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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2587/2019

ATA/276/2020 du 10.03.2020 ( DIV ) , SANS OBJET

Descripteurs : SUSPENSION DE LA PROCÉDURE;REPRISE;PROCÈS DEVENU SANS OBJET;RADIATION DU RÔLE
Normes : LPA.14; LPA.11; LOJ.132
Résumé : Reprise de la procédure à la suite de l’ACST/43/2019, rendant la procédure devant la chambre administrative sans objet. Cause rayée du rôle.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2587/2019-DIV ATA/276/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 mars 2020

 

dans la cause

 

A______
représenté par Mes Raphaël Jakob et Soile Santamaria, avocats

contre

GRAND CONSEIL

 



EN FAIT

1) A______ (ci-après : A______) est une fondation sans but lucratif avec siège à Genève, qui a pour but statutaire d'aider à façonner l'avenir des sciences de la vie par l'excellence en bioinformatique, englobant des activités de service et d'infrastructure, la recherche et la formation. Jusqu'au 31 décembre 2013, A______ était affilié, en tant qu'employeur externe, à la Caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (ci-après : CEH).

2) À la suite de l'absorption de la CEH par la Caisse de prévoyance de l'État de Genève (ci-après : CPEG) intervenue le 1er janvier 2014, A______ a conclu avec cette dernière une convention d'affiliation.

3) Disposant d'un taux de couverture inférieur à celui requis par le droit fédéral, la CPEG a adopté un premier train de mesures, entré en vigueur le 1er janvier 2018, destiné à rétablir son équilibre financier à long terme et impliquant une réduction de 5 % des prestations. Elle a adopté un second train de mesures, dont l'entrée en vigueur, plusieurs fois différée, a été fixée au 1er janvier 2020 si aucune loi prévoyant une capitalisation complémentaire n'était adoptée dans l'intervalle, qui impliquait une réduction supplémentaire de 10 % des prestations.

4) En cours d'année 2017 et jusqu'à fin 2018, plusieurs propositions législatives ont été formulées en vue de rétablir l'équilibre financier de la CPEG à long terme. Dans ce contexte, le 14 décembre 2018, le Grand Conseil a successivement adopté la loi 12228 et la loi 12404 portant sur la modification de la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève (LCPEG - B 5 22), qui ont toutes deux fait l'objet d'un référendum.

5) Lors de la votation populaire du 19 mai 2019, le corps électoral cantonal a accepté la loi 12228 à 52,83 %, la loi 12404, acceptée à 52,64 %, ayant été écartée.

6) Après avoir validé les résultats de la votation, le Conseil d'État a, par arrêté du 5 juin 2019 publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 7 juin 2019, promulgué la loi 12228 modifiant la LCPEG pour être exécutoire dans tout le canton dès le lendemain de sa publication, son entrée en vigueur étant fixée au 1er janvier 2020. L'art. 70 de ladite loi a la teneur suivante :

 

Art. 70

Versements extraordinaires (nouveau, l'art. 70 ancien devenant l'art. 74)

1 Un apport d'actifs est effectué en faveur de la Caisse conformément a l'article 25A. Cet apport d'actifs s'élève au montant permettant a la Caisse d'atteindre un taux de couverture de 75 %, voire un taux de couverture de 100 % pour les prestations que la Caisse choisirait de rétablir conformément a l'article 25A, alinéas 1 et 2.

2 Ce montant est calculé sur la base des comptes audités de la Caisse au 31 décembre qui précède l'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018, en prenant en compte :

a) des engagements envers les membres pensionnés calculés avec un taux d'intérêt technique égal ou supérieur a 1,75 % et ;

b) des engagements envers les membres actifs calculés selon les bases et règles techniques en vigueur au 31 décembre 2019.

3 L'apport d'actifs en faveur de la Caisse est effectué comme suit :

a) les employeurs affiliés a la Caisse, qui figurent sur la liste de l'annexe II, s'acquittent d'un apport d'actifs au prorata des engagements de leurs membres salariés a la date d'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018 ;

b) le solde est a la charge de l'État de Genève.

4 L'apport d'actifs est effectué au plus tard le 31 décembre de l'année d'entrée en vigueur de la loi modifiant la loi instituant la Caisse de prévoyance de l'État de Genève, du 14 décembre 2018.

 

Annexe II (voir articles 70 et 71) : liste des employeurs affiliés a la Caisse qui s'acquittent d'un apport d'actifs en faveur de la CPEG (nouvelle)

Aéroport international de Genève

Caisse publique de prêts sur gages

Centre suisse de contrôle de qualité

Conférence universitaire des associations d'etudiantEs

Fondation de la crèche La Cigogne

Fondation des immeubles pour les organisations internationales

Fondation des parkings

Fondation Health on the Net

Fondation pour la promotion du logement bon marche et de l'habitat coopératif

Fondation pour les terrains industriels de Genève

Groupement intercommunal pour l'animation parascolaire

Institut suisse de bioinformatique

Office cantonal des assurances sociales

Secrétariat des fondations immobilières de droit public

Société pédagogique genevoise

Syndicat des services publics

TIMELAB - Fondation du laboratoire d'horlogerie et de microtechnique de Genève

Union du corps enseignant secondaire genevois

7) Par acte du 8 juillet 2019, A______ a recouru auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) contre l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG, concluant préalablement à l'octroi de l'effet suspensif au recours et, principalement, « avec suite de frais et dépens », à son annulation, subsidiairement à la radiation de son nom dans l'annexe II de la loi et de l'obligation à sa charge de s'acquitter d'un apport d'actifs en faveur de la CPEG.

8) Le même jour, A______ a déposé un recours identique auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant, « avec suite de frais et dépens », préalablement à la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé sur la recevabilité du recours introduit devant la chambre constitutionnelle et, principalement, à l'annulation de la décision contenue dans l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG.

La norme contestée ayant un caractère décisionnel, elle pouvait s'apparenter, à son égard, à une mesure individuelle et concrète, de sorte que le recours portait sur l'éventuelle décision administrative contenue dans la disposition litigieuse.

9) Le 17 juillet 2019, le Grand Conseil s'en est remis à l'appréciation de la chambre administrative au sujet de la suspension de la cause.

10) Le 27 août 2019, la présidence de la chambre administrative a prononcé la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé de la cause devant la chambre constitutionnelle.

11) Par arrêt du 20 décembre 2019 (ACST/43/2019), la chambre constitutionnelle a rejeté le recours de A______.

Elle a en particulier considéré que l'art. 70 al. 3 let. a LCPEG était une disposition générale et abstraite, sujette à un contrôle abstrait des normes, de sorte qu'elle était compétente pour connaître du recours de A______, lequel était ainsi recevable.

12) Le 7 janvier 2020, A______ a écrit au juge délégué de la chambre administrative, lui expliquant que l'instruction de la cause ne pouvait être reprise et devait rester suspendue, dès lors qu'il entendait recourir au Tribunal fédéral contre l'arrêt de la chambre constitutionnelle.

13) Le 13 janvier 2020, le juge délégué de la chambre administrative a prononcé la reprise de la procédure et accordé un délai au 31 janvier 2020 à A______ pour indiquer les motifs pour lesquels la procédure devrait être suspendue, après quoi la cause serait gardée à juger.

14) Le 30 janvier 2020, A______ lui a répondu que la disposition litigieuse était de nature décisionnelle, dans la mesure où elle imposait une obligation concrète à des destinataires déterminés. En cas d'admission du recours par le Tribunal fédéral, la cause serait renvoyée à la chambre constitutionnelle, qui serait amenée à nouvellement déterminer sa propre compétence, au vu d'une lecture par hypothèse différente de la Haute Cour quant à la nature décisionnelle de la disposition litigieuse. Il en résultait que les motifs ayant présidé à la suspension de la cause demeuraient inchangées.

15) Le 3 février 2020, A______ a recouru auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt de la chambre constitutionnelle.

16) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. Lorsque le sort d'une procédure administrative dépend de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu'à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. L'art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie. La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d'une autre autorité serait utile à l'autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend. Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l'autorité saisie n'ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d'une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l'interdiction du déni de justice formel fondée sur l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) d'attendre la décision d'une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d'autres motifs (ATA/1633/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3 et les références citées).

2) La chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Elle examine d'office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 LPA).

Sauf exceptions prévues par la loi ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e et 57 LPA (art. 132 al. 2 LOJ).

3) En l'espèce, la chambre constitutionnelle, par arrêt du 20 décembre 2019, a considéré que la disposition contestée par le recourant était un acte normatif au contenu général et abstrait, de sorte qu'elle a admis sa compétence et tranché le litige sur le fond, rejetant le recours.

La chambre de céans était dès lors justifiée à ordonner la reprise de la procédure, puisque la suspension avait été ordonnée jusqu'à droit connu dans la procédure constitutionnelle. Le fait que le recourant ait entrepris l'arrêt de la chambre constitutionnelle au Tribunal fédéral n'y change rien, dès lors que l'issue de ce recours n'est pas de nature à influer sur l'issue de la présente cause, étant rappelé par ailleurs la nature potestative de l'art. 14 LPA.

Dès lors que la chambre constitutionnelle a admis sa compétence dans le cadre du recours, le recours devant la chambre de céans, qui a le même objet, n'est pas ouvert. Il convient d'ajouter que si le Tribunal fédéral devait retenir que la disposition contestée est de nature décisionnelle, la chambre constitutionnelle transmettrait la cause à la chambre administrative en vertu de l'art. 64 al. 2 LPA.

Il en résulte que le recours est sans objet et que la cause devra être rayée du rôle.

4) Vu l'issue de la présente procédure et le maintien du recours malgré le prononcé de l'arrêt de la chambre constitutionnelle, aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA) et un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

dit que le recours est devenu sans objet ;

raye la cause du rôle ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Raphaël Jakob et Soile Santamaria, avocats du recourant, ainsi qu'au Grand Conseil.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, MM. Thélin et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :