200).

Quant à l'art. 24 Cst-GE, rien n'indique que sa portée, s'agissant du droit à un enseignement de base suffisant et gratuit, serait plus large que celle de l'art. 19 Cst.

b. En l'espèce, le fils du couple n'est pas domicilié en Suisse. Il ne peut en conséquence pas se prévaloir du droit à y recevoir un enseignement de base suffisant et gratuit. Seul le fait qu'il ne soit pas domicilié à Genève est pertinent pour lui dénier ce droit, étant précisé que les recourants ne contestent pas, pour le surplus, ne pas remplir les conditions de l'art. 23 al. 1 let. b REP.

Cette conclusion ne contrevient pas à l'art. 13 par. 2 let. a du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels entré en vigueur pour la Suisse le 18 septembre 1992 (RS 0.103.1), lequel prévoit que l'enseignement primaire doit être obligatoire et accessible à tous. Cette disposition, qui selon le Tribunal fédéral n'est pas directement justiciable, ne confère en effet aucun droit supplémentaire par rapport à l'art. 19 Cst. (ATF 144 I 1 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2011 précité). Pour le même motif, elle n'est pas non plus contraire à l'art. 28 par.1 let. a de la Convention relative aux droits de l'enfant entrée en vigueur pour la Suisse le 26 mars 1997 (RS 0.107), disposition qui prévoit que les États parties rendent l'enseignement obligatoire et gratuit pour tous.

6) Cela étant, il convient d'examiner si l'art. 23 REP, en particulier son al. 1 let. b, repose sur une base légale suffisante.

À teneur de l'art. 5 al. 1 Cst., le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. Le principe de la légalité se compose de deux éléments : le principe de la suprématie de la loi et le principe de l'exigence de la base légale. Le premier signifie que l'autorité doit respecter l'ensemble des normes juridiques ainsi que la hiérarchie des normes. Le second implique que l'autorité ne peut agir que si la loi le lui permet ; son action doit avoir un fondement dans une loi (ATA/383/2017 du 4 avril 2017 consid. 5a et les références citées).

Le principe de la légalité exige donc que les autorités n'agissent que dans le cadre fixé par la loi. Il implique qu'un acte étatique se fonde sur une base légale matérielle qui est suffisamment précise et qui a été adoptée par l'organe compétent (ATF 141 II 169 consid. 3.1 p. 171). L'exigence de la densité normative n'est pas absolue, car on ne saurait ordonner au législateur de renoncer totalement à recourir à des notions générales, comportant une part nécessaire d'interprétation. Cela tient à la nature générale et abstraite inhérente à toute règle de droit et à la nécessité qui en découle de laisser aux autorités d'application une certaine marge de manoeuvre lors de la concrétisation de la norme. Pour déterminer quel degré de précision on est en droit d'exiger de la loi, il faut tenir compte du cercle de ses destinataires et de la gravité des atteintes qu'elle autorise aux droits fondamentaux (ATF 140 I 381 consid. 4.4 p. 386 et les références citées ; ATA/383/2017 précité).

7) a. Au niveau fédéral, le principe de la séparation des pouvoirs, implicitement contenu dans la Cst., est un droit constitutionnel dont peut se prévaloir le citoyen (ATF 130 I 1 consid. 3.1). Le principe de la séparation des pouvoirs interdit à un organe de l'État d'empiéter sur les compétences d'un autre organe ; en particulier, il interdit au pouvoir exécutif d'édicter des règles de droit, si ce n'est dans le cadre d'une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 134 I 322 consid. 2.2 ; 119 Ia 28 consid. 3 ; 118 Ia 305 consid. 1a).

b. Dans le canton de Genève, l'art. 2 Cst-GE consacre expressément le principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif incombe au Grand Conseil (art. 80 Cst-GE). Le Conseil d'État est chargé de l'exécution des lois et adopte à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 Cst-GE). Il est habilité, en vertu de l'art. 109 al. 3 Cst-GE, à adopter des règles d'exécution. À moins d'une délégation expresse, le Conseil d'État ne peut pas poser de nouvelles règles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles étaient conformes au but de la loi (ATF 133 II 331 consid. 7.2.2 ; 130 I 140 consid. 5.1 ; 114 Ia 286 consid. 5a ; ACST/19/2018 du 15 août 2018 consid. 7b ; ATA/168/2008 du 8 avril 2008 consid. 3a ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., n. 323).

c. Le gouvernement peut édicter des règles de droit soit dans des ordonnances législatives d'exécution, soit dans des ordonnances législatives de substitution fondées sur une délégation législative (ATA/426/2017 du 11 avril 2017 consid. 2c ; ATA/52/2015 du 13 janvier 2015).

d. Un acte législatif qui ne respecte pas l'une ou l'autre de ces conditions, ainsi qu'une décision qui se fonde sur une telle ordonnance, manque de base légale et viole le principe de la séparation des pouvoirs (ATA/1587/2017 du 12 décembre 2017 consid. 14 et les références citées). De jurisprudence constante, la légalité d'un règlement peut être remise en cause devant la chambre de céans à l'occasion d'un cas d'application (ATA/1587/2017 précité).

e. Le Conseil d'État est chargé d'édicter tous les règlements d'application de la LIP (art. 6 al. 1 LIP).

8) a. En l'espèce, il apparaît que dans la loi sur l'instruction publique adoptée par le Grand Conseil le 6 novembre 1940 (ci-après : aLIP), les termes de « habitant le canton de Genève » étaient déjà employés. Son art. 9 était en effet libellé ainsi : « Tous les enfants habitant le canton de Genève doivent recevoir, dans les écoles publiques ou privées, ou à domicile, une instruction conforme aux prescriptions de la présente loi et au programme général établi par le département » (MGC 1940 19/II 1392).

Malgré le texte clair de cet art. 9 aLIP, le législateur de 1940 admettait l'hypothèse que des enfants non domiciliés dans le canton puissent y être scolarisés dans l'enseignement primaire. En effet, alors que dans son projet de loi, le Conseil d'État proposait à l'art. 19 que « L'instruction et la fourniture du matériel scolaire sont gratuites dans les écoles enfantines et primaires », le Grand Conseil a tenu à ajouter que tel ne devait être le cas que « pour les enfants domiciliés dans le canton » (MGC 1940 19/II 1380). Cette référence au domicile a été supprimée lors d'une modification de la aLIP en 1973 (MGC 1973 27/4 3678).

La aLIP a par la suite subi plusieurs modifications. À la suite de celles entrées en vigueur le 29 août 2011 et rendues nécessaire en raison de l'adhésion par le canton de Genève à HarmoS et à la CSR, l'art. 9 aLIP a été modifié en ce sens que les références à ces deux textes y ont été introduites. Les termes « tous les enfants habitant le canton de Genève » sont eux demeurés inchangés.

b. Dans le PL 11'470, le Conseil d'État a fait figurer la disposition qui deviendra l'actuel art. 37 LIP (il s'agissait dans le PL 11'470 de l'art. 34 dont le contenu est le même que celui de l'art. 9 aLIP dans sa version entrée en vigueur le 29 août 2011), sans que celui-ci soit modifié par les députés. La notion de « habitant le canton de Genève » y figurant n'est donc pas le résultat du dépôt d'un amendement. A par contre fait l'objet d'un amendement du département, l'ajout de ces mêmes termes « habitant le canton de Genève », mais à l'al. 3 de ce qui deviendra l'art. 37 LIP (PL 11'470 p. 113). Cette disposition prévoit que les jeunes habitant le canton de Genève ont l'obligation jusqu'à l'âge de la majorité au moins d'être inscrits à une formation.

La question de la gratuité s'est à nouveau posée dans le cadre du PL 11'470, le Conseil d'État ayant en effet choisi de traiter cette question à l'occasion d'un art. 47, lequel deviendra, lors de l'adoption de la loi, l'art. 51 LIP. Il sera question de cette disposition plus bas (voir infra consid. 11d).

c. Au niveau réglementaire, est entré en vigueur le 15 juillet 1993, sous l'empire de l'art. 9 aLIP, un aREP qui autorisait déjà, sous certaines conditions, l'accès à l'enseignement public genevois à des élèves domiciliés hors du canton. L'art. 23 aREP était alors rédigé comme suit : « Les enfants dont le répondant jouit du statut de frontalier, assujetti à Genève sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton, ainsi que les enfants genevois et confédérés peuvent être admis dans l'enseignement public genevois dans la limite des places disponibles (al. 1). Une convention signée entre les cantons de Vaud et de Genève dite « Convention Vaud-Genève » précise les conditions à remplir pour être admis dans l'enseignement public genevois (al. 2). Par analogie, lorsque les parents n'habitent pas Genève et ne paient pas d'impôts dans ce canton, ils sont astreints à payer une taxe scolaire annuelle dont le montant est celui imposé aux parents d'élèves par la convention Vaud-Genève (al.3) ».

À la suite des modifications entrées en vigueur le 29 août 2011, l'art. 23 aREP destiné aux élèves domiciliés hors du canton prévoyait alors que « les enfants dont le répondant jouit du statut de frontalier, assujetti à Genève sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton, ainsi que les enfants genevois domiciliés hors canton peuvent être admis dans l'enseignement public genevois dans la limite des places disponibles (al. 1). Les enfants non genevois domiciliés hors canton peuvent être scolarisés très exceptionnellement à Genève, selon les termes fixés par la convention intercantonale réglant la fréquentation (al. 2) ».

Après une nouvelle modification le 6 juin 2012, l'art. 23 disposait que « peuvent être admis dans l'enseignement primaire public genevois dans la limite des places disponibles : les élèves genevois, quel que soit leur domicile (al. 1 let. a) ; les élèves habitant en France voisine dont l'un des parents au moins est assujetti à Genève à l'impôt sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton (al. 1 let. b). Les enfants non genevois domiciliés hors canton peuvent être scolarisés très exceptionnellement à Genève, selon les termes fixés par la convention intercantonale réglant la fréquentation (al. 2) ».

L'art. 23 aREP a encore subi des modifications entrées en vigueur le 29 août 2016, cette fois sous l'empire de la LIP actuelle. Il disposait alors que « peuvent être admis dans l'enseignement primaire public genevois dans la limite des places disponibles et pour autant qu'ils aient déposé leur demande d'admission dans le délai fixé par le département : les élèves genevois domiciliés hors canton (al. 1 let. a) ; les élèves habitant en France voisine dont l'un des parents au moins est assujetti à Genève à l'impôt sur le revenu de l'activité rémunérée qu'il exerce de manière permanente dans le canton (al. 1 let.b). Les enfants non genevois domiciliés hors canton peuvent être scolarisés très exceptionnellement à Genève, selon les termes fixés par la convention intercantonale réglant la fréquentation (al. 2). La demande d'admission au sens de l'al. 1 doit être déposée auprès de la direction générale de l'enseignement obligatoire dans le délai fixé chaque année par le département et publié sur le site Internet de ce dernier (al. 3) ».

Le 14 février 2018 est entré en vigueur l'art. 23 REP dans sa version en vigueur aujourd'hui et applicable au cas d'espèce.

9) a. Il découle de ce qui précède que déjà sous l'empire de la aLIP, le Conseil d'État avait, de longue date, ouvert les portes de l'enseignement primaire public genevois à des enfants n'habitant pas le canton. Le département justifiait cette pratique en expliquant que le Conseil d'État avait choisi d'agir ainsi, à titre exceptionnel, et hors de ses obligations découlant de la Cst. La chambre administrative a déjà jugé que cet argument était recevable, dès lors que s'il découlait des art. 19 et 62 Cst, comme de l'art. 24 Cst-GE ou encore de l'art. 37 al. 1 LIP, que le canton devait scolariser les enfants qui y étaient domiciliés et veiller à ce qu'ils le soient, aucune disposition constitutionnelle ou légale ne faisant obstacle à ce que le canton scolarise ceux qui n'y habitent pas.

b. Il en va de même sur le plan intercantonal.

En vue de régler notamment la fréquentation d'établissements situés hors de leur canton de domicile par des élèves des établissements de scolarité obligatoire, le canton de Genève est partie prenante à la convention intercantonale réglant la fréquentation. Après avoir rappelé, entre autres, que les élèves des établissements de la scolarité obligatoire fréquentent en principe les écoles ou établissements de leur canton de domicile (art. 1 al. 1), la convention intercantonale réglant la fréquentation précise que cet accord définit des exceptions (cas particuliers ou individuels) de portée générale que les cantons de Suisse romande ont décidé d'admettre, sous réserve des législations cantonales, du nombre de places disponibles et d'effectifs qui deviendraient insuffisants dans le canton de domicile (al. 2). La convention intercantonale réglant la fréquentation ne fait en conséquence pas obstacle à des solutions spécifiques adoptées par les cantons signataires, les législations cantonales étant expressément réservées.

c. Dès lors que les principes qui prévalent en matière de droit et d'obligation d'être scolarisé de même que ceux qui obligent le canton à permettre et à veiller à la scolarisation des enfants reposent sur le principe du domicile, le Conseil d'État ne pourrait pas étendre le champ des élèves admis dans le canton sans que le législateur y consente en toute connaissance de cause. Cet élargissement a en effet une influence sur la mise en oeuvre de la LIP elle-même, ne serait-ce qu'au regard de l'impact que l'accueil d'enfants n'habitant pas le canton peut avoir sur l'organisation des écoles et des classes. Cet élargissement a en outre des conséquences sur la mise en oeuvre d'autres lois dès lors qu'il est susceptible d'impliquer la construction ou l'agrandissement d'écoles, une augmentation des effectifs d'élèves dans les classes, l'engagement d'enseignants supplémentaires et, plus largement, des coûts pour le canton de Genève. Le principe de cet élargissement doit ainsi figurer dans une loi formelle et le Conseil d'État être autorisé à en traiter par voie réglementaire. Tel est bien le cas en l'espèce.

d. En effet, outre la délégation générale figurant à l'art. 6 LIP, l'art. 51 LIP prévoit que :

- dans les établissements des degrés primaire et secondaire I, il n'y a pas d'écolage, sauf exceptions prévues dans une convention intercantonale (al. 1) ;

- dans les établissements des degrés secondaire II et tertiaire B, il n'y a pas d'écolage, sous réserve de l'alinéa 3 (al. 2).

Des frais de scolarité correspondant au montant maximum prévu à titre de participation financière des cantons signataires d'une convention intercantonale pour la filière considérée, ou, à défaut, d'un montant ne dépassant pas le 80 % du coût moyen annuel de la formation, peuvent être perçus auprès de l'élève majeur ou des parents de l'élève mineur par le département pour admettre, dans les limites des places disponibles, des élèves auxquels ni une loi cantonale ou fédérale, ni une convention intercantonale, voire internationale, ne reconnaît un droit à être admis. Les montants de l'écolage, ainsi que l'instance seule habilitée à autoriser ces admissions, sont définis par voie réglementaire (al. 3).

Il ressort ainsi du texte de l'art. 51 al. 3 LIP que le législateur a bien envisagé les cas particuliers des élèves ne pouvant se prévaloir du droit d'être scolarisés à Genève. Il ressort au surplus des travaux préparatoires (PL 11'470A, p. 139), que dans le cadre des discussions relatives à cet art. 51 LIP, un député s'est interrogé sur le point de savoir si un élève dont les parents étaient frontaliers avait droit d'office à la scolarité au même titre qu'un enfant genevois. Le représentant du département lui a répondu que oui, « si un de ses parents paie ses impôts à Genève ».

L'art. 51 al. 3 LIP contient en outre une délégation explicite à agir par la voie réglementaire. Si dans le REP, le Conseil d'État a choisi de maintenir le principe selon lequel le matériel scolaire et les moyens d'enseignement sont remis gratuitement dans les classes primaires (art. 35 al. 1 REP), il a instauré la DGEO comme instance décisionnelle (art. 23 al. 3 REP). C'est d'ailleurs bien la DGEO qui a rendu la décision litigieuse.

En autorisant par voie réglementaire l'accès à l'enseignement primaire public genevois à certains enfants n'habitant pas le canton de Genève, le département a donc agi dans le cadre fixé par la loi et dans celui de la délégation de compétence que lui a confié le Grand Conseil (ATA/1168/2019 du 19 juillet 2019).

Ce grief sera en conséquence écarté.

10) Les parents soutiennent implicitement qu'ils sont, avec leur fils, victimes d'une discrimination proscrite par l'ALCP.

a. La chambre administrative a traité en détail de la problématique dans plusieurs arrêts auxquels il peut être renvoyé (ATA/999/2019 du 11 juin 2019 consid. 13 à 24 ; ATA/1017/2019 du 13 juin 2019 ; ATA/1016/2019 du 13 juin 2019 ; ATA/1015/2019 du 13 juin 2019 notamment). Elle a rejeté les recours d'enfants et de leurs parents domiciliés en France voisine contre le refus de les scolariser dans l'enseignement primaire public genevois. Ce refus, qui découlait de l'un des corollaires du caractère obligatoire de l'enseignements primaire, à savoir que les enfants doivent fréquenter l'école du lieu où ils résident, reposait sur une base légale suffisante et ne violait pas l'ALCP.

b. Par ailleurs, dans un arrêt du 11 juin 2019, le Tribunal fédéral a confirmé un arrêt de la chambre de céans (arrêt 2C_820/2018 consid. 4.1) s'agissant du refus de l'accès, pour un enfant handicapé suisse, domicilié en France, aux mesures de pédagogie spécialisée.

Aux termes de l'art. 3 Annexe I ALCP, les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle. Ce droit général comprend plusieurs facettes, qui correspondent pour l'essentiel aux droits accordés aux personnes qui jouissent elles-mêmes de la libre circulation, dont le droit à l'enseignement. Or, selon l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, qui est calqué sur l'art. 12 du règlement (CEE) n° 1612/68 (actuellement, art. 10 du règlement [UE] n° 492/2011), les enfants d'un ressortissant d'une partie contractante qui exerce ou non, ou qui a exercé une activité économique sur le territoire de l'autre partie contractante sont admis aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants de l'État d'accueil, si ces enfants résident sur son territoire. Il ressort de ce qui précède que la condition de la résidence est prévue par l'ALCP lui-même. Si l'art. 3 par. 6 de l'Annexe I à l'ALCP établit bien un principe de non discrimination relatif à l'admission aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle, celui-ci concerne les Suisses domiciliés dans un État membre et les ressortissants des États membres domiciliés en Suisse : ces personnes ont droit aux mesures de formation spécialisée aux mêmes conditions que les nationaux. La Cour de justice des Communautés européennes a d'ailleurs jugé que l'enfant d'un travailleur migrant, qui peut se réclamer de l'art. 12 du règlement n° 1612/68, doit être admis aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants du pays d'accueil, si cet enfant réside sur son territoire. Ainsi, en tant qu'il prévoit une condition de domicile, l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP constitue en quelque sorte une réserve par rapport au principe général de non-discrimination de l'art. 2 ALCP, qui lui-même ne s'applique au demeurant qu'aux personnes qui séjournent légalement sur le territoire de l'État concerné (arrêt 2C_820/2018 précité et les références citées).

Comme l'indique le Tribunal fédéral dans le cas précité, applicable aux recourants, ceci s'explique par le but de l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP qui est l'intégration de la famille du travailleur dans l'État membre d'accueil. En effet, l'intégration de la famille dans le milieu du pays d'accueil présuppose, dans le cas de l'enfant d'un travailleur étranger, que cet enfant puisse bénéficier, dans les mêmes conditions que ses homologues nationaux, des avantages prévus par la législation du pays d'accueil dont les mesures éducatives prévues. Or, en l'espèce, les recourants sont domiciliés en France. Le but recherché de l'intégration veut, en conséquence, que leur enfant bénéficie de l'enseignement spécialisé de ce pays et pas en Suisse.

Le grief d'une discrimination proscrite par l'ALCP sera donc écarté.

11) À l'appui du recours, les parents de l'élève exposent qu'il était pour eux impératif de pouvoir scolariser leur fils à Genève. En raison de la cherté des loyers dans cette ville, ils avaient été contraints de déménager en France voisine. La recourante payait ses impôts à Genève. Par ailleurs, les vacances scolaires françaises correspondaient rarement à celles en vigueur à Genève, de sorte qu'ils ne pourraient pas passer l'entier des vacances ensemble en famille.

S'agissant de sa qualité de contribuable du canton de la recourante, les parents n'indiquent pas quelles éventuelles dispositions conventionnelles, légales ou réglementaires, mis à part l'art. 23 al. 1 let. a REP, dont ils ne remplissent pas les conditions, imposeraient aux autorités genevoises d'admettre leur fils dans l'enseignement primaire public genevois du seul fait que leurs parents y payent des impôts (ATA/999/2019 précité consid. 23).

De plus, comme l'a déjà jugé la chambre administrative, les raisons familiales invoquées, bien que compliquant effectivement la prise de vacances en même temps, relèvent de la convenance personnelle et ne sont pas de nature à contredire efficacement le principe exposé plus haut selon lequel seuls sont titulaires du droit à un enseignement de base suffisant et gratuit les enfants domiciliés en Suisse, en l'occurrence à Genève (ATA/1043/2019 et ATA/1051/2019 du 18 juin 2019).

12) Les recourants invoquent encore une violation de l'égalité de traitement. Toutefois, ils ne précisent pas quelle situation serait similaire à la leur et serait traitée différemment.

En tous points infondé, le recours sera rejeté.

 

13) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent. L'enfant mineur ayant agi par ses parents, ceux-ci se verront astreints au paiement dudit émolument (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 mars 2020 par Madame A______ et Monsieur C______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 7 février 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame A______ et Monsieur C______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Tano Barth, avocat du recourant, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :