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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2212/2018

ATA/137/2020 du 11.02.2020 ( FPUBL ) , ADMIS

Recours TF déposé le 17.03.2020, rendu le 25.08.2020, REJETE, 8C_203/2020
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;POUVOIR D'APPRÉCIATION;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;PROPORTIONNALITÉ;VIOLATIONS DES DEVOIRS DE SERVICE;ENQUÊTE ADMINISTRATIVE;MOTIF;SANCTION ADMINISTRATIVE;RÉINTÉGRATION PROFESSIONNELLE
Normes : LPAC.16.al1; LPAC.27; RPAC.20; RPAC.21; RPAC.22; RPAC.26.al1
Résumé : Annulation d’une décision révoquant les rapports de service d’un fonctionnaire et ordre de réintégration, l’autorité intimée ayant mal établi les faits et abusé de son pouvoir d’appréciation en prononçant l’ultime sanction du catalogue prévu par la LPAC.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2212/2018-FPUBL ATA/137/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 février 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Claudio Fedele, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le _____ 1969, de nationalité ______, a été engagé au service de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) dès avril 1999, d'abord en qualité de juriste, puis à partir du mois de mars 2000 en qualité d'inspecteur du travail.

Il a été nommé fonctionnaire le 1er avril 2003.

2) M. A______ était spécialisé dans la santé et la sécurité au travail (ci-après : SST). Il est au bénéfice d'un diplôme de chargé de sécurité délivré par la commission fédérale en matière de sécurité et était responsable du secteur du commerce de détail au sein de l'OCIRT.

3) En 2007, il a été autorisé par le Conseil d'État à exercer une activité accessoire rémunérée en dehors de son temps de travail en qualité de co-auteur de ______».

Il a par ailleurs animé pour le compte de l'OCIRT plusieurs formations traitant de la thématique des risques psychosociaux. Il est l'auteur de plusieurs articles à ce sujet.

4) L'OCIRT comprend notamment un service d'inspection du travail (ci-après : IT).

Madame B______ a pris la direction du service de l'IT le 1er juin 2011 et en juin 2013, elle est devenue directrice générale de l'OCIRT, mais a continué à diriger l'IT, cumulant les deux fonctions.

Madame C______ a été engagée en qualité de directrice de l'IT le 1er avril 2015. Elle a quitté l'OCIRT au 31 décembre 2018.

Madame D______ a été engagée en qualité de juriste le 1er mars 2016 et a été nommée chef du secteur juridique dès le 1er mai 2017. Elle a quitté l'OCIRT courant 2019.

En 2016, l'IT comprenait deux domaines spécialisés : le SST, comprenant neuf inspecteurs dont M. A______, et le service « usages, mesures d'accompagnement » (ci-après : UMA), comprenant douze inspecteurs. Chaque semaine avait lieu un collège réunissant les inspecteurs SST et UMA auquel participait la directrice de l'IT et une fois par mois la directrice générale de l'OCIRT.

5) Les 13 septembre et 24 novembre 2016, M. A______ a été convoqué par Mme C______ à des « entretiens métiers » au cours desquels ont été abordés plusieurs aspects de son activité en présence de Mme B______. Ainsi, le 13 septembre 2016, a été abordé le dossier « E______», « F______ ». Il a été rappelé par la hiérarchie que l'entretien se voulait constructif et que les qualités professionnelles de M. A______ étaient reconnues mais qu'un changement de son comportement était attendu et qu'il devait respecter la stratégie de suivi d'un dossier décidée par le collège des inspecteurs ou la direction. Les deux dossiers abordés étaient transférés à un autre inspecteur, le second à la demande de M. A______. Le 24 novembre 2016, ont été abordés le rappel sur la discussion qui s'était tenue au collège SST concernant le dossier AA______ ainsi qu'un échange de courriels avec Mme D______.

M. A______ s'est déterminé sur ces entretiens par une note interne établie le 13 octobre 2016 et par des observations du 12 décembre 2016, adressées également à Mme B______.

6) Le 23 janvier 2017, M. A______ a été libéré de son obligation de travailler avec effet immédiat par Mme B______, ce qu'un arrêté du Conseil d'État a confirmé le 1er février 2017.

Il a été convoqué à un entretien de service le 8 février 2017.

7) Lors de l'entretien du 8 février 2017, divers manquements ont été reprochés à M. A______, pour lesquels il était envisagé le prononcé d'une sanction disciplinaire et l'ouverture d'une enquête administrative, la suspension provisoire des rapports de service pouvant entraîner la suppression de toute prestation à la charge de l'État.

Il lui était reproché d'avoir utilisé un certain ton, dans ses courriels adressés à ses « collègues féminines arrivées récemment dans le service, de façon vécue par celles-ci comme non respectueuse et particulièrement agressive ». Les collègues concernées étaient Mme D______ et Madame G______, secrétaire administrative et assistante de Mmes C______ et D______.

Il lui était aussi reproché, s'appuyant sur les mêmes courriels, de remettre en question la nécessité d'un cadrage juridique des procédures administratives menées par l'IT, respectivement l'organisation du service. Un comportement inadéquat à l'égard de sa hiérarchie (Mme C______) lui était reproché, par lequel il remettait ouvertement en question les compétences et l'intégrité de sa directrice.

Il lui était également reproché des comportements à l'égard de Madame  H______, anciennement employée de I______, devenue inspectrice du travail, susceptibles de constituer des actes de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle. À la suite de la libération de l'obligation de travailler de M. A______, d'autres faits avaient été portés à la connaissance de la hiérarchie, soit la transmission d'un document interne (mail du secrétariat d'État à l'économie, [ci-après : Seco], du 9 juin 2015) à Mme H______ alors qu'elle était encore responsable de la sécurité dans l'entreprise I______ ainsi que le non-respect de directives du Seco dans le cadre d'une procédure d'examen de plans auprès de l'entreprise J______.

M. A______ s'est expliqué en détail sur tous les reproches, contestant notamment toutes les accusations faites par Mme H______ qui, selon lui, convoitait son poste de travail dans le secteur du commerce de détail.

8) Par arrêt du 22 février 2017 (ATA/231/2017), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a déclaré irrecevable le recours interjeté par M. A______ contre l'arrêté de suspension du 1er février 2017.

Le recourant conservait son traitement pendant sa suspension, ce qui excluait une quelconque atteinte à ses intérêts économiques. Il alléguait d'une atteinte à sa réputation et à son avenir professionnel. Toutefois, de jurisprudence constante, une décision finale entièrement favorable au recourant permettrait de la réparer.

9) M. A______ a fait valoir ses observations le 14 mars 2017 auprès de son employeur, contestant point par point les manquements reprochés.

10) Par arrêté du Conseil d'État du 22 mars 2017, une enquête administrative a été ouverte. Elle a été menée par Monsieur K______, ancien magistrat de la Cour de justice.

Huit manquements étaient reprochés à M. A______. Un comportement susceptible de constituer des actes de harcèlement et d'agression sexuels à l'encontre de Mme H______ (1) ; des remarques à caractère homophobe à Mme H______ (2) ; un comportement inadéquat à l'égard de membres de la direction ou de collaboratrices d'entreprises auprès desquelles il était intervenu dans le cadre de sa fonction, dossiers « F______ » et « E______» (3) ; non-respect et refus de suivre les consignes données par sa hiérarchie, s'agissant du dossier « E______» (4) ; comportement inadéquat à l'égard de collègues de travail et une incapacité de le reconnaître envers Mme D______ et Mme G______, secrétaire (5) ; un comportement inadéquat à l'égard de sa hiérarchie, respectivement de Mme C______, consistant, notamment à outrepasser les consignes données par celle-ci et contester sa légitimité ; transmission à Mme H______ alors qu'elle travaillait encore au sein de l'entreprise I______ d'un document interne, à savoir un message électronique émanant du Seco, qui lui avait été adressé suite à sa participation à une journée de formation ouverte exclusivement aux membres des inspections cantonales du travail (7) ; le non-respect des directives du Seco concernant les postes de travail de l'entreprise J______ (8).

11) Dès juin 2017, Mme H______ a repris les dossiers du commerce de détail, auparavant gérés par M. A______.

12) Le 25 février 2018, l'enquêteur a rendu un rapport de cent vingt-trois pages, dont une synthèse et des observations finales sur sept pages.

Il avait entendu trente-deux témoins, constitué un dossier de deux classeurs de pièces et effectué un transport sur place le 29 juin 2017 dans le bureau de M. A______ à l'OCIRT.

Mme H______ avait été entendue le 16 mai 2017, hors la présence de M. A______, mais en présence des avocats de ce dernier, puis avait présenté un certificat médical lorsqu'elle avait été contactée pour une nouvelle audition et n'avait pas été réentendue.

Plusieurs manquements figurant dans la décision du 22 mars 2017 n'avaient pas été établis, notamment l'agression à caractère sexuel à l'encontre de Mme H______, les remarques à caractère sexuel concernant d'autres employés, une attitude autoritaire et irrespectueuse à l'égard de
Mme G______ ainsi qu'une violation du secret de fonction dans le dossier « F______ ».

Les manquements établis par l'enquêteur étaient les suivants :

- des faits relatifs à un grief de « drague lourde » et des propos à caractère homophobe dont avait fait l'objet Mme H______ ;

- la transmission à Mme H______, en juin ou juillet 2015, d'un mail du Seco du 9 juin 2015, constitutive d'une violation du secret de fonction ;

- une violation du secret de fonction dans le cadre des deux dossiers « F______ » et « E______», griefs survenus au cours de l'enquête ;

- des comportements professionnellement inadéquats à l'égard des membres de la direction ou des collaborateurs de l'entreprise « F______ » et de l'institut universitaire de formation des enseignants (ci-après : l'AA______) ainsi qu'à l'égard de la direction de l'OCIRT, notamment de sa supérieure hiérarchique directe, Mme C______, en particulier en contestant sa légitimité et en outrepassant ses consignes, notamment dans le dossier de l'AA______, de même en refusant de suivre des consignes données par sa hiérarchie dans le dossier « E______».

13) Le 17 avril 2018, M. A______ a transmis des observations au Conseil d'État, réitérant les explications déjà données lors de l'entretien de service et dans le cadre de l'enquête administrative.

Il relevait, sous la plume de son avocat, la place consacrée par l'enquêteur aux rares remarques négatives reçues depuis son engagement à l'OCIRT et aux recherches effectuées jusqu'en 2003 ainsi que l'omission de l'appréciation positive, voire même très bonne, donnée lors de sa dernière évaluation professionnelle le 28 octobre 2015, signée par Mmes C______ et B______, conforme aux précédentes, reçues depuis dix-neuf ans.

S'agissant de ses rapports avec Mme H______, il contestait avoir tenu des propos homophobes ou tout comportement déplacé. Il était fâcheux que l'enquêteur n'ait pas rejeté tous les griefs liés à ses déclarations. Aucune confrontation n'avait pu avoir lieu. S'il reconnaissait avoir pu tenir des propos à caractère grivois à certains de ses collègues lors de pauses ou en présence de Mme H______ lors de leurs contacts hors de la procédure de contrôle, une relation d'amitié et de confiance s'était développée parallèlement à celle purement professionnelle, comme elle le confirmait dans ses déclarations. Elle l'avait avisé de sa candidature à l'OCIRT début 2016 et demandé des informations utiles à ce sujet. Après le début de son engagement à l'OCIRT, alors qu'ils étaient collègues, leur relation était toujours bonne et ils allaient fréquemment boire le café ensemble, comme elle l'avait d'ailleurs déclaré.

Il reprenait ensuite point par point les reproches retenus par l'enquêteur. Depuis qu'il avait été gravement accusé et « traîné dans la boue », il n'hésitait plus à contester ouvertement les compétences de Mme C______. Il découlait des auditions que son avis était partagé par ses collègues inspecteurs du travail. Les conditions de travail s'étaient considérablement détériorées depuis l'arrivée de Mme C______ et ses collègues avaient formellement adressé à leur direction une liste de leurs préoccupations en matière de risques psychosociaux au sein même de l'OCIRT. C'était dans ce contexte que s'inscrivaient tous les faits reprochés. En outre, il était tenace et opiniâtre, compétent et expérimenté, ce qui avait manifestement dû constituer un défaut aux yeux de la direction de l'OCIRT.

14) Par arrêté du 30 mai 2018, le Conseil d'État a révoqué de ses fonctions M. A______ avec effet au 31 août 2018. Il était libéré de son obligation de travailler jusqu'à la fin des rapports de service. La décision était exécutoire nonobstant recours.

La décision reprenait les faits tels que retenus par l'enquêteur. Les remarques faites à l'égard de sa hiérarchie dans les observations du recourant étaient inadmissibles et démontraient clairement qu'il était incapable de se remettre en question. Il accusait de surcroît sa hiérarchie d'avoir un comportement déloyal pour justifier les violations commises. De telles accusations étaient graves et avaient définitivement ruiné toute confiance. Il avait commis de nombreuses violations de ses devoirs de service, dont certaines étaient extrêmement graves.

Malgré l'absence d'antécédents disciplinaires, les circonstances retenues justifiaient une révocation.

15) Le 29 juin 2018, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision de révocation, concluant à son annulation. Préalablement, le rapport d'audit effectué par l'OCIRT à la suite des plaintes, en début d'année 2017, de nombreux inspecteurs du travail, devait être versé à la procédure. Pour le surplus, l'audition de trois témoins était sollicitée.

Mme C______ occupait précédemment le poste de ______. En occupant immédiatement le poste de directrice du service de l'inspection du travail, elle avait dû faire la connaissance et se familiariser avec une matière juridique qu'elle n'avait jamais pratiquée auparavant et que les inspecteurs qu'elle était appelée à diriger maîtrisaient parfaitement, et ceci depuis de nombreuses années. Cette situation avait logiquement généré des difficultés entre elle et les inspecteurs déjà en place, difficultés qui s'étaient accentuées par la personnalité autoritaire de leur nouvelle directrice. Il s'agissait d'une femme de caractère qui n'hésitait pas à imposer son point de vue même lorsque les inspecteurs auxquels elle imposait son avis lui faisaient la démonstration juridique qu'elle avait tort. Consciente que sa méconnaissance du droit du travail minait son autorité, elle avait fait en sorte que l'OCIRT engage une nouvelle juriste spécialement rattachée à la direction en la personne de Mme D______. Cet engagement n'avait pas permis d'améliorer la situation. Au contraire, l'atmosphère s'était à ce point détériorée au début de l'année 2017, alors que le recourant était déjà suspendu, que les inspecteurs du travail avaient manifesté leur inquiétude en adressant à leur direction une liste de leurs préoccupations en matière de risques psychosociaux au sein même de l'OCIRT.

Tous les faits reprochés à l'égard de ses collègues ou de sa direction s'inscrivaient dans ce contexte de tension et de feu couvant entre la direction de l'OCIRT et les inspecteurs du travail.

Une grave accusation à son encontre était à l'origine de l'ouverture de l'enquête administrative. À mi-septembre 2016, un différend sur les dispositions légales à mentionner dans un courrier l'avait opposé à Mme D______. Ce désaccord avait fait l'objet d'un échange de correspondance électronique relativement tendu entre le 16 et le 20 septembre 2016. Mme D______ s'était plainte auprès de sa hiérarchie du ton avec lequel M. A______ lui avait écrit dans ce cadre. À l'occasion d'un café, elle en avait également parlé à Mme H______. Lors de cet entretien informel, celle-ci avait déclaré que le recourant avait tenté de l'agresser sexuellement dans les locaux de l'OCIRT alors qu'elle travaillait pour l'entreprise I______. Ce fait avait été rapporté par Mme D______ à Mme C______ qui en avait à son tour informé Mme B______. S'en était suivie une discrète enquête interne aux fins de requérir un maximum d'éléments sur M. A______, laquelle avait abouti le 23 janvier 2018 à ce qu'il soit libéré avec effet immédiat de son obligation de travailler.

Dans le cadre de l'enquête administrative, l'enquêteur avait procédé à l'audition de Mme H______ hors la présence du recourant. Valablement convoquée pour être entendue en présence de l'intéressé et alors qu'elle avait été vue dans les locaux de l'OCIRT à la date concernée, elle avait justifié son absence par la production d'un certificat médical que l'enquêteur avait qualifié de « laconique ». Dans son rapport, l'enquêteur avait écarté l'existence d'une tentative d'agression sexuelle, sans laquelle le recourant n'aurait jamais été suspendu et n'aurait jamais fait l'objet d'une enquête administrative. Ainsi, la grave accusation qui constituait le détonateur dudit dossier ne pouvait pas être retenue.

Le recourant contestait ensuite point par point tous les reproches qui lui étaient adressés. Les faits qui pouvaient finalement être reprochés se situaient « à des années lumières » de ceux dont il était initialement suspecté et qui avaient motivé la suspension. Ces faits n'étaient constitutifs d'aucune violation de la loi et des devoirs du fonctionnaire en particulier, mais ils s'inscrivaient dans un contexte de tensions professionnelles et psychosociales. À supposer que le principe du prononcé d'une sanction soit acquis, ce qu'il contestait, la sanction était tout à fait disproportionnée.

16) Le 12 septembre 2018, l'office du personnel de l'État (ci--après : OPE), pour le Conseil d'État, a déposé des observations, concluant au rejet du recours.

Bien que la révocation soit la sanction la plus grave qui puisse être prononcée à l'encontre d'un fonctionnaire, celle-ci était parfaitement proportionnée, eu égard aux nombreuses et graves violations des devoirs de service commises par le recourant.

17) Après que le Conseil d'État a conclu au rejet de la requête en restitution de l'effet suspensif et que M. A______ a répliqué, la présidence de la chambre administrative, par décision du 15 août 2018 (ATA/823/2018) a refusé de restituer l'effet suspensif au recours.

18) À la demande de la chambre administrative, le rapport d'audit organisationnel sur l'IT, réalisé par Monsieur L______, professeur à l'Université de Lausanne, a été versé à la procédure le 26 octobre 2018 et soustrait à la consultation des parties.

Le rapport d'audit était postérieur à la remise du rapport d'enquête administrative. Il retenait notamment que les changements organisationnels et la création de nouveaux secteurs administratif et juridique, avec à leur tête des responsables, avaient été effectués dans le but d'optimiser la gestion des équipes. Les collaborateurs estimaient que la création de postes de responsables pour des secteurs avec très peu d'effectif ne faisait pas sens et que l'organigramme actuel ne reflétait pas la réalité des collaborations internes. La collaboration entre les inspecteurs et les juristes était spécialement touchée, et un malaise relatif au nouveau style managérial et/ou prérogatives du secteur juridique était ressenti par plusieurs inspecteurs. Notamment, la lecture et la correction des courriers par les juristes étaient perçues comme des actes infantilisants et parfois même insultants.

19) Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 13 décembre 2018, le Conseil d'État a consenti à la transmission du rapport d'audit au recourant aux mêmes conditions de confidentialité que pour les autres collaborateurs de l'OCIRT.

Les représentants de l'intimé ont indiqué que Mme C______ quittait l'OCIRT le 31 décembre 2018. Elle avait présenté une incapacité partielle de travail avant la remise du rapport d'audit, aux alentours de mai 2018 environ. Des collaborateurs de l'OCIRT avaient fait appel au groupe de confiance compte tenu des tensions qui avaient eu lieu à l'OCIRT, au sein de l'IT. La collaboration avec M. A______ avait été très bonne jusqu'en 2016. Il avait attiré l'attention de sa hiérarchie sur les risques psychosociaux au sein même de l'OCIRT. Il n'était pas le seul. La décision litigieuse n'avait pas été faite en représailles par rapport à cette alerte.

M. A______ a précisé être en incapacité de travail depuis le 6 juillet 2018.

20) Des audiences d'enquêtes se sont tenues en mai 2019.

a. Monsieur M______, inspecteur du travail, a été entendu en qualité de témoin. Il avait indiqué à l'enquêteur qu'il trouvait que Mme C______ était incompétente à son poste et que cela créait des effets très négatifs et que Mme D______ semblait être l'instrument pour pouvoir peut-être agir contre certains collaborateurs, dont M. A______. Les collaborateurs de l'OCIRT avaient ignoré ce qui était advenu de M. A______. Un climat de peur au sein de l'OCIRT s'était développé, ressenti par beaucoup de ses collègues. L'atmosphère du service s'était détériorée. Cela n'était pas le cas tant que Mme B______ était directrice du service. Les inspecteurs étaient des personnes compétentes qui bénéficiaient d'une certaine autonomie, habitués à réfléchir. M. A______ avait été sacrifié pour l'exemple. Il n'avait jamais entendu dire au préalable que M. A______ aurait été incompétent. L'engagement de Mme C______ avait été une erreur. Lorsqu'elle était revenue à temps partiel, les inspecteurs n'avaient plus à traiter avec elle. Il n'avait jamais entendu un collègue ou une personne travaillant dans une entreprise contrôlée évoquer des actes de harcèlement sexuel ou des propos homophobes concernant M. A______. Mme H______ ne s'était jamais plainte auprès de lui de M. A______.

b. Madame N______, ______, précédemment employée à l'OCIRT ______, avait quitté l'OCIRT plusieurs mois auparavant. Elle ne s'y trouvait plus en juin 2018 lors de la présentation du rapport d'audit. Son incapacité de travail était « en relation » avec Mmes C______ et D______. À deux ou trois reprises, l'enquêteur avait reformulé certains de ses termes au motif qu'elle était encore employée au sein de l'OCIRT. Cela avait édulcoré certains de ses propos. Elle avait dit à l'enquêteur que Mmes C______ et D______ était un « duo diabolique ». Les collègues de M. A______ avaient appris un lundi matin sa suspension. Ils n'avaient pas obtenu beaucoup d'informations, ce qui les avait incités à faire des hypothèses. Cette situation avait créé un climat de peur très fort au sein du service dans les mois qui avaient suivi. Mme C______ n'avait pas les compétences métier pour son poste. Cela avait généré beaucoup de problèmes et de travail parfois inutile. Mme D______ était quelqu'un qui savait tout, qui imposait tout et qui écrasait. Avant l'arrivée de Mme D______, la collaboration entre les inspecteurs et les juristes était très bonne. Les compétences réciproques étaient mises en commun et les dossiers discutés. Mme D______ avait rapidement été accaparée par les demandes de Mme C______. Mme O______, collègue de Mme N______, avait été en incapacité de travail dès l'été 2016, n'était jamais revenue depuis et avait donné sa démission. Il était évident qu'il y avait un dysfonctionnement de la hiérarchie. Les collaborateurs, les inspecteurs et juristes n'étaient pas entendus par le « duo ». Elle connaissait Mme H______ ; celle-ci ne s'était jamais plainte auprès d'elle du comportement de M. A______. Au moment de la suspension du recourant, les collaborateurs n'avaient jamais imaginé un problème avec Mme H______. Elle n'avait jamais été l'objet de drague lourde de la part de M. A______, ni n'en avait constaté ni entendu parler.

c. Madame P______, médecin du travail, a été entendue en qualité de témoin, à la demande de l'autorité intimée. Mme H______ ayant préalablement manifesté par écrit son refus de délier la praticienne du secret médical, l'autorité intimée a renoncé à poser des questions au témoin.

d. Madame Q______, ______, a été entendue en qualité de témoin. Elle était surprise de devoir témoigner devant sa hiérarchie et souhaitait qu'il n'y ait aucune suite à ce qu'elle devait être amenée à dire. Lors de l'enquête administrative, elle avait eu le sentiment de n'être pas vraiment comprise, que ses propos étaient minimisés, par exemple sur l'intensité de la souffrance des collègues ou la perte de confiance des collègues. Elle travaillait à l'OCIRT depuis 1986. M. A______ avait à gérer des dossiers importants pour l'OCIRT. Mme D______ était quelqu'un qui avait tendance à s'imposer, faisait beaucoup de critiques sur la façon de travailler des inspecteurs ou sur les pratiques de ceux-ci vieilles de vingt ans. M. A______ était le seul inspecteur à avoir des notions juridiques. C'était peut-être pour cette raison qu'il avait eu davantage de conflits avec elle. Un fossé s'était créé entre inspecteurs et juristes alors qu'avant ils collaboraient. Les inspecteurs s'en étaient plaints, disant qu'ils étaient infantilisés, qu'on corrigeait leur travail alors que leurs tâches devaient être complémentaires. Mme O______ avait donné sa démission en précisant, le jour de son départ, qu'elle avait été « mobbée » par Mme C______ et qu'elle avait demandé une médiation mais ne l'avait pas obtenue.

e. Mme H______ a produit un certificat médical attestant de son incapacité de se présenter à la date de sa convocation pour être entendue en qualité de témoin.

M. A______ a dès lors renoncé à solliciter l'audition de Mme H______. Sans remettre en doute la réalité de l'accident neurologique dont elle avait été victime en septembre 2017, il relevait que l'incapacité de travail de celle-ci pendant toute l'année 2018 et jusqu'au printemps 2019 ne l'avait pas empêchée de déployer une activité politique très intense en France voisine au profit d'un parti politique. Elle était en tête du comité local dudit parti, responsable de tout le bassin annemassien. Elle avait organisé et surtout animé un grand nombre d'événements, de débats et de réunions politiques. Une dizaine de réunions était mentionnée et documentée. L'intéressée manifestement ne souhaitait pas être confrontée au recourant, lequel persistait à la considérer comme une amie et l'avait aidée à rejoindre l'OCIRT après son activité à I______.

21) Le 4 octobre 2019, dans ses écritures après enquêtes, le Conseil d'État a persisté dans ses conclusions. L'employeur était au courant que Mme H______ était active politiquement en France. Cette activité était, à sa connaissance, compatible avec son incapacité partielle de travail.

22) Les parties ont plaidé devant la chambre administrative le 5 novembre 2019, persistant dans leurs conclusions.

23) Le 15 novembre 2019, l'OPE s'est déterminé sur les pièces produites par le recourant en audience de plaidoiries. En particulier, la note d'honoraires de CHF ______ de son avocat ne concernait pas seulement la procédure de révocation, mais d'autres dossiers, notamment la plainte pénale déposée contre Mme B______.

24) Le 21 novembre 2019, le recourant a exposé que la note d'honoraires de son avocat avait été produite pour révéler l'ampleur de l'activité qui avait dû être déployée.

Tout au long de la procédure, M. A______ a produit de nombreux messages de soutien, provenant de plus de quinze collègues différents.

25) La cause a ensuite été gardée à juger.

26) Le détail des pièces figurant au dossier ainsi que le contenu des auditions faites par l'enquêteur et par la chambre de céans seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de révocation du recourant avec effet au 31 août 2018, prononcée le 30 mai 2018 par le Conseil d'État.

Le recourant fait valoir qu'il n'a pas commis de violations de ses devoirs de service et que, si certaines violations devaient être retenues à son encontre, la révocation constituerait une sanction disproportionnée.

3) Les rapports de service du recourant, en sa qualité de fonctionnaire de l'administration cantonale, sont soumis à la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05).

4) S'agissant des devoirs de service du fonctionnaire, celui-ci doit notamment respecter l'intérêt de l'État et s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 du règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 - RPAC - B 5 05.01).

Concernant leur attitude générale, les membres du personnel doivent, par leur attitude, entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes ; établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public ; justifier et renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (art. 21 RPAC).

Dans l'exécution de leur travail, ils doivent remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence, respecter leur horaire de travail, assumer personnellement leur travail et s'abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail, s'entraider et se suppléer notamment lors de maladies ou de congés, se tenir au courant des modifications et des perfectionnements nécessaires à l'exécution de leur travail (art. 22 RPAC).

Ils sont tenus de garder le secret envers quiconque sur les affaires de service de quelque nature qu'elles soient, dont ils ont eu connaissance. Ils ne doivent les utiliser en aucune façon (art. 26 al. 1 RPAC).

5) En vertu de l'art. 16 al. 1 LPAC, les fonctionnaires et les employés qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement soit par négligence, peuvent faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes :

Prononcé par le supérieur hiérarchique, en accord avec sa hiérarchie, d'un blâme (let. a) ; prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du département ou le chancelier d'État, d'entente avec l'office du personnel de l'État de la suspension d'augmentation du traitement pendant une durée déterminée ou de la réduction de traitement à l'intérieur de la classe (let. b) ; prononcées, à l'encontre d'un fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, par le Conseil d'État du retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans ou la révocation (let. c).

Le Conseil d'État doit ordonner l'ouverture d'une enquête administrative qu'il confie à une personne qui a les compétences requises dans les hypothèses visées à l'art. 16 al. 1 let. c LPAC, soit notamment pour le prononcé d'une révocation (art. 27 al. 2 LPAC).

6) Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu'elles ne sauraient être prononcées en l'absence de faute du fonctionnaire (Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7ème éd., Zurich 2016, n. 1515 ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, Bâle 2014, n. 2249). La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n'ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l'auteur (ATA/808/2015 du 11 août 2015 ; ATA/694/2015 du 30 juin 2015). La faute disciplinaire peut même être commise par méconnaissance d'une règle. Cette méconnaissance doit cependant être fautive (Gabriel BOINAY, op. cit., n. 55, p. 14).

Tout agissement, manquement ou omission, dès lors qu'il est incompatible avec le comportement que l'on est en droit d'attendre de celui qui occupe une fonction ou qui exerce une activité soumise au droit disciplinaire peut engendrer une sanction. La loi ne peut pas mentionner toutes les violations possibles des devoirs professionnels ou de fonction. Le législateur est contraint de recourir à des clauses générales susceptibles de saisir tous les agissements et les attitudes qui peuvent constituer des violations de ces devoirs (Gabriel BOINAY, op. cit., n. 50, p. 14). Dans la fonction publique, ces normes de comportement sont contenues non seulement dans les lois, mais encore dans les cahiers des charges, les règlements et circulaires internes, les ordres de service ou même les directives verbales. Bien que nécessairement imprécises, les prescriptions disciplinaires déterminantes doivent être suffisamment claires pour que chacun puisse régler sa conduite sur elles, et puisse être à même de prévoir, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences de nature à dériver d'un acte déterminé (Gabriel BOINAY, op. cit., n. 51, p. 14).

7) L'autorité qui inflige une sanction disciplinaire doit respecter le principe de la proportionnalité (arrêts du Tribunal fédéral 8C_292/2011 du 9 décembre 2011 consid. 6.2). Le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. À cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées pour le bon fonctionnement de la profession en cause et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressé (ATA/118/2016 du 9 février 2016 ; ATA/94/2013 du 19 février 2013). En particulier, elle doit tenir compte de l'intérêt du recourant à poursuivre l'exercice de son métier, mais elle doit aussi veiller à la protection de l'intérêt public (ATA/694/2015 du 30 juin 2015).

En matière de sanctions disciplinaires, l'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation ; le pouvoir d'examen de la chambre de céans se limite à l'excès ou à l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/118/2016 précité ; ATA/452/2013 du 30 juillet 2013 et les références citées).

8) a. La révocation disciplinaire, qui est la sanction la plus lourde prévue par la loi, implique une faute grave, soit une violation particulièrement grave d'un devoir de service (ATA/1287/2019 du 27 août 2019 et les références citées). Cette mesure revêt l'aspect d'une peine et a un certain caractère infamant vu sa nature. Elle s'impose surtout dans les cas où le comportement de l'agent démontre qu'il n'est plus digne de rester en fonction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_324/2017 du 22 février 2018 consid. 5.2.2 ; ATA/1476/2019 du 8 octobre 2019).

b. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, parmi les motifs propres à justifier une révocation disciplinaire, on peut mentionner, à titre d'exemple, la violation du secret de fonction dans un domaine sensible, l'abus des pouvoirs de la fonction, l'indication fausse des heures de travail ou des irrégularités dans le cadre de l'enregistrement du temps de travail, l'alcoolisme ou encore le vol (arrêt du Tribunal fédéral 8C_203/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.5 et les références citées).

c. La chambre de céans a notamment confirmé la révocation :
d'un huissier-chef ayant transmis des documents à des tiers non autorisés, omis de cadrer une subordonnée et adopté d'autres problèmes comportementaux (ATA/1287/2019 précité) ; d'un intervenant en protection de l'enfant ayant entretenu une relation intime avec la mère des enfants dont il était en charge (ATA/913/2019 du 21 mai 2019 confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 8C_448/2019 du 20 novembre 2019) ; d'un employé administratif au sein de la police ayant fait usage des outils informatiques mis à sa disposition pour son employeur pour satisfaire sa curiosité personnelle et transmettre des données confidentielles à des tiers (ATA/56/2019 du 22 janvier 2019, actuellement pendant devant le Tribunal fédéral) ; d'un fonctionnaire ayant dérobé de la nourriture dans les cuisines d'un établissement hospitalier (ATA/118/2016 du 9 février 2016) ; d'un policier ayant frappé un citoyen lors de son audition, alors que ce dernier était menotté et maîtrisé (ATA/446/2013 du 30 juillet 2013, confirmé par le Tribunal fédéral) ; d'un fonctionnaire ayant insulté, menacé et empoigné un collègue dans un cadre professionnel (ATA/531/2011 du 30 août 2011) ; d'un fonctionnaire ayant notamment entretenu des relations intimes avec des fonctionnaires du service (ATA/39/2010 du 26 janvier 2010, confirmé par le Tribunal fédéral) ; d'un fonctionnaire ayant fréquemment et régulièrement consulté des sites érotiques et pornographiques depuis son poste de travail, malgré une mise en garde préalable et nonobstant la qualité du travail accompli (ATA/618/2010 du 7 septembre 2010). Elle a également confirmé la révocation d'un enseignant qui avait ramené une prostituée à l'hôtel où logeaient ses élèves, lors d'un voyage de classe, organisé sur son lieu de travail et pendant ses heures de service une rencontre à caractère sexuel avec un jeune homme dont il n'avait pas vérifié l'âge réel et dont il ignorait l'activité, puis menacé ce dernier (ATA/605/2011 précité).

La chambre administrative a toutefois annulé la révocation et ordonné la réintégration, en l'absence de violation des devoirs de service d'un fonctionnaire, pour lequel l'autorité d'engagement n'a pas pu établir qu'il s'était rendu coupable de faux, seul fait à la base de la décision (ATA/911/2015 précité), ou dans le cas d'une fonctionnaire au motif que l'autorité avait renoncé à statuer sur le plan disciplinaire pendant plus d'une année, laissant l'intéressée dans l'incertitude sur sa situation, ce qui allait à l'encontre des principes du droit disciplinaire (ATA/1235/2018 du 20 novembre 2018).

9) En l'espèce, l'enquête administrative retient plusieurs violations des devoirs de service. La décision de révocation reprend de façon résumée les conclusions de l'enquête et retient des violations, dont certaines sont qualifiées d'extrêmement graves.

Il convient en premier lieu d'examiner le déroulement des faits ayant mené à l'ouverture de l'enquête administrative. En effet, toute la procédure ayant mené à la révocation du recourant a été initiée par des confidences faites par Mme H______, collègue du recourant, à une juriste, Mme D______, lors d'un café. Le recourant l'aurait agressée sexuellement le 2 octobre 2015, en la « plaquant » contre un mur de son bureau, lors de l'un de ses passages à l'OCIRT, alors qu'elle travaillait pour l'entreprise I______ et qu'elle était chargée d'amener des plans à signer. Mme H______ avait précisé qu'elle ne souhaitait pas qu'il en soit fait état à la direction. La juriste a alors rapporté les faits à sa supérieure, le 29 novembre 2016, laquelle a informé la directrice de l'OCIRT. Mme H______, ainsi que d'autres collaborateurs et des employés de I______, ont alors été entendus par la directrice et/ou la cheffe de service, hors la présence du recourant et hors de la présence du directeur du service des ressources humaines.

Le recourant a ensuite été convoqué à l'entretien de service du 8 février 2017, lors duquel l'accusation portée contre lui ainsi que d'autres faits qui apparaissaient comme constituant des violations de ses devoirs de service lui ont été communiqués.

Lors de l'enquête administrative, Mme H______ a été entendue, hors de la présence du recourant, et a réitéré ses accusations s'agissant de l'agression à caractère sexuel. Toutefois, comme l'a relevé l'enquête, il n'avait pas pu être établi si l'agression du 2 octobre 2015 avait vraiment eu lieu. Mme H______ avait gardé le silence au sujet de ces événements auprès de sa collègue de I______ alors qu'elle lui avait rapporté d'autres comportements inappropriés moins graves à son endroit et que, selon ses propres dires, elle n'en voulait pas à l'intéressé pour cette agression. Ainsi, Mme H______ a exposé à l'enquêteur qu'elle souhaitait reprendre le secteur du commerce de détail à l'OCIRT en trio avec un inspecteur du travail et le recourant. Elle a également sollicité le recourant, sur sa messagerie privée, pour des questions personnelles concernant une maladie professionnelle de sa compagne, avant et après l'agression dont elle affirme avoir été victime. Elle avait proposé le tutoiement au recourant et lui avait proposé de prendre au moins un café et un repas, après l'agression. En outre, s'agissant des lieux dans lesquels l'agression s'était déroulée aux dires de Mme H______, l'enquêteur n'a pas pu établir que l'ameublement de l'époque permettait physiquement le déroulement décrit par celle-ci.

En raison de ces circonstances, l'enquêteur a retenu que le doute devait profiter à l'accusé et a écarté le grief d'agression à caractère sexuel, alors que celui-ci fondait initialement toute la procédure d'enquête.

En revanche, s'agissant des autres accusations ou dénonciations émanant de la même personne, également faites à l'encontre du recourant, l'enquêteur a estimé qu'elles étaient établies. Ainsi, un comportement de « drague lourde » de même que des propos homophobes devaient être considérés comme établis car Mme H______ les avait rapportés à une collègue de I______,
Mme R______, dont la véracité du témoignage ne pouvait être mise en doute puisque les confidences de Mme H______ avaient été faites à l'époque où les faits s'étaient produits.

Cette conclusion, reprise par le Conseil d'État dans sa décision, ne peut être suivie, dans la mesure où ce qui doit être établi n'est pas tant ce qu'aurait dit Mme H______ à sa ou ses collègues, mais le comportement répréhensible du recourant. À cet égard, Mme R______, de même que toutes les autres personnes interrogées, ont indiqué n'avoir jamais personnellement assisté à des gestes ou des propos déplacés de la part du recourant à l'égard de Mme H______ ou de quelqu'un d'autre.

Le seul autre élément que l'on pourrait retenir comme ayant une connotation sexuelle dans le dossier est l'admission par le recourant lui-même, dans ses observations, qu'il faisait parfois des blagues grivoises, mais jamais dans un cadre professionnel. À cet égard, Mme S______, travaillant aillé au service IT depuis 2007, avait témoigné que six ans auparavant, et pendant quelques mois, le recourant faisait parfois des blagues à double sens lors des pauses café. Elle précisait encore que la patronne de l'établissement où ils se réunissaient entrait dans son jeu. En revanche, les près de trente autres témoignages ne contiennent aucun élément qui indiquerait que le recourant aurait commis les comportements qui lui sont reprochés, même sur question spécifique à ce sujet, ce que l'enquêteur a même souligné dans ses conclusions (p. 119, ch. 4).

Selon la jurisprudence, les blagues grivoises peuvent constituer du harcèlement sexuel (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb). Il ne ressort toutefois du dossier que quelques faits qui datent de plus de six ans et n'ont duré que quelques mois, et sans que personne ait indiqué avoir été gêné à l'époque. Il ne peut donc en être fait grief aujourd'hui au recourant.

C'est donc à tort que le Conseil d'État, se fondant sur le rapport d'enquête, a retenu des comportements qu'il qualifie de « harcèlement sexuel sur le lieu de travail » et de violation des devoirs de service pour les faits allégués par Mme H______.

10) Un autre comportement est reproché au recourant, fondé également sur une dénonciation faite par Mme H______, celui d'une transmission d'informations constitutive d'une violation du secret de fonction, sous la forme d'un courriel émanant du Seco.

L'enquêteur retient que cette transmission devait être considérée comme établie car Mme H______ avait dit à deux anciennes collègues, qui l'avaient répété dans leur témoignage, que le recourant lui avait transmis le document. L'une d'elle, Mme R______ aurait vu l'expéditeur du courriel comme étant le recourant, sur l'écran de l'ordinateur de Mme H______. De façon contradictoire, lors de son audition le 16 mai 2017, Mme H______ indique avoir reçu un courriel sur sa messagerie privée, qu'elle n'a pas pu retrouver et lors de l'entretien du 25 janvier 2017 avec Mme B______, elle a indiqué avoir reçu copie du document en main propre.

Dans les pièces du dossier, la copie du courriel du Seco litigieux est annexé à un courrier adressé par la direction de T______ (I______ Genève) au conseiller d'État en charge du département de tutelle de l'OCIRT. La direction y indique que les précisions données par le Seco dans ce courriel confirmaient les informations déjà fournies antérieurement s'agissant de la durée à prendre en compte pour déterminer une demi-journée. L'entreprise espérait donc que l'OCIRT allait se conformer à l'interprétation faite par le Seco, qui faisait autorité en la matière et qui était appliquée par tous les autres cantons.

Cette copie contient le nom des trente destinataires du courriel initial, dont deux inspecteurs de l'OCIRT. L'enquêteur a retenu que ce courriel était destiné aux inspecteurs cantonaux du travail ayant participé à une journée d'information du 7 mai 2015 consacrée aux pauses compensatoires. Il fait suite à un courriel de la veille et constitue un correctif des informations interprétatives déjà données par le Seco aux mêmes destinataires.

Le courriel du Seco qu'aurait transmis le recourant à Mme H______ qui affirme l'avoir transmis à sa direction, a été envoyé par Monsieur  U______ du Seco et a pour objet les pauses de compensation. Il indique que la question de la pause compensatoire ne se pose qu'à partir d'une demi-journée entière de travail, soit une durée de présence ininterrompue de quatre heures par jour. Le Seco n'avait pas l'intention de modifier la directive ni l'organisation des pauses compensatoires.

Outre le fait que Mme H______ a donné plusieurs versions quant à la forme qu'aurait prise la transmission du document par le recourant, elle n'a pas été interrogée sur le fait qu'elle avait transmis à son employeur d'alors le courriel sans caviarder la liste des destinataires, dont le recourant, mais en caviardant l'expéditeur, alors qu'elle allègue qu'il s'agit également du recourant. Son témoignage entre également en contradiction avec celui de sa collègue de I______ qui affirme avoir vu le courriel sur sa messagerie professionnelle, alors qu'elle-même a parlé de sa messagerie privée. Elle a également déclaré qu'elle était « embêtée de recevoir un courriel de cette nature, car je ne pensais pas qu'il s'agissait d'un document interne, qui plus est destiné à Mme B______ ». L'enquêteur n'a pas tenté de rendre cette déclaration plus compréhensible, le courriel n'étant de plus pas adressé à Mme B______.

Le recourant, quant à lui, a toujours nié avoir transmis le document en question et relève que Mme H______ est venue à plusieurs reprises dans les locaux de l'OCIRT et qu'elle aurait pu, à ces occasions, se procurer le document. En outre, l'entreprise I______ disposait d'établissements dans d'autres cantons, était membre de SwissRetail, association faitière du commerce de détail, laquelle aurait pu recevoir ledit document par ce biais. De plus, et surtout, il a exposé que, dans le cadre d'une procédure judiciaire en cours contre I______ s'agissant précisément de pauses compensatoires pour lesquelles l'OCIRT avait une interprétation divergente, il n'aurait jamais pris le risque de donner des arguments à son adverse partie.

Comme exposé ci-dessus, il n'existe aucun élément probant quant à la transmission par le recourant du courriel du Seco à Mme H______, alors que la preuve matérielle de la transmission, s'agissant d'un courriel, aurait pu aisément être apportée. En outre, le caractère confidentiel du document ne saurait être retenu sans autre examen, s'agissant d'une précision apportée par le Seco au sujet de l'une de ses directives qui sont régulièrement publiées. Cette question n'a même pas été examinée.

Il découle de ce qui précède qu'aucune violation du secret de fonction ne peut être retenue à l'encontre du recourant s'agissant du courriel du Seco que Mme H______ allègue avoir reçu du recourant.

11) Une autre violation du secret de fonction a été retenue concernant l'envoi de courriels par le recourant aux plaignantes, employées de la « E______».

Deux employées travaillant à l'institution V______, dépendant de la « E______» s'étaient plaintes auprès de l'OCIRT de leurs conditions psychosociales de travail. Le recourant, en charge de ce dossier, avait échangé une quinzaine de courriels, notamment avec l'une de ces employées, Madame W______ entre le 7 février et le 15 août 2016, au sujet de l'avancement du dossier. Dans un autre courrier du 11 février 2016, il avait informé l'autre employée, Madame AB______ du contenu d'un entretien qu'il venait d'avoir avec les dirigeants de la fondation.

L'enquêteur retient que le recourant a transmis à ces employées non seulement des informations relatives aux mesures prises par l'OCIRT, comme l'y autorisait la procédure de contrôle, contre l'avis de la direction de l'IT de l'époque, ce qui a été confirmé par un arrêt de la chambre administrative, (ATA/1473/2017 du 14 novembre 2017), mais également des « renseignements d'autre nature qu'il avait appris dans l'exercice de ses fonctions » (rapport d'enquête p. 109).

En revanche, ni l'enquêteur, ni le Conseil d'État ne spécifient quels renseignements, en outre couverts par le secret, auraient été transmis, se contentant de reprendre des extraits des courriels concernés, lesquels à leur lecture ne démontrent aucunement une violation du secret professionnel, l'échange de courriels avec une plaignante ou une employée d'un employeur contrôlé, ne constituant pas une violation du secret de fonction en soi.

12) La décision de révocation retient également un comportement inadéquat et une incapacité à le reconnaître, que le recourant aurait eu à l'égard de sa collègue, Mme D______, juriste.

L'enquêteur et le Conseil d'État ont retenu que, face à une divergence d'opinion entre le recourant et sa collègue juriste, celui-ci aurait employé des termes constitutifs d'une violation de l'art. 21 RPAC par l'utilisation de propos « inutilement blessants et irrespectueux » dans un courriel du 20 septembre 2016.

Le courriel incriminé a le contenu suivant : « Bonjour ______, Je n'ai aucun besoin d'explications ! Tu tiens une posture de donneuse de leçons dans un domaine que tu connais à peine ! Bienvenu et bon vent. Un jour ou l'autre le temps nous donnera raison pour nous avoir instruits. »

Ce courriel clôt un échange débuté le 14 septembre 2016, au sujet de la pertinence de deux références légales, citées par le recourant dans un courrier à adresser à un employeur (« E______»).

Le recourant avait indiqué auparavant qu'un débat à ce sujet avait déjà eu lieu, il y avait quelques années, à l'interne et également avec le Seco et que c'était sur ces bases qu'il avait établi sa pratique, consistant à citer les deux bases légales contestées. Il complétait ses explications dans un long courriel du 20 septembre 2016, indiquant notamment : « sache qu'il n'y a pas de mélange, là non plus » et terminant par : « je souhaitais bien clarifier ces différents points ».

Dans l'un des courriels du 16 septembre 2016, la juriste avait écrit que le recourant ne devait pas mélanger les dispositions de fond avec les dispositions procédurales. Ces termes étaient écrits en caractère gras puis illustrés par des exemples. Un courriel suivant contenait notamment les termes suivants : « A nouveau tu fais un mélange entre plusieurs notions, et en particulier ... » ainsi que : « Je n'ai malheureusement pas le temps actuellement de mener plus avant ce genre d'échange, ma mission consistant à vous expliquer l'état du droit et non à vous en convaincre. Si tu n'es pas d'accord avec mes explications, soit je peux tenter de te les réexpliquer oralement, soit il s'agira que tu en discutes avec ______ (ndr : Mme C______) pour qu'elle tranche in fine, d'autant plus s'il s'agit de rediscuter une voie juridique qui a été décidée ».

Le cahier des charges de Mme D______ ne prévoyait pas de pouvoir hiérarchique sur les inspecteurs, à cette époque, selon ses propres déclarations faites à l'enquêteur. Cette position d'égalité avec les inspecteurs posait, selon elle, quelques problèmes de confrontation. Cette fonction était un peu celle de « mal aimé », en raison du rôle de soutien des collaborateurs tout en devant les corriger sur le plan juridique. Avec le recourant, Mme D______ indique qu'il s'était, dans un dossier au moins, rangé à son avis, mais pas dans le dossier « E______». En cas de problèmes procéduraux, sa mission consistait à informer la direction pour voir s'il y avait un changement de pratique à adopter. Mme D______ a encore indiqué qu'elle n'avait pas le souvenir que le recourant ait tenu des propos agressifs à son égard.

Il découle de ce qui précède que l'organisation du travail alors en vigueur au sein de l'IT pouvait mettre en confrontation les avis juridiques des inspecteurs et des juristes. Cette confrontation s'était révélée relativement intense dans les échanges précités, le recourant, inspecteur du travail au bénéfice d'une expérience de dix-sept ans, ayant de surcroît une formation juridique, avait campé sur ses positions face à l'avis d'une juriste arrivée depuis six mois dans le service, qu'il estimait être dans son tort.

Le ton des courriels de la juriste dans ce contexte ainsi que l'utilisation des caractères gras et l'utilisation des termes : « à nouveau tu fais un mélange entre plusieurs notions » étaient susceptibles de toucher le recourant. Si le cahier des charges de la juriste prévoyait qu'elle remonte à la direction les divergences nécessitant éventuellement un changement de pratique de la part des inspecteurs, comme elle l'a exposé à l'enquêteur, il ne contenait pas celui de dévaloriser au préalable les connaissances de ceux-ci.

Il appert, dans ce contexte, que la réponse cinglante et irrespectueuse du recourant répond au ton des critiques faites par la juriste sur ses capacités juridiques.

Bien que n'excusant pas les termes utilisés, qui doivent être qualifiés d'irrespectueux, cet échange s'inscrit également dans une situation plus large de conflits non résolus préexistants dans le service entre les inspecteurs et la juriste, mis en évidence par Mme D______ elle-même.

En outre, ces faits avaient déjà été reprochés au recourant lors d'un entretien du 24 novembre 2016 convoqué par Mme C______, lors duquel elle lui avait demandé de modifier la façon avec laquelle il se « situait dans ce genre d'échanges », en abandonnant le rapport de force, en privilégiant l'échange des points de vue dans le cadre d'une discussion en bilatéral et en rédigeant autrement ses courriels. À cette occasion, il ne lui avait d'ailleurs pas été reproché d'avoir violé ses devoirs de fonction, mais une injonction lui avait été donnée. La gravité du comportement doit donc également être relativisée de ce fait.

13) Le Conseil d'État a encore retenu plusieurs manquements qui concernent plus spécifiquement l'exécution du travail du recourant dans certains de ses dossiers et qui sont qualifiés de comportements professionnellement inadéquats et regroupés dans un seul grief. Ces comportements ont été retenus à l'égard de collaboratrices de l'entreprise « F______ » et de l'AA______. Dans sa décision, le Conseil d'État examine ces comportements en même temps que ceux que le recourant aurait eus à l'égard de la direction de l'OCIRT, notamment à l'égard de Mme C______, en particulier en contestant sa légitimité et en outrepassant ses consignes, notamment dans le dossier AA______ et « E______» et dans le dossier « F______ » (décision de révocation p. 4).

C'est le lieu de relever que le Conseil d'État revient dans sa décision sur des faits qui n'ont pas été retenus par l'enquêteur comme étant constitutifs de violations de devoirs de service, telle qu'une façon jugée inadéquate d'interroger les cadres des entreprises contrôlées qui serait attestée par des plaintes, griefs qui n'avaient toutefois pas été confirmés par le témoignage des deux personnes concernées dans le dossier AA______ (rapport d'enquête p. 41). La décision revient également sur des faits remontant à 2009, dans un dossier qui n'est pas précisé, tout en exposant que, compte tenu de l'ancienneté des faits, il n'y avait pas lieu de retenir cet épisode à charge mais « cela montrait déjà que le ton et les écrits inappropriés, voire agressifs, reprochés à l'intéressé, n'étaient pas nouveaux » (décision de révocation p. 9, figurant dans le chapitre consacré aux manquements retenus).

a. S'agissant des faits retenus comme constituant une violation des devoirs de service, les premiers concernent le dossier AA______ dans lequel des divergences de vues, entre le recourant et sa hiérarchie, s'étaient déclarées au sujet du traitement des plaintes à caractère psychosocial. Il était reproché au recourant d'avoir résisté à la position de sa hiérarchie sur cette question et d'avoir dénigré sa supérieure directe, pour imposer son point de vue sur le sujet. Ce comportement avait eu lieu, le lendemain du collège des inspecteurs du 22 novembre 2016 lors duquel la stratégie pour traiter le dossier avait été établie, par l'envoi par le recourant d'un courriel à Mmes B______ et C______, avec copie à l'ensemble de ses collègues, dans lequel il indiquait que la solution préconisée, soit le renvoi de la plaignante, employée par l'AA______, devant la juridiction des prud'hommes pour faire valoir une cessation d'atteinte à sa sphère privée, ne pouvait être retenue, au vu des commentaires du Seco concernant l'art. 6 al. 1 loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce du 13 mars 1964 (LTr - RS 822.11) et de la doctrine en la matière.

Cette question a été reprise lors d'un entretien métier du 24 novembre 2016, lors duquel Mme C______ a rappelé que trois choses avaient été établies clairement lors du collège du 22 novembre 2016, s'agissant du dossier AA______ : une action en cessation de l'atteinte se requérait devant les juridictions civiles, l'instruction du dossier par l'OCIRT portait sur une analyse systémique et dans le cas où plusieurs instances étaient interpellées, soit un avocat, un syndicat et le préposé cantonal à la protection des données et à la transparence, l'OCIRT prenait d'autant plus de distance pour éviter des prises de positions contradictoires entre différents services de l'État. Finalement, la plaignante n'avait pas la qualité de partie, n'étant pas particulièrement concernée par l'instruction de portée systémique. Une réponse dans ce sens devait être faite à l'employée par rapport à sa demande de cessation de l'atteinte.

En réponse sur ce point, le recourant a envoyé un courriel le 12 décembre 2016 à Mme C______ et en copie à Mme B______, dans lequel il réitérait son avis concernant ce dossier, soit que la LTr donnait une mission de protection de l'intégrité personnelle des travailleurs à l'OCIRT, ce qui avait été confirmé par la jurisprudence. Il n'y avait pas de choix d'après la loi, et si des instructions différentes devaient être données, il souhaitait qu'elles le soient par écrit, sa responsabilité personnelle pouvant être engagée. Il indiquait également éprouver quelques inquiétudes quant à l'autonomie liée à la fonction d'inspecteur du travail qui se trouvait menacée et il souhaitait « tirer sur la sonnette d'alarme » s'agissant également de l'oubli de tenir compte des leçons tirées de l'expérience en faveur « d'une réduction de toute intervention à l'avis juridique ».

De ces faits, l'enquêteur a retenu que la résistance du recourant à la position de la direction de l'OCIRT sur cette question, par ailleurs en dénigrant sa supérieure directe, pour imposer son point de vue sur le sujet, contrevenait à l'obligation d'avoir un comportement de loyauté, digne et correct tel que l'on était en droit d'attendre d'un fonctionnaire, qui plus est cadre intermédiaire à l'égard de sa hiérarchie (rapport d'enquête p. 100).

Le Conseil d'État reprend cette qualification en retenant que le recourant avait contesté la légitimité de sa supérieure hiérarchique directe et outrepassé les consignes dans ce dossier (décision de révocation p. 4 à 6).

Il appert qu'aucune pièce, ni autre élément figurant au dossier ne permet de retenir que le recourant a effectivement agi en contradiction avec des directives reçues de sa hiérarchie dans le dossier AA______, après la mise au point faite lors de l'entretien du 24 novembre 2016, ni même avant. Il ne saurait non plus lui être reproché de ne pas partager l'avis de sa hiérarchie sur la portée d'une disposition légale.

En revanche, il peut lui être reproché de ne pas avoir réservé le fruit de sa réflexion à sa seule hiérarchie, après le collège du 22 novembre 2016 et de l'avoir envoyé à ses collègues par courriel en faisant état de sa divergence d'opinion avec sa hiérarchie directe et la mettant en cause par ce faire. Par cette communication, le recourant a commis une violation à son devoir de loyauté, mais celle-ci ne peut être qualifiée de grave étant donné le contexte plus large qui sera examiné
ci-dessous.

b. D'autres faits retenus dans la décision de révocation concernent le dossier « E______» dans lequel il a été reproché au recourant d'avoir exigé de l'employeur en décembre 2015 de se soumettre à une expertise externe. Toutefois, aucune pièce ne figure dans le dossier à l'égard de ces faits, notamment aucune intervention de la hiérarchie qui permettrait de retenir qu'ils doivent être retenus comme contraires à des directives expresses données avant septembre 2016 (p. 101 § 2 du rapport d'enquête). Ces faits ne sauraient donc être considérés comme établis. En outre, Mme B______ a déclaré devant la chambre de céans que le comportement professionnel et personnel du recourant ne prêtait pas flanc à la critique jusqu'en 2016, la collaboration étant d'ailleurs déclarée « très bonne ».

II est également retenu que, durant les vacances de Mme C______, alors qu'elle avait indiqué dans un courriel du 20 juillet 2016 au recourant qu'une séance serait fixée à son retour concernant la suite à envisager dans ce dossier, le recourant avait envoyé une lettre de menace pénale à l'employeur, le 11 août 2016, qui n'était pas justifiée par l'urgence et sans l'assentiment de la directrice générale. Toutefois, Mme B______ ayant croisé fortuitement le recourant dans les locaux qui l'avait informée du projet d'envoi, avait retenu le courrier.

Il appert que cette lettre a été cosignée par un autre inspecteur du travail, lequel avait effectué une visite commune dans les locaux de la Fondation. Celui-ci a déclaré avoir relu la lettre, corrigé certains passages, puis l'avoir signée sans avoir le sentiment que cela allait à l'encontre de discussions auxquelles il avait assisté ou de directives de la direction dont il aurait eu connaissance, précisant toutefois qu'en raison de problèmes de santé il n'avait pas assisté à tous les collèges d'inspecteur (audition de Monsieur X______).

La lettre incriminée ne figure pas au dossier et le recourant indique qu'il avait estimé son envoi nécessaire en raison d'un courrier reçu de l'avocat de la Fondation et des appels téléphoniques des employés se plaignant de l'inaction de l'OCIRT, ce qui constituait, selon lui, des éléments nouveaux qui motivaient de ne pas attendre le retour de Mme C______ pour agir dans ce dossier.

Sur cette base, la décision de révocation retient que le recourant avait caché à son collègue les directives reçues pour lui faire avaliser et cosigner le courrier incriminé et qu'il n'y avait aucune urgence qui exigeait son envoi à cette date. Elle retient également que le recourant avait volontairement renoncé à solliciter l'accord de Mme B______, adoptant un comportement déloyal, indigne et incorrect.

Cette qualification prête au recourant des intentions qui ne ressortent pas des faits établis. En effet, l'existence d'éléments nouveaux en août 2016, tels qu'une lettre de l'avocat de l'employeur et des appels téléphoniques de plaignants, n'est contestée par personne. Que sur cette base, le recourant ait fait le choix d'agir, en écrivant un courrier de menace pénale à l'employeur, cosigné par l'autre inspecteur ayant participé au dossier, et qu'il ait de surcroît spontanément averti Mme B______ de cet envoi, sont des faits incompatibles avec celui retenu d'avoir « profité de l'absence » de Mme C______ pour envoyer une « lettre contrevenant aux directives » avec la volonté de vouloir « court-circuiter » la direction. Il est à noter que le dossier ne lui avait pas été retiré par sa hiérarchie et que l'envoi de courriers par un inspecteur, sans l'aval express de sa hiérarchie, ne constitue pas un acte exceptionnel. En outre, il faut relever que le courriel de Mme C______ qui constituerait les directives que le recourant aurait outrepassées n'a pas été adressé à M. X______, lequel était pourtant aussi intervenu dans le dossier.

Au vu de ces circonstances, la réaction du recourant pourrait tout au plus constituer une erreur d'appréciation, mais ne saurait être interprétée comme une violation de ses devoirs de service, à tout le moins dans la mesure retenue par le Conseil d'État dans sa décision lequel retient également que ces faits démontraient « l'intention » du recourant « à faire comme il l'avait jusqu'alors fait, ce qui revenait à refuser de se soumettre à l'avenir aux directives formulées par sa hiérarchie, s'il estimait que celle-ci faisait fausse route » (décision de révocation p. 7). Cette dernière affirmation relève également d'un procès d'intention.

c. La décision de révocation retient encore comme constitutif de violation de devoirs de fonction, un courrier du recourant du 10 mars 2016 adressé à l'entreprise « F______ » ainsi que la manière dont un interrogatoire a été mené dans l'entreprise, à la suite de la plainte d'une des employés en arrêt maladie.

Le recourant a déclaré, s'agissant de ce dossier, qu'il avait procédé à un entretien dans une salle de pause, au sous-sol d'une boutique, ne comportant pas de bureau, comme cela avait été le cas dans de nombreux autres dossiers. Il n'avait pas voulu procéder à la fermeture de la boutique pour ne pas créer un manque à gagner pour l'employeur. Mme Y______ avait pleuré lorsqu'il avait fait lecture des extraits pertinents de la plainte de l'employée. Lorsqu'il avait exposé les différentes possibilités et étapes imposées par la LTr et notamment la possibilité d'une dénonciation pénale, Mme Y______ avait paniqué. L'entretien avait permis de mettre en évidence que Mme Y______ avait engagé l'une de ses amies pour reprendre le poste de la plaignante après que, suite aux pressions subies, elle fut en arrêt maladie.

Le fait que la responsable se soit sentie sous pression, humiliée et qu'elle ait même pleuré, ne permet pas en soi de retenir que le comportement de l'inspecteur ait été inadéquat. Ainsi, la conclusion de l'enquêteur, reprise par le Conseil d'État dans sa décision, apparaît comme infondée, notamment parce qu'elle s'appuie sur l'appréciation suivante faite par l'enquêteur : « l'enquête n'a pas révélé que Mme Y______ était une personne particulièrement sensible et/ou émotive, ce qui paraîtrait au demeurant peu compatible avec les responsabilités qu'elle assume au sein de l'entreprise (...) ». Outre que l'enquête n'a pas porté sur la sensibilité de Mme Y______, le fait qu'une employée ait porté plainte contre elle pour harcèlement auprès de l'OCIRT pouvait, à juste titre, suffire à la déstabiliser et à provoquer les réactions constatées. En outre, lors de son audition, elle a surtout relevé avoir été touchée par le ton « répétitif et martelant » utilisé. La décision de révocation retient à cet égard que le ton employé s'apparentait « à un interrogatoire de nature policière ».

S'agissant du courrier du 10 mars 2016, il contient l'affirmation que le cas de la plaignante était révélateur du « mauvais fonctionnement du dispositif en matière des risques de l'entreprise » et qu'une « nouvelle exposition de l'employée aux conditions de travail aurait conduit à des nouvelles atteintes à la santé si elles demeuraient inchangées ».

L'enquêteur juge ces termes « inappropriés » et « contenant un jugement de valeur prématuré au stade auquel se trouvait l'avancement du dossier », contrevenant ainsi à l'impartialité dont devait faire preuve un inspecteur du travail ainsi qu'au tact que devait avoir tout fonctionnaire dans ses contacts avec le public.

Il s'agit d'une question d'appréciation et force est de constater qu'aucun des termes, ni l'ensemble ne permet de retenir un comportement qui peut être qualifié d'inapproprié.

La conclusion retenue de violation des devoirs de fonction se fonde également sur l'intervention de Mme Z______, médecin et inspectrice du travail, lors d'un collège d'inspecteurs, lors duquel elle avait remis en cause la façon d'intervenir dans le dossier du recourant et notamment le fait de confronter l'employée mise en cause avec le contenu de la plainte. Cette façon de faire empêchait de protéger les deux employées. Elle avait ensuite fait part à Mme B______ du fait que d'autres inspecteurs étaient également de cet avis. Elle estimait sur cette base que le rôle de l'OCIRT dans les cas de plainte de harcèlement nécessitait une clarification de la part de la direction.

Il appert donc que les interventions du recourant dans le dossier, où comme l'exprime le Conseil d'État, « la manière d'aborder un dossier », qui ont été examinées par la hiérarchie, suite à l'intervention du conseil de l'employeur demandant la récusation de l'inspecteur et qui lui ont été reprochés lors de l'entretien métier du 13 septembre 2016, ne contrevenaient pas à des directives, lesquelles étaient inexistantes en la matière, comme l'a déploré Mme Z______.

Même si la méthode de confrontation préconisée par le recourant ne fait pas l'unanimité au sein de l'IT, il n'est toutefois pas possible de retenir une violation de ses devoirs de services, en l'absence d'éléments objectivement inappropriés ou d'une violation d'instructions données par sa hiérarchie.

d. Finalement, la décision retient que les observations faites par le recourant le 13 octobre 2016 au sujet de l'entretien du 13 septembre 2016, dans lesquelles il expose son point de vue et la stratégie qu'il estimait devoir être adoptée par l'OCIRT en raison des constatations qu'il avait faites sur le terrain, constituent un refus de se soumettre à l'avenir aux directives formulées par sa hiérarchie. Sur cette base, il est retenu un manquement intentionnel à la loyauté que l'on est en droit d'attendre d'un fonctionnaire, cadre intermédiaire à l'égard de sa hiérarchie et un « non-respect des instructions données ». Cette conclusion figurait déjà dans le compte-rendu de l'entretien de service du 8 février 2017 (p. 4 et 5).

Or, ce qui est reproché au recourant ce n'est en réalité pas d'avoir refusé d'appliquer les directives de la hiérarchie, mais d'avoir exprimé des doutes quant à leur pertinence. Le reproche consiste à faire un procès d'intention au recourant, ce qui ne permet pas de retenir un manquement, d'autant plus s'il est qualifié de « non-respect des instructions données ».

14) La décision de révocation retient que le recourant n'a pas rempli ses devoirs de fonction consciencieusement et avec diligence, au sens de l'art. 22 RPAC, en ne respectant pas les directives du Seco relatives aux postes de travail de l'entreprise J______.

En violation de la procédure, le recourant avait subordonné la délivrance d'un préavis favorable de l'OCIRT aux plans d'aménagement des locaux d'un magasin J______, en date du 2 novembre 2016, à l'octroi d'une « pause lumière » compensatoire, laquelle devait constituer une ultime mesure et relevait de la procédure d'exécution.

S'agissant de ce grief, le recourant a exposé dans ses observations, avoir agi par souci d'égalité de traitement avec la procédure menée contre l'entreprise I______ qui s'était terminée par un arrêt du Tribunal fédéral du 13 juin 2017, donnant raison à son argumentation.

À la lecture de la directive du Seco en la matière (Commentaire de l'ordonnance 3 relative à la loi sur le travail, Chapitre 2 : Exigences particulières en matière de protection de la santé, Section 2 : Éclairage, climat des locaux, bruits et vibrations, Art. 15 Éclairage, p. 315-9), il appert prima facie que l'exigence des « pauses lumières » constitue effectivement une mesure qui intervient lorsque d'autres mesures, constructives ou organisationnelles, n'ont pas pu être appliquées et, qu'en conséquence, la condition fixée à la délivrance du préavis n'apparaît pas conforme au droit et pourrait constituer une faute dans l'exécution de son travail.

15) En conclusion, seuls deux manquements peuvent être retenus à l'encontre du recourant. Une violation de son devoir de loyauté par la transmission à ses collègues de son avis qui différait de celui de sa hiérarchie s'agissant de la suite à donner à certaines plaintes ainsi qu'une mauvaise application d'une directive du Seco, dans la condition fixée à la délivrance d'un préavis.

Aucun de ces deux manquements ne saurait être qualifié de particulièrement ou extrêmement grave, compte tenu également de ce qui suit.

16) S'agissant du contexte général dans lequel l'examen du comportement du recourant ayant mené à sa révocation a été fait, il convient de retenir de la situation du service IT, telle qu'elle ressort des conclusions du rapport final du Prof. L______, et telle qu'elle a été reprise en résumé dans la presse, que la réorganisation du service, accompagnée de la création de nouveaux secteurs et échelons hiérarchiques, était pointée du doigt et certaines nominations suscitaient interrogations et rumeurs à l'interne. Les décisions prises par la hiérarchie étaient souvent perçues comme illégitimes. Le rapport pointe des problèmes d'organisation, de stratégie et de communication, une judiciarisation des tâches, une augmentation des charges administratives au détriment parfois de la qualité des prestations ainsi qu'une fatigue des équipes qui se manifestaient par de nombreux congés maladie et un climat tendu entre les différents secteurs de l'inspectorat, juridique et administratif, peu propice à une collaboration. Il était fait état d'une ambiance de méfiance, source de démotivation, de peur et de perte de confiance à l'égard de la direction alors même que les collaborateurs avaient une haute estime de leur travail et des valeurs liées au service public.

Bien que réalisés après le départ du recourant, mais portant sur l'organisation en place depuis début 2016, les constats faits dans cet audit sont entièrement confirmés par les auditions faites par la chambre de céans et dépeignent une situation génératrice de conflits. Cette dynamique et cette absence de collaboration saine ont été particulièrement aiguës s'agissant du travail du recourant, inspecteur du travail avec une longue expérience du métier, mais ayant également une formation juridique. Son expérience avait pourtant été valorisée jusque-là. Ainsi, dans son dernier entretien d'évaluation du 28 octobre 2015, au demeurant excellent en tous points, sa hiérarchie a souligné qu'il était un inspecteur dont l'expérience et la connaissance « historique » des dossiers et des approches étaient précieuses, y compris pour sa hiérarchie.

L'enquêteur avait déjà retenu que les changements au sein de l'OCIRT, dès le milieu de l'année 2015, avaient abouti à un malaise ressenti par certains. Des inspecteurs avaient évoqué l'existence de risques psychosociaux au sein de leur service lors d'un collège de mai 2017 et établi un document sur la question qu'ils avaient adressé à la direction de l'OCIRT (rapport d'enquête p. 121).

17) Au vu de ce qui précède, force est de constater que, même sans tenir compte du contexte institutionnel dans lequel se sont déroulés les faits, lequel était inconnu de l'enquêteur, la sanction prononcée par le Conseil d'État s'avère être sans commune mesure avec les fautes qui peuvent être retenues à l'encontre du recourant, étant rappelé que des faits constitutifs d'une agression sexuelle, lesquels n'ont pas été établis, avaient donné lieu à l'ouverture de la procédure.

De plus, il faut tenir compte du fait que le dossier administratif du recourant ne comporte aucune autre sanction formelle et que sa dernière évaluation professionnelle, réalisée le 28 octobre 2015, est excellente. La directrice de l'OCIRT a en outre confirmé que la collaboration avec le recourant avait été bonne jusqu'en 2016.

Il appert ainsi que la révocation du recourant n'est pas fondée, l'autorité intimée ayant mal établi les faits et abusé de son pouvoir d'appréciation en prononçant l'ultime sanction du catalogue prévu par la LPAC à l'encontre d'un fonctionnaire.

18) L'annulation de la décision de révocation a pour conséquence la réintégration obligatoire du fonctionnaire.

En effet, sous l'empire des anciennes dispositions de la LPAC, en vigueur jusqu'au 19 décembre 2015 (ci-après : aLPAC), si une révocation était jugée contraire au droit, en raison d'une absence de violation des devoirs de service, la réintégration était imposée à l'employeur, même si la relation d'emploi avait pris fin. En revanche, lorsque la révocation était jugée disproportionnée, la réintégration ne pouvait être que proposée (art. 30 al. 3 cum 31 aLPAC ; ATA/911/2015 du 8 septembre 2015 ; François BELLANGER, Le contentieux des sanctions et des licenciements en droit genevois de la fonction publique, in : Thierry TANQUEREL/François BELLANGER, Les réformes de la fonction publique, 2012, p. 226).

Depuis lors, l'art. 30 al. 3 aLPAC qui prévoyait ce mécanisme a été abrogé avec notamment pour conséquence que la réintégration peut être ordonnée également lorsqu'elle s'avère disproportionnée. L'un des buts de la nouvelle LPAC était de rendre obligatoire la réintégration, non seulement en cas de révocation prononcée en l'absence de violation des devoirs de service ou de fonction, mais également lorsque la révocation s'avérait contraire au principe de proportionnalité, soit dans les cas où les manquements qui pouvaient être retenus à l'encontre du fonctionnaire ne justifiaient pas une sanction aussi sévère (PL 7526-F, p. 18, 19 et 20 ; ATA/287/2018 du 27 mars 2018 consid. 7b).

Les considérant qui précèdent conduisent à l'admission du recours.

La décision du Conseil d'État du 30 mai 2018 sera donc annulée. Cette annulation a pour conséquence la réintégration du recourant dans sa fonction d'inspecteur du travail ou, à défaut dans un autre poste.

19) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA), et une indemnité de procédure de CHF 3'000.-, tenant compte de l'importance de l'activité nécessaire déployée par le mandataire, sera allouée au recourant, à la charge de l'État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 juin 2018 par Monsieur A______ contre la décision du Conseil d'État du 30 mai 2018 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision du Conseil d'État du 30 mai 2018 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Monsieur A______ une indemnité de procédure de CHF 3'000.-, à la charge de l'État de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

 

communique le présent arrêt à Me Claudio Fedele, avocat du recourant ainsi qu'au Conseil d'État, soit pour lui l'office du personnel de l'État.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, MM. Thélin et Verniory, Mmes Payot
Zen-Ruffinen et Cuendet, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :