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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3055/2018

ATA/445/2020 du 07.05.2020 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 22.06.2020, rendu le 20.07.2020, IRRECEVABLE, 8C_413/2020
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;RÉSILIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;PROTECTION DE LA PERSONNALITÉ;HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE;CERTIFICAT DE TRAVAIL
Normes : LCPEG.2.al1; CO.328; CO.330a
Résumé : Recours d’une employée au bénéfice d’un contrat de durée maximale résiliable contre son licenciement. Examen des conditions que l’employeur doit mettre en œuvre pour protéger un employé qui se plaint d’une atteinte à sa personnalité. En l’espèce l’employeur a agi correctement. Le recours est partiellement admis en ce sens que la recourante peut demander que son certificat de travail soit complété ou qu’il ne porte que sur la nature et la durée des rapports de travail.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3055/2018-FPUBL ATA/445/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 mai 2020

 

dans la cause

 

Madame A______

contre


CAISSE DE PRÉVOYANCE DE L'ÉTAT DE GENÈVE (CPEG)
représentée par Me Paul Michel, avocat


 

 

 

 

 

 

 


EN FAIT

1) Madame A______ a été engagée par la caisse de prévoyance de l'État de Genève (ci-après : CPEG) en 2018 et rattachée au service « organisation et solution de la division système d'information », afin de soutenir et mener à bien le projet dénommé B______, portant sur le système d'information de la CPEG, dont le délai de mise en oeuvre était court.

Elle était sous la direction de Madame C______, directrice du projet B______, et externe à la CPEG.

Six collaborateurs travaillaient au service « organisation et solution de la division système d'information ».

2) Par courriel du 29 janvier 2018, Madame D______, la responsable du service des ressources humaines (ci-après : RH), a confirmé à Mme A______ l'intention de la CPEG de l'engager au poste « d'ingénieur test », dès le 1er mars 2018, le contrat étant conclu pour une durée maximale de douze mois.

Selon le contrat de travail qui lui a été transmis pour signature le 16 février 2018, Mme A______ a été engagée par la CPEG en qualité de « chargé d'ingénieur de test » dès le 1er mars 2018, pour une durée maximale de vingt-quatre mois, soit jusqu'au 31 janvier 2020 (sic).

3) Le 25 mai 2018, à l'issue de sa période d'essai de trois mois, Mme A______ a été convoquée pour un entretien d'appréciation et de développement des compétences, par Monsieur E______, responsable de la « division systèmes d'information ».

Elle avait alors fait part des difficultés rencontrées avec sa responsable hiérarchique, Mme C______, qui ne lui donnait pas beaucoup d'informations et de retour sur son travail. Peu de tâches lui étaient déléguées et toujours au dernier moment. Les objectifs fixés changeaient trop fréquemment, parfois à plusieurs reprises dans la même journée. Elle ne recevait aucun délai et aucune indication quant aux priorités dans le travail à effectuer. L'ambiance au sein de l'équipe était difficile et un manque de respect était omniprésent.

4) Le 12 juin 2018, M. E______ a organisé une séance de médiation entre Mmes C______ et A______, afin de trouver une solution aux difficultés rencontrées dans leurs relations personnelles ; la description de la fonction de cette dernière a été mise à jour et un plan d'action a été mis en place, afin notamment de clarifier la stratégie de test ; ce document n'a toutefois pas été finalisé.

5) Selon un rapport d'entretien du 22 juin 2018 rédigé par Mme D______, le même jour, Mme C______ l'avait contactée par téléphone vers 11h50, Mme A______ à 12h00.

Selon Mme C______, Mme A______ était partie en cours de séance en indiquant qu'elle « donnait son sac » et qu'elle allait appeler les RH. En substance, Mme C______ reprochait à Mme A______ d'être trop rigide.

Mme A______, en pleurs, avait fait part de son souhait de partir. Dès lors qu'elle avait refusé de prendre un temps de réflexion, un rendez-vous avait été fixé le 27 juin 2018 à 11h, confirmé le jour même par courriel.

Monsieur F______, directeur général et M. E______ avaient été informés.

6) Le 25 juin 2018, Mme A______ a transmis à son employeur un certificat médical indiquant qu'elle était en arrêt dès cette date et jusqu'au 7 juillet 2018, prolongé par la suite jusqu'au 11 juillet 2018.

7) Le 2 juillet 2018, Mme C______ a rédigé un rapport concernant notamment les difficultés qu'elle avait rencontrées avec Mme A______ :

- Celle-ci avait fait croire à une de ses collègues ingénieur test qu'elle occupait la fonction de « chargée des ingénieurs test », laissant ainsi penser qu'elle était sa supérieure hiérarchique ;

- Deux des collègues de Mme A______ avaient exprimé le souhait de quitter leur emploi en raison de son attitude et de l'ambiance tendue qu'elle créait au bureau ;

- Le 9 mai 2018, elle avait reçu Mme A______ pour une séance ayant pour objet le planning des tests. Cette dernière lui avait alors dit qu'elle n'avait pas dormi la veille, sans préciser pourquoi, et qu'elle ne se sentait pas bien. Elle s'était plainte d'un manque d'autonomie et avait cité deux exemples. En réponse, elle lui avait alors expliqué que le fait qu'elle transmette un lien de l'application alors que celle-ci n'était pas montrable avait généré beaucoup de bruit négatif. Elle avait également été surprise lorsqu'elle avait dit au testeur métier d'arrêter les tests sans lui demander ce qu'elle en pensait, alors qu'elle était présente dans le bureau. Mme A______ n'était pas autorisée à prendre des décisions contraires aux consignes et devait la contacter en cas de problèmes.

Par la suite, elles avaient eu des difficultés à collaborer, car Mme A______ ne l'écoutait pas et était constamment sur la défensive.

- Le 25 mai 2018, elle avait fixé une séance à 13h. Les membres de l'équipe, et notamment Mme A______, avaient été prévenues le 21 mai 2018. Le matin de la séance, à 11h, elle avait demandé à cette dernière si le travail demandé, soit les plans de tests, étaient prêts, mais ce n'était pas le cas. Mme A______ était partie déjeuner avec une collègue, si bien qu'elle avait dû elle-même accueillir les testeurs avec l'aide d'une autre collaboratrice. Le plan de test créé dans l'urgence était resté inutilisable et elle avait encore dû intervenir lorsque Mme A______ était revenue travailler, car elle s'était encore permise de donner des instructions à ses collègues au lieu de reprendre elle-même le test.

Les autres difficultés mentionnées dans ce rapport seront reprises, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

8) Le 4 juillet 2018, une séance a été organisée, en présence de MM. F______ et E______ et de Mmes D______ et A______, afin d'évoquer les nouvelles difficultés rencontrées par celle-ci et de trouver des solutions ; Mme A______ a alors confirmé son souhait de reprendre son activité mais sans être rattachée à Mme C______ ; sa hiérarchie lui a indiqué qu'elle allait étudier cette proposition.

9) Par courrier du 6 juillet 2018, la CPEG, soit pour elle M. F______ et Madame G______, directrice générale adjointe, ont annoncé à Mme A______ qu'elle serait prochainement licenciée, en raison des difficultés rencontrées dans l'accomplissement de son travail, de son comportement qualifié de non fiable et de sa mésentente avec les membres de l'équipe.

Les représentants de la CPEG récapitulaient les événements principaux ayant précédé l'entretien du 4 juillet 2018. Ils avaient étudié la proposition faite par Mme A______, soit de ne plus être sous la responsabilité de Mme C______. Toutefois, cela ne permettait pas de répondre à ses besoins, ni pour la CPEG d'assumer sa responsabilité d'employeur. En effet, d'une part son travail en tant qu'ingénieur de test exigeait d'être régulièrement en interaction avec l'ensemble des collaborateurs engagés sur le projet et, en particulier, avec Mme C______ et Madame H______. D'autre part, dans leur responsabilité d'employeur, les représentants de la CPEG se devaient de préserver la santé de l'ensemble des collaborateurs. Mme A______ était libérée de son obligation de travailler.

10) Par courrier du 12 juillet 2018, Mme A______ a accusé réception du courrier du 6 juillet 2018 et contesté ces griefs.

11) Par décision du 15 août 2018 anticipée par courriel et envoyée par pli recommandé, la CPEG a licencié Mme A______ pour le 30 septembre 2018, en la libérant de son obligation de travailler avec effet immédiat jusqu'à cette date, son solde de vacances étant compris dans cette période.

Le projet pour lequel elle avait été engagée était complexe de par son ampleur, tant au niveau de l'organisation qu'au niveau économique, et entraînait un fonctionnement qui demandait une grande souplesse et une capacité d'adaptation de l'ensemble des personnes impliquées dans le projet, afin de pouvoir mener à bien les objectifs fixés. Les entretiens et certains événements avaient mis en évidence que ces exigences d'adaptabilité indispensables la mettaient face à des difficultés importantes. Après quatre mois d'activité, elle avait formulé le souhait de pouvoir être rattachée à une autre personne que sa responsable hiérarchique, ce qui n'était pas envisageable.

Par conséquent, la poursuite de la collaboration n'était pas possible et son contrat de travail était résilié. En raison des difficultés d'adaptation relevées et de leur conséquence sur sa santé, elle était libérée de son obligation de travailler avec effet immédiat.

12) Par courrier du 3 septembre 2018 adressé à la CPEG, Mme A______ a contesté la décision précitée et exigé le paiement :

- des salaires des mois d'octobre 2018 à février 2020, soit CHF 170'708.39 ;

- de son treizième salaire au prorata temporis de sa présence, du mois de juillet au mois de septembre 2018, soit CHF 2'510.42.

- CHF 6'346,50 correspondant au solde de ses congés auprès de son ancien employeur qu'elle avait abandonné afin de pouvoir être libérée plus vite ;

- CHF 6'000.- correspondant à six mois de loyer pour la location de son studio genevois et CHF 300.- pour deux mois de location de place de parc.

Elle souhaitait également obtenir son certificat de travail ainsi que le formulaire à présenter à la caisse de chômage.

En substance, elle reprochait à la CPEG de la licencier et de rompre ainsi le contrat de travail par lequel ils étaient liés pour vingt-quatre mois, à compter du 1er mars 2018, et ce malgré ses demandes de réintégrer son poste.

13) Par acte du même jour, Mme A______ a interjeté recours contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après la chambre administrative), en reprenant les mêmes conclusions mais en les amplifiant d'une demande de paiement de CHF 15'000.- de dommages et intérêts pour le préjudice et le licenciement abusif.

La CPEG avait cautionné les mauvais agissements de ses managers, alors que d'autres personnes avaient déjà quitté leur emploi auparavant en raison du comportement de Mme C______. Son employeur n'avait jamais proposé de solution au conflit, et avait refusé celles qu'elle proposait. Il n'avait pas protégé sa santé.

14) Dans ses observations du 12 octobre 2018, la CPEG a conclu au rejet du recours. Les conclusions étaient prises « sous suite de frais et dépens ».

Malgré le délai très court dans lequel le projet devait être terminé et l'impact négatif que le comportement de la recourante avait créé au sein de l'équipe, la CPEG avait agi et sans tarder afin de trouver une solution.

Le licenciement n'était pas abusif. Les problèmes de comportement de Mme A______ avaient un impact négatif sur l'ensemble de l'équipe. Mme A______ n'écoutait pas les instructions de Mme C______ et rencontrait des problèmes relationnels avec deux de ses collègues au moins, soit Mme H______ et Madame I______. Le projet pour lequel Mme A______ avait été engagée était primordial pour la CPEG et devait être terminé dans un délai très court, soit pour le mois de juin 2019.

15) Dans sa réplique du 21 novembre 2018, Mme A______ a confirmé ses précédentes conclusions.

Elle n'avait jamais été avertie que les entretiens qui s'étaient déroulés du 27 juin 2018 au 4 juillet 2018 avaient lieu en vue d'un licenciement.

En raison des agissements de Mme C______, elle avait souffert de dépression, de « burn out », comme l'avait confirmé son médecin. Elle avait fait à son égard plusieurs remarques désobligeantes et humiliantes et l'avait fait passer pour une menteuse et une incompétente. Elle lui avait hurlé dessus devant ses collègues, l'avait menacée et avait systématiquement refusé de mettre ses décisions par écrit. Elle avait « torpillé » son travail et fait de la rétention d'information. Elle n'avait jamais rencontré de problèmes relationnels avec les autres membres de l'équipe. Elle donnait plusieurs exemples de comportements et de remarques de Mme C______ considérés comme discriminatoires et produisait ses échanges de messages avec ses collègues, qui seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit ci-après.

Enfin, elle demandait la suppression d'une phrase contenue dans son certificat de travail, qui ne lui permettait pas en l'état de présenter ce document à un éventuel futur employeur.

16) Le 18 janvier 2019, la CPEG a renoncé à faire usage de son droit à la duplique.

17) Le 22 novembre 2019, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle en présence de Mme A______ et de Monsieur J______, responsable du pôle juridique, représentant la CPEG, assisté de son conseil.

a. Selon celui-ci, la CPEG avait conclu avec Mme A______ un contrat de travail qui n'était pas un contrat à durée déterminée, mais un contrat de durée maximale pour une durée de vingt-quatre mois, soit du 1er mars 2018 au 28 février 2020.

b. Mme A______, également entendue, a confirmé que bien que ce ne fût pas ce qui était initialement prévu, elle avait signé un contrat de durée maximale.

Mme C______ n'était qu'à moitié sa supérieure. Le 9 mai 2018, c'était avec son accord qu'elle avait transmis le lien. L'application était montrable puisqu'elle n'était pas différente de celle qu'ils avaient déjà dévoilée quelques semaines auparavant. Elle admettait également avoir demandé aux testeurs métiers d'arrêter les tests, car les données n'étaient ni stables, ni fiables, suite à un problème de migration. Toutefois, Mme C______ avait été immédiatement informée puisqu'elle se trouvait dans le même bureau. Elle était d'ailleurs immédiatement intervenue en s'opposant de manière sèche à l'arrêt des tests, qui s'étaient finalement poursuivis. Mme C______ lui avait alors dit qu'elle n'avait pas à prendre cette initiative. Toutefois, c'était dans son cahier des charges.

Elle contestait avoir décliné l'invitation à la séance du 25 mai 2018 à 13h00. Elle était partie prendre sa pause car elle ne savait pas que la séance avait lieu à 13h00 et qu'elle en avait la charge, ce d'autant plus que c'était l'heure de sa pause déjeuner. Elle avait été surprise que Mme C______ lui demande le matin même de la séance de préparer les tests. Elle les avait terminés avant d'aller manger et les avait attribués aux testeurs comme Mme C______ le lui avait demandé. L'après-midi, Mme C______ lui avait dit qu'elle aurait dû participer à cette séance. Elle n'avait toutefois pas reçu d'invitation Outlook. Elle ne se considérait pas fautive.

Lors de l'entretien du 25 mai 2018, c'était elle qui avait fait part de ses difficultés, M. E______ lui avait dit que tout allait bien. Il lui avait également dit qu'il « fallait bien faire avec Mme C______ ». Tout le monde savait que M. E______ ne s'entendait pas avec elle et il y avait plusieurs conflits à l'interne.

Elle avait un nouvel emploi depuis le 15 juillet 2019, occupait les mêmes fonctions et cela se passait très bien.

18) Le 20 décembre 2019, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle et d'enquêtes en présence de Mme A______ et de Mme G______, directrice générale adjointe, représentant la CPEG, assistée de son conseil.

a. » Mme C______ a expliqué qu'elle avait travaillé pour la CPEG en tant que consultante externe en 2011 jusqu'en 2014 pour un premier projet, puis avait été engagée depuis 2017, pour un deuxième projet, soit B______, qu'elle dirigeait. En tant que coordonnatrice, elle donnait des instructions qui devaient être exécutées.

Elle avait partagé le bureau de Mmes A______, I______, K______ et H______.

Le premier désaccord professionnel avait eu lieu au mois de mai 2018. Leurs relations n'étaient alors pas mauvaises. Elle lui avait demandé d'organiser une séance tests car M. F______ souhaitait aller de l'avant, bien que l'application ne soit pas prête et que ce serait imparfait. Mme A______ avait exprimé des réticences à les faire et au milieu de la séance, elle l'avait prise au dépourvu en disant aux testeurs : « il y a trop de bugs, on arrête ». Elle avait alors été contrainte et mal à l'aise de la désapprouver publiquement, car ils devaient faire cet état des lieux, conformément aux instructions du directeur général. Fin avril environ, mais en tout cas avant l'entretien du 9 mai 2018, sans lui en parler, Mme A______ avait transmis des liens à un petit groupe d'utilisateurs, sans préciser que c'était imparfait. Elle avait une nouvelle fois été obligée d'intervenir.

Dès la mi-mai, Mme A______ s'était comportée bizarrement, elle ne pouvait rien lui demander. Elle l'évitait et baissait les yeux. Elle sursautait à son approche, mais également à celle des autres.

Mme A______ « tirait à sa propre corde ». Selon ses collègues, soit Mmes I______, H______ et K______, elle souhaitait scinder l'équipe, créant ainsi une mauvaise ambiance. Mme I______, ingénieure de tests à la CPEG, avait exprimé le souhait de ne plus venir travailler, à cause de Mme A______.

b. Selon M. E______, la veille de l'entretien des trois mois, il avait rencontré Mme C______, qui ne lui avait pas fait de commentaire négatif sur Mme A______, mais l'avait informé rencontrer avec elle des problèmes en matière d'organisation, de flexibilité, d'attitude et d'initiatives.

Le 25 mai 2018, il n'avait pas pu mener l'entretien jusqu'à son terme, car Mme A______ était rapidement partie, en pleurs. Il était alors ennuyé, car il avait deux points de vue divergents sur une même situation et une personne qui en souffrait. Les faits rapportés par Mme A______ étant importants, il lui avait demandé de les détailler par écrit ou par pièces la semaine suivante. Il avait reçu un courriel de Mme A______ le 8 juin 2018, détaillant les problèmes rencontrés et déjà évoqués. Mme A______ et Mme C______ avaient accepté de se rencontrer en sa présence le 12 juin 2018. Entre-temps, il avait demandé aux collaborateurs si ces derniers avaient été témoins de cris de Mme C______ envers Mme A______, ce qu'ils avaient contesté. La séance du 12 juin 2018 s'était bien passée, sans éclats de voix. Les deux femmes étant d'accord avec les objectifs fixés, il était sorti confiant de cette séance.

Le 22 juin 2018, Mme D______ lui avait téléphoné afin de le prévenir que Mme A______ l'avait contactée, en pleurs, et qu'elle ne souhaitait plus revenir travailler. Ils avaient alors fixé une réunion début juillet 2018, en présence de Mme D______, M. F______ et de Mme A______, qui était alors en congé maladie. Cette dernière avait fait part des problèmes rencontrés et proposé différentes solutions. Elle souhaitait poursuivre son travail, mais sans devoir collaborer avec Mme C______. C'était envisageable mais cela ne réglait pas les problèmes rencontrés avec les autres collaborateurs, si bien qu'il ne pouvait pas garantir qu'une reprise de son emploi pourrait se faire sereinement.

c. Mme D______ a confirmé qu'ils avaient initialement imaginé un contrat de douze mois, mais s'étaient rendu compte par la suite que ce délai était trop court et avait proposé un contrat d'une durée maximale de deux ans. Mmes A______ et H______ avaient été engagées en même temps, aux mêmes conditions et portaient le titre de chargées ingénieure de test. Elles étaient placées sous la direction de Mme C______. Lors de l'entretien du 4 juillet 2018, plusieurs possibilités avaient été évoquées mais l'organisation liée au projet ne permettait pas de la déplacer.

19) Le 24 janvier 2020, le juge délégué a tenu une seconde audience de comparution personnelle et d'enquêtes en présence de Mme A______ et de M. J______, assisté de son conseil.

a. Mme H______ a été entendue en qualité de témoin.

Elle était employée en tant qu'ingénieure test par la CPEG depuis le mois de février 2018. Mme A______ avait été sa collègue depuis le début de son engagement. Elles partageaient un bureau à cinq et s'entendaient bien. Des tensions dues au projet étaient apparues et ils devaient tous apprendre à travailler ensemble. Beaucoup de conflits avaient été générés sur la partie tests sans que cela ne soit lié spécialement à Mme A______. Les problèmes survenus entre Mmes A______ et C______ étaient surtout dus au fait que, de par son poste de cheffe, cette dernière concentrait certaines tensions.

Le jour où le pape était venu à Genève, elle avait fait du télétravail en raison des embouteillages. Le lendemain, elle avait demandé qu'une séance soit organisée avec Mmes C______ et A______, en raison des difficultés rencontrées la veille en aidant cette dernière à faire des tests à distance. Elle souhaitait pouvoir en parler, car le travail attendu par Mme C______ n'avait pas pu être terminé. Cette séance s'était mal déroulée et Mme A______ était complètement fermée. Elle avait expliqué les difficultés qu'elles avaient rencontrées et les raisons pour lesquelles elle n'était pas arrivée au but fixé. Elle avait fait des propositions avec lesquelles Mme A______ ne semblait pas d'accord. Mme C______ les avait toutefois trouvées bonnes. Mme A______ s'était certainement sentie trahie et une dispute avait éclaté. Elle avait alors dit « si Delphine a toujours raison, elle n'a qu'à le faire ». Elle avait dit « je m'en vais » et avait emporté toutes ses affaires personnelles, comme si elle n'allait pas revenir au travail.

Ses relations avec Mme A______ s'étaient envenimées peu à peu, en raison de son attitude négative qui tirait tout le monde vers le bas et avait nui à son bien-être au travail. D'autres membres de l'équipe, et notamment ses deux autres collègues de bureau, Mmes I______ et K______, s'étaient plaintes du comportement de Mme A______ auprès de Mme C______.

Quasiment depuis le début de leur engagement et en raison des tensions existantes, elle avait souvent vu Mme A______ pleurer. Mme C______ n'en était pas la responsable et ne harcelait pas les collaborateurs.

Elles avaient parfois échangé avec Mme A______ des messages WhatsApp pour faire baisser la pression et ne souhaitait pas les commenter.

b. Monsieur L______, dirigeant d'entreprise et consultant informatique, a été entendu en qualité de témoin. Prestataire externe pour la CPEG depuis 2011, il suivait le projet B______ depuis le début en accompagnant l'équipe de la CPEG.

Il travaillait avec Mme C______ et c'était un peu plus compliqué de collaborer avec elle qu'avec d'autres personnes. Il ne partageait pas toujours son point de vue. Il avait avec elle des divergences de pratiques et tous deux travaillaient différemment. Elle n'en faisait qu'à sa tête, mais c'était effectivement à elle de prendre les décisions. Par contre, elle manquait parfois de transparence en faisant les choses différemment que ce qui avait été décidé.

Mme A______, avec laquelle il avait collaboré pendant quelques mois sans rencontrer de problème, lui avait parlé des difficultés professionnelles qu'elle rencontrait avec Mme C______. Il avait perçu ces tensions, de même qu'entre Mme C______ et d'autres personnes.

c. Monsieur M______, consultant en gestion de projet informatique, a également été entendu en qualité de témoin. Externe à la CPEG, il s'y était rendu tous les jours en 2018 et avait été ainsi en contact avec les employés qui s'occupaient du projet B______.

Il ne connaissait pas Mme A______, mais Mme C______. Il avait eu de bons contacts avec elle et malgré des divergences de point de vue, son approche était logique. En tant que directrice de projet, c'était à elle de décider et de donner des directives. Il y avait eu des tensions comme dans tout projet.

20) Dans ses observations après enquêtes du 10 février 2020, la CPEG a persisté dans ses conclusions.

Les auditions des parties et des témoins avaient démontré l'exactitude des motifs invoqués à l'appui de la résiliation du contrat de travail. Il avait été établi que les causes du litige étaient à trouver dans un problème relationnel, à tout le moins comportemental, de la part de Mme A______, dont les compétences techniques n'étaient pas remises en question. De par son comportement, elle avait instauré un climat de tensions et de conflits au sein de son équipe.

21) Le 15 février 2020, Mme A______ a également persisté dans ses conclusions.

Depuis le mois de juillet 2019, elle occupait un poste de test manager dans le cadre duquel elle ne rencontrait aucun problème relationnel, quand bien même le projet était plus important que celui de la CPEG et les délais tout aussi courts. Elle pouvait ressentir un véritable esprit d'équipe, généré par tous les membres du projet et de la direction. Elle reprenait confiance en elle après son expérience à la CPEG.

22) Le 2 mars 2020, la cause a été gardée à juger.

23) Le contenu des pièces produites sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 46 du règlement du personnel de la CPEG du 21 novembre 2013 (ci-après : le règlement).

2) a. Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 41 LPA, comprend, en particulier, le droit pour la personne concernée de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. En tant que droit de participation, le droit d'être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu'elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2 et les références citées ; ATA/209/2020 du 25 février 2020).

Aux termes de l'art. 43 al. 1 du règlement, les membres du personnel ont la possibilité de s'exprimer sur les motifs invoqués à l'appui de la résiliation.

b. Le droit d'être entendu de la recourante a été respecté dans le cadre de la procédure de licenciement.

En effet, elle a été prévenue par courrier du 6 juillet 2018 des intentions de la CPEG, soit de la licencier, et a pu faire valoir son point de vue dans son courrier du 12 juillet 2018. Il sera précisé en tant que de besoin qu'aucun élément ne permet de penser que les entretiens qui se sont déroulés entre le 27 juin et le 4 juillet 2018 ont été fixés en vue d'un licenciement. Au contraire, ces discussions se sont inscrites dans la démarche d'apaisement entreprise par sa hiérarchie.

Ce grief sera par conséquent écarté.

3)  La CPEG est un établissement de droit public du canton de Genève (art. 2 al. 1 de la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève du 14 septembre 2012 - LCPEG - B 5 22).

4) a. Les rapports de travail entre la CPEG et son personnel sont régis par le règlement (art. 1 du règlement). Si celui-ci n'en dispose pas autrement, les dispositions pertinentes de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), s'appliquent par analogie aux rapports de travail (art. 47 al.1 du règlement).

b. Les rapports de travail découlent de la conclusion d'un contrat de travail de droit public établi en la forme écrite (art. 4 ch. 1 1ère phrase du règlement). La création, la modification et/ou la prolongation des rapports de travail, la limitation de leur durée et leur fin, ainsi que toute modification du contrat de travail ne sont valables que si elles sont établies en la forme écrite (art. 4 ch. 2 du règlement).

c. Sauf disposition contraire du contrat de travail, les rapports de travail sont conclus pour une durée indéterminée (art. 5 du règlement).

5) La recourante soutient avoir accepté l'engagement pour un contrat à durée déterminée. Toutefois, entendue par le juge délégué le 22 novembre 2019, elle a admis que, bien que ce ne fût pas ce qui était initialement prévu, elle a signé un contrat de durée maximale, ce que le responsable du pôle juridique au sein de la CPEG, ainsi que la responsable RH ont confirmé lors de leurs auditions.

Selon la clause 2 du contrat, il était effectivement conclu pour une durée maximale de vingt-quatre mois et pouvait, conformément à la clause 3, être résilié dans un délai d'un mois pour la fin d'un mois.

Par conséquent, il doit être confirmé que le contrat était un contrat de durée maximale, résiliable.

6) La politique des RH vise à assurer le fonctionnement optimal de l'administration de la CPEG et à garantir une gestion des RH qui soit efficiente, respectueuse et socialement responsable (art. 2 al. 1 du règlement).

Elle met en oeuvre les mesures propres à assurer notamment la protection de la personnalité, de la santé et de l'intégrité, ainsi que la sécurité au travail de son personnel (art. 2 al. 2 let. d).

La CPEG protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité des membres de son personnel. Elle manifeste les égards voulus pour leur santé et veille au maintien de la moralité (art. 24 al. 1 du règlement). L'art. 328 CO ainsi que les règles internes relatives à la protection de la personnalité sont applicables pour le surplus (art. 24 al. 3 du règlement).

7) Le personnel de la CPEG est soumis à des devoirs concernant l'attitude générale à observer, soit notamment d'entretenir des relations dignes et correctes avec ses supérieurs, ses collègues et ses subordonnés ; il s'efforce de faciliter les relations avec ces personnes et avec les tiers. Il se doit de s'entraider et de se suppléer notamment en cas de maladies ou de congés (art. 27 al. 3 du règlement).

8) Selon la clause 3 du contrat conclu par les parties, celui-ci pouvait être résilié dans un délai d'un mois pour la fin d'un mois.

En cas de licenciement abusif, les dispositions des art. 336ss CO sont applicables par analogie (art. 39 al. 1 du règlement).

Aux termes de l'art. 336 CO, le congé est abusif notamment lorsqu'il est donné par une partie pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise (let. a), en raison de l'exercice par l'autre partie d'un droit constitutionnel, à moins que l'exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise (let. b), seulement afin d'empêcher la naissance de prétentions juridiques de l'autre partie, résultant du contrat de travail (let. c), parce que l'autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail (let. d), parce que l'autre partie accomplit un service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, en vertu de la législation fédérale, ou parce qu'elle accomplit une obligation légale lui incombant, sans qu'elle ait demandé de l'assumer (let. e).

Selon la jurisprudence fédérale, un licenciement n'est pas abusif lorsque le caractère difficile d'un employé a contribué à créer une situation conflictuelle sur le lieu de travail qui se répercutait négativement sur le travail en commun et lorsque l'employeur avait pris auparavant toutes les mesures que l'on pouvait attendre de lui pour désamorcer le conflit (ATF 132 III 115 consid. 2.2, Jdt 2006 I p. 152 du 20 décembre 2015 ; ATA 1807/2019 du 17 décembre 2019 consid. 11c).

9) a. La recourante soutient que sa supérieure a fait à son égard plusieurs remarques désobligeantes et humiliantes, la faisant passer pour une incompétente. Elle lui aurait également « hurlé dessus » devant ses collègues et sa hiérarchie ne l'aurait pas protégée.

Or, le 25 mai 2018, à l'issue de la période d'essai de trois mois, la recourante a fait part au responsable de la division systèmes d'information des difficultés rencontrées avec sa supérieure. Ce dernier a réagi rapidement, puisqu'il a convié les personnes intéressées pour une médiation le 12 juin 2018 et qu'ils ont pu, durant cette séance, mettre à jour la description de la fonction de la recourante et apaiser les tensions.

Dix jours plus tard, soit le 22 juin 2018, lorsqu'un nouveau conflit a éclaté entre la recourante et sa responsable, le directeur général, M. F______, et le responsable de la « division systèmes d'information », M. E______, ont été immédiatement informés et une nouvelle séance, à laquelle ils ont participé, a été organisée rapidement, soit le 4 juillet 2018, afin d'évoquer les nouvelles difficultés rencontrées.

Par conséquent, il ne saurait être reproché à l'intimée de ne pas avoir réagi et de ne pas avoir tenté d'apaiser les tensions et de trouver des solutions à leur mésentente.

De plus, l'instruction de la cause n'a pas permis de démontrer que les accusations portées par la recourante envers sa responsable hiérarchique étaient conformes à la réalité. En effet, si les prestataires externes ont expliqué qu'il n'était pas toujours simple de collaborer avec cette dernière, en raison de leurs opinions divergentes et de leurs différentes méthodes de travail, leur collaboration se passait toutefois très bien. Ils ont également précisé que Mme C______ occupait un poste à responsabilité qui exigeait d'elle des prises de décisions et une certaine autorité. Mme H______, qui était également sous la direction de Mme C______, a confirmé que la recourante n'avait pas été victime d'harcèlement et que si elle l'avait vu souvent pleurer, c'était en raison des tensions existantes, sans que leur supérieure ne puisse en être tenue pour responsable. Enfin, également entendu par le juge délégué le 20 décembre 2019, M. E______ a expliqué qu'à la suite des plaintes reçues de la recourante, il avait demandé aux collaborateurs s'ils avaient été témoins des hurlements de Mme C______ au détriment de la recourante, ce qu'ils avaient nié.

Les messages versés au dossier ne peuvent être considérés comme probants, de par leur contenu, mais également car ils émanent d'échanges informels entre collègues qui, comme l'a précisé Mme H______ devant le juge délégué, sont parfois nécessaires pour faire baisser la pression.

Il sera encore relevé que Mme C______ a déjà eu l'occasion de travailler pour la CPEG pour un premier mandat entre 2011 et 2014 et qu'elle a été réengagée pour le projet B______ depuis 2017, ce qui atteste que son travail et les contacts qu'elle entretient dans le cadre de celui-ci sont appropriés et appréciés.

Enfin, entendu le 20 décembre 2019, M. E______ a expliqué que la solution proposée par la recourante, soit de ne plus collaborer avec Mme C______, n'avait pas été retenue, notamment car cela ne réglait pas les problèmes rencontrés avec les autres collaborateurs.

Pour ces motifs, l'intimée n'a pas failli à ses devoirs d'employeur. Elle a tenu compte de son obligation de protéger la personnalité de la recourante, étant rappelé qu'elle devait également veiller à celle des autres collaborateurs en souffrance, en raison du comportement adopté par celle-ci. La recourante n'a pas démontré la véracité de ses accusations et la procédure n'a pas permis de démontrer l'existence d'une situation de harcèlement. Par conséquent, ce grief sera écarté, la protection de la personnalité de la recourante ayant été respectée.

b. Conformément à la décision querellée, la recourante a été licenciée au motif des difficultés rencontrées dans le cadre de son activité, soit un manque de souplesse et l'absence de capacité à s'adapter, qualités requises de l'ensemble des collaborateurs employés dans le cadre de ce projet complexe.

Dans son rapport du 2 juillet 2018, la responsable hiérarchique de la recourante a évoqué les difficultés rencontrées avec cette dernière. Elle a notamment expliqué que la recourante entretenait des contacts compliqués avec ses collègues, ce qui a été confirmé par l'instruction de la cause. En effet, entendue le 24 janvier 2020 par le juge délégué, Mme H______, engagée en même temps et au même titre que la recourante, a confirmé que, si leurs rapports étaient bons au début de la collaboration, la recourante avait par la suite montré une attitude négative, ce qui n'était pas resté sans conséquence sur l'ambiance au travail, dès lors qu'elle démotivait ses collègues. Elle n'était pas la seule à l'avoir ressenti, deux autres membres de l'équipe, Mmes I______ et K______, s'étant également plaintes de son comportement. Entendue par le juge délégué le 20 décembre 2019, Mme C______ a également confirmé que trois collègues de la recourante, soit Mmes H______, I______ et K______ pensaient que cette dernière essayait de scinder l'équipe, ce qui créait une mauvaise ambiance.

Tant Mme C______ que Mme H______ ont évoqué dans le cadre de la procédure la journée du 22 juin 2018, lors de laquelle une dispute a éclaté avec la recourante. Ce jour-là, Mme H______ s'est plainte de sa collaboration avec la recourante, celle-ci lui faisant constamment des reproches face aux difficultés rencontrées dans le cadre des tests. Mme C______ ayant trouvé les solutions proposées par Mme H______ pertinentes, la recourante était partie furieuse, les laissant toutes les deux dans l'incompréhension de cette réaction.

Il a également été établi que la recourante a pris des initiatives sans l'accord de sa supérieure, ce qu'elle a elle-même confirmé. En effet, entendue le 22 novembre 2019 par le juge délégué, elle a admis avoir transmis le lien le 9 mai 2018, mais également avoir demandé aux testeurs métiers d'arrêter les tests. Elle a toutefois précisé que, dans les deux cas, sa supérieure avait été informée. Or, si tel était le cas, Mme C______ ne l'avait pas autorisée à procéder ainsi. Par conséquent, et quand bien même, comme elle l'a exprimé devant la chambre de céans, la recourante considérait Mme C______ comme n'étant « qu'à moitié » sa supérieure, elle devait obtenir son accord avant de procéder.

Enfin, si comme le soutient la recourante, elle n'a pas reçu d'invitation pour la séance de 13h00 le 25 mai 2018, il pouvait être attendu de sa part, dans le cadre d'un projet complexe, exigeant d'être terminé dans un délai très court, et comportant d'importants engagements financiers, qu'elle renonce à son déjeuner.

Ces problèmes sont rapidement apparus. M. E______ a en effet confirmé que, la veille de l'entretien du 25 mai 2018, soit au terme de la période des trois mois d'activité, Mme C______ l'avait informé qu'elle rencontrait avec la recourante des problèmes en matière d'organisation, de flexibilité, d'attitude et d'initiatives.

Enfin, il sera encore précisé qu'il n'est pas contradictoire que la recourante ait vu son contrat confirmer au terme de la période d'essai, dès lors que son employeur n'a formulé aucun reproche quant à la qualité de son travail. L'échec de son intégration au sein de son équipe ne remet nullement en cause ses capacités professionnelles.

La procédure a toutefois permis de confirmer l'existence du motif ayant mené à la résiliation du contrat de travail de la recourante, soit un problème relationnel, tant avec sa supérieure hiérarchique qu'avec certaines de ses collègues. Son comportement négatif mettait à mal l'ambiance au sein de l'équipe et le bien-être de l'ensemble des collaborateurs.

Par conséquent, il doit être retenu que la recourante n'a pas réussi à s'intégrer en tant que membre de ce projet d'envergure, devant être réalisé dans des délais très courts. Avec un terme au mois de juin 2019, l'ensemble des collaborateurs devaient faire un effort pour le mener à bien. Confrontée à un problème d'entente au sein de l'équipe, et en l'absence d'une issue favorable à ses tentatives de médiation, il ne pouvait être exigé de l'intimée qu'elle laisse la situation perdurer au détriment de l'avancement du travail de toute une équipe.

Pour ces motifs, il doit être constaté que le licenciement prononcé n'est pas abusif et celui-ci doit par conséquent être confirmé.

10) La recourante conclut à l'établissement d'un nouveau certificat de travail, dès lors que celui qui lui a été remis par la CPEG ne reflète pas la réalité et ne lui permet pas de le présenter à un éventuel futur employeur, en raison de la phrase « cependant, les difficultés d'intégration auxquelles elle avait été confrontée ne lui avaient pas permis de poursuivre son activité ».

a. Selon l'art. 330 a CO, applicable par renvoi de l'art. 47 al. 1 du règlement, le travailleur peut demander en tout temps à l'employeur un certificat portant sur la nature et la durée des rapports de travail, ainsi que sur la qualité de son travail et sa conduite (al. 1). À la demande expresse du travailleur (uniquement : BGE 129 III 177 S. 177), le certificat ne porte que sur la nature et la durée des rapports de travail (al. 2).

Le but du certificat de travail est de favoriser l'avenir économique du travailleur et ses recherches d'emploi (ATF 107 IV 35). Sauf lorsque le travailleur le demande, le certificat doit être complet, soit contenir la description précise et détaillée de l'activité exercée et des fonctions occupées dans l'entreprise, les dates de début et de fin des rapports de travail, l'appréciation de la qualité du travail effectuée, ainsi que celle relative à l'attitude du travailleur dans l'entreprise (Christian FAVRE/Charles MUNOZ/Rolf A. TOBLER, Le contrat de travail, Code annoté, 2010, art. 330 a CO, p. 126 et références citées).

Si le certificat de travail doit être conforme à la réalité, il doit être dépourvu de termes péjoratifs ou ambigus, ainsi que d'allusions dissimulées ou inutilement dépréciatives. Une appréciation négative de la qualité du travail ou de la conduite du travailleur peut être exprimée pour autant qu'elle soit pertinente et fondée (ibid.).

Le travailleur qui estime que le certificat de travail qui lui a été remis ne reflète pas la réalité ou est incomplet peut demander à l'employeur de le modifier en proposant lui-même une version de remplacement. Dans le cadre de l'action en justice, il appartient au travailleur de prouver que le contenu du certificat n'est pas conforme à la réalité. L'employeur devra collaborer à l'instruction de la cause, en motivant les faits qui fondent son appréciation négative. S'il refuse de le faire ou ne parvient pas à justifier sa position, le juge pourra considérer que la demande de rectification est fondée (Christiane BRUNNER/Jean-Michel BÜHLER/
Jean-Bernard WAEBER/Christian BRUCHEZ, Commentaire du contrat de travail, troisième édition, 2004, p. 182 n. 3, p. 183 n. 5).

b. En l'espèce, le texte que la recourante souhaite voir supprimer dans son certificat comporte une appréciation qui est conforme à la réalité. La procédure a en effet permis de démontrer l'existence des difficultés d'intégration qu'elle a rencontrées.

Les appréciations par trop édulcorées et laissant croire à une situation très éloignée de la réalité dans un certificat de travail, ne rendent pas service à l'employée, car elles discréditent l'intégralité des affirmations contenues dans le certificat dans le cas où l'employeur potentiel futur apprend le licenciement dont la recourante a été l'objet. Une version n'occultant pas les difficultés survenues, mais laissant apparaître les qualités et les compétences de l'employée qui lui ont été reconnues - car il y en a - favorise la prise d'un nouveau départ, car elle invite le futur employeur, comme l'employée, à construire une nouvelle relation de travail sur des bases claires, celles-ci étant nécessaires à la relation de confiance qui doit s'instaurer entre l'employée et son nouvel employeur, charge au premier d'adopter une attitude constructive à cet égard, qui tient compte des événements survenus, et de démontrer une volonté sincère de ne pas reproduire ce qui s'est passé (ATA/271/2015 du 17 mars 2015).

Par conséquent, la recourante peut demander à ce que son certificat soit complété par l'ajout de ses compétences professionnelles, reconnues par son employeur, ou demander expressément à ce qu'il soit modifié et ne porte que sur la nature et la durée des rapports de travail.

Il convient ainsi de conserver la première partie du certificat de travail du 29 octobre 2018 jusqu'à « de nature dynamique... », ce paragraphe devant être soit complété, soit supprimé.

Par conséquent, le recours sera admis sur ce point.

11) Pour autant que cette conclusion soit toujours d'actualité, dès lors que la recourante a retrouvé un emploi dès le mois de juillet 2019, il sera donné acte à la CPEG qu'elle doit fournir à la recourante les documents à présenter à la caisse de chômage avant le 30 mai 2020.

12) Au vu de ce qui précède, le recours interjeté contre le licenciement sera rejeté pour l'essentiel. Un émolument de procédure de CHF 1'000.- sera mis à la charge de Madame A______, qui succombe dans une large mesure (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de CHF 500.-, à la charge de la CPEG, lui sera par ailleurs allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 septembre 2018 par Madame A______ contre la décision de la caisse de prévoyance de l'tat de Genève (CPEG) du 15 août 2018 ;

au fond :

l'admet partiellement dans le sens des considérants :

donne acte à la caisse de prévoyance de l'État de Genève (CPEG) de compléter ou de modifier le certificat de travail à remettre à Madame A______, en accord avec cette dernière au sens des considérants ;

donne acte à la caisse de prévoyance de l'État de Genève (CPEG) qu'elle doit fournir à la recourante les documents à présenter à la caisse de chômage avant le 30 mai 2020.

le rejette pour le surplus ;

met un émolument de procédure de CHF 1'000.- à la charge de Madame A______ ;

alloue à Madame A______ une indemnité de procédure de CHF 500.-, à la charge de la caisse de prévoyance de l'État de Genève (CPEG) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt (la présente décision) peut être porté(e) dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt (la présente décision) et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, ainsi qu'à Me Paul Michel, avocat de la caisse de prévoyance de l'État de Genève (CPEG).

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme Cuendet, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :