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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/489/2020

ATA/453/2020 du 07.05.2020 sur DITAI/112/2020 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/489/2020-PE ATA/453/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 mai 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A_______
représenté par Me Yves Rausis, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________




Recours contre la décision sur effet suspensif du Tribunal administratif de première instance du 26 février 2020 (DITAI/112/2020)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1990, est ressortissant du Kosovo.

Selon ses dires, il serait arrivé en Suisse en 2015 et y aurait exercé différents emplois dans le domaine de la construction ; il n'a jamais été au bénéfice d'aucune autorisation de séjour ou de travail.

2) Par formulaire daté du 29 octobre 2018, la société B______ SA a déposé une demande d'autorisation de séjour à l'année avec activité lucrative (permis B) en faveur de M. A______, en qualité d'aide-monteur, pour un salaire mensuel de CHF 3'280.- (40 heures par semaine).

3) a. Par décision du 5 décembre 2018, l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée, aux motifs que l'admission en vue de l'exercice d'une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse. De plus, l'ordre de priorité n'avait pas été respecté, l'employeur n'ayant pas démontré qu'aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un pays de l'UE et de l'AELE n'avait pu être trouvé. Par ailleurs, les conditions de rémunération n'étaient pas respectées, pour des raisons qu'il appartenait à son employeur de lui communiquer. Enfin, la vacance du poste à pourvoir n'avait pas été annoncée à l'office cantonal de l'emploi (ci-après : OCE).

b. Suite au recours de M. A______ auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), ce dernier a, par jugement du 11 juin 2019, rejeté ledit recours ; en substance, c'était à bon droit que l'OCIRT avait refusé de donner une suite favorable à la demande d'autorisation de travail déposée en sa faveur au motif que l'ordre de priorité n'avait pas été respecté.

4) a. Par formulaire daté du 22 mai 2019, la société C______ SA a déposé une demande d'autorisation de séjour à l'année avec activité lucrative (permis B) en faveur de M. A______, en qualité d'aide-électricien, pour un salaire mensuel brut de CHF 4'280.- (40 heures par semaine).

b. Par décision du 21 août 2019, l'OCIRT a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée par C______ SA, aux motifs que l'admission en vue de l'exercice d'une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse, que l'ordre de priorité n'avait pas été respecté et que la vacance du poste à pourvoir n'avait pas été annoncée à l'OCE.

5) Par décision exécutoire nonobstant recours du 6 janvier 2020, l'OCPM, se fondant sur la décision de l'OCIRT, a refusé d'agréer la demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______ et prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 31 janvier 2020 pour se faire.

6) Par acte du 6 février 2020, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du TAPI, concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'OCPM pour nouvelle décision.

S'agissant de l'effet suspensif, il devait être restitué, respectivement des mesures provisionnelles prononcées, afin de lui permettre de demeurer en Suisse jusqu'à l'issue de la procédure, dès lors qu'outre les difficultés psychologiques que lui causerait un départ immédiat, il perdrait l'emploi qu'il occupait depuis le 15 janvier 2020 auprès de D______ SA et serait empêché de poursuivre les négociations avec son ancien employeur aux fins de se faire payer son salaire.

Au fond, il soulevait une violation du principe de l'égalité de traitement et de son droit d'être entendu. L'exécution du renvoi attenterait à son équilibre psychologique, ayant construit l'ensemble de son environnement social et professionnel en Suisse ; il ne pourrait guère compter sur le soutien de membres de sa famille en cas de retour dans son pays, rendant ainsi son renvoi inexigible.

7) Dans ses observations du 13 février 2020, l'OCPM s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif, faute notamment pour l'intéressé de démontrer qu'il aurait un intérêt privé prépondérant à demeurer en Suisse.

8) Par réplique sur effet suspensif du 24 février 2020, M. A______ a encore relevé qu'un départ forcé l'empêcherait de faire valoir ses droits dans la procédure qu'il entendait initier contre son ancien employeur.

9) Par décision sur effet suspensif du 26 février 2020, le TAPI a rejeté la requête en restitution de l'effet suspensif.

L'intérêt public au respect immédiat de la loi devait l'emporter sur l'intérêt privé de M. A______ à pouvoir demeurer illégalement en Suisse dans l'attente de l'issue de la procédure, son mandataire pouvant parfaitement le représenter dans le cadre des négociations avec son ancien employeur, voire de l'éventuelle procédure qu'il disait vouloir initier contre ce dernier. En effet, celui qui plaçait l'autorité devant le fait accompli devait s'attendre à ce qu'elle se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlaient pour lui. Compte tenu des circonstances - M. A______ n'avait jamais bénéficié d'un titre de séjour ni d'une autorisation provisoire de travail, alors qu'il disait avoir été employé par trois employeurs successifs depuis 2015 -, la restitution de l'effet suspensif ne se justifiait pas car cela reviendrait à consacrer la politique du fait accompli et à récompenser celui qui contrevenait à la loi de manière inadmissible, au détriment des personnes respectueuses des procédures en vigueur. Faute de titre de séjour, M. A______ ne pouvait ignorer qu'il pourrait être amené à quitter la Suisse. Partant, il avait pris ce risque et ne pouvait valablement se prévaloir des inconvénients qui découleraient de son renvoi. Enfin, il n'apparaissait pas, prima facie, qu'il obtiendrait, sans le moindre doute, gain de cause sur le fond du litige.

10) Par acte mis à la poste le 9 mars 2020, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur effet suspensif du TAPI.

Il a conclu, préalablement, à son audition et, principalement, à l'annulation de ladite décision, à l'admission de son recours et à ce qu'il lui soit permis au titre de mesures provisionnelles, de demeurer en Suisse jusqu'à droit connu sur le fond de sa procédure de recours.

L'absence d'effet suspensif à la procédure de recours le contraindrait à quitter subitement la vie et l'ensemble des attaches qu'il avait constituées en Suisse depuis plus de quatre ans et un renvoi dans son pays d'origine compromettrait sa situation financière, professionnelle et personnelle. L'emploi qu'il occupait aujourd'hui revêtait une importance particulière et lui démontrait que les efforts consentis au cours de ces dernières années avaient été payants, dans la mesure où il avait su développer des compétences techniques nécessaires à la pratique de chauffagiste, grâce aux diverses activités exercées en Suisse. Si l'effet suspensif venait à être rejeté, il devrait quitter son emploi, le travail qui lui permettait d'assurer son autonomie financière et couvrir ses dépenses courantes ; dans son pays d'origine, il ne pourrait aucunement compter sur le soutien des membres de sa famille, ces derniers ne disposant pas de ressources suffisantes. Ainsi, le préjudice qu'il pourrait subir ne saurait être justifié par un intérêt public supérieur. De plus, il avait pour intention d'entreprendre toutes les démarches utiles auprès de son ancien employeur, visant à faire valoir ses droits en matière de droit du travail ; à ce sujet, une demande en paiement allait être introduite. Sa présence, et non seulement celle de son conseil, était indispensable pour qu'il puisse comparaître personnellement devant le tribunal. Il devait, en conséquence, être autorisé à demeurer en Suisse « jusqu'à droit connu sur le fond de son recours auprès du TAPI et, pour le moins, jusqu'à sa première audience auprès de la juridiction des prud'hommes ». Compte tenu de ces éléments et dans le cadre d'une juste pesée des intérêts en présence, il fallait retenir que, pour le cas où il devrait quitter la Suisse, il en résulterait un préjudice irréparable.

11. Par observations du 19 mars 2020, l'OCPM a conclu au rejet du recours. M. A______ avait indiqué être arrivé en Suisse en 2015 et avait commencé à travailler en étant dépourvu de tout titre de séjour ; ce n'était qu'en octobre 2018 qu'une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative avait été déposée. Par deux décisions de 2018 et 2019, l'OCIRT avait refusé de délivrer une unité du contingent en faveur de M. A______ et il était donc clair qu'il ne pouvait pas travailler. L'intéressé avait fait fi des décisions rendues à son endroit et ne saurait se plaindre qu'un renvoi de Suisse lui ferait perdre ses revenus alors même qu'il savait ne pas être en droit de travailler. Ainsi, il ne pouvait pas faire valoir un intérêt prépondérant à attendre en Suisse l'issue de la procédure.

12. Par réplique du 15 avril 2020, M. A______ a persisté dans ses conclusions et son argumentation. L'autorité intimée ne mettait pas en exergue les raisons impératives justifiant le retrait de l'effet suspensif au recours. Son intérêt privé devait primer sur l'intérêt public à son éloignement. S'agissant du litige avec son ancien employeur, il avait tout d'abord entrepris des démarches en privilégiant la voie de la conciliation, afin de traiter le litige à l'amiable. Par la suite, son conseil avait reçu une réponse non satisfaisante dudit employeur, raison pour laquelle l'intéressé lui avait donné pour instruction d'introduire dans les délais les plus brefs une demande en paiement devant la juridiction des prud'hommes. En parallèle, en raison de « la mauvaise foi objectivement supposée de son ancien employeur », M. A______ entendait déposer une plainte pénale à son encontre. Il devait ainsi pouvoir défendre ses droits et jouer un rôle actif et déterminant dans ladite procédure. Tous ces éléments justifiaient la primauté de son intérêt privé sur l'intérêt public à son éloignement.

13. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. Interjeté en temps utile et devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. Selon l'art. 57 LPA, le recours contre une décision incidente est recevable si un dommage irréparable peut être causé. Tel est le cas en l'espèce, le renvoi du recourant à l'étranger pouvant causer un tel dommage. Le recours est ainsi recevable.

2) Le recourant sollicite préalablement son audition.

a. Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 41 LPA, comprend notamment le droit pour la personne concernée de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2).

b. Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_119/2015 du 16 juin 2015 consid. 2.1).

c. Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_551/2015 du 22 mars 2016 consid. 2.2), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

d. En l'espèce, le recourant a eu l'occasion de s'expliquer, outre dans ses écritures devant le TAPI, dans son recours du 9 mars 2020 et dans sa réplique. Le dossier est en état d'être jugé. De surcroît, il n'indique pas en quoi une audition pourrait amener des éléments complémentaires pertinents à l'issue du litige.

En conséquence, il ne sera pas donné suite à sa demande de comparution personnelle.

3) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif, à moins que l'autorité qui a pris la décision n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (art. 66 al. 1 LPA).

4) a. Selon la jurisprudence et la doctrine, un effet suspensif ne peut être restitué lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif, soit contre une décision qui porte refus d'une prestation. La fonction de l'effet suspensif est de maintenir un régime juridique prévalant avant la décision contestée. Si, sous le régime antérieur, le droit ou le statut dont la reconnaissance fait l'objet du contentieux judiciaire n'existait pas, l'effet suspensif ne peut être restitué car cela reviendrait à accorder au recourant d'être mis au bénéfice d'un régime juridique dont il n'a jamais bénéficié (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344 ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., 2016, n. 1166 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2010, n. 5. 8. 3. 3 p. 814 ; ATA/87/2013 du 18 février 2013 ; ATA/84/2009 du 9 avril 2009).

b. Lorsqu'une décision à contenu négatif est portée devant la chambre administrative et que le destinataire de la décision sollicite la restitution de l'effet suspensif, il y a lieu de distinguer entre la situation de celui qui, lorsque la décision intervient, disposait d'un statut légal qui lui était retiré de celui qui ne disposait d'aucun droit. Dans le premier cas, la chambre administrative pourra entrer en matière sur une requête en restitution de l'effet suspensif, aux conditions de l'art. 66 al. 2 LPA, l'acceptation de celle-ci induisant, jusqu'à droit jugé, le maintien des conditions antérieures. Elle ne pourra pas en faire de même dans le deuxième cas, vu le caractère à contenu négatif de la décision administrative contestée. Dans cette dernière hypothèse, seul l'octroi de mesures provisionnelles, aux conditions cependant restrictives de l'art. 21 LPA, est envisageable (ATA/70/2014 du 5 février 2014 consid. 4b ; ATA/603/2011 du 23 septembre 2011 consid. 2 ; ATA/280/2009 du 11 juin 2009 et ATA/278/2009 du 4 juin 2009).

5) a. Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).

b. Pour effectuer la pesée des intérêts en présence, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités).

6) À teneur de l'art. 21 LPA, l'autorité administrative peut ordonner, d'office ou sur requête, des mesures provisionnelles lorsqu'il est nécessaire de régler provisoirement la situation en cause, jusqu'au prononcé de la décision finale.

Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, de telles mesures ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis et elles ne peuvent anticiper le jugement définitif (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/87/2013 précité ; ATA/248/2011 du 13 avril 2011 consid. 4 ; ATA/197/2011 du 28 mars 2011 ; ATA/248/2009 du 19 mai 2009 consid. 3 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 consid. 2). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif, ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu'aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HAENER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, p. 265).

7) a. Tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour. Il doit la solliciter auprès de l'autorité compétente du lieu de travail envisagé (art. 11 al. 1 de la loi sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20).

b. Qu'il s'agisse d'une première prise d'emploi, d'un changement d'emploi ou du statut de travailleur salarié vers un statut de travailleur indépendant, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l'admission en vue de l'exercice de l'activité lucrative (art. 40 al. 2 LEI et 83 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 - OASA - RS 142.201).

c. Dans le canton de Genève, le département de la sécurité et de l'économie est l'autorité compétente en matière de police des étrangers, compétence qu'il peut déléguer à l'OCPM (art. 1 al. 1 et art. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10) sous réserve des compétences dévolues à l'OCIRT en matière de marché de l'emploi.

La compétence pour traiter les demandes d'autorisation de séjour avec prise d'emploi est dévolue à l'OCIRT (art. 17A de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 12 mars 2004 - LIRT - J 1 05 et 35A du règlement d'application de la loi sur l'inspection et les relations du travail du 23 février 2005 - RIRT - J 1 05.01). De même que les décisions de l'OCPM, celles de l'OCIRT peuvent faire l'objet d'un recours auprès du TAPI avant de pouvoir être déférées à la chambre administrative (art. 3 LaLEtr).

8) En l'espèce, la demande du recourant vise à obtenir une autorisation de séjour avec activité lucrative, refusée par l'OCPM le 6 janvier 2020.

9) Aux termes de l'art. 18 LEI, un étranger peut être admis en vue d'exercer une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a) ; son employeur a déposé une demande (let. b) ; les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEtr sont remplies (let. c). Lesdites conditions sont cumulatives (ATA/494/2017 du 2 mai 2017 consid. 3 : ATA/401/2016 du 10 mai 2016).

10) En l'espèce, la décision litigieuse, sur effet suspensif, est de type négatif (Cléa BOUCHAT, l'effet suspensif en procédure administrative, 2015, p. 107 n. 282). En effet, le recourant ne disposait - et ne dispose encore - d'aucun droit de séjour.

11) Le recourant reproche au TAPI d'avoir procédé à une pesée des intérêts erronée. En substance, il y avait lieu de prendre en considération son emploi actuel, les attaches créées en Suisse depuis quatre ans et la procédure prud'homale, voire pénale, qu'il allait engager contre son ancien employeur. La solution à laquelle parvient le TAPI dans le cadre de la pesée des intérêts est toutefois correcte. L'intérêt privé du recourant de pouvoir rester en Suisse, continuer à exercer son emploi sans autorisation et percevoir une rémunération doit céder le pas à l'intérêt public au respect de la loi, notamment à l'exigence de l'art. 18 LEI que l'activité serve les intérêts économiques du pays, étant précisé que le recourant a déjà travaillé chez trois employeurs différents sans autorisation. « Il parait souhaitable que le but assigné par la loi ou poursuivi par la décision puisse être atteint et ne soit pas contrecarré par une longue procédure, laquelle serait assortie de l'effet suspensif » (Cléa BOUCHAT, op. cit, p. 249 n. 656). Quant à l'argument de sa présence en Suisse pour intenter et suivre la procédure devant le Tribunal des Prud'hommes, voire pour déposer une plainte pénale - démarches non encore initiées - il n'apparaît pas décisif, dans la mesure où le recourant a la possibilité de se faire représenter par son conseil devant lesdites instances.

12) C'est donc à juste titre que le TAPI a refusé la restitution de l'effet suspensif au recours contre la décision querellée.

Quant à l'octroi de mesures provisionnelles ayant le même effet, il n'est pas non plus envisageable. En effet, une telle conclusion aboutirait à accorder au recourant l'autorisation sollicitée au fond et anticiperait ainsi le jugement définitif.

Par conséquent, le recours doit être rejeté et la décision du TAPI confirmée.

13) Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).



* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 février 2020 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations  du 26 février 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge du recourant ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Rausis, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'Etat aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.