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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/320/2020

ATA/177/2020 du 17.02.2020 sur JTAPI/102/2020 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/320/2020-MC ATA/177/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 février 2020

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Stéphanie Butikofer, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 janvier 2020 (JTAPI/102/2020)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______, est originaire soit du Mali, soit de la république de Guinée.

2) Le 22 octobre 2010, il a déposé une demande d'asile en Suisse.

3) Par décision du 20 janvier 2011, l'office fédéral des migrations (devenu depuis le secrétariat d'État aux migrations, ci-après : SEM), a refusé d'entrer en matière sur cette demande et a simultanément prononcé le renvoi de Suisse de M. A______ à destination de l'Espagne, État « Dublin » compétent pour statuer sur sa demande de protection internationale. La prise en charge de l'intéressé a été confiée au canton de Genève.

4) Le 3 février 2011, M. A______ s'est vu notifier la décision du SEM ci-dessus par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) et il a été informé qu'il disposait de cinq jours pour recourir contre cette décision.

5) Le 25 février 2011, M. A______ a été signalé comme étant disparu de son foyer, sis au chemin B______ à C______.

6) Le transfert de M. A______ en Espagne n'a pas pu être effectué dans le délai imparti, de sorte que la procédure relative à sa demande de protection internationale est devenue de la compétence des autorités suisses.

7) Le 16 mars 2015, M. A______ a été condamné par le Tribunal correctionnel de l'Est Vaudois à une peine privative de liberté de vingt mois (sous déduction de deux cent vingt-deux jours de détention provisoire et deux cent trente-neuf jours d'exécution anticipée de la peine) pour infraction à l'art. 19 al. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup -RS 812.121 ; trafic de cocaïne) et à l'art. 115 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr) dénommée depuis la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

8) Le 20 avril 2015, M. A______ a été remis en liberté conditionnelle.

9) Le 25 août 2015, M. A______ a été contrôlé à Vevey par les services de police vaudois alors qu'il était en possession de 2 boulettes de cocaïne (pour un poids total de 2 g) dissimulées dans sa bouche. Le 9 novembre 2015, il a été condamné par défaut par le Tribunal de police de l'Est Vaudois à une peine privative de liberté de 90 jours pour infraction à l'art. 19 al. 1 et 19a de la LStup (trafic et possession de cocaïne) et à l'art. 115 al. 1 LEI. La libération conditionnelle octroyée à M. A______ était révoquée, et l'exécution du solde de la peine prononcée le 16 mars 2015 ordonnée.

10) Le 4 février 2019, M. A______ a été écroué par les autorités vaudoises en vue de purger ses peines.

11) Le 12 avril 2019, le SEM a rouvert la procédure d'asile en Suisse de M. A______.

12) Le 5 juillet 2019, le SEM a rendu une décision de rejet de la demande d'asile de l'intéressé et prononcé son renvoi de Suisse. Le canton de Genève était désigné pour procéder à l'exécution du renvoi. Cette décision est entrée en force le 9 août 2019.

13) Le 9 septembre 2019, une demande de soutien en vue de l'exécution du renvoi de M. A______ a été soumise au SEM par le canton de Genève.

14) Par courriel du 14 novembre 2019, le SEM a confirmé à l'OCPM que la prochaine audition centralisée par les autorités guinéennes aurait lieu du 2 au 6 décembre 2019, à Berne. Si la personne en question devait être reconnue comme citoyen guinéen, la durée pour l'obtention d'un laissez-passer et la réservation d'un vol de retour serait d'environ un mois.

15) Le 22 novembre 2019, l'OCPM a requis l'acheminement de M. A______ au SEM en vue de sa présentation, le 4 décembre 2019, à l'audition centralisée précitée.

16) À sa sortie de prison, le 26 novembre 2019, M. A______ a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.

17) Le 26 novembre 2019, à 17h30, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de dix semaines, sur la base des art. 75 al. 1 let. g et 76 al. 1 let. b ch. 1, 3 et 4 LEI.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Guinée car il était malien. Il a ajouté qu'il était en bonne santé.

18) Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le même jour.

19) Par jugement du 28 novembre 2019, le TAPI a confirmé l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de dix semaines, soit jusqu'au 4 février 2020.

20) Le 11 décembre 2019, le SEM a confirmé que M. A______ n'avait pas été reconnu lors des dernières auditions avec la délégation guinéenne, bien que cette dernière eût été en possession d'une copie d'un passeport guinéen. Ladite délégation avait suggéré de présenter l'intéressé à la délégation du Mali. Par conséquent, il était prévu que M. A______ serait prochainement auditionné par les autorités maliennes, et le cas échéant une nouvelle fois par les autorités guinéennes.

21) Par requête motivée du 23 janvier 2020, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de six mois.

22) Lors de l'audience s'étant déroulée devant le TAPI le 28 janvier 2020, M. A______ a déclaré qu'il était titulaire d'un permis de séjour espagnol, mais n'avait pas pu remettre la main dessus. Il a confirmé être d'origine malienne. Il n'avait jamais indiqué être originaire de Guinée. Il ne souhaitait toujours pas être refoulé à destination de la Guinée. Il n'avait pas de gros problèmes de santé, si ce n'était qu'il avait de la peine à trouver le sommeil.

La représentante de l'OCPM a indiqué que les autorités entendaient présenter à nouveau M. A______ aux autorités guinéennes et maliennes. L'audition devant les autorités guinéennes devait normalement avoir lieu au courant du premier semestre 2020. Pour ce qui était des autorités maliennes, elle n'avait malheureusement pas d'autres informations quant à une date pour une audition. Si tout allait bien, cela devait avoir lieu au courant du printemps ou de l'été 2020. Elle a demandé la prolongation de l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de six mois, soit jusqu'au 4 août 2020.

Le conseil de M. A______ s'est opposée à la prolongation de la durée de la détention pour une durée de six mois. Elle s'en est rapportée à justice sur le principe de la détention étant précisé que l'intégralité de la détention administrative de M. A______, ne devait pas excéder six mois, soit jusqu'au 28 mai 2020.

23) Par jugement du 28 janvier 2020, le TAPI a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 4 mai 2020.

M. A______ avait fait l'objet d'une première décision de renvoi du 20 janvier 2011, qu'il n'avait pas respectée. Bien qu'informé à plusieurs reprises de son devoir de collaborer à son départ, il n'avait jamais entrepris la moindre démarche en ce sens, et avait été signalé comme disparu de son foyer le 25 février 2011, rendant impossible son transfert en Espagne dans le délai imparti dans le cadre de la procédure Dublin. Il faisait l'objet d'une nouvelle décision de renvoi exécutoire du 5 juillet 2019. Il avait sciemment donné de fausses informations sur son identité et son origine et été poursuivi et condamné pénalement à deux reprises, la dernière fois le 25 août 2015, notamment pour trafic de cocaïne. Ces circonstances démontraient l'existence d'un risque sérieux qu'il pourrait continuer à s'adonner au trafic de stupéfiants s'il était remis en liberté, de sorte que sa détention administrative était justifiée sur la base des art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 75 al. 1 let. g LEI. Elle l'était également sous l'angle de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et ch. 4 LEI, dès lors que M. A______ avait déjà disparu une première fois dans la clandestinité, n'avait jamais entrepris la moindre démarche en vue de son départ et indiquait s'opposer à son renvoi en Guinée, affirmant désormais qu'il serait malien. L'assurance de son départ de Suisse répondait enfin à un intérêt public certain, et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où M. A______ devrait monter dans l'avion devant le reconduire dans son pays d'origine.

S'agissant du respect du principe de la célérité, la police avait d'ores et déjà réservé un vol à destination d'Alger (sic), si bien que le principe précité était respecté.

24) Par acte posté le 7 février 2020, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation ainsi qu'à une mise en liberté immédiate, et ce « sous suite de frais et dépens ».

Il était disposé à quitter le territoire suisse, mais non pour aller en Guinée, pays dont il n'était pas originaire, ni au Mali, pays dans lequel sa vie serait menacée compte tenu de la situation politique actuelle. Il envisageait en revanche de rejoindre l'Espagne dès sa sortie de détention, pays dans lequel il avait des amis et de la famille. Il disposait de moyens financiers suffisants pour s'y rendre et n'opposerait aucune résistance à son renvoi s'il y était refoulé.

La situation politique malienne actuelle laissait craindre pour son intégrité physique ou morale s'il devait y être reconduit. Il y avait donc une cause d'impossibilité du renvoi au sens de l'art. 80 al. 6 let. a LEI justifiant, sinon sa libération immédiate, du moins son renvoi vers l'Espagne, pays dans lequel il possédait une autorisation de séjour.

25) Le 13 février 2020, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Dans le cadre de sa demande d'asile du 22 octobre 2010, M. A______ avait déclaré être guinéen, et ce n'était que lors de son audition complémentaire par le SEM, en juin 2019, qu'il avait prétendu être malien, sans fournir aucune preuve relative à cette allégation.

Les prochaines auditions centralisées auraient lieu en mars 2020 pour le Mali, et à la fin de l'automne 2020 pour la Guinée, les autorités de ce dernier pays ne procédant à une telle audition en Suisse qu'une seule fois par an.

M. A______ avait été condamné pour infraction grave à la LStup, et donc pour crime, si bien que le motif de l'art. 75 al. 1 let. h LEI s'appliquait également au cas d'espèce.

La référence faite par le TAPI à un renvoi en Algérie était surprenante voire arbitraire. Les pièces du dossier, en particulier la photocopie du passeport de M. A______ effectuée par les gardes-frontière le 20 octobre 2010, établissaient qu'il était incontestablement de nationalité guinéenne. L'OCPM n'avait dès lors pas d'autre choix que de présenter à nouveau M. A______ aux autorités guinéennes à l'automne 2020. L'intéressé se disant malien, il serait tout de même présenté également aux autorités maliennes « par acquit de conscience » en mars 2020.

L'exécution du renvoi ne pouvait en l'occurrence être qualifié d'impossible, la délivrance d'un document de voyage étant prévisible encore au cours de l'année 2020.

Quant à un renvoi en Espagne, M. A______ s'était montré incapable de fournir le moindre document attestant qu'il y bénéficiait d'un titre de séjour, ce qui excluait en l'espèce l'application de l'art. 69 al. 2 LEI.

26) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile - c'est-à-dire dans le délai de dix jours - devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr -
F 2 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 1ère phr. LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 10 février 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 § 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1).

4) a. En vertu de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée, notamment si elle a été condamnée pour crime (art. 75 al. 1 let. h LEI).

Par crime au sens de l'art. 75 al. 1 let. h LEI, il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a), ce qui est notamment le cas du vol (art. 139 ch. 1 CP).

b. Aux termes de l'art. 76 al. 1 let. b LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou 66abis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée, notamment si des éléments concrets font craindre que la personne concernée entende se soustraire à son renvoi ou à son expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de l'art. 90 LEI ou de l'art. 8 al. 1 let. a ou al. 4 de la loi sur l'asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31 ; ch. 3), ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (ch. 4).

Ces chiffres 3 et 4 décrivent tous deux les comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition ; ils doivent donc être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Lorsqu'il examine le risque de fuite, le juge de la détention doit établir un pronostic, en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du renvoi le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions en seront réunies. Il dispose pour ce faire d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_128/2009 précité consid. 3.1).

5) En l'espèce, à juste titre, le recourant ne conteste pas la réalisation des conditions d'application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI, ainsi que de
l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 let. g LEI, quant au principe de la détention administrative, les considérants du TAPI étant à cet égard convaincants.

La détention administrative est en conséquence justifiée dans son principe.

6) a. La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

b. Aux termes de l'art. 79 LEI, la détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion visées aux art. 75 à 77 LEI ainsi que la détention pour insoumission visée à l'art. 78 LEI ne peuvent excéder six mois au total (al. 1) ; la durée maximale de la détention peut, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus et, pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, de six mois au plus, dans les cas suivants : la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (al. 2 let. a) ; l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (al. 2 let. b).

Conformément à l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder.

c. La durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

Le principe de la proportionnalité interdit non seulement que la mesure administrative en cause soit plus incisive que ce qui est nécessaire, mais aussi qu'elle soit insuffisante pour atteindre son but (arrêts du Tribunal fédéral 2C_497/2017 du 5 mars 2018 consid. 4.2.2 ; 2C_431/2017 du 5 mars 2018 consid. 4.3.3).

d. Selon la jurisprudence, le devoir de célérité est en principe violé lorsque, pendant plus de deux mois aucune démarche n'est plus accomplie en vue de l'exécution du renvoi par les autorités compétentes, sans que cette inaction soit en première ligne causée par le comportement des autorités étrangères ou celui de l'étranger lui-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 et les arrêts cités).

e. À teneur de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention est levée si le motif de la détention n'existe plus ou l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, une telle impossibilité supposant en tout état de cause notamment que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6668/2012 du 22 août 2013 consid. 6.7.1 relativement à l'art. 83 al. 2 LEI, a fortiori).

7)  Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (art. 69 al. 2 LEI). Le renvoi dans un pays tiers du choix de l'étranger présuppose que ce dernier ait la possibilité de s'y rendre légalement et constitue, qui plus est, une faculté (« peut ») de l'autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7).

8) a. Le recourant invoque uniquement une impossibilité de l'exécution du renvoi du fait de la situation politique au Mali, et le fait qu'il est disposé à se rendre de son plein gré en Espagne, où il dit disposer d'un titre de séjour.

b. S'agissant du premier argument, il s'agirait non du caractère impossible de l'exécution du renvoi, mais de son caractère illicite, le renvoi dans un pays où l'intégrité physique voire la vie de l'étranger sont menacés étant interdit par le principe de non-refoulement, qui constitue l'une des facettes de l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Le recourant ne fournit à cet égard, pour étayer ses allégations, que les conseils aux voyageurs publiés par le département fédéral des affaires étrangères. Il tombe toutefois sous le sens que les risques encourus par un ressortissant suisse ne sont pas les mêmes que ceux encourus par un national. À cet égard, il ressort de la jurisprudence récente du Tribunal administratif fédéral que ni le Mali (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-4207/2019 du 9 septembre 2019) ni la République de Guinée (arrêts du Tribunal administratif fédéral E-2710/2018 du 4 décembre 2019 consid. 6.2 ; E-7448/2018 du 2 décembre 2019 consid. 8.4.1, et E-6969/2017 du 15 novembre 2019) ne se trouvent en proie à une guerre, une guerre civile ou une violence généralisée, si bien que les renvois peuvent y être exécutés. Le recourant ne donne du reste aucun élément concret faisant penser qu'il pourrait risquer pour sa vie au Mali, pays dont il dit être originaire.

c. Quant à un éventuel renvoi en Espagne, le recourant perd de vue qu'un tel choix ne serait possible que s'il avait la possibilité de s'y rendre légalement. Or il n'a aucunement prouvé ses allégations quant à la détention d'un titre de séjour dans ce pays, si bien qu'il ne peut prétendre à y être renvoyé, étant rappelé que c'est en raison de son départ dans la clandestinité que le renvoi en Espagne initialement prévu n'a pu avoir lieu.

d. Concernant l'art. 80 al. 6 let. a LEI, il n'existe en l'état pas d'impossibilité à l'exécution du renvoi. Cette dernière est seulement retardée en raison des démarches nécessaires à l'identification de la nationalité réelle de l'intéressé et à l'obtention des documents de voyage nécessaires.

e. Sous l'angle du principe de la proportionnalité, on ne voit pas quelle mesure moins incisive qu'une détention administrative pourrait permettre de garantir que le recourant prêtera son concours à l'exécution de son renvoi le moment venu et que celle-ci pourra effectivement être réalisée. En effet, sans attaches, ni moyens de subsistance en Suisse, le recourant a clairement, y compris par les écritures de son avocat, fait part de son opposition à son retour dans son pays d'origine, qu'il s'agisse de la Guinée ou du Mali.

f. Enfin, l'examen auquel a procédé le TAPI sous l'angle du principe de la célérité se rapporte vraisemblablement à un autre dossier, et n'est donc pas pertinent. Quoi qu'il en soit, le recourant ne conteste pas cet aspect du dossier, et ce à juste titre, car dans la mesure où il prétend encore - depuis le 18 juin 2019 et contrairement à ce qu'il avait affirmé préalablement depuis 2010 - être originaire du Mali, il ne saurait en effet plaider que l'examen de son identité nationale par les autorités maliennes, prévu pour le mois de mars 2020, serait trop éloigné dans le temps. C'est du reste en fonction du résultat de cette audition centralisée - à laquelle il doit être soumis pour établir de manière la plus complète et précise possible de quel pays il est bien originaire, et non seulement par acquit de conscience - que pourra être le cas échéant évaluée la proportionnalité d'une poursuite de la détention administrative jusqu'à la tenue à la fin de l'automne 2020 de la prochaine audition centralisée guinéenne.

Vu ce qui précède, le jugement querellé est conforme au droit, et le recours sera rejeté.

9) La procédure étant gratuite (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument de procédure ne sera perçu (art. 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 février 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 janvier 2020 ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Stéphanie Butikofer, avocate du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Verniory et Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. Deschamps

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :