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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/755/2019

ATA/169/2020 du 11.02.2020 sur JTAPI/703/2019 ( LCI ) , REJETE

Parties : FEHR Serge Marc, FEHR Manuela Fiorella et consorts, BORGEAUD Jean-Daniel / K SA, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, BENOIT Pierre Albert
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/755/2019-LCI ATA/169/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 février 2020

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur Jean-Daniel BORGEAUD
Madame Manuela et Monsieur
Serge Marc FEHR
représentés par Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat

contre

Monsieur Pierre Albert BENOIT

et

K SA
représentée par Me Timo Sulc, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 août 2019 (JTAPI/703/2019)


EN FAIT

1) La parcelle n° 3'021, de 3'141 m2, propriété de Ariex Developpements Immobiliers SA (ci-après : Ariex), est composée du chemin des Comtoises, sis sur la commune de Vernier (ci-après : la commune), en zone villa, et, à son extrémité, du terrain sur lequel est construit une habitation.

2) Le chemin dessert en outre quatorze parcelles, réparties sur ses deux côtés dont notamment :

a. au nord, la parcelle n° 1'792, d'une surface de 1'999 m2 inscrite au Registre foncier au nom de feu Monsieur Laurent IMHOF. Une villa à un logement est érigée sur cette parcelle, à l'adresse 5, chemin des Comtoises.

b. au sud : les parcelles, notamment :

- n° 2'661, d'une surface de l'651 m2, située chemin des Comtoises 4B, propriété de Madame Manuela et Monsieur Serge FEHR ;

- n° 2'659, et n° 2660, d'une surface, respectivement, de 1'214 et 1'703  m2, situées chemin des Comtoises 2A et 2B, propriétés de Monsieur Jean-Daniel BORGEAUD ;

- n° 2'662, d'une surface de 1'285 m2, située au chemin des Comtoises 4A, propriété de Monsieur Pierre Albert BENOIT.

Ces propriétés comportent toutes une villa constituant le domicile des propriétaires précités.

3) Le présent litige porte sur l'autorisation globale de construire DD 111'759 délivrée par le département du territoire (ci-après : le département ou le DT) le 22 janvier 2019 en faveur de la parcelle n° 1'792 en vue de la construction de quatre habitats groupés (très haute performance énergétique [ci-après : THPE] 47,5 %), couvert à voitures, pompes à chaleur et panneaux solaires - abattage d'arbres.

Les voisins contestent l'autorisation principalement aux motifs que la parcelle n'est équipée, ni en voies d'accès - le chemin des Comtoises étant « totalement défoncé et difficilement praticable » - ni en réseau de canalisation séparatif entre les eaux pluviales et les eaux usées.

4) Depuis plus de vingt ans, les propriétaires des parcelles du chemin des Comtoises rencontrent des difficultés avec l'état du chemin et des canalisations, sans parvenir à trouver de solutions aux litiges qui les opposent.

5) Des servitudes de passage (RS 50665) et de canalisations (RS 50666) ont été constituées en faveur de certaines parcelles.

La parcelle n° 1'792 n'est pas au bénéfice d'une servitude de passage de canalisations.

6) Le 6 février 2014, le service de planification de l'eau de la direction générale de l'eau, devenu depuis l'office cantonal de l'eau (ci-après : l'OCEau) rattachée au DT, a envoyé un courrier d'information aux propriétaires riverains du chemin des Comtoises pour les informer que des études étaient entreprises en vue de la mise en séparatif des canalisations dudit chemin.

7) Le 10 novembre 2015, faisant suite à sa lettre d'information du 6 février 2014, l'OCEau a convoqué les propriétaires riverains du chemin des Comtoises à une séance d'information du 2 décembre 2015, en présence notamment de Messieurs Daniel ANSUINI, ingénieur à l'OCEau, Kim NG, ingénieur civil à la commune et Madame Aurélie SCHENK du bureau d'ingénieurs Cera SA.

a. Un plan de situation général des biens-fonds avait été préalablement établi. S'agissant de la parcelle n° 1'792, le plan indique qu'il n'existe qu'un branchement unitaire, que celui-ci est bouché et qu'il n'est pas raccordé à un collecteur d'évacuation.

b. Il ressort de la présentation « power point » des photos de l'état du collecteur des eaux de pluie (ci-après : EP) qu'il était « interrompu en amont (mauvais état) » et présentait des fissures, du calcaire et des racines. Soixante mètres avaient pu être observés. La canalisation n'était pas récupérable. Deux nouvelles devaient être construites. Les travaux étaient urgents.

c. Selon le procès-verbal établi suite à cette séance, les représentants de l'OCEau et de la commune ont notamment rappelé que les travaux de mise en conformité du réseau d'assainissement collectif privé du chemin des Comtoises et ceux de réfection dudit chemin étaient deux choses distinctes. Les premiers devaient être réalisés pour répondre aux exigences légales alors que les seconds ne concernaient que les propriétaires du chemin auxquels il était toutefois conseillé d'associer l'exécution desdits travaux.

Les travaux étaient urgents, en particulier au vu du risque de pollution engendré par la situation en l'état.

Le début des travaux était planifié à l'été 2016.

8) Le 24 novembre 2016, la commune a informé les propriétaires riverains que l'exécution des travaux de mise en séparatif était décalée et désormais planifiée pour les années 2018-2019.

9) Le 13 juin 2018, K SA et Monsieur Ezio CARSANA, architecte au sein du bureau d'architecture Estravaganza SA, ont déposé une demande de démolition de la villa existante sur la parcelle n° 1'792 (M 8173).

Le même jour, ils ont requis l'autorisation de construire, sur la parcelle précitée, quatre habitations groupées (THPE 47.5%) avec couvert à voitures, pompes à chaleur et panneaux solaires.

10) Dans le cadre de l'instruction de cette demande, enregistrée sous DD 111'759, les préavis suivants ont notamment été recueillis :

- favorables sous conditions et dérogations à l'art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), le 23 juillet et 24 octobre 2018, de l'office des autorisations de construite (ci-après : OAC) ;

- favorables, les 22 août et 28 novembre 2018, de la direction générale des transports (ci-après : DGT), sous condition émise dans le premier préavis d'obtenir l'accord de la commune au sujet de l'accès aux places de stationnement donnant sur le chemin des Comtoises ;

- défavorable, le 1er octobre 2018, de l'Aéroport international de Genève, compte-tenu de l'exposition au bruit de la parcelle, le périmètre concerné par le projet se situant en dessus des valeurs limites d'immission (ci-après : VLI) diurne et nocturne correspondant au DS II ;

- favorable, le 27 novembre 2018, de l'OCEau, sous conditions notamment de « 1 - Raccorder les canalisations privées au système public d'assainissement des eaux du chemin de la Greube (...) par l'intermédiaire du collecteur collectif privé unitaire EM sis au chemin des Comtoises, et dans l'attente de la mise en séparatif dudit chemin les eaux transiteront auparavant par les parcelles No 3316 et No 1792. (...) 6 - Prendre contact avec la commune de Vernier et son ingénieur mandataire pour définir toutes les modalités techniques, administratives et financières de raccordement aux futurs équipements publics / collectifs privés actuellement à l'étude, ainsi que le programme de réalisation. 7 - L'ouverture du chantier est subordonnée au règlement des éléments relevant du droit privé, dont notamment : la constitution des servitudes de passage, maintien et entretien de canalisations sur fonds d'autrui impliquant l'approbation des parties concernées [et] l'accord écrit du(es) propriétaire(s) de la (des) canalisation(s) privée(s) existante(s) pour son (leur) utilisation. 8 - Préalablement au branchement des canalisations des eaux usées et pluviales, le requérant, respectivement son mandataire, sera tenu de vérifier l'état, le bon fonctionnement et la capacité hydraulique des équipements collectifs privés susmentionnés, jusqu'aux équipements publics. Les éventuels travaux de réfection, d'adaptation, voire de reconstruction seront entrepris dans le cadre de ceux faisant l'objet de la présente requête, d'entente avec notre service (...) » ;

Les autres préavis recueillis, dont celui de la commune, étaient tous soit favorables, soit favorables sous conditions, au projet.

11) Le 7 décembre 2018, la commune a informé les propriétaires riverains du chemin des Comtoises que l'exécution des travaux était reportée au plus tôt aux années 2020 - 2021, à condition qu'un budget comportant un crédit de réalisation soit voté par le Conseil municipal. Le même courrier indiquait que le chemin des Comtoises était appelé à se densifier à court terme : « une coordination entre ces nouvelles constructions, les travaux de canalisation, ainsi que la réfection des enrobées du chemin, doit être assurée ».

12) Le 22 janvier 2019, le département a délivré les autorisations de construire et de démolir sollicitées (M 8173 et DD 111'759), lesquelles ont été publiées dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

13) Par acte du 21 février 2019, Mme et MM. FEHR, BENOIT et BORGEAUD (ci-après : les voisins) ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre l'autorisation de construire, concluant à son annulation sous suite de frais et dépens. Préalablement, un délai pour compléter leur recours devait leur être accordé et un transport sur place ainsi que l'audition de MM. ANSUINI, NG et de Mme SCHENK devaient être ordonnés.

En tant que voisins directs ou proches de la parcelle concernée et riverains du chemin des Comtoises servant d'accès à leurs propriétés et au projet autorisé, ils disposaient de la qualité pour recourir.

Au fond, l'autorisation avait été délivrée alors que la parcelle n° 1'792 n'était équipée ni en voie d'accès, ni en réseau de canalisation séparatif. Les canalisations de dix villas étaient actuellement branchées sur le chemin des Comtoises et le système actuel n'était déjà pas capable d'absorber les eaux usées et pluviales de ces dernières. La construction de quatre villas ne ferait qu'aggraver les importants problèmes d'insuffisance des canalisations et d'état du chemin. Par ailleurs, outre le projet querellé, d'autres projets de construction étaient en cours sur les parcelles n° 3'021 (DD 111'852 construction de deux villas contiguës) et n° 1'783, situées 15 et 6 chemin des Comtoises. La construction de dix villas supplémentaires était ainsi prévue à brève échéance.

Les pièces mentionnées dans le recours n'étaient pas jointes.

14) Dans ses observations du 27 mars 2019, K SA a conclu au rejet du recours. Préalablement, elle a requis le retrait de l'effet suspensif au recours, l'audition de MM. ANSUINI et NG - qui pourraient établir que l'état actuel des canalisations du chemin des Comtoises était suffisant pour accueillir le projet litigieux, dans l'attente de la mise en séparatif de ces canalisations dans un proche avenir - et le rejet des requêtes de transport sur place et d'audition de Mme SCHENK.

Le caractère abusif du recours ainsi que le comportement procédural déloyal des voisins justifiaient que l'effet suspensif soit retiré.

Elle versait à la procédure diverses pièces dont :

- une facture de la société Amoudruz SA du 30 juin 2016 relative à des travaux de dégagement du branchement unitaire existant sur la parcelle n° 1'792 et attestant du raccordement de cette dernière à la canalisation unitaire du chemin des Comtoises ;

- un extrait de l'acte de constitution de servitude de passage et de canalisations sur la parcelle n° 3'021 constituant le chemin des Comtoises du 22 septembre 1970 en faveur de la parcelle n° 1'792 ;

- un courrier du 27 mars 2019 de la commune indiquant que le projet de mise en séparatif du collectif privé au chemin des Comtoises était dorénavant planifié à l'horizon 2020 - 2021, conformément au plan pluriannuel des investissements fixé par son Conseil administratif dans le cadre du budget 2019. Ces travaux seraient réalisés sous réserve de l'approbation d'une délibération administrative ouvrant un crédit de réalisation, qui devrait être adoptée par le Conseil municipal.

15) Le 25 avril 2019, le département s'en est rapporté à justice s'agissant de la demande de restitution de l'effet suspensif formulée par l'intimée.

16) Le 29 avril 2019, le département s'est déterminé sur le recours, concluant à son rejet.

Il s'opposait aux mesures d'instruction requises qui ne présentaient aucun intérêt pour trancher le litige.

Au fond, le grief des voisins relatif à l'insuffisance de l'équipement de la parcelle en voie d'accès était infondé, étant rappelé que les voisins eux-mêmes utilisaient le chemin incriminé pour accéder à leur propre propriété et que l'instance compétente avait rendu un préavis favorable, ce qui permettait de confirmer que, du point de vue de l'accès, l'équipement de la parcelle était suffisant.

L'absence d'équipement en réseau séparatif était pour le surplus temporaire dans la mesure où il ressortait du préavis favorable de l'OCEau du 27 novembre 2018 qu'elle durerait uniquement jusqu'à la mise en séparatif du chemin des Comtoises. La situation n'était pas imputable aux constructeurs et l'écoulement par l'intermédiaire du collecteur unitaire n'entraînait aucun impact environnemental. L'instance de préavis compétente avait émis un préavis favorable et listé les conduites publiques auxquelles le raccordement devait être effectué. Enfin, le projet prendrait place en bordure de terrains construits et équipés et, selon la jurisprudence, dans de telles circonstances, il appartenait aux voisins de démontrer que l'équipement ne serait pas suffisant, ce qu'ils n'avaient pas fait en l'espèce.

Enfin, les autres constructions projetées dans le périmètre étaient sans incidence sur la présente espèce.

17) Dans leurs observations sur effet suspensif, les voisins ont réfuté le caractère dilatoire de leur démarche, précisant que le second projet de construction sur des parcelles riveraines avait été déposé (DD 112'489 portant sur la construction de cinq villas [HPE 43,3 %] sur la parcelle n° 1'783 sise 6, chemin des Comtoises).

18) Dans leur réplique, les voisins ont relevé que raccorder quatre nouveaux logements sur la canalisation unitaire située sous le chemin des Comtoises, qui ne comportait qu'un collecteur fissuré et en mauvais état, ne satisfaisait pas la dimension technique de l'exigence d'équipement. À cet égard, le préavis de l'OCEau, qui reconnaissait que la parcelle ne permettait pas un raccordement des nouvelles constructions en réseau séparatif jusqu'aux égouts publics, était alambiqué. La parcelle n° 1'792 ne bénéficiait par ailleurs pas d'une servitude de canalisations sur la parcelle n° 3'021 correspondant au chemin des Comtoises, comme l'exigeait le préavis de l'OCEau. Il fallait dès lors considérer que la parcelle n'était pas équipée sous l'angle technique et juridique.

L'accès était également insuffisant tant techniquement que juridiquement, la parcelle n° 1'792 ne bénéficiant notamment d'aucune servitude inscrite au Registre foncier lui permettant de passer sur la parcelle n° 3'021 constituant le chemin des Comtoises.

19) Dans sa duplique, l'intimée a rappelé que la parcelle n° 1'792 bénéficiait d'une servitude de passage sur la parcelle n° 3'021. Elle avait produit des extraits d'un acte notarié attestant l'existence d'une telle servitude. Un courrier du 12 février 2019 d'Ariex confirmait l'existence de cette servitude. Pour le surplus, il fallait se référer au préavis favorable de l'OCEau du 27 novembre 2018, dont les conditions garantissaient que l'équipement collectif auquel se raccorderait la construction litigieuse serait suffisant en termes de fonctionnement comme de capacité, et au courrier de la commune du 27 mars 2019. La possibilité pour toutes les parcelles desservies par la parcelle n° 3'021 d'y raccorder leurs canalisations était une chose acquise et nullement contestée, comme cela ressortait du procès-verbal de la réunion des propriétaires riverains du 2 décembre 2015.

20) Le département a également dupliqué, relevant que la question du collectif unitaire avait été dûment prise en compte par l'OCEau, dans son préavis qui prévoyait notamment la vérification de l'état du fonctionnement des équipement collectifs privés avant branchement. L'autorisation posait pour le surplus la condition que la question des servitudes, qui relevait du droit privé, soit réglée avant le début des travaux. La parcelle disposant enfin d'une servitude de passage sur le chemin des Comtoises, il fallait retenir qu'elle était équipée tant sous l'angle technique que juridique.

21) Par jugement du 7 août 2019, le TAPI a rejeté le recours.

Il n'était pas contesté que la parcelle litigieuse était desservie par des canalisations situées à sa proximité directe, sous l'extension du chemin des Comtoises (parcelle n° 4'857), auxquelles il était en soi possible de se raccorder, même si, au vu des pièces du dossier, ces installations présentaient certaines défectuosités, mises en évidences depuis plusieurs années.

L'OCEau avait dûment examiné cet aspect et, dans son préavis favorable, fixé des conditions à ce sujet. Les charges dont ce préavis était assorti garantissaient que l'équipement collectif auquel se raccorderait le projet serait suffisant en termes de fonctionnement et capacité. L'absence d'équipement en réseau séparatif actuel avait un caractère temporaire (2020-2021) et n'entraînerait de surcroît aucun impact environnemental. Selon ce même préavis, l'ouverture du chantier était enfin subordonnée au règlement des éléments relevant du droit privé, dont notamment la constitution des servitudes utiles. Partant, la question de savoir si ces travaux pourraient concrètement être réalisés, en particulier parce que des copropriétaires de la parcelle de dépendance concernée pourraient s'y opposer, et celle de savoir qui assumerait les frais y relatifs relevaient des relations de droit privé entre les parties, de sorte qu'elles ne sauraient être examinées dans le cadre du présent recours.

Dès lors, le préavis du service spécialisé, dont les conditions particulières visant à s'assurer que le terrain serait dûment équipé avaient été reprises dans la décision querellée, suffisait, sur ce point, à fonder la décision du département.

Les voisins n'apportaient pour le surplus aucun élément quant à la praticabilité malaisée du chemin des Comtoises, qu'ils utilisaient au demeurant quotidiennement pour accéder à leurs villas. Ils ne démontraient pas plus que ce chemin ne serait pas à même de répondre à la sollicitation à laquelle il serait soumis compte tenu des nouvelles constructions envisagées, notamment en termes de revêtement.

Ce chemin desservait aujourd'hui quatorze parcelles et l'on peinait à comprendre en quoi la construction de trois logements supplémentaires le rendrait soudain impraticable. La DGT, instance spécialisée, avait d'ailleurs préavisé favorablement le projet sans émettre la moindre observation en ce qui concernait l'accès aux constructions projetées, ce qui confirmait que l'équipement de la parcelle était suffisant à cet égard. Le département s'était notamment fondé sur ce préavis pour autoriser le projet litigieux, étant rappelé que, dans un tel cas, l'autorité de recours devait s'imposer une certaine retenue.

Ainsi, en se fondant sur les préavis de l'instance spécialisée, le DT n'avait pas outrepassé son pouvoir d'appréciation en considérant que le chemin des Comtoises constituait un accès suffisant pour desservir les constructions projetées et que le projet n'induirait pas d'inconvénients graves ou durables.

Il était rappelé aux voisins, en tant que de besoin, l'existence de la servitude de passage et de canalisations sur la parcelle n° 3'021 (chemin de Comtoise) en faveur de la parcelle n° 1'792.

Enfin, les voisins ne sauraient tirer argument de l'existence d'autres requêtes en autorisation de construire sur des parcelles accessibles depuis le chemin des Comtoises dans la mesure où un traitement simultané des projets en question avec celui querellé ne s'imposait pas et que le département pouvait parfaitement dissocier le traitement de l'autorisation litigieuse de celui des autres requêtes, la délivrance de la première n'étant juridiquement pas conditionnée par la délivrance des autres, dont l'instruction était d'ailleurs toujours en cours et le sort inconnu à ce stade.

22) Par acte du 18 septembre 2019, Mme et M. FEHR ainsi que M. BORGEAUD ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité.

Ils ont conclu à l'annulation du jugement et de l'autorisation DD 111'759. Subsidiairement, trois conditions devaient être mises à la délivrance de l'autorisation de construire, à savoir : la constitution des servitudes de passage, maintien et entretien de canalisation sise sous la parcelle n° 3'021 ainsi que l'obtention de l'accord écrit de tous les propriétaires utilisant le collecteur privé unitaire EM sis au chemin des Comtoises ; la remise et l'approbation par l'OAC d'un rapport d'ingénieur portant sur le collecteur privé unitaire EM sis sous le chemin des Comtoises jusqu'aux équipements publics (nature exacte, état, fonctionnement, capacités hydrauliques, ainsi que description et coût des éventuels travaux de réfection, adaptation, voire de reconstruction) ; enfin, la remise à l'OAC d'une garantie financière du coût des travaux de réfection, d'adaptation, voire de reconstruction dudit collecteur. Préalablement, ils ont sollicité de nombreuses mesures d'instruction, lesquelles seront reprises dans la partie en droit, en tant que de besoin.

Les faits avaient été mal établis. C'était à tort que le TAPI avait retenu que la parcelle n° 1'792 était au bénéfice d'une servitude de canalisations. De même, il était erroné de retenir l'existence d'une desserte en canalisations en faveur de la parcelle n° 1'792. La probabilité qu'une réfection du chemin intervienne dans un proche avenir avec la pose d'un réseau séparatif et d'un nouveau revêtement était illusoire, tant à cause des conflits entre les propriétaires (tant pour la prise en charge du coût des réfections que pour les modalités de celles-ci) qu'au vu de la position de la commune, actuellement confrontée à d'importants besoins en équipements publics. Enfin, le doublement imminent du nombre de constructions était, contrairement à ce qu'avait retenu le TAPI, pertinent puisqu'il en avait déduit le caractère prétendument compatible avec l'état actuel de la canalisation unitaire et de la surface du chemin, ce qui était faux.

Le TAPI avait violé le droit à la preuve et son devoir d'instruction d'office. Le jugement relevait que les recourants n'avaient apporté aucun élément quant à la praticabilité malaisée du chemin, alors que ceux-ci avaient sollicité un transport sur place. S'agissant de l'état défectueux des canalisations, ils avaient requis l'audition de témoins. Retenir que les recourants n'avaient pas établi les faits consacrait une violation de leur droit à la preuve.

Par ailleurs, l'exigence d'équipement aux plans technique et juridique avait été violée à l'instar de la législation sur les eaux. Les arguments seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

23) K. SA a conclu au rejet du recours et au retrait de l'effet suspensif au recours.

Il ressortait d'une facture du 30 juin 2016 adressée au propriétaire de la parcelle n° 1'792 par une entreprise générale de vidange que des travaux avaient été effectués, consistant en la mise en place de la haute pression depuis le regard au milieu du jardin jusqu'au collecteur principal et au nettoyage du regard. La parcelle était en conséquence raccordée à la canalisation unitaire du chemin des Comtoises.

Le revêtement du chemin était usé par l'effet du temps, mais amplement suffisant pour garantir la sécurité des usagers, étant donné ses larges dimensions et son caractère rectiligne. Le processus de commercialisation des quatre unités du projet litigieux était très avancé, trois des quatre logements étant déjà réservés. Par ailleurs, M. NG avait adressé, le 29 septembre 2019, un courrier à l'intimée dont il ressortait que le crédit pour l'assainissement des canalisations du chemin des Comtoises avait été voté le 1er octobre 2019, qu'un appel d'offre serait lancé en novembre 2019 pour la réalisation de ces travaux, que les propriétaires riverains seraient mis en demeure de contribuer financièrement à ces travaux en mars 2020 et que le début des travaux d'assainissement des canalisations était prévu pour septembre 2020. Un montant correspondant à la quote-part de la parcelle n° 1'792 était prévu dans le plan financier du projet litigieux. Seul un éventuel refus des recourants de s'acquitter de leur contribution retarderait les travaux de canalisation.

Pour le surplus, les conditions strictes fixées dans les préavis répondaient aux exigences légales s'agissant de la praticabilité du chemin, au demeurant utilisé par les recourants, le raccordement au réseau des canalisations ou la constitution de servitudes de canalisations.

24) M. BENOIT, voisin, qui n'avait pas souhaité recourir, concluait à l'admission du recours pour des motifs similaires aux recourants.

25) Le département a conclu au rejet du recours.

C'était à tort que le TAPI avait retenu l'existence d'une servitude de passage et de canalisation à charge de la parcelle n° 3'212 en faveur de la parcelle n° 1'792. Le DT n'avait jamais évoqué l'existence d'une telle servitude. Ce fait était pour le surplus sans pertinence pour la résolution du litige.

C'était à bon droit que le TAPI avait retenu que la parcelle n° 1'792 serait desservie par des canalisations situées à proximité directe. Sur question du DT, l'architecte avait détaillé notamment ce point dans une correspondance du 22 octobre 2018.

C'était à raison que le TAPI avait retenu que l'absence d'équipement en réseau séparatif avait un caractère provisoire. Des travaux étaient planifiés à l'horizon 2020 - 2021. En tous les cas, les recourants ne démontraient pas que l'état actuel serait définitif.

26) Dans leur réplique, les recourants ont persisté dans leurs conclusions.

27) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Dans leur acte de recours, les recourants ont conclu à plusieurs actes d'instruction, soit un transport sur place, l'audition de quatre témoins (les trois personnes représentant les administrations, présentes à la séance du 10 décembre 2015, et l'examinateur du préavis auprès de l'OCEau), à ce qu'une expertise soit ordonnée, ainsi qu'à la production de plusieurs documents, à l'instar de tout document, en particulier un rapport d'ingénieurs, portant sur ses obligations figurant au ch. 8 du préavis du 27 novembre 2018 de l'OCEau ; toute explication et document relatifs au prix de commercialisation des quatre habitations, à la production du plan détaillé de réalisation de ces quatre habitations avec mise en évidence du coût prévu pour la constitution d'une servitude de passage des canalisations notamment.

a. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 4.1).

Le droit de faire administrer des preuves découlant du droit d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_635/2016 du 3 août 2017 consid. 4.2).

b. En l'occurrence, les recourants ont pu s'exprimer dans leur acte de recours et dans réplique, produire toute pièce utile, de sorte qu'ils ont pu valablement exercer leur droit d'être entendus.

Les recourants soulèvent de nombreux faits non pertinents pour l'issue du litige, notamment des faits en relation avec le droit privé. Ces faits n'ont pas à être établis. Toute offre de preuve y relative doit être écartée.

En l'état, le dossier contient les préavis détaillés de toutes les instances nécessaires, notamment de l'OCEau. Il n'est en conséquence pas nécessaire d'auditionner la personne en charge du dossier au sein dudit office. Les recourants sollicitent par ailleurs l'audition des trois personnes présentes lors de la séance du 10 décembre 2015, que cela soit pour l'OCEau, pour le bureau d'ingénieur ou pour la commune. Ces auditions n'apparaissent pas nécessaires, le dossier, comprenant tous les éléments pertinents pour la solution du litige, étant en conséquence complet et en état d'être jugé.

S'agissant du transport sur place, des photos sont produites au dossier sur l'état du chemin. Pour le surplus, les données accessibles sur le SITG permettent de visualiser la configuration des lieux. Les problèmes de canalisations souterraines ne justifient pas un transport sur place.

Enfin, l'expertise n'apparaît pas nécessaire compte tenu de ce qui suit.

La chambre administrative étant en possession d'un dossier complet, qui contient les éléments pertinents pour trancher le litige, il ne sera pas donné suite aux demandes d'acte d'instruction.

3) Conformément à l'art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (al. 1 let. a), et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b) ; les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

4) Dans un premier grief, les recourants se plaignent d'un mauvais établissement des faits. Ils soulèvent trois points.

a. Il est exact, conformément à ce que soutiennent les recourants que, contrairement à ce qu'a retenu le TAPI, la parcelle n° 1'792 n'est pas au bénéfice d'une servitude de canalisation. Le DT n'a toutefois jamais évoqué l'existence d'une telle servitude. Ce fait est cependant sans pertinence compte tenu de ce qui suit.

b. Le fait que « la parcelle litigieuse est desservie par des canalisations, situées à sa proximité directe, sous l'extension du chemin des Comtoises (parcelle 4'857) auxquelles il est possible de se raccorder » est contesté.

Dans une correspondance du 22 octobre 2018, l'architecte répond aux préoccupations émises par l'OCEau dans son premier préavis, du 11 septembre 2018. Il confirme l'adaptation des branchements privés au système public d'assainissement des eaux en réutilisant les raccords existants. Il précise que seront utilisés les canalisations privées au système public d'assainissement des eaux du chemin de la Greube en attendant la mise en séparatif dudit chemin. Il était prévu de raccorder les maisons projetées sur la canalisation du voisin en amont (parelle n° 3'316) qui transitait sur la parcelle n° 1'792, avant de se raccorder sur la canalisation unitaire existante dans le chemin des Comtoises. Le raccordement du collecteur unitaire du chemin des Comtoises sur le collecteur communal dans le chemin de la Greube pourrait être réalisé sur l'écoulement des eaux claires. L'architecte indiquait qu'un contrôle serait effectué durant les travaux et le raccordement serait remis en conformité (raccordement sur les eaux usées) si nécessaire.

Cette réponse a manifestement correspondu aux attentes du service spécialisé, lequel a délivré un préavis favorable sous conditions le 27 novembre 2018.

Pour le surplus, les griefs des recourants sont sans pertinence compte tenu des conditions posées par l'OCEau dans son préavis, lequel a veillé à conditionner son préavis à ce que toutes les conditions légales nécessaires soient remplies au plus tard au moment de l'ouverture du chantier.

Ainsi, même à suivre les recourants, la construction de la parcelle n° 1'792 ne pourra commencer qu'à partir du moment où les canalisations privées auront été raccordées au système public d'assainissement des eaux du chemin de la Greube par l'intermédiaire du collecteur collectif privé unitaire EM sis au chemin des Comptoises, et dans l'attente de la mise en séparatif dudit chemin. Suivent des considérations sur les diamètres des collecteurs respectivement pour les eaux usées et les eaux de pluie. Par ailleurs, le préavis mentionne que « la constitution des servitudes de passage, maintien et entretien de canalisations sur fonds d'autrui impliquant l'approbation des parties concernées et l'accord écrit du ou des propriétaires de la ou des canalisations privées existantes pour son ou leur utilisation auront été réglés » (point 7 du préavis).

Ainsi, le fait que, en l'état aujourd'hui, la parcelle litigieuse soit, ou non, desservie par des canalisations situées à sa proximité directe sous l'extension du chemin des Comtoises auxquelles il est en soi possible de se raccorder n'est pas pertinent. Même à considérer qu'en l'espèce ce fait serait pertinent, il serait sans incidence sur la solution du litige conformément aux considérants qui suivent.

c. Le TAPI avait retenu la probabilité qu'une réfection du chemin intervienne dans un proche avenir avec la pose d'un réseau séparatif et d'un nouveau revêtement, ce qui était erroné, compte tenu des conflits entre les propriétaires (tant pour la prise en charge du coût des réfections que pour les modalités de celles-ci) que de la position de la commune, actuellement confrontée à d'importants besoins en équipements publics.

Le TAPI a toutefois relevé que l'absence d'équipements en réseau séparatif avait un caractère provisoire. Les recourants ne le contestent pas et ne démontrent pas le caractère définitif de la situation. Le fait retenu n'est pas erroné.

d. Enfin, l'augmentation du nombre d'habitants dans le chemin était un fait pertinent. Le doublement imminent du nombre de constructions était, contrairement à ce qu'avait retenu le TAPI, pertinent puisqu'il en avait déduit le caractère prétendument compatible avec l'état actuel de la canalisation unitaire et de la surface du chemin, ce qui était faux. Ce ne serait plus neuf, mais vingt villas qui utiliseraient le collecteur unitaire défectueux du chemin des Comtoises et plus quatorze, mais vingt-cinq villas qui emprunteraient le chemin des Comtoises, déjà en mauvais état, lequel subirait encore une destruction supplémentaire du fait des camions et engins de chantier qui l'utiliseraient pour les projets de construction.

Savoir si l'augmentation du nombre d'habitations dans une zone donnée est pertinente dépend des circonstances. Même à considérer qu'en l'espèce ce fait serait pertinent, il serait sans incidence sur la solution du litige conformément aux considérants qui suivent.

5) a. Les recourante se plaignent d'une violation du droit à la preuve et du devoir d'instruction d'office. Ils critiquent le jugement qui retient qu'ils n'auraient apporté aucun élément, notamment en terme de revêtement quant à la praticabilité malaisée du chemin des Comtoises. Or, ceux-ci avaient sollicité un transport sur place. S'agissant du chemin, les recourants entendaient démontrer que « depuis plus de vingt ans, ce chemin était dans un état pitoyable et l'objet de tentatives toujours avortées de la part de certains riverains ».

La maxime d'office ne porte que sur les faits pertinents sans égard aux propres allégués et offres de preuves des parties (arrêt du Tribunal fédéral 1C_1/2015 du 10 août 2015 consid. 2.1 in SJ 2016 I 185).

b. En l'espèce, l'état du chemin, principalement l'existence de nids de poule, ressort de photos versées au dossier. Il n'est pour le surplus pas contesté que des travaux sont nécessaires, que l'entretien du chemin est litigieux depuis de nombreuses années et qu'aucun accord n'a pu être trouvé entre les riverains, en l'état, pour procéder auxdits travaux. En conséquence, la maxime d'office n'a pas été violée, l'offre de preuves portant sur des faits soit non pertinents soit établis.

S'agissant du caractère défectueux des canalisations, les recourants se prévalent de pièces produites. On peine à discerner une violation du droit à la preuve. Ils avaient par ailleurs requis l'audition de trois témoins qui « avaient décrit la nécessité de la réfection des canalisations du chemin ». La nécessité desdits travaux n'est toutefois pas contestée. Le TAPI n'a dès lors pas violé l'art. 19 LPA.

6) Les recourants arguent d'une violation de l'art. 22 al. 2 let. b et 19 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700) sous deux aspects, soit l'absence d'équipement pour l'évacuation des eaux et l'absence d'équipement en voie d'accès.

7) a. Les recourants allèguent que la décision querellée viole l'art. 17 de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux - RS 814.20) selon lequel un permis de construire un bâtiment ne peut être délivré en zone à bâtir, à savoir dans le périmètre des égouts publics, si le déversement des eaux polluées dans les égouts n'est pas garanti (art. 17 LEaux). Par ailleurs, les art. 7 et 12
al. 3 LEaux imposent un principe d'égout séparatif pour les eaux claires et les eaux usées. Techniquement, le préavis l'OCEau reconnaissait que la parcelle ne permettait pas un raccordement des nouvelles constructions en réseau séparatif jusqu'aux égouts publics. Le département ne pouvait pas se défausser de ses responsabilités sur le requérant et le mandataire. Un réseau séparatif et un nouveau revêtement au chemin des Comtoises coûtaient environ CHF 800'000.-. À défaut de garanties financières d'un tel montant, il était improbable qu'une réfection du chemin intervienne dans un proche avenir. L'exigence d'un raccordement « sans frais disproportionnés » ressortant de l'art. 19 al. 1 LAT n'était pas respectée. Juridiquement, le dossier ne contenait aucun engagement d'un notaire ou du propriétaire de la parcelle n° 3'021 de constituer une servitude de canalisation en cas d'entrée en force de l'autorisation de construire. Or, le département s'était limité à exiger « sous la rubrique documents d'information qu'il conviendrait de communiquer une telle servitude avant l'ouverture du chantier ».

b. En l'espèce, juridiquement, le préavis prévoit que l'ouverture du chantier est subordonnée au règlement des éléments relevant du droit privé, dont notamment « la constitution des servitudes de passage, maintien et entretien de canalisations sur fonds d'autrui impliquant l'approbation des parties concernées et l'accord écrit du ou des propriétaires de la ou des canalisations privées existantes pour son ou leur utilisation auront été réglés » (point 7 du préavis).

Le propriétaire doit pouvoir garantir qu'il jouit du droit d'utiliser l'accès en question de manière durable. On considère parfois qu'une éventuelle servitude ne doit pas forcément avoir été inscrite au registre foncier lors de l'octroi du permis de construire, mais qu'elle doit avoir au moins été convenue, le cas échéant, soumise à la condition suspensive qu'elle sera valide dès l'obtention du permis de construire (Éloi JEANNERAT, Commentaires pratiques LAT : planifier l'affectation, 2016, p. 555, n. 35).

Certes, en l'espèce, ce n'est que l'ouverture du chantier et non la délivrance de l'autorisation de construire qui est conditionnée à l'obtention desdites garanties. Le résultat est toutefois identique. En effet, selon les principes généraux du droit, il n'appartient pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s'élever entre le requérant d'une autorisation de construire et un opposant, celle-ci n'ayant pas pour objet de veiller au respect des droits réels et notamment des servitudes (art. 3 al. 6 LCI ; ATA/166/2018 consid. 5). De surcroît, conformément à l'adage nemo auditur suam (propriam) turpitudinem allegans (nul ne peut se prévaloir de sa propre faute), qui concrétise le principe constitutionnel de la bonne foi et vaut également en matière de droit public (arrêt du Tribunal fédéral 2C_17/2008 du 16 mai 2008 consid. 6.2 ; ATA/26/2012 du 17 janvier 2012 consid. 10), les recourants sont malvenus de se prévaloir des blocages liés à leur mésentente pour la réfection du chemin et la répartition des frais y relatifs pour en déduire que le projet ne remplit pas les conditions exigées par la LEaux et la LAT.

La condition fixée dans le préavis, même posée sous la rubrique « documentation d'information à joindre à l'autorisation », répond en conséquence aux exigences légales et jurisprudentielles dès lors que les travaux ne pourront être entrepris qu'une fois les problèmes liés aux évacuations des eaux réglés, preuve à l'appui, à satisfaction des spécialistes du département, conformément aux exigences posées dans le préavis.

c. Techniquement, les recourants invoquent un coût de CHF 200'000.- par nouvelle villa, soit CHF 800'000.- au total pour poser un réseau séparatif et un nouveau revêtement au chemin des Comtoises. Ils en déduisent que l'exigence de raccordement sans frais disproportionnés de l'art. 19 al. 1 LAT n'est pas remplie.

Lors de la réalisation ou de la transformation du réseau public existant, les propriétaires sont tenus d'adapter le système d'évacuation des eaux de leur
bien-fonds conformément aux exigences du département, aux normes des associations professionnelles et à l'état de la technique (art. 24 al. 1 du règlement d'exécution de la loi sur les eaux du 15 mars 2006 - REaux - L 2 05.01). Le département peut imposer aux propriétaires des mesures de gestion des eaux pluviales à la parcelle, telles que l'infiltration si les conditions locales le permettent, ou la rétention. Lorsque de telles mesures ne sont pas envisageables, les raccordements se font en système séparatif dans la mesure où cela n'implique pas des coûts disproportionnés (art. 24 al. 2 REaux).

Les recourants produisent l'exposé fait par le DI le 2 décembre 2015 en lien avec la problématique des canalisations. Conformément au powerpoint, il a été rappelé aux recourants, notamment, que le département était l'autorité de surveillance en matière d'assainissement de collectifs privés et devait veiller à ce que les travaux nécessaires soient effectués conformément à ses directives et aux règles de la technique, qu'il rendrait en temps voulu une décision formelle mettant en demeure l'ensemble des propriétaires concernés de procéder aux travaux d'assainissement nécessaires, que cette décision étant exécutoire nonobstant recours, en cas d'opposition de l'un des propriétaires, les travaux d'assainissement pourraient se poursuivre, que le cas échéant, l'État procéderait à une exécution des travaux par substitution par le biais de la procédure de travaux d'office avec inscription d'une hypothèque légale sur la parcelle du propriétaire litigieux. L'art. 27 REaux était rappelé, traitant des installations collectives privées d'intérêt local.

Le grief des recourants imputant au seul requérant la totalité du coût des travaux pour la pose d'un réseau séparatif et d'un nouveau revêtement au chemin des Comtoises est infondé puisque les coûts seront répartis entre tous les propriétaires concernés. Par ailleurs et en l'état, rien ne démontre qu'une équitable répartition desdits coûts aboutirait à des frais disproportionnés à charge de la partie sollicitant l'autorisation de construire et que le département aurait en conséquence violé l'art. 19 al. 1 LAT.

Le grief est infondé.

8) Les recourants invoquent une violation des art. 19 et 22 al. 2 let. b LAT en lien avec la largeur du chemin et son état.

a. Conformément à l'art. 22 al. 2 let. b LAT, l'autorisation de construire n'est délivrée que si le terrain est équipé. Tel est le cas selon l'art. 19 al. 1 LAT lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès. Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. Il faut aussi que la sécurité des usagers soit garantie sur toute sa longueur, que le revêtement soit adéquat en fonction du type de véhicules qui vont l'emprunter, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l'accès des services de secours et de voirie soit assuré (ATF 121 I 65 consid. 3a et les arrêts cités; arrêts 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.1 et les références citées; 1C_430/2015 du 15 avril 2016 consid. 3.1). La loi n'impose pas des voies d'accès idéales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (ATF 121 I 65 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_56/2019 du 14 octobre 2019 consid. 3.1 ; 1C_52/2017 du 24 mai 2017 consid. 5.2; 1P.319/2002 du 25 novembre 2002 consid. 3 publié in RDAT 2003 I n° 59 p. 211).  

Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation, que le Tribunal fédéral doit respecter (ATF 121 I 65 consid. 3a in fine ; 96 I 369 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_846/2013 du 4 juin 2014 consid. 8.1). Elles peuvent également se fonder sur les normes édictées en la matière par l'Union des professionnels suisses de la route, étant précisé que ces normes, non contraignantes, doivent être appliquées en fonction des circonstances concrètes et en accord avec les principes généraux du droit, dont celui de la proportionnalité (1C_155/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.1 et les références citées). 

Le projet doit disposer de l'équipement routier au plus tard au moment de sa réalisation (ATF 127 I 103 consid. 7d ; arrêts 1C_271/2011 du 27 septembre 2011 consid. 2.5; 1C_554/2008 du 7 juillet 2009 consid. 4.3). Il est à cet égard suffisant que, pour entrer en force, l'autorisation de construire soit assortie de la condition que l'accès routier est garanti (arrêt du Tribunal fédéral 1C_245/2014 du 10 novembre 2014 consid. 4.1 et les références citées).

b. En l'espèce, il ressort du SITG que le chemin des Comtoises est rectiligne, d'une longueur de 200 m environ et d'une largeur supérieure à 4 m en toute sa longueur. La visibilité est bonne, ce qui n'est pas contesté. Il est à l'usage de propriétaires de villas.

Les recourants invoquent le mauvais état du revêtement pour conclure que la parcelle n'est pas équipée. Ils allèguent que les camions de la voirie ne pourraient plus l'emprunter. Il ressort toutefois des pièces versées au dossier que les travaux les plus urgents pour combler les trous ont été entrepris par la société propriétaire de la parcelle. Dans un courrier du 12 février 2019, celle-ci s'est toutefois plainte que les frais d'entretien du chemin, à la charge des fonds dominants et servants, avaient été contestés par les propriétaires des parcelles au bénéfice des servitudes de passage à pied et à véhicule. En l'état, ils renonçaient à tous travaux et laissaient le chemin tel quel, relevant la mauvaise volonté des usagers. En l'occurrence, les recourants ont certes produit des photos qui démontrent que le revêtement est abimé. Cependant, il s'agit là d'un litige de droit privé, non pertinent dans la cadre de la résolution d'un litige de droit de la construction. Le département spécialisé en la matière, en l'espèce la DGT, a préavisé favorablement sans considérer que la parcelle présenterait des problématiques d'accès incompatibles avec l'art. 19 LAT.

Les recourants allèguent que les différentes constructions à venir, trop nombreuses, ne pourraient être assumées par le chemin. Le chemin dessert actuellement quatorze villas selon les écritures des recourants devant la chambre de céans, dix selon celles devant le TAPI. Cette différence est sans pertinence. L'utilisation actuelle et future du chemin querellé ne sert qu'à l'usage de quelques villas. Les projets à venir n'ont, en l'état du dossier, pas à être considéré dans l'analyse de l'art. 19 LAT. Même à retenir que tel doive être le cas, l'augmentation du nombre de villas, de dix - hypothèse la plus favorable aux recourants - à vingt-cinq selon leurs dernières écritures, n'est pas déterminant compte tenu de la longueur du chemin (deux cents mètres), de sa largeur et de sa configuration rectiligne.

L'un des recourants envisage d'ailleurs de construire sur sa parcelle n° 2'659, « à l'évidence destinée un jour à être construite, même si ce projet n'est pas d'actualité » - conformément à la lettre dudit recourant produite en pièce 33 et datée du 2 octobre 2012.

En l'espèce, la voie de desserte est praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs. Les recourants eux-mêmes utilisent ladite voie d'accès quand bien même il serait souhaitable qu'elle puisse faire l'objet de travaux de réfection. Ladite voie d'accès peut accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. Une fois les villas supplémentaires construites, l'utilisation du chemin entraînera un léger accroissement du trafic, lequel pourra être absorbé par le réseau routier. Cet accroissement ne provoquera pas d'atteintes nuisibles ou incommodantes dans le voisinage. Les travaux indispensables ont été effectués si bien que les possibilités de croisement sont suffisantes et que l'accès des services de secours (ambulances, service du feu) et de voirie est assuré.

Le grief est infondé.

Compte tenu de ce qui précède, les autorités cantonales n'ont pas abusé de leur large pouvoir d'appréciation en délivrant l'autorisation globale de construire, compte tenu des conditions posées dans ladite autorisation.

Les conclusions subsidiaires seront aussi rejetées, toutes les garanties nécessaires au respect du droit des constructions étant contenues dans l'autorisation querellée.

Infondé, le recours sera rejeté.

Vu le présent arrêt, la demande de restitution d'effet suspensif est sans objet.

9) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge des recourants, pris solidairement, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à K SA qui y a conclu, obtient gain de cause et a bénéficié des services d'un mandataire. Elle sera mise à la charge des recourants, solidairement (art. 87 al. 2 LPA).

Aucun émolument ne sera mis à la charge de M. BENOIT malgré les conclusions prises, dès lors qu'il n'a pas recouru. Il ne lui sera pas alloué d'indemnité au vu desdites conclusions.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 septembre 2019 par Monsieur Jean-Daniel BORGEAUD, Madame Manuela et Monsieur Serge Marc FEHR contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 août 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Monsieur Jean-Daniel BORGEAUD, Madame Manuela et Monsieur Serge Marc FEHR, pris solidairement ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à K SA, à la charge de Monsieur Jean-Daniel BORGEAUD, Madame Manuela et Monsieur Serge Marc FEHR, pris solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat des recourants, à Me Timo Sulc, avocat de K SA, au département du territoire, à Monsieur Pierre Albert BENOIT, intimé, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :