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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2499/2018

ATA/287/2020 du 10.03.2020 sur JTAPI/225/2019 ( ICCIFD ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 15.05.2020, rendu le 19.11.2020, PARTIELMNT ADMIS, 2C_380/2020
Descripteurs : PROCÉDURE DE TAXATION;DÉCLARATION D'IMPÔT;CHARGE FISCALE;BARÈME;CALCUL DE L'IMPOT;DÉDUCTION DU REVENU(DROIT FISCAL);MONTANT LIBRE D'IMPÔT;OBLIGATION D'ENTRETIEN;DROIT DE GARDE
Normes : LIFD.36.al2; LIFD.36.al2bis; LIPP.39; LIPP.41; CC.298a
Résumé : Confirmation du refus, par l’autorité fiscale, d’appliquer au recourant le barème parental ainsi que de la possibilité de faire valoir les déductions liées aux frais d’entretien des enfants nés hors mariage de sa relation avec son ex-compagne, qui en assure pour l’essentiel l’entretien. Rejet du recours sur ce point.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2499/2018-ICCIFD ATA/287/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 mars 2020

4ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mars 2019 (JTAPI/225/2019)


EN FAIT

1) Monsieur A______ est domicilié à Genève, où il est contribuable. Il est le père de deux enfants, nés hors mariage les ______ 2007 et ______ 2013, issus de sa relation avec Madame B______, avec laquelle il vivait en concubinage.

2) En 2014, M. A______ et Mme B______ se sont séparés.

3) En avril 2015, M. A______ et Mme B______ ont déposé auprès du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) une déclaration concernant l'autorité parentale conjointe sur leurs enfants, aux termes de laquelle ils confirmaient assumer conjointement la responsabilité de leurs enfants ainsi que s'être entendus sur leur garde, sur les relations personnelles de même que la participation financière et la contribution à leur entretien, la bonification pour les tâches éducatives étant attribuée par moitié à chaque parent. Cette convention a été ratifiée par le TPAE le 19 juin 2015.

4) a. Le 23 juin 2016, M. A______ a écrit à l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE), lui expliquant qu'il assurait la garde alternée sur ses enfants, conjointement avec Mme B______. Étant donné que son revenu était plus élevé que celui perçu par son ex-compagne, il alimentait un compte commun destiné au paiement de l'entretien des enfants, sur lequel étaient également versées les allocations familiales. Mme B______ était réticente à signer une convention réglant par écrit ces questions, dès lors qu'elle souhaitait continuer à bénéficier des déductions fiscales relatives aux enfants. Compte tenu de la situation, il devait bénéficier du « splitting » et des déductions, par moitié, sur toutes les charges relatives aux enfants.

b. Il a annexé à son courrier un extrait du compte commun dont il était titulaire avec Mme B______, sur lequel il avait crédité, en 2016, un montant total de CHF 4'675.-, à raison de montants mensuels variables libellés « contribution entretien des enfants », le compte étant également alimenté de CHF 600.- par mois par le service cantonal d'allocations familiales.

5) En janvier 2018, M. A______ a déposé auprès de l'AFC-GE sa déclaration fiscale pour l'année 2016, mentionnant un revenu annuel brut de CHF 91'773.- et net de CHF 50'951.- pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et CHF 54'975.- pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD).

Il faisait valoir des déductions afférentes à ses enfants pour frais de garde effectifs (CHF 3'143.- pour l'ICC et CHF 4'685.- pour l'IFD), pour frais médicaux (CHF 53.- pour l'ICC et l'IFD), pour les primes d'assurance (CHF 1'378.- pour l'ICC et l'IFD) et pour charges de famille (CHF 10'078.- pour l'ICC et CHF 6'500.- pour l'IFD).

À l'annexe G1 de la déclaration, il indiquait que ses deux fils constituaient des charges de famille, faisant ménage commun avec lui et en assumant pour l'essentiel l'entretien.

Il a également complété la rubrique « observations », demandant à ce que soit prise en compte la garde sur ses enfants qu'il exerçait de manière alternée avec Mme B______ et le fait qu'il contribuait plus que cette dernière à leur entretien, ce qui devait conduire à l'application d'un barème d'imposition réduit en sa faveur ainsi que la prise en compte de la moitié des déductions pour les frais d'entretien des enfants.

6) Par bordereaux du 8 mai 2018, l'AFC-GE a fixé la taxation 2016 de M. A______ à CHF 9'687.40 pour l'ICC, sur la base d'un revenu imposable de CHF 60'906.- et d'une fortune imposable de CHF 82'866.-, et à CHF 787.05 pour l'IFD, sur la base d'un revenu imposable de CHF 62'100.-.

Ses revenus annuels étaient composés de ceux tirés de son activité lucrative dépendante ainsi que par les allocations familiales, d'un montant de CHF 3'600.-.

Le barème parental/« splitting », la déduction pour charge de famille et les déductions afférentes à ses enfants (assurance-maladie, frais médicaux, déduction sociale sur la fortune) ne pouvaient être accordées, en l'absence de document attestant une garde partagée ou alternée avec Mme B______. Les montants versés sur le compte joint par CHF 4'675.- à titre de déductions pour pensions et contributions d'entretien versées avaient toutefois été pris en compte.

7) Le 18 mai 2018, M. A______ a élevé réclamation contre ces bordereaux.

Il exerçait une garde alternée sur ses enfants, qui, sur une période de quatorze jours, résidaient chez lui durant six jours et chez Mme B______ durant huit jours. Dès lors qu'il disposait d'un revenu net plus élevé que Mme B______, il contribuait également de manière plus importante à l'entretien des enfants, par un versement sur leur compte commun, qu'il alimentait de manière exclusive et qui servait à la prise en charge financière et au paiement des frais occasionnés par les enfants. Ainsi, dans une telle situation, il devait pouvoir bénéficier du barème parental/« splitting » ainsi que d'une déduction par moitié sur toutes les charges relatives aux enfants.

8) Par décisions du 11 juin 2018, l'AFC-GE a rejeté la réclamation de M. A______ et maintenu les bordereaux de taxation ICC et IFD 2016.

Le barème parental/« splitting » ne pouvait lui être accordé, dès lors que Mme B______ exerçait sur les enfants une garde plus importante que lui. Dans la mesure où il versait une contribution d'entretien pour ses enfants, même sur un compte qu'il détenait en commun avec Mme B______, les demi-charges de famille ne pouvaient lui être accordées.

9) Le 18 juillet 2018, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre ces décisions, concluant à leur annulation.

Il reprenait ses précédents arguments, précisant que l'ensemble des dépenses fixes relatives aux enfants, notamment les frais relatifs à la scolarité, à la garde, à l'assurance-maladie (sous déduction des subsides par CHF 100.- par mois) et de loisirs, étaient payées à partir du compte commun et représentaient environ CHF 780.- par mois. À ces charges fixes venaient s'en ajouter d'autres, variables, relatives à l'entretien des enfants, comme la nourriture et les loisirs. Au total, les frais d'entretien des enfants représentaient CHF 3'000.- par mois. Le montant retenu, de CHF 4'675.-, était ainsi trop modeste, la taxation pratiquée par l'AFC-GE ne respectant pas le principe de l'imposition selon la capacité contributive.

10) Le 19 octobre 2018, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Bien que M. A______ et Mme B______ aient signé une déclaration d'autorité parentale conjointe, ils ne s'étaient pas entendus sur la garde ainsi que la participation à la prise en charge et la contribution d'entretien des enfants, aucun jugement ni convention ne réglant ces questions. Dès lors que M. A______ alimentait seul et régulièrement le compte commun, qui servait à l'entretien des enfants, ces versements pouvaient être qualifiés de contribution d'entretien. La loi ne fixant aucune limite inférieure à l'imposition ni à la déduction d'une telle contribution, un certain schématisme pouvait être admis en raison de la diversité des situations individuelles à considérer, ce qui était compatible avec le principe de l'imposition selon la capacité contributive.

11) Par jugement du 11 mars 2019, le TAPI a rejeté le recours de M. A______.

La manière par laquelle la garde sur les enfants mineurs était partagée et comment les dépenses étaient réparties entre M. A______ et Mme B______, pouvait rester indécise, dès lors que l'intéressé admettait que la garde qu'il exerçait était d'importance inégale par rapport à celle de la mère. Dans un tel cas, seul le parent assumant la part la plus importante pouvait bénéficier du barème parental, en l'occurrence Mme B______. Même à suivre la thèse de M. A______, selon laquelle les versements effectués sur le compte commun ne constituaient pas une pension alimentaire, le barème parental devait néanmoins être accordé à Mme B______, qui bénéficiait d'un revenu net moins élevé. C'était dès lors à juste titre que l'AFC-GE avait refusé d'accorder à M. A______ le barème parental/« splitting », ainsi que les déductions sollicitées. L'intéressé n'avait ainsi droit qu'à la déduction de la contribution versée à l'entretien de ses enfants, dont le montant retenu, de CHF 4'675.-, correspondait aux versements qu'il avait effectués sur le compte commun, étant précisé que M. A______ n'avait étayé ses affirmations, selon lesquelles il y contribuait de manière plus importante, par aucun document probant.

12) a. Par acte expédié le 10 avril 2019, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation ainsi qu'à celle des décisions de l'AFC-GE, à ce qu'il soit constaté qu'il exerçait la garde alternée de ses enfants, que le barème parental/« splitting » et la moitié des déductions sollicitées lui soient accordés, ainsi qu'à la correction de l'imposition des allocations familiales, subsidiairement au renvoi de la cause à l'AFC-GE pour nouvelle décision au sens des considérants.

Le jugement entrepris était contraire à la réalité des faits, violait la loi et consacrait une solution arbitraire eu égard à sa situation personnelle.

Durant la période fiscale en cause, Mme B______, qui percevait les allocations familiales, avait été imposée en conséquence, de sorte que le montant de CHF 3'600.- y relatif ne pouvait être additionné à son revenu imposable.

Étant donné que son revenu net était supérieur à celui de Mme B______, il contribuait de manière prépondérante à la prise en charge financière des frais d'entretien fixes des enfants, au moyen de versements mensuels sur le compte commun. Il ne versait toutefois aucune contribution à ce titre à son ex-compagne, le fait que les virements sur le compte commun comportaient le libellé « contribution d'entretien » ne modifiant pas cette situation. C'était également à tort que le TAPI avait retenu que la garde alternée exercées sur ses enfants n'était pas de même importance que celle de Mme B______, puisque les enfants se trouvaient chez lui quasiment la moitié du temps.

Ainsi, conformément à la jurisprudence, en l'absence de contribution d'entretien versée et en présence d'une garde alternée, le parent ayant le revenu le plus important était réputé contribuer de manière plus importante à l'entretien de l'enfant, de sorte qu'il devait bénéficier du barème parental/« splitting » ainsi que de la moitié des déductions applicables, en lieu et place du montant de CHF 4'675.- retenu, qui ne couvrait qu'une partie des frais fixes d'entretien de ses enfants et ne correspondait pas à l'entier de sa participation financière, laquelle s'exerçait également majoritairement de manière directe, afin de prendre en charge les frais quotidiens variables et extraordinaires de ses enfants.

 

 

b. Il a notamment produit :

- un récapitulatif à son nom de l'assurance-maladie pour 2016, indiquant un total de primes de CHF 1'377.60 par enfant ainsi que de coûts de CHF 76.85 et CHF 28.85 ;

- un récapitulatif des factures pour les frais parascolaires des enfants pour l'année scolaire 2017-2018, ainsi que les justificatifs de paiement y relatifs ;

- des factures des restaurants scolaires pour 2018 ;

- des ordres de paiement du compte commun pour les activités de loisirs des enfants pour 2017 et 2018.

13) Le 30 avril 2019, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d'observations.

14) Le 7 juin 2019, l'AFC-GE a conclu à ce qu'il soit donné acte à M. A______ de la diminution de son revenu taxable 2016 des allocations familiales par CHF 3'600.- ainsi qu'au rejet du recours pour le surplus.

En application de la jurisprudence, le TAPI avait considéré qu'il n'était pas nécessaire de déterminer si M. A______ versait ou non une contribution à l'entretien de ses enfants, puisque la garde sur les enfants était assurée plus longtemps par Mme B______. Seule cette dernière pouvait ainsi bénéficier du barème parental/« splitting » et des déductions afférentes aux enfants, puisqu'elle percevait, en tout état de cause, le revenu le plus faible. Les présomptions posées par la jurisprudence en cette matière étant irréfragables, le jugement entrepris devait être confirmé.

15) Le 25 juin 2019, le juge délégué a accordé aux parties un délai au 12 juillet 2019 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

16) Le 9 juillet 2019, l'AFC-GE a indiqué au juge délégué qu'elle n'avait pas de requêtes ni d'observations complémentaires à formuler.

17) M. A______ ne s'est pas déterminé à l'issue du délai imparti.

18) Bien qu'invitée à se déterminer sur le recours, l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) ne s'est pas manifestée.

19) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).

2) Le litige a trait au barème applicable au recourant ainsi qu'aux déductions qu'il peut faire valoir en lien avec ses deux enfants mineurs nés hors mariages, tant en matière d'ICC et d'IFD, pour l'année fiscale 2016.

3) L'art. 36 al. 2 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) prévoit pour l'IFD un barème d'imposition réduit pour les époux vivant en ménage commun, tandis que le barème ordinaire, fixé à l'art. 36 al. 1 LIFD, est applicable aux autres contribuables.

Conformément à l'art. 36 al. 2bis LIFD, l'al. 2 s'applique par analogie aux époux vivant en ménage commun et aux contribuables veufs, séparés, divorcés ou célibataires qui vivent en ménage commun avec des enfants ou des personnes nécessiteuses dont ils assument pour l'essentiel l'entretien. Le montant de l'impôt ainsi fixé est réduit de CHF 251.- par enfant et par personne nécessiteuse.

4) Dans le canton de Genève, la question du barème d'imposition applicable est réglée à l'art. 41 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08). L'art. 41 al. 1 LIPP instaure un calcul de l'impôt en fonction d'un taux d'imposition par tranche. L'art. 41 al. 2 LIPP instaure non pas un barème pour couple mais prévoit l'application d'un taux réduit à 50 % du taux applicable pour les époux vivant en ménage commun (« splitting »). L'art. 41 al. 3 LIPP autorise l'application de l'art. 41 al. 2 LIPP aux contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait faisant ménage commun avec leurs enfants mineurs ou majeurs ou un proche qui constituent des charges de famille, au sens de l'art. 39 al. 2 LIPP, et dont ils assurent pour l'essentiel l'entretien.

Selon la jurisprudence, lorsque deux contribuables vivent en union libre avec un enfant commun (et sont en principe imposés comme des personnes seules, selon leur état civil), seul celui qui assume pour l'essentiel l'entretien de l'enfant et qui exerce sur lui l'autorité parentale a droit aux déductions sociales accordées pour les enfants (ATF 131 II 553 consid. 3.4). Il ressort du système légal qu'un même abattement ne peut en principe être accordé plusieurs fois, de sorte qu'il est également exclu d'accorder plusieurs fois, pour un même enfant, la déduction sociale pour enfant, soit au contribuable séparé ou divorcé qui assure l'entretien de l'enfant et à celui qui verse la contribution d'entretien pour cet enfant (ATF 133 II 305 consid. 6.8).

5) D'après la jurisprudence, afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales, l'administration peut expliciter l'interprétation qu'elle leur donne dans des directives. Celles-ci n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATA/104/2020 du 28 janvier 2020 consid. 4 et les références citées).

6) a. Le 21 décembre 2010, l'AFC-CH a émis à l'intention des administrations cantonales la circulaire n° 30 relative à l'imposition des époux et de la famille selon la LIFD (ci-après : la circulaire).

b. À teneur de celle-ci, en matière d'imposition de parents divorcés (ou non mariés vivant dans deux ménages distincts) avec enfant mineur commun et autorité parentale commune, avec garde alternée, sans contributions d'entretien, il faut partir de l'idée que le parent qui a le revenu net le plus élevé pourvoit à l'essentiel de l'entretien de l'enfant et bénéficie en conséquence du barème parental (ch. 13.4.2 et 14.4.2 de la circulaire). Le Tribunal fédéral a toutefois précisé dans ce cas de figure que, en vertu du principe de l'imposition selon la capacité contributive, lorsque les frais nécessaires à l'entretien de l'enfant sont partagés entre eux de manière égale, c'est le parent qui dispose du revenu net le plus bas qui est considéré comme le parent qui assure pour l'essentiel l'entretien de l'enfant (ATF 141 II 338 consid. 6.4).

c. Dans le cas de parents séparés, divorcés ou non mariés (deux ménages) avec enfant mineur commun et autorité parentale commune, avec ou sans garde alternée, si l'un des parents verse une contribution d'entretien en faveur de l'enfant et demande une déduction pour celle-ci selon l'art. 33 al. 1 let. c LIFD, les parents sont imposés de la manière suivante :

- le parent qui reçoit les contributions d'entretien pour l'enfant doit l'impôt sur ces contributions et le parent qui les verse peut les déduire de son revenu (ch. 14.5.1 de la circulaire) ;

- le parent qui reçoit les contributions d'entretien peut demander la déduction sociale pour enfants et la déduction pour primes d'assurance et intérêts des capitaux d'épargne pour l'enfant (ch. 14.5.2 de la circulaire) ;

- le parent qui reçoit les contributions d'entretien est imposé selon le barème parental, alors que le parent qui les verse est imposé selon le barème de base (ch. 14.5.3 de la circulaire).

7) a. L'AFC-GE a fait diffuser le 16 février 2011 la lettre d'information n° 2/2011 (ci-après : l'information), disponible sur son site internet, qui vise à préciser le mode de soumission au barème d'imposition instauré par l'art. 41 LIPP. Cette information s'inspire de la jurisprudence rendue en matière de barème fiscal applicable aux contribuables divorcés en cas de garde alternée (ATF 133 II 205).

b. Selon le ch. 2.1 de l'information, peuvent notamment bénéficier du « splitting » les contribuables célibataires veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait qui font ménage commun avec leurs enfants mineurs ou majeurs ou un proche qui constituent des charges de famille au sens de l'art. 39 al. 2 LIPP et qui en assurent pour l'essentiel l'entretien.

En cas de versement d'une pension alimentaire, le parent qui assure pour l'essentiel l'entretien de l'enfant est celui qui bénéficie du versement de la pension alimentaire. Le débiteur de la pension peut, en revanche, la déduire de ses revenus.

Lorsqu'il n'y a pas de versement d'une pension alimentaire et que les parents vivent en concubinage ou pratiquent une garde alternée sur leur enfant mineur, le parent qui assure pour l'essentiel l'entretien est, en règle générale, celui qui dispose du revenu brut le plus élevé. Dans un souci d'harmonisation avec le droit fédéral et suite à plusieurs jurisprudences, c'est le revenu net le plus élevé qui est déterminant dès la période fiscale 2015.

En revanche et nonobstant ce qui précède, lorsque les conditions cumulatives suivantes sont remplies, c'est le parent qui dispose du revenu net le plus bas qui est considéré comme le parent qui assure pour l'essentiel l'entretien de l'enfant :

- les parents disposent de l'autorité parentale commune sur l'enfant ;

- ils pratiquent une garde alternée ;

- il n'y a pas de versement de pension alimentaire ;

- les frais nécessaires à l'entretien de l'enfant sont partagés entre eux de manière égale et cela ressort, en principe, du jugement de divorce.

Dans les autres cas, le parent qui assure pour l'essentiel l'entretien est, généralement, celui qui fait ménage commun avec l'enfant.

8) Aux termes de l'art. 298a du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), si la mère n'est pas mariée avec le père et que le père reconnaît l'enfant, ou si le lien de filiation est constaté par décision de justice et que l'autorité parentale conjointe n'est pas encore instituée au moment de la décision de justice, les parents obtiennent l'autorité parentale conjointe sur la base d'une déclaration commune (al. 1). Les parents confirment dans la déclaration commune qu'ils sont disposés à assumer conjointement la responsabilité de l'enfant ; qu'ils se sont entendus sur la garde de l'enfant, sur les relations personnelles ou la participation de chaque parent à sa prise en charge ainsi que sur la contribution d'entretien (al. 2).

9) a. En l'espèce, le recourant et son ex-compagne, qui détiennent sur leurs deux enfants mineurs, nés hors mariage, l'autorité parentale conjointe, se sont séparés en 2014 et ont déposé auprès du TPAE une déclaration selon laquelle ils s'étaient entendus notamment sur la garde, les relations personnelles et la participation financière et d'entretien de chaque parent, que l'autorité judiciaire a ratifiée le 19 juin 2015. Le recourant et Mme B______ n'ont toutefois signé aucune convention réglant ces questions, aucun jugement n'ayant au demeurant été rendu à ce sujet.

b. Il ressort des déclarations constantes du recourant qu'il pratiquait une garde alternée sur ses enfants, ceux-ci résidant, sur une période de quatorze jours, à raison de six jours chez lui et huit jours chez leur mère. Durant l'année 2016, le recourant a également alimenté mensuellement le compte qu'il détenait en commun avec Mme B______ pour un montant total de CHF 4'675.- et destiné au paiement des frais fixes des enfants.

Dans ce cadre, le recourant soutient qu'en alimentant exclusivement ce compte, il n'avait pas eu l'intention de se rendre débiteur d'une contribution d'entretien, mais uniquement de prendre en charge les frais fixes de ses enfants liés notamment aux frais de scolarité, de garde, d'assurance-maladie et de loisirs, dès lors qu'il percevait un salaire supérieur à celui de Mme B______. Ce faisant, il a ainsi admis avoir pris en charge des frais supérieurs à ceux payés par son ex-compagne, ses versements devant être considérés comme une contribution d'entretien. En effet, même si de telles contributions d'entretien prennent en général la forme de rentes, elles peuvent également revêtir celle de paiements de divers frais fixes, comme ceux du cas d'espèce (ATA/104/2020 précité consid. 8). C'est dès lors à juste titre que l'autorité intimée a considéré qu'en présence du versement d'une contribution d'entretien, c'était l'ex-compagne du recourant qui assurait pour l'essentiel l'entretien des enfants, de sorte que seule cette dernière pouvait prétendre au barème parental/« splitting » et aux déductions liées aux frais d'entretien des enfants, conformément à la circulaire de l'AFC-CH et à l'information de l'AFC-GE, confirmées par la jurisprudence.

Au demeurant, même à admettre que les montants versés mensuellement par le recourant sur le compte commun ne constituent pas une contribution d'entretien dans le sens précité, l'ex-compagne bénéficie toujours du revenu net le plus bas, ce qui n'est pas contesté, de sorte qu'elle est considérée, selon la jurisprudence, comme assurant pour l'essentiel l'entretien des enfants, ce qui a également pour conséquence de la faire bénéficier du barème parental/« splitting » et des déductions liées aux frais des enfants.

C'est dès lors à juste titre que l'autorité intimée a considéré que le recourant pouvait seulement prétendre à la déduction des contributions d'entretien versées, ce que le TAPI a confirmé.

c. Le recourant conteste le montant retenu par le premier juge, arrêté à CHF 4'675.-, qu'il qualifie de dérisoire par rapport au coût effectif des enfants, estimé à quelque CHF 3'000.- par mois. Bien que le recourant ait produit de nombreuses pièces, la plupart de celles-ci sont sans pertinence, dès lors qu'elles ne concernent pas la période fiscale en cause. Quant au récapitulatif des primes et des coûts d'assurance-maladie pour l'année 2016 des enfants, le recourant a indiqué qu'elles étaient payées au moyen du compte commun, étant précisé que s'agissant des primes d'assurance-maladie, l'intéressé bénéficie de subsides par CHF 100.- par enfant et par mois.

Rien n'indique dès lors que le recourant se serait acquitté d'un montant supérieur à celui de CHF 4'675.- en 2016, qui correspond aux versements qu'il a effectués sur le compte commun. Il s'ensuit que le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point, étant précisé que le recourant ne peut rien tirer du respect du principe de l'imposition selon la capacité économique, qui ne peut s'interpréter comme autorisant un contribuable à déterminer son revenu imposable à sa guise (ATF 137 II 353 consid. 6.4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_687/2018 du 15 février 2019 consid. 4.3).

d. Devant la chambre de céans, le recourant a conclu à ce que l'AFC-GE renonce à lui imputer un revenu imposable de CHF 3'600.- pour l'année fiscale 2016 correspondant à la moitié des allocations familiales perçues par Mme B______ pour leurs enfants, imposées auprès de cette dernière. L'AFC-GE ayant donné son accord, il lui en sera donné acte.

Il s'ensuit que le recours sera partiellement admis. Le jugement du TAPI sera annulé dans ce sens, ainsi que les bordereaux de taxation et de réclamation pour l'ICC et l'IFD 2016, le dossier étant renvoyé à l'AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation au sens des considérants.

10) Vu l'issue du litige, un émolument, réduit, de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe pour l'essentiel (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourant n'ayant pas pris de conclusions dans ce sens, ni exposé de frais pour sa défense (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 avril 2019 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mars 2019 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule ce jugement, ainsi que les bordereaux de taxation du 8 mai 2018 et de réclamation du 11 juin 2018 pour l'ICC et l'IFD 2016 de Monsieur A______ au sens des considérants ;

renvoie le dossier à l'administration fiscale cantonale pour nouvelle décision de taxation pour l'ICC et l'IFD 2016 de Monsieur A______ au sens des considérants ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, MM. Verniory et Mascotto, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :