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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3006/2019

ATA/143/2020 du 11.02.2020 ( DIV ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ÉTABLISSEMENT HOSPITALIER;ASSURANCE OBLIGATOIRE;DÉCOMPTE(SENS GÉNÉRAL);ASSURANCE COMPLÉMENTAIRE EN CAS D'HOSPITALISATION;INTERPRÉTATION(SENS GÉNÉRAL)
Normes : LAMAL.35; LAMAL.39.al1; LAMAL.39.al2; LAMAL.39a; LAMAL.41.al1; LAMAL.41.al3; LAMAL.41.al1bis; LAMAL.49a; OAMAL.58a; OAMAL.58b; OAMAL.58c; OAMAL.58d; OAMAL.58e
Résumé : Admission partielle du recours d’une clinique vaudoise contre une décision de l'Etat de Genève s’agissant de la prise en charge de la part cantonale en cas d’hospitalisation de résidants genevois dans une clinique vaudoise. La liste vaudoise mentionnait que la clinique était admise à pratiquer à la charge de l'AOS pour les missions médicales générales de médecine interne et de chirurgie. Seules les hospitalisations concernant ces deux domaines pouvant faire l'objet d'un paiement de la prise en charge de la part cantonale par l'intimé. Les prestations relevant de l'urgence ne relevant pas de missions médicales générales, mais d'une modalité dans l'exercice de celle-ci, rien ne permettait de considérer, comme le prétendait le département, que le mandat de prestations pouvait valablement restreindre la prise en charge de la part cantonale aux prestations relevant de l'urgence.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3006/2019-DIV ATA/143/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 février 2020

 

dans la cause

 

FONDATION A______
représentée par Me Philippe Ducor, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTÉ

 



EN FAIT

1) La Fondation A______ (ci-après : la fondation), ayant son siège à Lausanne, a pour but l'exercice de toute activité en relation avec la santé et l'enseignement des soins infirmiers.

Elle exploite notamment la Clinique B______ (ci-après : la clinique) à Lausanne. Cette dernière est membre de l'Association vaudoise des cliniques privées (ci-après : Vaud Cliniques), laquelle regroupe plusieurs cliniques privées vaudoises.

2) a. Par arrêté du 29 juin 2011 (AListeLAMal - RS-VD 832.11.1), le Conseil d'État du canton de Vaud a édicté, en application de l'art. 38 al. 1 de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), la liste 2012 des établissements hospitaliers admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins (ci-après : AOS) (ci-après : la liste vaudoise).

L'art. 4 précisait que ladite liste fixait les types de mandats ainsi que les missions médicales générales. L'art. 6 indiquait, notamment, que le département de la santé et de l'action sociale précisait la teneur des missions médicales générales mentionnées à l'art. 4 (let. a) et concluait avec les établissements hospitaliers les mandats de prestations individuels, ces derniers précisant les conditions à respecter (let. c).

Aux termes de l'art. 7, la clinique a été admise à pratiquer à la charge de l'AOS dans les missions suivantes : médecine interne et chirurgie. Elle n'était en revanche pas inscrite pour les autres missions médicales générales, à savoir l'obstétrique, la pédiatrie, la psychiatrie ou la réadaptation et les soins palliatifs. Le mandat était « partiel de base ».

b. Les arrêtés du Conseil d'État du canton de Vaud des 13 février 2013 et
16 janvier 2019 ont mis à jour la liste vaudoise, sans aucune modification pour la clinique.

3) a. Le 3 avril 2012, le Conseil d'État du canton de Vaud, représenté par le département de la santé et de l'action sociale, et la clinique ont signé un « mandat de prestation 2012-2014 ». Ledit contrat prévoyait, notamment, que le mandat était « partiel de base » et octroyé pour dix lits reconnus d'utilité publique
(ci-après : RIP) dont un lit de soins intensifs (p. 3 et 21). Il listait également les groupes de prestations/pôles d'activité attribués (p. 26). Une remarque précisait qu'une non-attribution d'un pôle d'activité n'excluait pas les prises en charge exceptionnelles dans ce pôle d'activité/groupe de prestations (p. 26).

b. Un nouveau contrat de « mandat de prestation 2015-2019 » a été signé par les précités le 8 mars 2016. Ledit contrat prévoyait également que le mandat était « partiel de base » mais précisait qu'il était octroyé pour dix lits RIP dont un lit de soins intensifs pour les urgences et la chirurgie robotique (p. 3 et 21). Il listait également les groupes de prestations/pôles d'activité attribués (p. 17-18). Une remarque précisait qu'une non-attribution d'un pôle d'activité n'excluait pas les prises en charge exceptionnelles dans ce pôle d'activité/groupe de prestations
(p. 18).

4) a. Par arrêté du 23 novembre 2011, le Conseil d'État du canton de Genève a également établi la liste des établissements hospitaliers admis par le canton de Genève à pratiquer à la charge de l'AOS. La clinique vaudoise précitée n'y figure pas.

b. Par arrêtés des 10 avril 2013 et 24 juin 2015, le Conseil d'État du canton de Genève a successivement adapté sa liste hospitalière en y incluant de nouveaux pôles d'activités et établissements. La clinique vaudoise précitée n'en fait pas partie.

5) Par courrier du 27 juin 2018, Vaud Cliniques a sollicité auprès du Conseiller d'État genevois en charge du département de l'emploi et de la santé, devenu depuis lors le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (ci-après : DSES ou le département), le paiement des montants dus par le canton de Vaud [recte : Genève] au titre de séjours de ses ressortissants au sein des établissements de ses membres depuis l'entrée en vigueur du nouveau financement hospitalier le 1er janvier 2012 jusqu'au 31 décembre 2017. Les montants faisant l'objet de procédures en cours n'étaient pas inclus. Pour la fondation, les montants dus s'élevaient à CHF 770'152.10. Pour le cas où le canton refuserait le paiement, une décision formelle était sollicitée.

Le courrier était accompagné d'un document énumérant notamment les patients concernés (identifiés par un numéro et non par leurs noms), la durée du séjour (tous compris entre le 17 mai 2012 et le 17 décembre 2017), le montant pris en charge par l'assurance-maladie, le nom de l'assurance-maladie concernant tant la base que les complémentaires.

6) Par courrier du 23 juillet 2018, le Conseiller d'État en charge du DSES a sollicité, afin qu'il puisse se déterminer, et pour chaque facture concernée, une attestation de l'assureur confirmant qu'aucune assurance privée n'avait réglé les montants concernés.

7) Le 27 août 2018, Vaud Cliniques a réitéré sa demande. L'État de Genève était malvenu d'invoquer une situation qu'il avait lui-même créée par son comportement illégal. Les arrangements passés entre des acteurs privés afin de pallier les difficultés de liquidité engendrés exclusivement par le refus de l'État de Genève de remplir ses obligations étaient sans aucune pertinence quant à l'existence et la persistance desdites obligations de l'État.

8) Par courrier du 20 septembre 2018, le Conseiller d'État en charge du DSES a maintenu sa demande, dès lors que la protection tarifaire prévue à l'art. 44 LAMal excluait la possibilité pour les cliniques d'être rémunérées deux fois pour la même prestation.

L'annexe jointe au courrier du 27 juin 2018 ne démontrait pas qui étaient les patients concernés et si des demandes de prise en charge avaient été effectuées auprès du canton.

Les prétentions sollicitées étaient donc, en l'état, contestées.

9) Par courrier du 27 septembre 2018, Vaud Cliniques a demandé à ce que toute décision soit suspendue jusqu'à droit jugé par la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois, sur un litige portant sur la même question juridique. Elle demandait dès lors la confirmation que le canton de Genève renoncerait à invoquer la prescription quant aux demandes de ses membres.

10) Le 2 octobre 2018, le DSES a transmis à Vaud Cliniques une déclaration de renonciation à invoquer la prescription.

11) Le 9 novembre 2018, Vaud Clinques a remis au Conseiller d'État en charge du DSES une copie de l'arrêt du 10 octobre 2018 de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois lequel tranchait un litige opposant des cliniques genevoises au département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud. Dès lors que le jugement faisait droit pour l'essentiel aux conclusions des cliniques genevoises, elle sollicitait à nouveau le paiement des sommes demandées dans son courrier du 27 juin 2018.

12) Par courrier du 22 novembre 2018, le Conseiller d'État en charge du DSES a maintenu sa demande quant aux éléments sollicités précédemment.

13) Le 9 janvier 2019, la fondation a réitéré sa demande visant au paiement en sa faveur de la somme de CHF 770'152.10 au titre de la part cantonale visée par l'art. 49a al. 2 LAMal. Ce montant concernait les séjours hospitaliers dont la date de sortie était au plus tard le 31 décembre 2017 et elle se réservait le droit de demander le paiement de la part cantonale pour les séjours s'étant terminés ultérieurement.

L'art. 41 al. 1bis LAMal exigeait uniquement que l'établissement extracantonal répertorié choisi par le patient soit « apte à traiter sa maladie ». Cette disposition n'exigeait pas que le mandat de prestations, octroyé par le canton de situation de l'établissement dans le cadre de sa planification hospitalière au sens de l'art. 39 LAMal, ait inclus le pôle de prestations (mission) dont relevait la maladie du patient en provenance d'un autre canton. L'aptitude à traiter la maladie relevait d'une notion purement médicale. Elle répondait à des critères distincts de ceux déterminant la décision du canton planificateur d'octroyer ou non à l'établissement concerné un mandat de prestations pour un pôle de prestations (mission) donné. Cette décision découlait certes en premier lieu de l'aptitude médicale de l'établissement à traiter la maladie du patient mais aussi de façon déterminante de la considération de planification et de couverture des besoins en soins hospitaliers de la population résidant dans le canton planificateur. Ces considérations n'avaient strictement rien à voir avec l'aptitude à traiter la maladie du patient en provenance d'un autre canton. Le canton de domicile du patient était ainsi tenu de payer la part cantonale des séjours de ses ressortissants dans un établissement répertorié extracantonal lorsque ce dernier était apte à traiter la maladie dudit patient.

14) Dans son courrier du 22 janvier 2019, le Conseiller d'État en charge du DSES a indiqué à la fondation qu'il ne pouvait prendre position sur les prétentions, les tableaux annexés ne permettant nullement d'apprécier si les patients concernés étaient effectivement des résidents genevois. Il sollicitait dès lors la remise de tableaux sous format « excel » fournissant des informations quant au lieu de résidence des patients, par exemple les noms et dates de naissance de ces derniers.

L'arrêt rendu par la Cour des assurances sociales vaudoise excluait par ailleurs sans ambiguïté l'application générale du principe selon lequel l'établissement devait être remboursé dès qu'il figurait sur une liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux. Elle admettait au contraire que les missions pour lesquelles la clinique figurait sur la liste de son canton de situation étaient applicables aux prestations délivrées aux patients extra-cantonaux.

15) Le 24 janvier 2019, la fondation a transmis un tableau comprenant, notamment, les noms et dates de naissance des patients auxquels se rapportaient les demandes de remboursement sollicitées.

Dans le cas où le canton de Genève maintiendrait son refus de payer les parts cantonales demandées, y compris partiellement pour les séjours hors missions, une décision formelle devait être rendue sans plus attendre. Elle n'avait pas pu recourir contre l'arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois dès lors qu'elle n'était pas partie à ce litige.

16) Le 1er février 2019, la direction générale de la santé du DSES a indiqué à la fondation qu'au regard de la liste informative sur les établissements hospitaliers inscrits ou non sur la liste vaudoise, la clinique était inscrite pour « une part des missions médicales de l'établissement » et pour les pôles d'activités suivants : « chirurgie robotique (urologie, gynécologie, chirurgie viscérale, ORL) + urgences (médecine et chirurgie) dans le cadre des quotas fixés par le mandat de prestations ».

Conformément à la jurisprudence récente rendue par la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois, le canton de Genève n'était tenu de prendre à charge la part cantonale d'une hospitalisation hors canton que lorsque les prestations effectuées correspondaient aux mandats qui avaient été confiés audit établissement au regard de la liste y relative. Au vu des mandats limités confiés à la Clinique de la Source, l'indication du code « DRG » de la prestation était insuffisante. En effet, une part certainement non négligeable de l'activité de la Clinique de la Source, pour laquelle elle figurait sur la liste hospitalière vaudoise, relevait des urgences (médicales et chirurgicales). Il était donc indispensable que cette indication figure sur les pièces transmises pour que le DSES puisse se déterminer sur la part due au titre de cofinancement des prestations.

Le DSES réservait sa décision et conditionnait le paiement des créances alléguées à l'obtention des éléments susdécrits qui lui permettraient d'en contrôler la validité.

17) Par courrier du 5 février 2019, la fondation a indiqué qu'elle réclamait le paiement des parts cantonales afférentes à l'intégralité des séjours mentionnés dans son courrier du 27 juin 2018, et non seulement les séjours entrant dans les pôles de prestations (missions) figurant dans le contrat de prestations du canton de Vaud. Les décisions des tribunaux vaudois ne trouvaient d'ailleurs pas application dans le canton de Genève. Elle sollicitait dès lors sans délai une décision formelle sur sa demande.

18) Par courrier du 21 mai 2019, la direction générale de la santé a réaffirmé ne pas être en possession des éléments de faits lui permettant de déterminer si les créances alléguées étaient valides et éligibles au cofinancement par le canton. Dans ces conditions, il n'y avait pas lieu de rendre une décision dans la mesure où elle n'entendait pas se prononcer sur la base d'un état de fait qu'elle savait être incomplet.

Le caractère urgent ou planifié des prestations effectuées était déterminant et devait impérativement ressortir des pièces produites de manière précise.

19) Le 13 juin 2019, la fondation a indiqué prendre acte du fait que la direction générale de la santé apparaissait prête à payer les parts cantonales afférentes aux séjours de patients genevois dans son établissement, pour autant que ceux-ci relèvent des pôles de prestations prévus dans le mandat octroyé par le canton de Vaud.

Les informations supplémentaires sollicitées avaient été ajoutées au tableau des séjours et transmis par courriel.

Reprenant ses précédentes explications, la fondation a relevé qu'elle entendait également obtenir le paiement des parts cantonales afférentes aux séjours de patients genevois dans son établissement n'entrant pas dans les pôles de prestations figurant dans son contrat de mandat avec le canton de Vaud, dès lors qu'elle était parfaitement apte à traiter leur maladie. Elle sollicitait la prise d'une décision formelle si la direction générale de la santé persistait dans sa position.

20) Par courrier du 26 juin 2019 en lien avec des séjours passés de patients genevois, le Conseiller d'État en charge du DSES a relevé que l'art. 41 al. 1bis LAMal s'inscrivait dans la systématique de la loi qui voulait que la planification et les mandats de prestations servent au contrôle de la qualité et de l'économicité des prestations. L'interprétation que la fondation faisait de cette disposition permettrait de contourner la systématique de la loi en faisant fi des missions médicales pour lesquelles l'une ou l'autre institution figurait sur la liste hospitalière vaudoise. Cette interprétation ne pouvait en aucun cas être suivie puisqu'elle mettrait en échec le contrôle de la qualité et de l'économicité des prestations. Il n'y avait dès lors aucune raison pour le canton de prendre en charge les parts afférentes à ces séjours.

21) Par courrier du 28 juin 2019, le Conseiller d'État en charge du DSES a indiqué que les séjours actuels et futurs de patients genevois dans un établissement hospitalier situé dans un autre canton seraient pris en charge par le canton de Genève dans la mesure de ses obligations. Ce dernier prendrait en charge la part cantonale afférente aux hospitalisations hors canton pour autant que celles-ci correspondent aux missions pour lesquelles l'établissement concerné figurait sur la liste hospitalière de son canton de situation.

22) Par acte du 22 août 2019, la fondation a interjeté recours contre les décisions du DSES des 26 et 28 juin 2019 par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant à leur annulation, à ce que le canton de Genève soit condamné à lui payer la somme de CHF 770'152.19, avec intérêts à 5 % l'an dès le 27 juin 2018 et à ce qu'il soit dit et constaté que le canton de Genève avait l'obligation de payer la part cantonale au sens de l'art. 49a al. 2 LAMal afférente aux séjours de patients résidant dans le canton de Genève ayant exercé leur libre choix de l'hôpital au sens de l'art. 41 al. 1bis LAMal en faveur de la clinique, pour autant que celle-ci soit apte à traiter la maladie de ces patients et sans considération quant à l'éventail de prestations au sens de l'art. 58e al. 2 de l'ordonnance sur l'assurance-maladie du 27 juin 1995 (OAMal - RS 832.102) indiqué dans le contrat de prestations liant ladite clinique au canton de Vaud, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure.

La clinique figurait sur la liste vaudoise. Les patients genevois étaient dès lors habilités à se faire traiter auprès de cet établissement, dans la mesure où celui-ci était apte à traiter leur maladie. Le contenu du mandat de prestations que lui avait octroyé le canton de Vaud pour la couverture des besoins en soins stationnaires de la population vaudoise, en particulier l'éventail de prestations au sens de l'art. 58e al. 2 OAMal, était sans pertinence dans le cadre de l'application de l'art. 41 al. 1bis LAMal. Les décisions litigieuses dénotaient une confusion entre les concepts de planification hospitalière et de libre choix de l'hôpital. Le DSES feignait d'ignorer que les critères requis pour la couverture LAMal et le paiement de la part cantonale de l'art. 49a al. 2 LAMal différaient selon que le séjour du patient relevait du système de planification hospitalière cantonale des art. 39 al. 1 let. d et 41a LAMal, ou du système de libre choix de l'hôpital pour les patients résidant en Suisse institué par l'art. 41 al. 1bis LAMal. Seule l'aptitude à traiter la maladie de l'établissement considéré était pertinente dans le cadre du libre choix de l'hôpital de l'art. 41 al. 1bis LAMal.

Les deux conditions d'application de l'art. 41 al. 1bis LAMal, soit que l'établissement soit apte à traiter la maladie et qu'il figure sur la liste du canton de résidence du patient ou sur celle du canton où se situait l'hôpital, étaient remplies. L'art. 41 al. 1bis LAMal n'imposait pas de condition supplémentaire à teneur de laquelle la maladie devait en outre relever de l'éventail de prestations figurant dans le mandat de prestations de l'hôpital sélectionné. Si le canton de Vaud avait limité l'éventail des prestations figurant dans le mandat de la clinique à la médecine interne ou la chirurgie dispensées aux urgences ou relevant de la chirurgie robotique, c'était parce qu'il estimait que les autres prestations étaient déjà couvertes par l'offre d'autres établissements. Cela n'avait donc rien à voir avec l'aptitude à traiter les maladies des patients extracantonaux.

Nonobstant, le canton de Genève faisait une interprétation erronée de l'étendue de l'éventail de prestations au sens de l'art. 58e al. 2 OAMal figurant dans le mandat de prestations vaudois de la clinique. Cette disposition traitait uniquement des prestations planifiées et non pas de celles dispensées dans l'urgence. En ce qui concernait ces dernières, le législateur avait adopté une réglementation spécifique à l'art. 41 al. 3 LAMal, lequel ne contenait également ni référence à un quelconque mandat de prestations de l'établissement concerné ni à l'éventail de prestations qu'il contenait. Une lecture objective de la liste vaudoise ne permettait pas de trouver une limitation aux cas d'urgence ou de chirurgie robotique. Seules les notions de « médecine interne » et de « chirurgie » y figuraient. Le canton de Genève ne pouvait ainsi interpréter le mandat de prestations de la même manière illégale que le canton de Vaud. L'éventail des prestations (missions ou pôles de prestations) pertinent au sens de l'art. 58e al. 2 OAMal pour la prise en charge était celui découlant des tableaux figurant aux pages 25 et 26 du mandat de prestations 2012-2014, ainsi qu'aux pages 16 et 17 du mandat de prestations 2015-2019 de la clinique, à savoir la médecine interne et la chirurgie, sans considération des circonstances de l'urgence ou de la chirurgie robotique. En l'occurrence, l'ensemble des séjours pour lesquels la prise en charge de la part cantonale était réclamée relevaient des missions indiquées dans les mandats de prestations successifs de la clinique. Ainsi, même si la chambre administrative devait considérer que les limitations liées à l'éventail des prestations figurant dans le mandat de prestations vaudois de la clinique déterminaient la prise en charge des séjours de patients genevois ayant exercé leur libre choix de l'hôpital, ce qui était contesté, le canton de Genève devait néanmoins payer les parts cantonales afférentes à l'ensemble des séjours listés dans sa demande du 27 juin 2018.

23) Dans sa réponse du 23 septembre 2019, le DSES a conclu au rejet du recours.

Le canton de Genève était en droit de refuser de payer la part cantonale des frais d'hospitalisation pour des traitements n'entrant pas dans les différents pôles d'activité ou missions pour lesquels la clinique figurait sur la liste hospitalière cantonale vaudoise. En l'occurrence, elle figurait sur la liste cantonale vaudoise en fonction d'un mandat de prestations dont l'éventail était clairement mentionné, à savoir la chirurgie robotique (urologie, gynécologie, chirurgie viscérale, ORL) et les urgences (médecine et chirurgie).

En outre, si la recourante délivrait des hospitalisations à des résidents genevois sur la base de l'art. 41 al. 3 LAMal, elle devait être admise à la charge de la LAMal et par conséquent figurer sur la liste vaudoise pour des mandats de prestations correspondant aux missions médicales considérées, y compris pour les cas d'urgence. Toute autre interprétation permettrait de contourner la loi en faisant fi des missions médicales pour lesquelles une institution figurait sur la liste vaudoise et mettrait ainsi en échec le contrôle de la qualité et de l'économicité des prestations. Le canton de Genève était ainsi en droit de réclamer des informations sur les patients genevois hospitalisés à la clinique, en particulier pour savoir si ces hospitalisations correspondaient à des prestations pour lesquelles ladite clinique avait été mandatée et de vérifier dans quelles mesures lesdites hospitalisations relevaient de l'urgence ou d'une planification.

24) Dans sa réplique du 27 septembre 2019, la fondation a persisté dans son recours.

25) Le 4 octobre 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) a. En matière d'assurance-maladie, la chambre des assurances sociales connaît en instance cantonale de recours unique des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), et qui sont relatives à la LAMal, opposant des assureurs et des assurés, à l'issue d'une procédure d'opposition (art. 52. al. 1 et 56 al. 2 LPGA ; art. 85 et 86 LAMal).

La chambre administrative conserve la compétence résiduelle pour les litiges surgissant entre les autorités et des prestataires de soins (ATA/1049/2017 du 4 juillet 2017 consid. 1 ; ATA/922/2014 du 25 novembre 2014 consid. 2) et notamment pour statuer sur les recours relatifs au financement résiduel des frais d'hospitalisations extra-cantonales (ATA/284/2019 du 19 mars 2019 consid. 1 ; ATA/1049/2017 précité consid. 1).

En conséquence, interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. Au sens de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d'annuler des droits et des obligations (let. a), de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations (let. c).

Les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délais de recours (art. 46 al. 1 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

En l'occurrence, les courriers du département des 26 et 28 juin 2018 n'indiquent pas de voie ni de délai de recours. Ce nonobstant, il convient de les considérer comme des décisions au sens de l'art. 4 LPA, dès lors qu'ils constituent la prise de position du département sur les prétentions de la recourante, qu'elle a exposées dans plusieurs courriers et après qu'elle ait demandé, le 13 juin 2019, une décision formelle. Dans sa réponse du 23 septembre 2019, le département ne conteste d'ailleurs pas le fait qu'il s'agisse de décisions, qu'il qualifie comme telles dans ses conclusions.

Le recours formé le 22 août 2019 sera donc déclaré recevable sous cet angle également.

2) Le litige porte sur l'étendue de l'obligation du canton de Genève de payer à la recourante la part cantonale des frais d'hospitalisation, pour des patients domiciliés dans le canton de Genève, pour les cas présentés dans l'annexe de son courrier du 27 juin 2018.

3) Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n'a toutefois pas la compétence d'apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), hypothèse non réalisée en l'espèce.

Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur les considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables ou viole des principes généraux de droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; ATA/151/2016 du 23 février 2016 consid. 11).

4) L'art. 35 al. 1 LAMal prévoit que sont admis à pratiquer à la charge de l'AOS les fournisseurs de prestations qui remplissent les conditions des art. 36 à 40 LAMal.

Selon l'art. 39 al. 1 LAMal, les établissements et celles de leurs divisions qui servent au traitement hospitalier de maladies aiguës ou à l'exécution, en milieu hospitalier, de mesures médicales de réadaptation (hôpitaux) sont admis s'ils garantissent une assistance médicale suffisante (let. a), disposent du personnel qualifié nécessaire (let. b), disposent d'équipements médicaux adéquats et garantir la fourniture adéquate de médicaments (let. c), correspondent à la planification établie par un canton ou, conjointement, par plusieurs cantons afin de couvrir les besoins en soins hospitaliers, les organismes privés devant être pris en considération de manière adéquate (let. d) et s'ils figurent sur la liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en fonction de leurs mandats (let. e).

L'art. 39 al. 2 LAMal précise que les cantons coordonnent leurs planifications. Par ailleurs, aux termes de l'art. 39 al. 2ter LAMal, le Conseil fédéral édicte des critères de planification uniformes en prenant en considération la qualité et le caractère économique. Il consulte au préalable les cantons, les fournisseurs de prestations et les assureurs.

Conformément à cette délégation de compétence, le Conseil fédéral a édicté les art. 58a à 58e OAMal sur les critères de planification.

À teneur de l'art. 58a OAMal, la planification en vue de couvrir les besoins en soins (art. 39 al. 1 let. d LAMal) garantit aux habitants des cantons qui l'établissent le traitement hospitalier à l'hôpital ou dans une maison de naissance ainsi que le traitement dans un établissement médico-social (al. 1). Les cantons réexaminent périodiquement leurs planifications (al. 2).

Les cantons déterminent non seulement l'offre utilisée dans des établissements qui ne figurent pas sur la liste qu'ils ont arrêtée (art. 58b
al. 2 OAMal) mais également l'offre qui doit être garantie par l'inscription d'établissements cantonaux et extra-cantonaux sur la liste visée à
l'art. 58e OAMal afin que la couverture des besoins soit assurée (art. 58b
al. 3 OAMal).

Dans le cadre de l'obligation de coordination intercantonale des planifications, visée à l'art. 39 al. 2 LAMal, les cantons doivent notamment exploiter les informations pertinentes concernant les flux de patients et les échanger avec les cantons concernés (art. 58d let. a OAMal) et coordonner les mesures de planification avec les cantons concernés par celles-ci dans la couverture de leurs besoins (art. 58d let.b OAMal).

Les cantons inscrivent sur leur liste visée à l'art. 39 al. 1 let. e LAMal, les établissements cantonaux et extra-cantonaux nécessaires pour garantir l'offre déterminée conformément à l'art. 58b al. 3 OAMal (58e al. 1 OAMal). Les listes mentionnent pour chaque hôpital l'éventail de prestations correspondant au mandat de prestations (art. 58e al. 2 OAMal). Les cantons attribuent à chaque établissement sur leur liste un mandat de prestations au sens de l'art. 39 al. 1 let. e LAMal. Celui-ci peut contenir notamment l'obligation de disposer d'un service d'urgence (art 58e al. 3 OAMal).

5) À teneur de l'art. 41 al. 1bis LAMal, en cas de traitement hospitalier, l'assuré a le libre choix entre les hôpitaux aptes à traiter sa maladie et figurant sur la liste de son canton de résidence ou celle du canton où se situe l'hôpital (hôpital répertorié). En cas de traitement hospitalier dans un hôpital répertorié, l'assureur et le canton de résidence prennent en charge leur part respective de rémunération au sens de l'art. 49a jusqu'à concurrence du tarif applicable pour ce traitement dans un hôpital répertorié du canton de résidence.

En vertu de l'art. 41a LAMal, dans les limites de leurs mandats de prestations et de leurs capacités, les hôpitaux répertoriés sont tenus de garantir la prise en charge de tous les assurés résidant dans le canton où se situe l'hôpital (obligation d'admission ; al. 1). Pour les assurés résidant hors du canton où se situe l'hôpital répertorié, l'obligation d'admission ne s'applique que si elle est basée sur des mandats de prestations ainsi que dans les cas d'urgence (al. 2 ). Les cantons veillent au respect de l'obligation d'admission (al. 3).

Selon l'art. 49a LAMal, les rémunérations au sens de l'art. 49 al. 1 LAMal sont prises en charge par le canton et les assureurs, selon leur part respective
(al. 1). Le canton fixe pour chaque année civile, au plus tard neuf mois avant le début de l'année civile, la part cantonale pour les habitants du canton. Celle-ci se monte à 55 % au moins (al. 2). Le canton de résidence verse sa part de la rémunération directement à l'hôpital. Les modalités sont convenues entre l'hôpital et le canton. L'assureur et le canton peuvent convenir que le canton paie sa part à l'assureur, et que ce dernier verse les deux parts à l'hôpital. La facturation entre l'hôpital et l'assureur est réglée à l'art. 42 (al. 3).

6) a. Dans une affaire opposant le département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud à plusieurs cliniques genevoises, le Tribunal fédéral a, par arrêt du 27 janvier 2017, tranché la question de savoir si les limites quantitatives (quotas) fixées dans les contrats de prestations liant lesdites cliniques à l'État de Genève s'appliquaient lors d'hospitalisation de patients vaudois (9C_151/2016, 9C_153/2016, 9C_155/2016 et 9C_507/2016).

Il a relevé que compte tenu de l'arrêté déterminant la liste des hôpitaux admis par le canton de Genève au sens de la LAMal, de son avenant et des mandats de prestations octroyés aux cliniques genevoises, il apparaissait que le gouvernement cantonal genevois avait établi une planification et une liste hospitalière en fonction uniquement des personnes domiciliées dans le canton de Genève, sans la coordonner avec le canton de Vaud. Seuls les besoins en soins des habitants du canton de Genève avaient été pris en considération. Les mandats de prestations convenus entre l'État de Genève et les cliniques portaient expressément sur les prestations fournies aux personnes assurées à l'AOS domiciliées dans le canton de Genève et pour lesquelles existait une obligation d'admission au sens de l'art. 41a LAMal. Une telle obligation n'existait pas pour les assurés résidant dans le canton de Vaud, aucun mandat de prestations ne liant les cliniques au canton de Vaud. Par ailleurs, le nombre de cas avait été limité par chacun des mandats de prestations en relation avec leur prise en charge par l'État de Genève.

Le Tribunal fédéral a conclu que les limites du nombre de cas prévues par les mandats de prestation en question ne pouvaient pas concerner d'autres assurés que les personnes domiciliées dans le canton de Genève. Le volume des prestations défini n'avait pas été conçu ni déterminé pour s'appliquer aux patients domiciliés dans le canton de Vaud ayant choisi de se faire hospitaliser hors de leur canton, en relation avec la prise en charge des prestations hospitalières par l'État de Vaud.

Dans le cadre de cet arrêt, le Tribunal fédéral a notamment défini le mandat de prestations comme déterminant la palette des prestations qu'un hôpital doit être en mesure de proposer à ses patients pour couvrir les besoins en soins de la population et, par voie de conséquence, être inscrit sur la liste LAMal
(consid. 7.1).

b. Dans un arrêt du 28 mai 2018, le Tribunal fédéral a eu à trancher la même question, opposant cette fois le département à des cliniques vaudoises (9C_617/2017).

Selon le même raisonnement, il a considéré que les mandats de prestations que le canton de Vaud avait accordés aux cliniques vaudoises avaient pour but d'assurer les besoins en soins des personnes résidant dans le canton de Vaud, sans que n'existe une planification établie par plusieurs cantons. Aussi, la limitation de l'activité médicale à un nombre défini de cas ne pouvait pas être appliquée à des assurés ne résidant pas dans le canton de Vaud pour la prise en charge par un autre canton en l'occurrence Genève de la part cantonale correspondant à la rémunération des prestations hospitalières choisies par les assurés extra-cantonaux conformément au libre choix prévu par l'art. 41 al. 1bis LAMal.

c. Dans une affaire vaudoise portant sur des faits similaires à ceux relevant de la présente cause (arrêt/2018/902 du 10 octobre 2018, n° de décision AM 15/17, 65/17, 66/17, 67/17 et 68/17 - 43/2018), à la différence près qu'elle concernait des clinique genevoises sollicitant la prise en charge de la part cantonale par les autorités vaudoises, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois a conclu que l'État de Vaud était en droit de refuser de payer la part cantonale des frais d'hospitalisation pour des traitements qui n'entraient pas dans les différents
« pôles d'activité » ou « missions » pour lesquels les cliniques figuraient sur la liste hospitalière genevoise pendant la période déterminante.

La Cour des assurances sociales a relevé qu'il était difficilement imaginable que les mandats de prestations qui avaient été confiés aux cliniques soient opposables au canton de Vaud dans la mesure où ils leur permettaient de figurer sur la liste hospitalière genevoise, mais qu'aucune des limitations à ces mandats ne soit pertinente pour déterminer l'étendue de l'obligation de prester du canton.
L'art. 39 al. 1 let. e LAMal précisait d'ailleurs que pour être admis à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire des soins, l'hôpital concerné devait figurer « sur une liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en fonction de leurs mandats ». Ensuite, la limitation de l'activité des cliniques à certaines « missions » ou à certains « pôles d'activité » découlait de la liste hospitalière elle-même, et non uniquement des mandats de prestations. Enfin, et surtout, l'inscription d'un établissement sur la liste hospitalière d'un canton impliquait que ce dernier vérifie que l'hôpital en question dispose des compétences médicales nécessaires, tant au niveau du personnel que de l'équipement, et qu'il fournisse des prestations respectant les critères de qualité et d'économicité. Or, il était tout à fait envisageable qu'un établissement hospitalier remplisse ces critères dans certains domaines de spécialisation et pas dans d'autres, ce qui justifierait son inscription sur une liste hospitalière cantonale pour certains « pôles d'activité » ou pour certaines « missions » uniquement. Ces critères étaient pertinents tant pour les hospitalisations dans le canton de résidence que pour les hospitalisations extra-cantonales.

La Cour des assurances sociales a encore relevé que les cliniques genevoises soulignaient que selon l'art. 41 al. 1bis LAMal, l'assuré avait le libre choix entre les différents hôpitaux « aptes à traiter sa maladie ». Elles omettaient toutefois la seconde condition posée par cette disposition, à savoir que l'hôpital choisi figure sur une liste hospitalière cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en fonction de leurs mandats de prestations (art. 41 al. 1bis LAMal en relation avec l'art. 39 al. 1 let. e LAMaI). Ces deux conditions cumulatives étaient posées pour les hospitalisations dans le canton de résidence du patient comme pour les hospitalisations extra-cantonales et il n'y avait aucun motif de faire une différence entre les premières et les secondes, sur ce point tout au moins. Le Tribunal fédéral estimait justifié d'opérer une distinction en ce qui concernait l'application des limites quantitatives fixées dans les mandats de prestation, ce dont il convenait de prendre acte. Mais rien ne permettait de considérer que l'on pouvait faire abstraction, pour les hospitalisations extra-cantonales, de critères comme le caractère économique et l'adéquation des prestations, en particulier en ce qui concernait l'efficience de la fourniture de prestations, la justification de la qualité nécessaire ou le nombre minimum de cas traités dans certains domaines de spécialisation.

d. Le Tribunal administratif fédéral a déjà eu l'occasion de relever que la liste hospitalière devait être conforme aux normes fédérales relatives à la planification hospitalière (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5017/2015 du 16 janvier 2019 consid. 7.3.4 ; C-1966/2014 du 23 novembre 2015 consid. 4.2).

7) La recourante considère, en premier lieu, qu'à teneur de l'art. 41
al. 1bis LAMal, la part cantonale devrait faire l'objet d'un remboursement à chaque fois que l'établissement choisi par le patient serait apte à traiter la maladie et figurerait sur la liste du canton de résidence du patient concerné ou du canton où se situe l'établissement en question, dès lors que cette disposition ne prévoit aucune autre condition à cette prise en charge. Elle estime en l'occurrence que ces deux conditions seraient remplies pour tous les cas soumis à l'intimé dans son tableau « excel » remis en annexe à sa correspondance du 27 juin 2018.

Le département considère que le paiement des parts cantonales au sens de l'art. 49a al. 2 LAMal relatives aux séjours hospitaliers des ressortissants genevois dans la clinique se limite aux cas relevant des « pôles de prestations » ou des
« missions » figurant dans les mandats de prestations successifs octroyés par le canton de Vaud à ladite clinique, à savoir celles relevant de la chirurgie robotique (urologie, gynécologie, chirurgie viscérale, ORL) et les urgences (médecine et chirurgie). Ces prestations avaient été choisies en fonction des critères énoncés de la planification hospitalière, établis par la législation, tels que leur caractère économique, leur efficience et leur qualité. Il importait peu que ces prestations aient été délivrées à des vaudois et à des ressortissants d'autres cantons.

Les parties divergent ainsi sur les critères conditionnant, selon l'art. 41 al. 1bis LAMal, la prise en charge de la part cantonale lors de l'hospitalisation d'un patient genevois auprès de la clinique. La recourante relève que seules deux conditions claires se dégagent de cette disposition, tandis que l'intimé considère qu'elle doit s'interpréter à la lumière, notamment, des art. 39 al. 1 let. d et
39 al. 2ter LAMal ainsi que l'art. 58e OAMal.

8) a. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme au regard notamment de la volonté du législateur, telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, en particulier de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique ; ATF 140 II 202 consid. 5.1). Appelé à interpréter une loi, le juge ne privilégie aucune de ces méthodes, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique (ATF 139 IV 270 consid. 2.2).

b. Le juge est en principe lié par un texte clair et sans équivoque. Ce principe n'est toutefois pas absolu, dès lors que le texte d'une norme peut ne pas correspondre à son sens véritable. L'autorité qui applique le droit ne peut ainsi s'en écarter que s'il existe des motifs sérieux de penser que sa lettre ne correspond pas en tous points au sens véritable de la disposition visée. De tels motifs sérieux peuvent résulter des travaux préparatoires, du fondement et du but de la prescription en cause, de même que de sa relation avec d'autres dispositions
(ATF 138 II 557 consid. 7.1). En dehors du cadre ainsi défini, des considérations fondées sur le droit désirable ne permettent pas de s'écarter du texte clair de la loi, surtout si elle est récente (ATF 118 II 333 consid. 3e). Le juge ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 142 II 388 consid. 9.6.1). Enfin, si plusieurs interprétations sont admissibles, il faut choisir celle qui est conforme à la Constitution (ATF 144 III 58 consid. 4.1.3.1).

c. S'agissant plus spécialement des travaux préparatoires, bien qu'ils ne soient pas directement déterminants pour l'interprétation et ne lient pas le juge, ils ne sont pas dénués d'intérêt et peuvent s'avérer utiles pour dégager le sens d'une norme. En effet, ils révèlent la volonté du législateur, laquelle demeure, avec les jugements de valeur qui la sous-tendent, un élément décisif dont le juge ne saurait faire abstraction même dans le cadre d'une interprétation téléologique (ATF 119 II 183 consid. 4b ; 117 II 494 consid. 6a ; ATA/213/2017 du 21 février 2017). Les travaux préparatoires ne seront toutefois pris en considération que s'ils donnent une réponse claire à une disposition légale ambiguë et qu'ils ont trouvé expression dans le texte de la loi (ATF 124 III 126 consid. 1b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_939/2011 du 7 août 2012 consid. 4).

9) a. En l'espèce, le texte de l'art. 41 al. 1bis 1ère phrase LAMal ne mentionne effectivement que deux conditions cumulatives au libre choix de l'hôpital en cas de traitement hospitalier, soit que celui-ci soit apte à traiter sa maladie et qu'il figure sur la liste de son canton de résidence ou celle du canton où il se situe (hôpital répertorié).

b. Selon le message du Conseil fédéral concernant la révision partielle de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (financement hospitalier) du 15 septembre 2004 (FF 2004 5207) relatif à l'art. 41 al. 1bis LAMal, la première phrase de cet alinéa prévoit que les assurés ont le choix entre les fournisseurs de prestations qui sont aptes à traiter leur maladie. Les mandats de prestations attribués en fonction de la planification/liste cantonale déterminent quels sont les hôpitaux admis pour les différents traitements. Sont réputés admis à pratiquer à la charge de l'AOS les hôpitaux figurant sur la liste du canton où réside la personne assurée ou sur la liste du canton où le fournisseur de prestations est installé à titre permanent. Une prise en charge par l'assurance-maladie obligatoire n'intervient toutefois - excepté pour des raisons médicales au sens de l'art. 41 al. 3 LAMal - qu'au tarif des hôpitaux figurant sur la liste du canton où réside la personne assurée. Si celle-ci recourt, sans raisons médicales, à un fournisseur de prestations qui ne figure pas sur la liste de son canton de résidence, mais qui est admis comme fournisseur de prestations dans un autre canton, elle bénéficie d'une protection tarifaire : le fournisseur de prestations doit s'en tenir au tarif approuvé ou fixé (art. 46 al. 4, 47, al. 2 LAMal). L'assurance-maladie ne prend en charge que la part des coûts qui correspond au tarif des hôpitaux figurant sur la liste du canton où réside la personne assurée et qui disposent d'un mandat de prestations correspondant. Si l'hôpital n'est pas inclus dans la planification, le canton ne doit pas contribuer aux coûts. Les coûts correspondants sont à la charge de l'assuré lui-même ou d'une éventuelle assurance complémentaire. Cette démarche se justifie par le fait qu'en effectuant la planification hospitalière et en attribuant des mandats de prestations, le canton veille à disposer d'une capacité suffisante pour que les habitants du canton puissent être traités dans tous les cas de maladie. Lorsqu'une personne assurée se fait soigner dans un hôpital ne correspondant pas à la planification hospitalière alors que les capacités mises à disposition engendrent néanmoins des coûts fixes, c'est à elle et non pas au canton d'en supporter les conséquences financières (p. 5232- 5233).

Il ressort ainsi des travaux préparatoires qu'il existe, contrairement à l'avis de la recourante, une évidente relation entre la planification hospitalière et le libre choix de l'hôpital. Ces derniers précisent en particulier que les mandats de prestations, lesquels sont attribués en fonction de la planification et de la liste cantonale, déterminent quels sont les hôpitaux admis pour les différents traitements. Il apparaît dès lors que les mandats de prestations sont déterminants, dans le cadre de l'art. 41 al. 1bis LAMal, pour déterminer quelles prestations les hôpitaux figurant sur la liste cantonale sont admis à pratiquer à la charge de l'AOS.

c. Cette analyse est confirmée par l'interprétation téléologique et systématique de l'art. 41 al. 1bis LAMal.

D'une part, il convient de relever que l'art. 41 LAMal, prend place dans le chapitre 4 intitulé « fournisseurs de prestations » du titre 2 de la LAMal relatif à l'AOS. Ce chapitre divisé en six sections traite notamment, à la section 1, de l'« admission » aux art. 35 à 40 LAMal, puis à la section 2 du « choix du fournisseur de prestations, prise en charge des coûts et obligation d'admission faite aux hôpitaux répertoriés », aux art. 41 et 41a LAMal. Comme susmentionné, l'art. 39 al. 1 LAMal, en relation avec l'art. 35 LAMal, définit les conditions auxquelles un hôpital peut être admis à pratiquer à la charge de l'AOS. L'une de ces conditions est de figurer sur la liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en fonction de leurs mandats (art. 39 al. 1 let. e LAMal). L'art. 58e al. 2 OAMal précise quant à lui que la liste visée à l'art. 39 al. 1 let. e LAMal mentionne, pour chaque hôpital, l'éventail des prestations correspondant au mandat de prestations. Il ressort de cette systématique que si l'art. 41 al. 1bis LAMal lequel figure dans le titre relatif à l'AOS ne semble poser que deux conditions dans l'exercice du libre choix par l'assuré d'un hôpital en cas d'hospitalisation, il n'en demeure pas moins que pour prétendre à la prise en charge de la part cantonale, l'hôpital doit être admis à pratiquer à la charge de l'AOS. Or, pour ce faire, l'hôpital doit remplir plusieurs conditions cumulatives, dont celle de figurer sur la liste cantonale fixant les catégories d'hôpitaux en fonction de leurs mandats, laquelle indique l'éventail des prestations correspondant au mandat de prestations (art. 58e al. 2 OAMal). La conclusion d'un contrat de mandat définissant l'éventail de prestations pouvant faire l'objet d'une prise en charge par l'AOS est donc nécessaire pour qu'un établissement hospitalier puisse figurer sur une liste hospitalière.

Par ailleurs, la prise en compte des « pôles de prestations » ou des
« missions » figurant dans les mandats de prestations permet, notamment, de considérer que l'hôpital en question est effectivement apte à traiter la maladie au sens de l'art. 41 al. 1bis LAMal. En effet, avant d'admettre une prestation dans un mandat de prestations, et a fortiori dans sa liste hospitalière, le canton concerné a effectivement dû procéder à différentes vérifications concernant, entre autres, les besoins de sa population, mais également la qualité des établissements hospitaliers.

Enfin, rien ne justifie, sous l'angle du principe de l'égalité de traitement, de restreindre de manière beaucoup plus importante le libre choix des patients vaudois. À suivre l'interprétation de la recourante, les patients vaudois pourraient choisir, dans le cadre de l'art. 41 al. 1bis LAMal, uniquement un hôpital de la liste vaudoise pour les prestations précisément déterminées par les mandats de prestations conclus, tandis que les patients genevois seraient en mesure de choisir un hôpital figurant sur ladite liste pour n'importe quel type de prestations.

En définitive, il convient de relever, comme le fait valoir la recourante, que les mandats de prestations ont effectivement essentiellement pour but d'assurer les besoins en soins des personnes résidant dans le canton ayant conclu lesdits mandats. Or, il ressort des éléments qui précèdent qu'ils sont également indispensables à la fois pour permettre l'inscription d'un établissement hospitalier sur une liste hospitalière et pour autoriser celui-ci à pratiquer à la charge de l'AOS. Ils permettent enfin de s'assurer que l'hôpital est effectivement apte à traiter le patient dans le pôle d'activité pour lequel celui-ci est hospitalisé. Comme relevé par la cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois, il est tout à fait envisageable qu'un établissement hospitalier dispose des compétences nécessaires dans certains domaines de spécialisation et pas dans d'autres, ce qui justifie qu'il soit inscrit sur une liste hospitalière pour certains pôles d'activités seulement. Il en découle que les mandats de prestations doivent également être pris en compte, même pour les patients extra-cantonaux, lorsqu'il convient de s'interroger sur la prise en charge de la part cantonale par un canton.

10) La recourante considère que le raisonnement tenu par le Tribunal fédéral dans les litiges portant sur les quotas serait pleinement valable dans le présent litige. Le Tribunal fédéral a effectivement considéré dans les arrêts précités (9C_151/2016, 9C_153/2016, 9C_155/2016, 9C_507/2016 et 9C_617/2017) que la limitation de l'activité médicale à un certain nombre de cas ressortant des mandats de prestations conclus avec les cliniques ne s'appliquait pas aux patients extra-cantonaux. Or, une différence notable existe entre la prise en compte des
« quotas » ou des « pôles de prestations » figurant dans les mandats de prestations. Si le Tribunal fédéral a effectivement admis qu'un canton était en droit d'introduire des limitations quantitatives des prestations dans sa planification hospitalière (ATF 138 II 398), une telle limitation n'est aucunement prévue par la loi. Le Tribunal fédéral pouvait dès lors conclure qu'à la lecture des mandats de prestations, seuls les besoins de la population cantonale avaient été pris en compte, de sorte que les limitations ne s'appliquaient qu'à celle-ci. En revanche, il ressort des art. 39 al. 1 let. d LAMal et 58 e OAMal que les listes doivent mentionner l'éventail des prestations tel qu'il ressort des mandats de prestations. Il ne saurait dès lors être considéré, comme le prétend la recourante, que l'éventail des prestations déterminés par les mandats de prestations qu'elle a conclus avec l'État de Vaud, dont la concrétisation ressort du texte même de la LAMal et de l'OAMal, ne s'appliqueraient pas aux patients extra-cantonaux mais uniquement aux patients vaudois, une telle distinction ne ressortant au demeurant pas de la loi.

Pour le surplus, l'argumentation de la recourante relative à la situation dans laquelle un hôpital figurerait sur plusieurs listes cantonales pour des prestations différentes n'a pas à être examinée dans la présente affaire. En effet, dans le cas d'espèce, seules sont déterminantes les listes cantonales vaudoises et genevoises. Or, la clinique ne figure que sur l'une seule de ces listes, à savoir la liste vaudoise.

Il ressort de ce qui précède que, dans le cadre de l'AOS, une prise en charge de la part cantonale par le canton de résidence du patient devra intervenir chaque fois que ce dernier choisit un hôpital apte à traiter sa maladie et figurant sur la liste de son canton de résidence ou sur celle du canton où se trouve l'hôpital. Pour les raisons susmentionnées, cette prise en charge sera également conditionnée au fait que l'hospitalisation concerne l'une des missions médicales générales figurant sur la liste cantonale, dans les pôles d'activité précisés par le mandat de prestations conclu par l'hôpital en question.

Il n'est pas contesté que la clinique ne figure pas sur la liste genevoise, de sorte que seule la liste vaudoise est déterminante. En l'occurrence, l'AListeLAMal mentionne que la clinique est admise à pratiquer à la charge de l'AOS pour les missions médicales générales de médecine interne et de chirurgie. Elle précise qu'il s'agit d'un mandat partiel de base. Il en découle que les hospitalisations pouvant faire l'objet d'un paiement de la prise en charge de la part cantonale par l'intimé, sous l'angle de l'art. 41 al. 1bis LAMal, ne peuvent concerner que ces deux domaines, à l'exclusion de l'obstétrique, de la pédiatrie, de la psychiatrie ou de la réadaptation et des soins palliatifs, pour lesquels elle ne figure pas sur la liste.

11) Dans un raisonnement subsidiaire, la recourante considère que même si, en sus des deux conditions mentionnées à l'art. 41 al. 1bis LAMal, le paiement de la part cantonale était également conditionné au fait que l'hospitalisation concerne des prestations (missions ou pôles de prestations) figurant dans le mandat de prestations accordé par le canton de Vaud à la clinique, cette condition serait également remplie en l'espèce pour tous les cas soumis. Le département considérait, à tort, que l'éventail de prestations au sens de l'art. 58e al. 2 OAMal figurant dans le mandat de prestations ne couvrirait que les prestations urgentes ou relevant de la robotique. Or, ladite disposition ne traitait que des prestations planifiées, et non urgentes. L'art. 41 al. 3 LAMal, lequel traitait des prestations urgentes, ne contenait pour sa part aucune référence ni à un quelconque mandat de prestations ni à l'éventail des prestations qu'il contenait.

L'intimé considère quant à lui que si la recourante délivre des hospitalisations à des résidents genevois sur la base de l'art. 41 al. 3 LAMal, elle doit être admise à la charge de la LAMal et, par conséquent, figurer sur la liste hospitalière vaudoise pour des mandats de prestations correspondant aux missions médicales considérées, y compris pour les cas d'urgence.

Les parties diffèrent ainsi sur la question de savoir si l'éventail de prestations visé à l'art. 58e al. 2 LAMal concerne uniquement des prestations médicales au sens nosologique du terme, ou également les modalités de leur administration (élective ou urgente).

12) a. Selon l'art. 41 al. 3 LAMal, si, pour des raisons médicales, l'assuré se soumet à un traitement hospitalier fourni par un hôpital non répertorié du canton de résidence, l'assureur et le canton de résidence prennent à leur charge leur part respective de rémunération au sens de l'art. 49a LAMal. À l'exception du cas d'urgence, une autorisation du canton de résidence est nécessaire.

L'art. 41 al. 3bis let. b LAMal précise que sont réputées raisons médicales au sens des al. 2 et 3 le cas d'urgence et le cas où les prestations nécessaires ne peuvent pas être fournies dans un hôpital répertorié du canton de résidence de l'assuré, s'il s'agit d'un traitement hospitalier.

b. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un cas d'urgence au sens de
l'art. 41 LAMal est réalisé lorsque des soins médicaux doivent être administrés sans tarder et qu'il n'est pas possible ou pas approprié d'imposer à l'assuré de retourner dans son canton de résidence (arrêt 9C_812/2008 du 31 mars 2009 consid. 2.2).

13) Selon les travaux préparatoires précités, relatifs à l'art. 41 al. 3 LAMal, les assurés ont le droit de choisir un autre fournisseur de prestations s'ils ne peuvent recourir, pour un traitement déterminé ou en cas d'urgence, à un fournisseur de prestations figurant sur la liste du canton de résidence. En résumé, il en résulte que l'assurance-maladie prend en charge les coûts de traitement hospitalier si le choix se porte soit sur un fournisseur de prestations figurant sur la liste du canton de résidence et apte à traiter la maladie, soit, pour des raisons médicales, sur un autre fournisseur de prestations qui ne figure pas sur la liste du canton de résidence. Dans ce dernier cas également, comme le système d'assurance est autonome, seul un fournisseur de prestations admis selon les règles légales est autorisé à facturer des prestations à la charge de l'assurance-maladie ; en d'autres termes, il doit s'agir d'un hôpital figurant tout au moins sur la liste du canton où il a son siège et qui est, de ce fait, considéré comme un fournisseur de prestations admis (FF 2004 5207, p. 5233).

14) À titre préalable, comme le relève la recourante, les prestations relevant de l'urgence ne sauraient être considérées comme des prestations médicales au sens nosologique du terme. Il s'agit en réalité de modalités dans l'exercice de prestations médicales, pouvant toucher n'importe quel domaine de la médecine et devant être effectuées sans tarder. Il en découle que la liste vaudoise ne mentionne pas les prestations relevant de l'urgence aux titres des diverses missions médicales générales. Il en va d'ailleurs de même dans les listes hospitalières des autres cantons. Le fait, pour un établissement hospitalier, de disposer d'un service d'urgence peut en revanche être une obligation ressortant d'un mandat de prestations (art. 58e al. 3 OAMal), et ainsi conditionner son inscription sur une liste hospitalière.

Par ailleurs, la prise en charge de la part cantonale s'agissant des hospitalisations relevant des situations d'urgence est spécifiquement réglée à
l'art. 41 al. 3 et al. 3bis LAMal. Conformément à l'art. 41 al 3 in fine LAMal, dans de telles circonstances, une autorisation préalable du canton de résidence n'est pas nécessaire. Si le texte de l'art. 41 al. 3 LAMal ne fait effectivement, comme le relève la recourante, aucune référence à la liste hospitalière ou aux mandats de prestations, il n'en demeure pas moins qu'à teneur des travaux préparatoires, l'hôpital dans lequel l'hospitalisation relevant de l'urgence a eu lieu doit, pour qu'un paiement de la part cantonale intervienne, figurer sur la liste du canton de son siège, ce qui implique indéniablement qu'il remplisse les conditions pour être considéré comme un fournisseur de prestations admis, soit notamment qu'un mandat de prestations ait été conclu. Ainsi, le paiement de la part cantonale pourra être exigé du canton de résidence du patient uniquement si la prestation réalisée en urgence relève d'un pôle d'activité admis à teneur de la liste hospitalière et du mandat de prestations.

En revanche, dès lors que les prestations relevant de l'urgence ne relèvent pas de missions médicales générales, mais d'une modalité dans l'exercice de celle-ci, rien ne permet de considérer, comme le prétend le département, que le mandat de prestations pourrait valablement restreindre la prise en charge de la part cantonale aux prestations relevant de l'urgence. En effet, si comme susmentionné la prise en compte des pôles d'activité indiqués dans les mandats de prestations est effectivement de nature à permettre de préciser la palette des prestations qu'un hôpital est médicalement apte à dispenser, la limitation aux cas relevant de l'urgence ne vise clairement pas cet objectif. Comme le relève la recourante, il est par ailleurs surprenant qu'il puisse être considéré qu'un hôpital serait apte à traiter médicalement un patient dans un cas relevant de l'urgence, mais non lors d'une intervention planifiée.

15) Compte tenu des éléments qui précèdent, il doit être retenu ce qui suit.

Il sera relevé préalablement que contrairement aux listes hospitalières, notamment, des autres cantons romands lesquelles énumèrent toutes plusieurs dizaines de pôles d'activité différents , la liste vaudoise ne contient que six missions médicales générales, à savoir la médecine interne, la chirurgie, l'obstétrique, la pédiatrie, la psychiatrie ainsi que la réadaptation et les soins palliatifs. Dans ces circonstances, la prise en compte des mandats de prestations conclus par le canton de Vaud apparaît encore plus importante pour définir précisément les pôles d'activité dans lesquels les établissements hospitaliers sont aptes à pratiquer.

Comme susmentionné, la clinique figure sur la liste vaudoise uniquement pour les missions médicales générales relevant de la médecine interne et de la chirurgie.

À teneur du mandat de prestations 2012-2014 liant la recourante au canton de Vaud, il n'est fait aucune mention quant au fait que les prestations pouvant être fournies par la clinique se limiteraient à celles relevant de l'urgence ou de la chirurgie robotique. Il doit dès lors être retenu que la recourante peut prétendre au paiement par l'intimé de la part cantonale pour toutes les hospitalisations survenues entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014 relevant, à teneur de la liste vaudoise, de la chirurgie et de la médecine interne, sans distinction des cas relevant ou non de l'urgence étant relevé que le mandat de prestations précise que la clinique dispose d'un service d'urgence ouvert au minimum entre 7h et 20h permettant ainsi de considérer que celle-ci est apte à prendre en charge les cas relevant de l'urgence , dans les limites des pôles d'activités listés en page 26 du mandat de prestations.

S'agissant du mandat de prestations 2015-2019 liant la clinique au canton de Vaud, il indique effectivement que les seules prestations admises sont celles relevant de la chirurgie robotique et des urgences. Toutefois, comme susmentionné, la limitation au cas relevant de l'urgence ne saurait être admise. Dans ces circonstances, la recourante pourra prétendre au paiement par l'intimé de la part cantonale pour les hospitalisations survenues entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2019 relevant de la chirurgie robotique, conformément à la restriction ressortant du mandat de prestations 2015-2019, ainsi que de la médecine interne, telle que prévue par la liste vaudoise, dans les limites des pôles d'activités listés en pages 17 et 18 dudit mandat, dès lors que la restriction aux cas urgents prévue dans celui-ci n'est pas admissible.

Les montants dont la recourante demande la prise en charge par l'intimé sont ceux listés dans son annexe à son courrier du 27 juin 2018, soit un total de CHF 770'152.19. Cette liste a été depuis lors plusieurs fois complétée par la recourante, en fonction des demandes émises par l'intimé. Toutefois, en l'état des pièces figurant au dossier, il n'est pas possible pour la chambre de céans de déterminer quelles sont les factures qui devraient être prises en charge par l'intimé en fonction des explications qui précèdent, s'agissant notamment de la nature des prestations médicales concernées pour chaque hospitalisation. Par ailleurs, à teneur des décisions litigieuses, le département n'a pas exposé de manière concrète les factures pour lesquelles il refusait, respectivement il acceptait de payer la part cantonale. Le dossier lui sera donc retourné pour qu'il se prononce, eu égard aux considérants qui précèdent, sur la prise en charge de chacune des factures figurant dans la liste figurant en annexe au courrier de la recourante du
27 juin 2018.

Pour le surplus, il sera relevé que le département bénéfice toutefois d'un intérêt à demander à la recourante des précisions s'agissant du caractère urgent ou planifié des hospitalisations, non pas pour refuser celles ne relevant pas d'un caractère urgent, mais bien pour établir si la situation concernée relève de l'art. 41 al. 1bis ou al. 3 LAMal.

Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis. Le dossier sera retourné à l'intimé pour qu'il procède au sens des considérants.

16) Vu l'issue du litige, un émolument - réduit de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure également réduite de CHF 800.- lui sera allouée, à la charge de l'État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 août 2019 par Fondation A______ contre les décisions du département de la sécurité, de l'emploi et de la santé des 26 et 28  juin 2019 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule les décisions du département de la sécurité, de l'emploi et de la santé des 26 et 28 juin 2019 ;

constate que Fondation A______ est habilitée à facturer à la charge de l'assurance obligatoire des soins (LAMal) et à recevoir de la part de l'État de Genève la part cantonale prévue à l'art. 49a al. 2 LAMal pour les prestations fournies au sein de la Clinique la Source entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014 à des patients résidant dans le canton de Genève pour les missions médicales suivantes : médecine interne et chirurgie, dans les limites des pôles d'activités visés par le contrat de prestations 2012-2014 qui la lie au canton de Vaud ;

constate que Fondation A______ est habilitée à facturer à la charge de l'assurance obligatoire des soins (LAMal) et à recevoir de la part de l'État de Genève la part cantonale prévue à l'art. 49a al. 2 LAMal pour les prestations fournies au sein de la Clinique la Source entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2019 à des patients résidant dans le canton de Genève pour les missions médicales suivantes : chirurgie robotique et médecine interne, dans les limites des pôles d'activités visés par le contrat de prestations 2015-2019 qui la lie au canton de Vaud ;

renvoie le dossier au département de la sécurité, de l'emploi et de la santé pour qu'il procède dans le sens des considérants ;

met à la charge de Fondation A______ un émolument de CHF 500.- ;

alloue à Fondation A______ une indemnité de procédure de CHF 800.-, à la charge de l'État de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Philippe Ducor, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de la sécurité, de l'emploi et de la santé.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, MM. Thélin et Verniory,
Mmes Payot Zen-Ruffinen et Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :