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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1957/2018

ATA/259/2020 du 03.03.2020 sur JTAPI/563/2019 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 06.05.2020, rendu le 19.11.2020, REJETE, 1C_225/2020
Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;5E ZONE;PERMIS DE CONSTRUIRE;VILLA;VOISIN;SURFACE;ESTHÉTIQUE;MOTIVATION DE LA DÉCISION;POUVOIR D'APPRÉCIATION;CONDITIONS DE CIRCULATION;PLACE DE PARC;PRISE DE POSITION DE L'AUTORITÉ
Normes : LCI.3.al3; LCI.14.al1.leta; LCI.14.al1.letb; LCI.14.al1.letc; LCI.14.al1.letd; LCI.14.al1.lete; LCI.15; LCI.59; LCI.76; RCI.3.al4
Parties : CORMINBOEUF HARARI Corinne, HARARI Maurice, GAILLARD Astrid, GAILLARD Louis et autres, HENRY Jean-Pierre, RENTSCH Alain, RENTSCH Denis, RENTSCH Claudine / FM MANAGEMENT SARL ET AUTRES, KRIEF John, KRIEF Séverine, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
Résumé : Rejet d’un recours contre l’autorisation de construire quatre villas groupées en 5ème zone. Examen des griefs liés au calcul de la surface brute de plancher, à la compatibilité de la dérogation à l’IUS du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier ainsi que celui lié à l’augmentation du trafic généré et des dangers supposés créés par la construction projetée.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1957/2018-LCI ATA/259/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 mars 2020

3ème section

 

dans la cause

 

Madame Corinne CORMINBOEUF HARARI et Monsieur Maurice HARARI

Madame Astrid et Monsieur Louis GAILLARD

Monsieur Jean-Pierre HENRY
représentés par Me Louis Gaillard, avocat

contre

 

FM MANAGEMENT SÀRL

Madame Séverine et Monsieur John KRIEF
représentés par Me Diane Schasca, avocate

et

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2019 (JTAPI/563/2019)


EN FAIT

1) Madame Séverine et Monsieur John KRIEF (ci-après : les époux KRIEF) sont copropriétaires de la parcelle n° 1'011 de la commune de Chêne-Bougeries, à l'adresse 24, chemin de la Colombe, sise en cinquième zone de construction.

Le schéma du plan directeur cantonal (ci-après : PDCn2030) renvoie pour ce périmètre à la fiche A04 préconisant de « favoriser une utilisation diversifiée de la zone villas » et sa densification sans modification de la zone en favorisant l'habitat individuel groupé. Cette fiche donne également mandat aux communes de proposer « dans leur plans directeurs communaux, une stratégie pour leur zone villas en identifiant les secteurs à densifier ou à protéger ».

2) Monsieur Jean-Pierre HENRY est propriétaire de la parcelle n° 1'010 de la même commune. Monsieur Maurice HARARI est propriétaire de la parcelle n° 1'066, où est érigée une villa dans laquelle il vit avec son épouse, Madame Corinne CORMINBOEUF HARARI. Madame Astrid et Monsieur Louis GAILLARD sont copropriétaires de la parcelle n° 1'067 de cette commune.

3) En date du 28 juin 2017, FM Management Sàrl a déposé, pour le compte des époux KRIEF et par l'intermédiaire de GM Architectes Associés, une demande en autorisation de construire portant sur cinq villas mitoyennes, des places de stationnement extérieures ainsi que l'abattage d'arbres sur cette parcelle.

4) Par décision du 2 novembre 2017, le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, devenu le 1er juin 2018 le département du territoire (ci-après : DT ou le département), a délivré l'autorisation de démolir la construction existante sur cette parcelle (M 7'925).

5) Dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation de construire, enregistrée sous le n° DD 110'554, les préavis suivants ont été notamment émis :

- le 4 juillet 2017, préavis favorable de la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC), retenant un rapport de surface de plancher habitable d'environ 44 % pour un projet de standard de haute performance énergétique (HPE) ;

- le 14 juillet 2017, la direction générale des transports, devenue depuis le 1er juin 2018 l'office cantonal des transports (ci-après : OCT), a sollicité une modification du projet consistant en la réalisation d'un minimum de huit places de stationnement ;

- le 18 juillet 2017, la direction générale de l'agriculture et de la nature, devenue le 1er juin 2018 l'office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN), a également demandé une modification du projet afin de protéger les arbres projetés entre les places de parking et de conserver valablement le chêne existant par le respect de son domaine vital et l'interdiction de tout terrassement dans cette zone ;

- le 25 juillet 2017, la commission d'architecture (ci-après : CA) s'est prononcée favorablement sur le projet ;

- le 6 septembre 2017, la commune de Chêne-Bougeries (ci-après : la commune) a préavisé défavorablement le projet aux motifs, notamment, que l'abattage de la quasi-totalité des arbres de la parcelle engendrerait une atteinte paysagère importante incompatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier ; la modification de l'accès existant depuis le chemin de la Colombe via le chemin J-F. Dupuy serait de nature à provoquer un impact important en termes de flux de véhicules, le déplacement ou la suppression de places en zone bleue impliqué par le projet n'était pas envisageable, l'absence d'un double trottoir ne plaidant pas non plus pour ce changement ; les sous-sols étaient conçus avec une habitabilité « Canada Dry » : ils étaient aménagés, desservis et équipés comme des locaux habitables, mais comptabilisés comme inhabitables ; le découpage de la parcelle en cinq jardinets ne reflétait pas la typologie des jardins de ce quartier.

6) À la suite des demandes formulées dans les préavis précités et des séances qui ont eu lieu en date des 14, 20 et 21 septembre 2017 avec l'office de l'urbanisme, l'OCAN et l'OCT, le projet de construction a été modifié et a donné lieu aux préavis suivants :

- le 8 novembre 2017, l'OCAN a préavisé favorablement le projet, sous conditions. Le même jour, il a émis un préavis liant arbres hors forêts, sous conditions notamment de replanter des arbres pour un montant de CHF 17'000.- et de respecter intégralement le projet de replantation transmis ;

- le 14 novembre 2017, la CA a confirmé sa position, précisant que le projet était compact avec une implantation qui s'ordonnait dans la continuité de la villa existante, tout en préservant une zone végétale ;

- le 5 décembre 2017, l'OCT a émis un préavis favorable sans observations ;

- le 13 décembre 2017, la commune a maintenu son préavis défavorable, relevant qu'elle avait engagé, sur demande du canton, l'élaboration d'une stratégie d'évolution de la zone 5 dans le cadre de la révision de son Plan directeur communal (ci-après : PDCom) qui mettait en évidence les éléments structurants forgeant l'identité communale. À cet égard, la question liée à la transition entre l'espace public et l'espace privé avait été identifiée comme élément d'intérêt public prépondérant assurant le respect du caractère et de l'harmonie des quartiers. L'implantation projetée allait à l'encontre des orientations communales et imposait un type d'implantation incompatible avec le contexte, l'harmonie et l'aménagement d'un quartier qui se caractérisait par des constructions en retrait de rue. Il était demandé un projet plus compact et respectant un recul aux limites plus important. Il devait être présenté de nouveau à la CA.

7) Le 8 mai 2018, le DT a délivré l'autorisation de construire globale sollicitée, publiée le même jour dans la Feuille d'avis officielle de la République et Canton de Genève.

Ce même jour, il écrivait notamment à la commune, se référant à son préavis défavorable du 13 décembre 2017, que la direction de la planification directrice cantonale et régionale était l'instance cantonale la plus à même de déterminer si une révision d'un PDCom était en cours et l'impact de celle-ci sur une requête d'autorisation de construire. En l'espèce, elle avait préavisé favorablement le projet sans émettre d'observations. Il n'y avait aucun PDCom concernant cette commune ayant force obligatoire. Aussi, les PDCom de la commune, que le canton n'avait pas approuvés, et dont il n'avait pas connaissance, ne pouvaient être pris en considération.

8) Par acte du 5 juin 2018, Mme CORMINBOEUF HARARI, M. HARARI, Mme GAILLARD, M. GAILLARD et M. HENRY (ci-après : les consorts) ont formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation.

Le projet excédait le taux d'occupation du sol de 44 % dans la mesure où la surface de 21.5 m2 de chacune des pièces qualifiées de « salles de jeux » n'avait pas été prise en compte dans le calcul des surfaces. À cet égard, la CA avait rendu un préavis dénué de toute motivation circonstanciée. Les préavis défavorables de la commune, laquelle disposait d'un mandat de planification en lien avec les questions de densification des zones villas, n'avaient pas été suivis. En présence de préavis divergents, l'appréciation de la CA ne devait pas l'emporter. L'abattage de plusieurs arbres, notamment le grand arbre séparant le bâtiment actuel du chemin de la Colombe, et la création de cinq jardinets séparés entraîneraient notamment un appauvrissement du paysage végétal.

Le projet entraînerait des problèmes de sécurité du trafic sur les chemins J.-F. Dupuy et de la Colombe, en raison de l'augmentation importante du trafic. L'accès aux quelques places de stationnement prévues sur la parcelle n° 1'011 n'était pas satisfaisant en raison du chemin très étroit prévu à l'arrière du projet de construction qui ne permettait pas le croisement de deux voitures, celles-ci ne pouvant de surcroît sortir qu'en marche arrière.

9) Dans leur réponse du 12 juillet 2018, FM Management Sàrl et les époux KRIEF ont conclu au rejet du recours.

Le projet querellé n'apparaissait pas en rupture avec certaines villas individuelles avoisinantes d'un volume important. Son gabarit ne se montait qu'à 5.74 m, limitant ainsi considérablement l'impact visuel de la construction et son alignement reprendrait celui de la villa actuelle. L'intention du législateur était de permettre une évolution des zones villas en augmentant leur densification par l'implantation notamment de constructions en forme contiguë.

10) Dans ses observations du 13 août 2018, le DT a également conclu au rejet du recours.

La CA avait consciencieusement examiné le projet pour lequel elle avait émis un préavis favorable à deux reprises et relevé que le projet était compact. Au demeurant, ce n'était pas parce qu'une construction se différenciait de celles avoisinantes par sa volumétrie et sa dimension qu'il fallait en conclure qu'elle ne s'intégrait pas dans son environnement.

11) En date du 24 janvier 2019, le TAPI a tenu une audience, lors de laquelle a été entendu en qualité de témoin Monsieur Frédéric ORVAIN, ingénieur à l'OCT et signataire des préavis de cet office.

Le second préavis avait été émis « avec dérogation », même s'il n'avait effectivement pas coché la case correspondante. Finalement, sept places de parking allaient être réalisées ; il avait accepté la dérogation en raison de l'existence de places bleues sur le chemin François Dupuy, lesquelles étaient sous-utilisées. Ces places bleues avaient pour vocation de limiter la vitesse du trafic, de sorte qu'il était bénéfique que les voitures y stationnent.

En pratique, il recevait souvent les requérants et les discussions se faisaient sur la base de plans. Concernant le plan de courbe de giration du 17 octobre 2017, il avait demandé à un bureau spécialiste en transports l'examen de l'accessibilité de la parcelle et avait eu ce plan à disposition lors de la rédaction de son second préavis. Il existait un autre plan M03 au dossier, qui était le plan de stationnement demandé par la DGT et qui montrait que les voitures pouvaient faire demi-tour au fond de la parcelle. Les véhicules avaient ainsi la possibilité d'aller en marche arrière ou de faire demi-tour pour faire marche avant. S'agissant du plan d'angle de visibilité du 17 octobre 2017, il en ressortait que les voitures faisaient un retournement à l'intérieur de la parcelle afin de pouvoir garantir l'angle de visibilité prévu par le plan. Le plan prévoyait le maintien des places bleues. Il ignorait comment les voitures feraient marche arrière car il n'avait pas les courbes de giration. Il passait régulièrement dans le secteur, lequel lui était dévolu, aux fins de pouvoir établir ses préavis. Il s'y était ainsi rendu le matin, l'après-midi et le soir pour voir l'occupation des places bleues.

Les nouvelles constructions engendraient toujours une augmentation du trafic mais en l'espèce, on parlait de quatre villas supplémentaires, ce qui ne devait pas entraîner une augmentation substantielle du trafic. Qu'il s'agisse de la disposition des places de parc ou de l'accès à la parcelle, le projet était envisageable à son avis, raison pour laquelle il l'avait préavisé favorablement.

12) Par jugement du 20 juin 2019, le TAPI a rejeté le recours déposé par les consorts.

Le projet était conforme à un standard HPE. La « salle de jeux » au sous-sol de chaque villa ne pouvait être considérée comme « hors sol » dès lors que seul 20 cm environ se situait au-dessus du niveau du terrain naturel alors que 2.40 m se situait en-dessous du sol. Ces salles ne pouvaient pas servir à l'habitation, leur surface ne devait pas être prise en compte dans le calcul de la surface brute du plancher (ci-après : SBP).

Face à des préavis contradictoires, l'autorité avait choisi de suivre ceux de la CA, l'OCAN et l'OCT soit les instances spécialisées qui avaient estimé le projet comme étant compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier ainsi qu'avec les différentes modifications du trafic dans la zone.

13) Par acte déposé le 19 août 2019, les consorts ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, en concluant à son annulation ainsi qu'à celle de l'autorisation de construire DD 110'544. Subsidiairement, ils concluaient au renvoi de la cause au TAPI pour que ce dernier annule l'autorisation de construire.

Le plafond du sous-sol ne se situait pas à 20 cm environ au-dessus du niveau du terrain naturel. Ce dépassement était en réalité d'environ 40 cm. Le premier niveau des maisons ne s'apparentait ni à un sous-sol, ni à une salle de jeu mais devait être considéré comme un espace habitable. Par conséquent, il rentrait partiellement dans le calcul du rapport des surfaces qui était ainsi dépassé et ne respectait pas les règles de la 5ème zone de construction. Par ailleurs, dans la commercialisation de leur projet sur internet, les promoteurs avaient eux-mêmes qualifié les cinq villas d'immeubles à « trois niveaux » ainsi le premier niveau était un véritable niveau d'habitation constituant un attrait commercial.

Le volume compact et massif du projet de construction rompait complètement avec le caractère et l'harmonie du quartier dans lequel régnait une certaine unité de style et une importante végétation. La construction d'un bâtiment à toit plat monobloc occupant presque l'entier de la longueur de la parcelle, ne maintenait pas les percées existantes provoquant un effet barrière important. Le projet ne respectait pas l'alignement existant actuellement entre les bâtiments se trouvant sur les parcelles voisines. Il y avait un intérêt public à ce que le quartier conserve une certaine homogénéité au vu des différents immeubles présents et de la promenade « la balade de Conches » bordant la parcelle sur laquelle le projet litigieux était prévu.

Enfin, le projet en cause créerait immanquablement des problèmes de circulation des véhicules au débouché de la parcelle. La visibilité sur le chemin J.-F. Dupuy, considérablement réduite à cause du dépôt prévu pour les poubelles à l'angle de la parcelle no 1'011 et de ce chemin, était créateur de risques notamment en raison de la forte fréquentation par les jeunes adolescents de l'École de Formation Professionnelle (ci-après : l'EFP), parfois turbulents, et de jeunes adultes de la Fondation SGIPA, en situation de handicap mental.

14) Le 26 août 2019, le TAPI a transmis son dossier, renonçant à formuler des observations.

15) Le 23 septembre 2019, FM Management Sàrl et les époux KRIEF (ci-après : les intimés) ont présenté leurs observations.

Le dépassement du plafond par rapport au niveau du sol tel qu'estimé par les recourants avait été effectué en référence au niveau naturel du sol le plus bas de la parcelle, induisant la différence la plus importante, alors que le TAPI retenait le niveau de référence du projet, arrêté à l'altitude moyenne. Par ailleurs, l'habitabilité éventuelle d'un espace n'était pas un critère pertinent pour le calcul du rapport des surfaces.

Les spécificités du quartier avaient été prises en considération. L'intérêt public du quartier n'était pas avéré, et le simple fait qu'il soit propice à la promenade n'y changeait rien. Le quartier n'était pas seulement composé de maisons individuelles, le bâtiment de l'école SGIPA ou la Clinique Vert-Pré constituaient notamment des bâtiments avec un volume important. Enfin, aucun des bâtiments environnants ne faisait l'objet d'une protection particulière.

Les personnes fréquentant les deux institutions mentionnées étaient capables de prendre le bus de manière autonome et de se confronter à la circulation urbaine. Ce n'était pas dans la zone villa considérée, malgré le nouveau projet à construire, qu'ils s'exposaient au risque le plus important au vu de la densité de la circulation dans le canton. Au surplus, les institutions concernées n'avaient pas formé recours contre l'autorisation de construire litigieuse ne partageant pas les craintes des consorts.

Enfin, un bureau d'ingénieurs spécialisés avait calculé les courbes de giration et de visibilité afin de s'assurer que la sortie de la parcelle respectait les prescriptions des normes en vigueur.

16) Le 23 septembre 2019, le département a formulé des observations, concluant au rejet du recours.

La partie enterrée des locaux était nettement prépondérante par rapport à celle qui était hors sol. Le seuil des cinq salles de jeux projetées se situait à environ 2 m en dessous du niveau du terrain naturel. L'éclairage, l'accès direct à l'extérieur ainsi que les autres caractéristiques invoquées par les recourants n'y changeaient rien car elles ne modifiaient en rien le fait que ces surfaces ne se situaient pas hors sol, or seule cette dernière question était déterminante pour le calcul des SBP.

La compatibilité avec l'aménagement du quartier n'était pas compromise du seul fait qu'un projet de construction se démarquait de celles existantes par sa volumétrie ou par une utilisation plus importante des possibilités constructives et ce d'autant moins lorsque le quartier n'était pas caractérisé par des constructions uniformes comme en l'espèce.

Les recourants n'avaient pas relevé les dangers de la circulation entraînés par la construction mais ceux qu'elle serait susceptible de créer, ainsi ils ne pouvaient pas reprocher aux premiers juges d'avoir accordé davantage de crédit au préavis favorable de l'instance spécialisée.

17) Le 11 novembre 2019, la chambre administrative a organisé un transport sur place à la hauteur du 24, chemin de la Colombe, Chêne-Bougeries.

Les parties ont constaté que le quartier était très végétalisé et arboré. Par ailleurs, les villas des époux HARARI et GAILLARD étaient des villas jumelles, d'un étage sur rez avec combles habitables, datant de la fin du XIXème siècle. M. GAILLARD a expliqué que quatre bâtiments de ce style avaient été édifiés à l'époque, deux donnant sur le chemin de la Colombe et deux sur le chemin Vert-Pré. Les villas construites de l'autre côté du chemin de la Colombe, soit du côté pair, avaient été édifiées vers les années 1930, suite à un morcellement du domaine de la Paumière. Elles étaient beaucoup plus modestes.

Les recourants ont rappelé que les véhicules des cinq villas édifiées devraient ressortir en marche arrière, ce qui était dangereux pour les piétons utilisant ce chemin, en particulier ceux qui se rendaient dans les locaux des ateliers de la SGIPA ou à l'EFP. Les parties ont précisé que, dans le cadre d'une promotion immobilière appelées « Les Arases », cinquante-sept appartements étaient en construction à proximité. Ainsi, le chemin J.-F. Dupuy, par lequel un accès au parking souterrain de ce projet se faisait, pourrait être mis à sens unique. M. KRIEF a indiqué, avec l'appui du département, que tous les calculs démontrant qu'il était possible de faire demi-tour au bout du chemin d'accès des cinq villas avaient été faits.

18) Le 3 décembre 2019, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les recourants invoquent une violation de l'art. 59 al. 2 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Le premier niveau des villas à construire n'était pas un sous-sol échappant au calcul du rapport des surfaces.

a. L'art. 59 LCI fixe, pour la cinquième zone de construction, le rapport maximum admissible entre la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, et la surface de la parcelle.

Son alinéa 2 précise ce qu'il faut entendre par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces ; il s'agit de la surface brute de plancher de la totalité de la construction hors sol.

b. La directive 021-v5 du 1er mars 2013 relative à l'art. 59 LCI, émise par le DT (L 5 50) donne des précisions sur la manière de calculer la SBP. Par le biais de schémas, dès lors que l'ensemble de la surface de plancher d'une pièce est située en dessous de la surface du sol, elle n'est pas prise en considération dans le calcul de la SBP. Tout en soulignant à juste titre que l'art. 59 al. 2 LCI ne se rapporte nullement à la notion de surface habitable, il est expliqué, au troisième schéma, que la surface d'un étage à moitié enterré, c'est-à-dire dont le niveau du terrain se situe à mi-hauteur du vide d'étage, ne doit pas être comprise dans la SBP. Le quatrième schéma montre quant à lui qu'un étage partiellement enterré dans un terrain naturel en pente, dont l'un des côtés des façades est entièrement hors sol, peut ne pas être intégralement défini comme une construction en sous-sol, étant précisé que ce dernier schéma a été remis en cause dans l'ATA/97/2019 du 29 janvier 2019. Dans cet arrêt, concernant un terrain naturel en pente, la chambre administrative a considéré que dans la mesure où, dans ce cas d'espèce, le rez inférieur se situait, côté lac, 31 cm seulement en-dessous de la pente du terrain naturel, un si faible écart entre le socle du rez inférieur et la pente naturelle ne pouvait avoir pour conséquence que l'entier de l'étage se situe en-dessous du sol, et par conséquent qu'il ne soit pas comptabilisé dans la SBP, concluant que l'inverse comporterait un risque d'abus.

Dans sa jurisprudence, la chambre administrative retient que les niveaux d'un bâtiment situés en sous-sol doivent être pris en compte dans le calcul de la SBP lorsqu'ils sont affectés à l'habitation ou au travail. Seuls des locaux communs dépourvus de rentabilité doivent être exclus du calcul. L'on ne comptera pas des caves, des garages, des dépôts sans places de travail, ou des locaux techniques, mais l'on tiendra compte d'un hall d'entrée, d'une cage d'escalier ou d'une coursive même ouverte lorsque ceux-ci donnent accès à des locaux rentables (ATA/1000/2018 du 25 septembre 2018 consid. 5 ; ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014 consid. 5).

c. La chambre de céans s'est à plusieurs reprises référée à la norme 514 420 de l'Institut pour l'aménagement local, régional et national du territoire de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (norme 514 420 ORL-EPF). Cette dernière prévoit que « la SBP se compose de la somme de toutes les surfaces d'étages en dessous et en dessus du sol, y compris les surfaces des murs et des parois dans leur section horizontale. N'entrent toutefois pas en considération : toutes les surfaces non utilisées ou non utilisables pour l'habitation ou le travail, telles que par exemple les caves, les greniers, les séchoirs et les buanderies des logements ; les locaux pour le chauffage, les soutes à charbon ou à mazout ; les locaux pour la machinerie des ascenseurs, des installations de ventilation et de climatisation, les locaux communs de bricolage dans les immeubles à logements multiples, les garages pour véhicules à moteur, vélos et voitures d'enfants, non utilisés pour le travail ; les couloirs, escaliers et ascenseurs desservant exclusivement des surfaces non directement utiles, les portiques d'entrées ouverts ; les terrasses d'attique, couvertes et ouvertes ; les balcons et les loggias ouverts pour autant qu'ils ne servent pas de coursive ».

Selon le Tribunal fédéral, cette norme se borne à définir les surfaces qui doivent être prises en compte dans la SBP utile. Si elle ne donne aucune indication sur la manière dont il convient de calculer la SBP utile quant aux autres éléments qui n'y sont pas mentionnés, cela ne signifie pas que les cantons disposeraient d'une marge de manoeuvre sur ce point (arrêt du Tribunal fédéral 1A.10/2005 du 13 juillet 2005 consid. 3.3).

d. L'art. 76 LCI indique qu'il est interdit d'utiliser, pour l'habitation, des locaux dont le plancher est situé au-dessous du niveau général du sol adjacent applicable aux projets situés dans la 5ème zone de construction.

e. L'art. 3 al. 4 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), invoqué par les recourants et intitulé « constructions au-dessous du sol », prévoit que les constructions au-dessous du sol sont celles dont la couverture ne dépasse pas le niveau naturel du sol.

3) C'est à juste titre que le TAPI a estimé que cette dernière disposition n'était pas pertinente en l'espèce pour estimer la SBP du projet querellé, cet article ayant trait aux normes d'habitabilité. Sous l'angle de la systématique du règlement, l'art. 3 RCI est intitulé « exploitation rurale ». Il se limite à définir des notions générales, l'alinéa 4 en question définissant celle de construction « au-dessous du sol » dans le cas d'une exploitation rurale. Les principes spécifiques de la zone 5 se trouvent aux art. 242 ss RCI.

4) Dès lors que l'art. 59 al. 2 LCI et la directive LCI y relative donnent des explications sur le calcul de la SBP d'une construction située en zone 5, la norme ORL 514 420 ne s'applique pas à de tels cas. Par ailleurs, cette dernière se borne à détailler le type de pièces à ne pas prendre en compte, sans indiquer de clé de calcul de la SBP.

Le calcul de sa surface brute de plancher peut se faire en application de l'art. 59 al. 2 LCI, dès lors que la future construction se situe en zone 5. Selon l'extrait de la mensuration officielle et du registre foncier, le terrain qui accueillera la future construction s'étend sur une surface de 1'339 m2. La SBP autorisée se monte dès lors à 589 m2.

À teneur de la coupe A-A du plan visé ne varietur du 8 mai 2018, le plafond du rez inférieur se situe à environ 20 cm au-dessus du niveau du terrain naturel alors que près de 2.40 m se situe en dessous du sol. Un si faible écart entre le plafond du rez inférieur et la pente naturelle ne peut avoir pour conséquence que l'entier de l'étage se situe au-dessus du sol. Par conséquent, la surface du sous-sol ne doit pas être comptabilisée dans la SBP. L'inverse comporterait un risque d'abus, soit l'abaissement de quelques centimètres du socle d'un niveau, afin que celui-ci se retrouve enterré et que l'ensemble de l'étage soit qualifié de construction en sous-sol. Partant, c'est à juste titre que le département n'a pas comptabilisé la surface de la salle de jeux dans le calcul du rapport des surfaces.

Par ailleurs, les autres critères invoqués par les recourants, soit l'habitabilité du sous-sol ainsi que les autres caractéristiques mentionnées ne signifient pas que ces surfaces se trouvent hors sol selon l'art. 59 al. 2 LCI et la directive LCI surtout au vu de la prohibition consacrée par l'art. 76 LCI.

Ce premier grief sera rejeté.

5) Les recourants ont fait valoir que les conditions de l'art. 59 al. 4 LCI pour permettre une augmentation du ratio à 44 % n'étaient pas remplies. Le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier n'étaient pas respectés avec la construction des nouvelles villas. Par ailleurs, la CA avait rendu un préavis favorable dénué de toute motivation circonstanciée.

a. L'art. 59 al. 4 LCI règle les rapports des surfaces en zone villas dans deux cas de figure. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, à certaines conditions précisées aux let. a et b de l'art. 59 al. 4 LCI, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé à un taux de densification plus élevé que ceux mentionnés à l'art. 59 al. 1 LCI. L'hypothèse de la let. b de l'art. 59 al. 4 LCI entre en ligne de compte lorsque la surface totale de la parcelle ou d'un ensemble de parcelles contiguës est supérieure à 5'000 m2. Elle exige, à titre de condition, l'accord de la commune exprimé sous la forme d'une délibération municipale, alors que le cas visé par la let. a de cette disposition requiert la consultation de la commune. Dans les deux cas, la CA doit être consultée.

b. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/699/2015 du 30 juin 2015 ; ATA/51/2013 du 21 janvier 2013 ; ATA/719/2011 du 22 novembre 2011). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/417/2009 du 25 août 2009 ; ATA/902/2004 du 16 novembre 2004). Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/873/2018 du 28 août 2018).

Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/318/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 ; ATA/828/2015 du 11 août 2015).

c. La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, exigée par l'art. 59 al. 4 LCI, est une clause d'esthétique, analogue à celle contenue à l'art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 et la jurisprudence citée).

d. Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1098/2019 du 25 juin 2019). De même, s'agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre administrative exerce son pouvoir d'examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/373/2016 du 3 mai 2016 et les références).

6) En l'espèce, le dossier compte les préavis de la CA, datant des 25 juillet 2017 et 14 novembre 2017 respectivement, tous deux favorables à la dérogation aux rapports de surface et qui n'a émis aucune réserve concernant une quelconque incompatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Le reproche des recourants face à ces préavis, soit leur manque de motivation circonstanciée, ne peut être suivi.

En effet, dans son premier préavis, la CA est favorable au projet et mentionne expressément la dérogation de l'art. 59 LCI comme nécessaire. Dans son second préavis, la CA y ajoute le motif l'ayant amenée à adopter une position favorable à ladite construction, soit que « le projet est compact avec une implantation qui s'ordonne dans la continuité de la villa existante, tout en préservant une zone végétale ». Ainsi, la brièveté du préavis de la CA, motivation que la loi n'exige au demeurant pas, ne saurait signifier que cette instance spécialisée n'aurait pas examiné de manière complète et circonstanciée l'intégration du bâtiment projeté dans le quartier. Par conséquent, en tant qu'autorité spécialisée, son analyse du projet n'apparaît pas contestable et c'est conformément à son pouvoir d'appréciation que le DT s'est fondé sur ce préavis imposé par la loi, malgré le préavis défavorable de la commune.

Au demeurant, le département a, à juste titre, rendu attentive la commune concernant son préavis du 13 décembre 2017. La direction de la planification directrice cantonale et régionale est l'instance cantonale la plus à même de déterminer si une révision d'un PDCom est en cours et l'impact de celle-ci sur une requête d'autorisation de construire. Dans le cas présent, cette dernière a préavisé favorablement le projet sans émettre d'observations et il n'y a aucun PDCom concernant cette commune ayant force obligatoire. Ainsi, les PDCom de la commune, que le canton n'a pas approuvé, et dont il n'a pas connaissance, ne peuvent être pris en considération.

Par ailleurs, tel que souligné par le TAPI, le législateur a souhaité permettre à la zone villa d'évoluer et de se densifier, notamment par la création d'habitats en ordre contigu, qui modifieront à terme la configuration de la zone villas. Il a eu conscience de cette évolution et en augmentant les IUS dérogatoires susceptibles d'être appliqués dans cette zone, il a souhaité encourager la réalisation de ces nouvelles formes d'habitation. L'exiguïté du territoire et la pénurie de logements sont des problèmes auxquels le législateur a jugé nécessaire d'apporter des solutions (ATA/1274/2017 précité ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/828/2015 précité). L'obligation de densification des autorités genevoises résulte du PDCn 2030 qu'elles ont adopté et qui a été approuvé par le Conseil fédéral. Ce document fondateur illustre leur réelle intention de procéder aux aménagements nécessaires. Le projet querellé s'inscrit pleinement dans ce projet.

Enfin, le quartier dans son ensemble n'est pas au bénéfice d'une protection patrimoniale particulière. De plus, lors du transport sur place, il a été constaté que le quartier dans lequel devait s'insérer le projet était constitué de bâtiments de style, d'époque et de gabarits différents. En outre, la construction plus dense de cinquante-sept appartements dans une promotion immobilière appelées « Les Arases » à proximité des villas à construire, accentue encore cette hétérogénéité. Par ailleurs, la commune ne recense pas uniquement des maisons individuelles, en effet, d'autres bâtiment, parfois de volume important, s'y trouvent tels que l'école SGIPA, l'EFP ou la Clinique Vert-Pré, si bien que le projet litigieux est compatible avec le nouveau visage du quartier tel qu'il se dessine désormais.

En conséquence, le grief sera écarté.

7) Selon les recourants, les risques liés à la circulation des véhicules au chemin J.-F. Dupuis auraient été sousestimés. Ainsi, les normes VSS n'auraient pas été respectées.

a. Le département peut refuser des autorisations de construire lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public ; ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu'exige son exploitation ou son utilisation ; ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l'égard des voisins ou du public ; offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection ; peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (art. 14 al. 1 let. a à e LCI).

Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y a pas d'abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/758/2016 du 6 septembre 2016 ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/86/2015 du 20 janvier 2015).

b. Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, l'accroissement du trafic routier, s'il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable au sens de l'art. 14 LCI ; de fait, l'accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone, ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l'art. 14 LCI (ATA/253/2016 du 22 mars 2016 et les arrêts cités). La chambre administrative avait notamment retenu que la construction de trois villas nouvelles ne saurait générer d'inconvénients graves pour le voisinage (ATA/66/2001 du 30 janvier 2001).

c. À Genève, l'OCT se fonde, en général, sur les normes VSS. Si les services spécialisés peuvent s'y référer, ces normes ne constituent pas des règles de droit et ne lient en principe pas les autorités (arrêt du Tribunal fédéral 1C_430/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.2). Leur application doit respecter les principes généraux du droit, dont en particulier celui de la proportionnalité (ATA/588/2017 du 23 mai 2017 ; ATA/758/2016 précité; ATA/98/2012 du 21 février 2012 et les références citées ; Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p. 326 n. 703).

La norme VSS 640 050 s'applique aux accès riverains, soit au raccordement destiné à l'usage de véhicules routiers (entrées et sorties privées) entre une route publique prioritaire et un bien-fonds générant un trafic de faible intensité.

8) En l'espèce, l'autorité intimée a suivi le préavis favorable de l'OCT du 5 décembre 2017 après une modification du projet consistant en la réalisation d'un minimum de huit places de parking. Il ressort des remarques émises qu'il était conscient des inquiétudes de circulation dont font part les recourants, sans que cela ne l'amène à préaviser défavorablement le projet. En raison du caractère technique de ce préavis, la chambre de céans ne peut s'en écarter que si l'autorité administrative a manifestement excédé la limite de sa liberté d'appréciation, ce qui n'est pas le cas.

En effet, en audience devant le TAPI, M. ORVAIN a confirmé le second préavis dérogatoire. Finalement, sept places de parking seraient construites car les places bleues, sous-utilisées, sur le chemin J.-F. Dupuy étaient à disposition des nouvelles villas à construire. Lors de la rédaction de son préavis concernant l'accessibilité de la parcelle, l'expert avait des plans à disposition tels que le plan de courbe de giration, le plan de stationnement et le plan d'angle de visibilité.

Au vu de ce qui précède, les voies d'accès à la parcelle litigieuse revêtent des caractéristiques suffisantes, d'un point de vue technique, pour assurer la desserte des nouvelles constructions projetées, lesquelles n'engendreront pas d'inconvénients graves au sens de l'art. 14 LCI. S'agissant du trafic provoqué par les constructions litigieuses dans une zone destinée à les accueillir, quatre villas supplémentaires ne sauraient être la source d'une trop grande incommodité pour les voisins. Enfin, les recourants, de leur propre aveu, n'apportent pas la preuve de ce qu'ils avancent quant à un éventuel danger pour les personnes en situation de handicap mental de la SGIPA et des jeunes de l'EFP ; un tel danger n'apparait, au demeurant, pas manifeste. Par conséquent, la chambre de céans retiendra qu'il n'existe aucun élément probant permettant de retenir que les personnes fréquentant ces établissements encourent un risque.

Compte tenu des conditions posées par les instances de préavis ainsi que de l'absence d'éléments lui permettant de s'écarter des préavis, le TAPI a, à raison, considéré la décision d'autorisation de construire comme conforme au droit.

9) Vu ce qui précède, le recours sera rejeté.

Vu cette issue, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à FM Management Sàrl ainsi qu'à Madame Séverine et Monsieur KRIEF, également à la charge des recourants (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 août 2019 par Madame Corinne CORMINBOEUF HARARI et Monsieur Maurice HARARI, Madame Astrid et Monsieur Louis GAILLARD et Monsieur Jean-Pierre HENRY contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge solidaire de Madame Corinne CORMINBOEUF HARARI et Monsieur Maurice HARARI, Madame Astrid et Monsieur Louis GAILLARD et Monsieur Jean-Pierre HENRY un émolument de CHF 1'000.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à FM Management Sàrl ainsi qu'à Madame Séverine et Monsieur John KRIEF à la charge de Madame Corinne CORMINBOEUF HARARI et Monsieur Maurice HARARI, Madame Astrid et Monsieur Louis GAILLARD et Monsieur Jean-Pierre HENRY pris solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Louis Gaillard, avocat des recourants, à Me Diane Schasca, avocate des intimés, au département du territoire, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :