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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/544/2020

ATA/304/2020 du 20.03.2020 sur JTAPI/224/2020 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/544/2020-MC ATA/304/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 mars 2020

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______, alias B______
représenté par Me Roxane Sheybani, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 mars 2020 (JTAPI/224/2020)


EN FAIT

1) Monsieur B______, né le ______ 1999, originaire de Guinée, a déposé une demande d'asile en Suisse le 21 janvier 2017, sur laquelle, par décision du
6 juin 2017, le Secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) n'est pas entré en matière, prononçant simultanément son renvoi de Suisse.

2) La prise en charge de l'intéressé a été confiée au canton du Fribourg.

3) Il ressort du casier judiciaire de l'intéressé les condamnations suivantes :

- le 6 novembre 2017, le Tribunal de police de Genève l'a condamné à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 10.-, avec sursis à l'exécution de la peine et délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'une amende de CHF 300.- pour opposition aux actes de l'autorité (art. 286 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), et contravention selon l'art. 19a de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (art. 19a LStup) ;

- le 22 mars 2019, M. B______ a été condamné par la Chambre pénale d'appel et de révision de Genève à une peine pécuniaire de trente jours-amende à CHF 10.-, avec sursis à l'exécution de la peine et délai d'épreuve de trois ans, pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20).

4) Le 4 mai 2017, le commissaire de police a prononcé à l'encontre
M. B______ une interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de trois mois en vertu de l'art. 74 LEI. La décision n'a pas été contestée.

5) Le 1er mars 2018, M. B______ a été refoulé à destination de l'Espagne.

6) Revenu en Suisse, l'intéressé s'est vu notifier, le 1er octobre 2018, une décision du SEM d'interdiction d'entrée en Suisse valable du 21 février 2018 au 20 février 2021.

7) Par jugement du 12 octobre 2018, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a confirmé une interdiction d'accès au territoire genevois pendant une durée de trois mois. L'intéressé avait été condamné pour « trafic de stupéfiants à deux reprises » et avait été retrouvé en possession de marijuana. Le jugement n'a pas fait l'objet d'un recours.

8) Par jugement du 14 février 2019, le TAPI a confirmé une décision d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pendant douze mois. Ses « nombreuses condamnations pénales ne l'avaient pas dissuadé de continuer à s'adonner à du trafic de stupéfiants. Ces éléments montraient son mépris des décisions judiciaires ».

9) a. Le 6 février 2020, l'intéressé a été interpellé par les services de police à la rue de la Navigation, à Genève, pour infractions au CP (faux dans les certificats étrangers), à la LStup (trafic de stupéfiants) et à la LEI (séjour illégal en Suisse, ne pas s'être conformé à une interdiction d'entrée en Suisse et conditions d'entrée en Suisse non respectées).

Il ressort du rapport d'arrestation que les services de police ont procédé au contrôle de M. B______, lequel a présenté une carte d'identité portugaise au nom d'A______.

Lors de la palpation de sécurité de M. B______, il était porteur, dissimulées dans une chaussette, de CHF 8'500.- et EUR 720.-.

b. Entendu par les services de police, M. B______ a déclaré se savoir faire l'objet d'une interdiction d'entrée sur le territoire suisse et que les sommes d'argent retrouvées, dissimulées dans une chaussette, provenaient de la vente d'une voiture. Il a indiqué, dans un premier temps qu'il n'avait jamais été consommateur de stupéfiants, puis, sur question des services de police, qu'il avait fumé de la CBD en Suisse avec un homme qu'il avait connu au Portugal et que ce dernier n'avait pas aimé ce qu'ils avaient fumé. Il a ajouté, suite à l'interrogatoire des policiers quant à la raison de l'envoi de photos d'ecstasy à un contact par l'intéressé, qu'il ne se rappelait plus de ces pilules, mais a confirmé qu'il s'agissait bien d'ecstasy. Il a précisé ne pas s'adonner au trafic de stupéfiants et vivre à Annecy en France. S'agissant de sa situation personnelle, il n'avait ni famille, ni attaches particulières en Suisse et était démuni de moyens de subsistance, l'argent retrouvé sur lui ayant été saisi.

10) Par ordonnance pénale du 7 février 2020, le Ministère public a reconnu M. B______ coupable de faux dans les certificats (art. 252 CP cum art. 255 CP) et d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI, et condamné à une peine privative de liberté de nonante jours. Il a notamment été retenu que la carte d'identité portugaise grâce à laquelle il s'était identifié sous le nom d'A______ ne lui appartenait pas.

11) La police a organisé un transport de type Jail-Transport-System afin d'acheminer M. B______ dans le canton de Fribourg.

12) Le 7 février 2020, en application de l'art. 74 LEI, le commissaire de police a prononcé à l'encontre de M. B______ une mesure d'interdiction d'accès au canton de Genève pour une durée de douze mois.

13) M. B______ a formé immédiatement opposition contre cette décision devant le commissaire de police.

14) Lors de l'audience du 2 mars 2020 devant le TAPI, M. B______ a maintenu que la carte d'identité portugaise qu'il avait présentée à la police au nom d'A______ était bien la sienne et qu'il s'agissait de sa véritable identité. Il avait déposé, sous l'identité de B______, une demande d'asile en Suisse le
21 janvier 2017. Il avait acquis la nationalité portugaise en décembre 2019. C'était sa famille qui s'était occupé de ces démarches.

Il n'avait pas entamé de démarches récemment auprès de la représentation portugaise en Suisse afin de démontrer qu'il était bien M. A______. Il avait eu beaucoup à faire ces derniers temps car sa compagne allait accoucher dans deux semaines. Elle demeurait à Villeneuve et il vivait avec elle.

Son intérêt à pouvoir demeurer sur le territoire genevois était lié à ses tentatives de trouver une formation ou un travail. Il était dans l'attente de trois réponses d'employeurs potentiels.

Il avait déposé sa demande d'asile sous le nom de B______ car, lors de son voyage vers l'Europe, il avait traversé l'Algérie et le Maroc. Dans ces pays, il ne lui était pas possible d'obtenir de l'aide et notamment de la nourriture s'il n'avait pas un prénom faisant référence à la culture musulmane. Il avait donc choisi ce nom. Lorsqu'il était arrivé finalement en Suisse, on lui avait conseillé d'utiliser le même nom que celui sous lequel il avait été enregistré à son arrivée en Espagne. C'était plus tard, grâce à l'aide de son actuelle compagne, d'origine portugaise, qu'il avait pu retrouver sa famille en Guinée, dont il n'avait plus de nouvelles depuis neuf ans. C'était ensuite sa famille qui avait appuyé ses démarches en vue d'obtenir la nationalité portugaise.

Il a maintenu que la personne dont la photographie figurait sur un passeport au nom de M. C______ n'était pas lui-même.

Son amie s'appelait Madame D______. Elle était née le ______ 1994.

Ses recherches d'emploi visaient le métier de plongeur ou d'aide-cuisinier.

Concernant l'argent retrouvé sur lui lors de son arrestation, il servait d'intermédiaire dans la vente de la voiture. Il ne disposait pas du contrat entre l'acheteur et le vendeur, mais il avait dit à ce dernier que son argent avait été confisqué et qu'il devait s'adresser aux autorités pour le récupérer. Le vendeur était parti récemment au Liban où son père était décédé et n'avait pas pu entamer les démarches.

Il avait l'intention de « reprendre » la question de l'interdiction d'entrée en Suisse prononcée sous son identité de B______.

15) Par jugement du 2 mars 2020, le TAPI a rejeté l'opposition formée par M. B______ contre la décision d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée précitée et l'a confirmée.

16) Par acte du 12 mars 2020, M. B______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à son annulation et à la levée de l'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pendant douze mois. Il sollicitait l'octroi de l'effet suspensif pour pouvoir donner suite aux réponses qu'il attendait de potentiels employeurs.

Sa compagne devait accoucher le 23 mars 2020. Il produisait notamment une attestation de grossesse. Il attendait trois réponses d'employeurs dans le canton de Genève. Une demande de suspension définitive de son interdiction d'entrée en Suisse serait bientôt déposée, dès la restitution de ses papiers d'identité par le Ministère public. Il était important qu'il puisse prendre un emploi au vu de ses nouvelles charges.

S'agissant de son identité, le fardeau de la preuve d'un fait dont elle entendait tirer une conséquence juridique appartenait à l'autorité. En l'absence de preuves, elle devait se fier aux déclarations de l'administré. Le jugement n'examinait pas le bien-fondé des raisons, pourtant motivées, pour lesquelles il avait été contraint de prendre une fausse identité. C'était en conséquence à tort que le jugement retenait que l'identité du recourant qui résultait des documents portugais n'étaient pas sa vraie identité.

En application de l'accord entre la Confédération suisse et la Communauté européenne et ses Etats membres sur la libre circulation des personnes du 21 juin 1999 (ci-après : ALCP), en qualité de ressortissant portugais il était autorisé à résider sur le territoire helvétique. La condition de l'illégalité du séjour en Suisse n'était en conséquence pas réalisée. Par ailleurs, dès la naissance de son enfant, il aurait droit à la délivrance d'une autorisation de séjour, la jurisprudence admettant le regroupement familial inversé.

La seconde condition cumulative de l'art. 74 al. 1 let. a LEI n'était pas réalisée. Le recourant n'avait été condamné que pour consommation de drogue et non pour trafic. C'était à tort que le TAPI avait déduit de la seule possession de la somme de CHF 10'000.- un comportement criminel. Le jugement n'indiquait pas non plus pour quels motifs il avait écarté les allégations du recourant.

Enfin, la décision était inopportune.

17) Le commissaire de police a conclu au rejet du recours. M. B______ avait été interpellé six fois dans une zone notoire de trafics de drogues en tous genres, dont deux fois pour vente de marijuana et trois fois en possession de marijuana ou de cocaïne. Il avait fait l'objet de quatre interdictions de pénétrer dans le canton de Genève prononcées à son encontre par le commissaire de police et deux de ses trois condamnations définitives désormais inscrites dans son casier judiciaire concernaient des infractions à la LStup.

18) Le recourant a transmis un acte de naissance le concernant, actualisé, émis par le consul général du Portugal.

19) Interpellé, le commissaire a persisté dans ses conclusions.

Le consul général du Portugal à Genève n'avait aucune compétence en matière de vérification de la légitimité de pièces officielles. Cette compétence étant du ressort exclusif des services spécialisés au Portugal. D'autre part, M. B______ faisait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse en vigueur jusqu'au 20 février 2021. Ce seul fait suffisait au rejet du recours, si tant est même que celui-ci soit recevable, démuni de tout intérêt pratique au regard de la décision prononcée le 21 février 2018 par le SEM à l'endroit du recourant.

20) Dans sa réplique, le recourant a persisté dans ses conclusions.

21) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

La question de l'intérêt au recours, compte tenu de la décision d'interdiction d'entrée en cours, souffrira de rester indécise en l'état compte tenu de ce qui suit.

2) Selon l'art. 10 al. 2 1ère phr. de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 13 mars 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

La chambre administrative est en outre compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 2ème phr. LaLEtr).

3) a. Aux termes de l'art. 74 al. 1 let. a LEI, l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas pénétrer dans une région déterminée si celui-ci n'est pas titulaire d'une autorisation de courte durée, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation d'établissement et trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics. Cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants.

L'art. 6 al. 3 LaLEtr prévoit que l'étranger peut être contraint à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment suite à une condamnation pour vol, brigandage, lésions corporelles intentionnelles, dommages à la propriété ou pour une infraction à la LStup.

b. L'interdiction de pénétrer dans une région déterminée ne constitue pas une mesure équivalant à une privation de liberté au sens de l'art. 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et n'a donc pas à satisfaire aux conditions du premier alinéa de cette disposition (Tarkan GÖKSU, in Martina CARONI/Thomas GÄCHTER/Daniela TURNHERR [éd.], Bundesgesetz über die Ausländerinnen und Ausländer, Berne, 2010 ; Andreas ZÜND in Marc SPESCHA/Hanspeter THÜR/Peter BOLZLI, Migrationsrecht, 2ème éd., 2013, ad art. 74, p. 204 n. 1).

Selon le message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993 (FF 1994 I 325), les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour et d'établissement n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement ; s'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle de l'étranger concerné, « le seuil, pour l'ordonner, n'a pas été placé très haut » ; il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics.

4) a. La jurisprudence fédérale admet que la mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prévue à l'art. 74 LEI peut s'appliquer à l'entier du territoire d'un canton (arrêts du Tribunal fédéral 2A.253/2006 du 12 mai 2006 ; 2C_231/2007 du 13 novembre 2007), même si la doctrine relève que le prononcé d'une telle mesure peut paraître problématique au regard du but assigné à celle-ci (Tarkan GÖKSU, op. cit., p. 725 n. 7). La portée de l'art. 6 al. 3 LaLEtr, qui se réfère à cette disposition et en reprend les termes, ne peut être interprétée de manière plus restrictive. C'est en réalité lors de l'examen du respect par la mesure du principe de la proportionnalité que la question de l'étendue de la zone géographique à laquelle elle s'applique doit être examinée.

b. À cet égard, les mesures doivent être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4). En particulier, la délimitation géographique et la durée de la mesure doivent être prises en considération en fonction du but poursuivi. En matière d'interdiction de pénétrer sur une partie du territoire, le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c ; ATA/748/2018 du 18 juillet 2018 consid. 4b).

c. La mesure d'interdiction de pénétrer dans un périmètre déterminé vise en particulier à combattre le trafic de stupéfiants, ainsi qu'à maintenir les requérants d'asile éloignés des scènes de la drogue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_808/2011 du 24 mai 2012 consid. 1.2 ; 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1).

De jurisprudence constante, constitue une menace pour les tiers et une grave mise en danger de leur vie ou de leur intégrité, la participation à un trafic de stupéfiants comme la cocaïne, compte tenu de la dangerosité de ce produit (ATA/142/2012 du 14 mars 2012 ; ATA/118/2011 du 16 février 2011 ; ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/185/2008 du 15 avril 2008).

Des indices concrets de délits commis dans le milieu de la drogue ou des contacts avec des extrémistes suffisent à justifier une telle mesure, de même que la violation grossière des règles tacites de la cohabitation sociale (ATA/607/2013 du 12 septembre 2013 consid. 4 ; ATA/46/2013 du 25 janvier 2013 consid. 3 et les références citées).

Le simple soupçon qu'un étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue justifie une mesure prise en application de l'art. 74 al. 1 let. a LEI ; en outre, de tels soupçons peuvent découler du seul fait de la possession de stupéfiants destinés à sa propre consommation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3.1 et les arrêts cités). De plus, même si la simple présence en des lieux où se pratique le commerce de la drogue ne suffit pas à fonder un soupçon de menace à l'ordre et à la sécurité publics, tel est le cas lorsque la personne concernée est en contacts répétés avec le milieu de la drogue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_437/2009 précité consid. 2.1). Le Tribunal fédéral a du reste confirmé une telle mesure visant un recourant qui avait essentiellement été condamné pour de simples contraventions à la LStup (arrêt du Tribunal fédéral 6B_808/2011 précité).

5) a. L'art. 74 LEI ne précise ni la durée que peut ou doit fixer la mesure, pas plus qu'il ne précise quelles sont les autorités compétentes.

b. S'agissant de la durée des mesures prévues à l'art. 74 LEI, le Tribunal fédéral a précisé qu'elles devaient dans tous les cas répondre au principe de proportionnalité, c'est-à-dire être adéquates au but visé et rester dans un rapport raisonnable avec celui-ci, en particulier au regard de la taille du périmètre concerné et de la durée de la mesure (ATF 142 II 1 consid. 2.3). Plus spécifiquement, elles ne pouvaient pas être ordonnées pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c). Des durées inférieures à six mois n'étaient guère efficaces (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 précité consid. 4.2) ; vers le haut, des mesures d'une durée d'une année (arrêt du Tribunal fédéral 2C_330/2015 du 26 novembre 2015 consid. 3.2 ; ATA/1347/2018 du 13 décembre 2018 consid. 6), voire de deux ans (arrêt du Tribunal fédéral 2C_828/2017 du 14 juin 2018 consid. 4.5) ont été admises.

6. En l'espèce, M. B______ conteste le principe de la mesure d'interdiction.

a. S'agissant de la première condition de l'art. 74 al. 1 let. a LEI, M. B______ est originaire de Guinée. Il fait l'objet d'une décision d'interdiction d'entrée sur le territoire helvétique qui est aujourd'hui en force. Il remplit en conséquence la première condition de l'art. 74 al. 1 LEI, à savoir qu'il n'est pas au bénéfice d'une autorisation de courte durée (art. 32 LEI), de séjour (art. 33 LEI) ou d'établissement (art. 34 LEI).

Le recourant se prévaut de sa nationalité portugaise. L'autorité intimée remet en cause le fait que le recourant soit le réel titulaire des papiers d'identité portugais produits, voire leur authenticité. Même à suivre le recourant, il ne conteste pas que l'identité ou l'alias B______ le concerne. En conséquence c'est bien à sa personne que s'applique la décision d'interdiction d'entrée. La condition de l'art. 74 al. 1 LEI est remplie (ATA/632/2018 du 19 juin 2018 consid. 5 ; ATA/609/2018 du 14 juin 2018). Le fait qu'il ait l'intention de demander la suspension définitive de son interdiction d'entrée une fois que le Ministère public lui aura restitué les documents d'identité est, en l'état, sans pertinence sur l'issue de la présente cause.

S'agissant de la seconde condition, M. B______ a été interdit d'entrée en Suisse par décision du 1er octobre 2018. Selon l'art. 67 al. 2 let. a LEI, le SEM peut interdire l'entrée en Suisse à un étranger lorsque ce dernier a attenté à la sécurité et à l'ordre publics en Suisse ou à l'étranger ou les a mis en danger. L'interdiction d'entrée au sens du droit des étrangers vise à empêcher l'entrée ou le retour d'un étranger dont le séjour en Suisse est indésirable. Le prononcé d'une interdiction d'entrée implique par conséquent que l'autorité procède à un pronostic en se fondant sur l'ensemble des circonstances du cas concret et, en particulier, sur le comportement que l'administré a adopté par le passé. La commission antérieure d'infractions constitue en effet un indice de poids permettant de penser qu'une nouvelle atteinte à la sécurité et à l'ordre publics sera commise à l'avenir (arrêt du Tribunal administratif fédéral du 9 mai 2019 dans la cause F-770/2018 consid. 6.1 et les références citées).

En conséquence, le fait d'être actuellement interdit d'entrée en Suisse implique que la seconde condition est remplie.

Pour le surplus, l'intéressé a été appréhendé à plusieurs reprises, depuis 2017, sur des lieux notoirement connus pour la pratique du commerce de stupéfiants. Il a certes été acquitté de l'accusation de commerce de stupéfiants. Toutefois, il a régulièrement reconnu, lors des interrogatoires de police, consommer de la marijuana, et le 6 août 2018, consommer de la cocaïne. Son comportement a déjà justifié deux interdictions de pénétrer sur le canton que l'intéressé n'a pas respectées. Lors de sa dernière arrestation, son téléphone portable contenait des photos d'ecstasy qu'il avait envoyées à un contact. Ces éléments suffisent à fonder un soupçon concret qu'il puisse commettre à nouveau des infractions à la LStup. Le recourant admet pour le surplus être sans emploi et sans revenu, alors même qu'il va devoir assumer de nouvelles charges suite à la naissance prochaine de son enfant.

Il convient donc d'admettre que les conditions d'une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée, au sens de l'art. 74 al. 1 let. a LEI, sont réalisées.

7. a. S'agissant de la proportionnalité de la mesure, la durée de celle-ci respecte le principe de la proportionnalité, s'agissant d'une troisième mesure, d'une durée identique à la deuxième, et qui se confond avec l'interdiction d'entrée en Suisse actuellement encore en cours.

b. La mesure porte sur l'entier du territoire du canton de Genève. Le recourant n'en conteste pas l'étendue. Il reconnait n'avoir aucune attache sur le territoire genevois ni aucune raison d'y venir à l'exception d'éventuels rendez-vous professionnels pour lesquels aucune indication supplémentaire n'est fournie. Pour le surplus, sa compagne réside dans le canton de Vaud.

Il résulte de ce qui précède que le recours, en tous points mal fondé, sera rejeté.

Le présent arrêt rend sans objet la requête en octroi de l'effet suspensif.

8. Vu la nature de la cause, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA et art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette en tant qu'il est recevable le recours interjeté le 12 mars 2020 par
Monsieur A______, alias B______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 mars 2020 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Roxane Sheybani, avocate du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal admisnitratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Thélin, président, M. Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Meyer

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :