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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3418/2019

ATA/123/2020 du 04.02.2020 ( CPOPUL ) , REJETE

Descripteurs : CAPACITÉ MATRIMONIALE;CONCLUSION DU MARIAGE;DONNÉES PERSONNELLES;DROIT AU MARIAGE;IDENTITÉ;INTENTION DE SE MARIER;MARIAGE;PAPIER DE LÉGITIMATION;RESSORTISSANT ÉTRANGER
Normes : CC.98.al4; CC.99; CEDH.12; Cst.14; OEC.5.al1.letb; OEC.5.al1.letg; OEC.16.al1; OEC.16.al5; OEC.64.al1; OEC.64.al2; OEC.66.al1; OEC.66.al2; OEC.66.al3
Résumé : Lors de la procédure préparatoire de mariage, l’office de l’état civil examine si la demande a été déposée régulièrement, si l’identité des fiancés est établie et si les conditions du mariage sont remplies. Il appartient en principe aux fiancés d’entreprendre les démarches requises en vue de se procurer les documents utiles. Ils ont l’obligation de les produire. À la clôture de la procédure préparatoire, l’officier de l’état civil constate le résultat de celle-ci. Si les conditions ne sont pas remplies ou que des doutes importants subsistent, il refuse de célébrer le mariage.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3418/2019-CPOPUL ATA/123/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 février 2020

en section

 

dans la cause

 

Madame A______
et
Monsieur B______
représentés par Me Pierre-Bernard Petitat, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTÉ



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1992 à C______ en Côte d'Ivoire, est, selon le registre de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), entrée en Suisse le 24 avril 2005 et est détentrice d'une autorisation d'établissement. Monsieur B______ est, d'après le système d'information central sur la migration (ci-après : SYMIC) du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), entré en Suisse le 2 mai 2007 et a déposé des demandes d'asile qui ont été rejetées par le SEM au cours de l'instruction desquelles il a indiqué être né le ______ 1980, 1987 voire 1990 à D______ en Côte d'Ivoire.

2) Le 30 mars 2012, Mme A______ et M. B______ (ci-après : les fiancés) ont déposé une demande en vue de mariage auprès de l'arrondissement de l'état civil de Genève (ci-après : état civil de Genève).

3) Le ______ 2012, Mme A______ a donné naissance à Genève à E______ A______, devenue B______ à la suite de la déclaration de sa reconnaissance, le 25 juillet 2012, par-devant l'officier de l'état civil de Genève par M. B______.

L'intéressé avait, pour prouver son identité, fourni un extrait de naissance et un certificat de célibat établis le 13 juin 2012 et une copie de son passeport ivoirien.

4) Le 5 juillet 2012, l'état civil de Genève a imparti aux fiancés un délai de soixante jours pour présenter un document attestant la légalité du séjour de M. B______.

5) Le 1er novembre 2012, l'état civil de Genève a déclaré irrecevable la demande d'ouverture d'une procédure préparatoire de mariage des intéressés et a classé sans suite leur dossier.

M. B______ n'avait pas, durant le délai imparti de soixante jours, prouvé la légalité de son séjour en Suisse.

6) Le 17 juillet 2015, l'OCPM a délivré à M. B______ une attestation l'autorisant à rester en Suisse le temps de la procédure de préparation de son mariage avec Mme A______. Il en a fait de même les16 février et 21 juillet 2017.

7) Le 21 février 2017, les fiancés ont déposé auprès de l'état civil de Genève une autre demande en vue de mariage.

8) Le 4 décembre 2017, l'état civil de Genève a transmis à la représentation suisse à Abidjan (ci-après : l'ambassade) pour authentification les documents des fiancés.

9) a. Par procès-verbal de vérification du 18 janvier 2018, l'avocat-conseil de l'ambassade a confirmé que l'extrait d'acte de naissance de Mme A______ et son certificat de célibat établis sur la base d'un jugement supplétif considéré comme faux étaient également des faux.

L'intéressée n'avait pas d'existence légale en Côte d'Ivoire et avait présenté des documents faux pour justifier une identité qui n'était pas la sienne. Les documents de Mme A______ ne répondaient pas aux conditions de fond et de forme prévues par la loi ivoirienne et n'étaient pas authentiques.

L'avocat-conseil recommandait de demander à l'intéressée de requérir un jugement d'annulation de l'acte de naissance et de lui faire parvenir un certificat de scolarité primaire en vue de déterminer quel acte de naissance avait servi à son inscription en classe du cursus scolaire primaire (ci-après : CP1). De nouveaux documents envoyés le 16 octobre 2018 ne pouvaient pas être authentifiés, l'acte de naissance considéré comme faux n'ayant pas été annulé.

b. Le 14 décembre 2018, l'état civil de Genève a demandé à Mme A______ de solliciter le Tribunal de Première Instance d'Abidjan en vue de l'annulation de son acte de naissance précité, de lui faire parvenir la copie du jugement d'annulation ou une copie de l'extrait de l'acte de naissance portant la mention annulée et un certificat de scolarité primaire.

10) Le 2 mai 2018, l'ambassade a transmis à l'état civil de Genève une copie du procès-verbal du 12 mars 2018 de vérification des actes d'état civil de M. B______.

Il subsistait des doutes au sujet de l'authenticité des documents vérifiés. M. B______ devait faire parvenir à l'ambassade un document de son CP1 afin de déterminer quel acte de naissance avait permis son inscription à l'école.

11) Le 7 mai 2018, l'état civil de Genève a demandé à M. B______ de transmettre le document exigé pour confirmer l'authenticité de ses documents.

12) Le 18 juin 2018, M. B______ a donné par écrit des informations relatives à son CP1.

Il avait, de 1993 à 1998, été inscrit à l'école « EPP Habitat » dans la commune d'G______ à Abidjan. Il n'avait pas les moyens d'apporter les documents requis, néanmoins une confirmation pouvait être demandée auprès de l'école concernée.

13) Le 20 juin 2018, l'état civil a transmis à l'ambassade le courrier précité de M. B______.

14) Le ______§ 2018, Mme A______ a donné naissance à Genève à F______ B______, reconnue avant sa naissance par M. B______, le 18 octobre 2018.

15) Le 6 mars 2019, l'ambassade a transmis le procès-verbal du 4 février 2019 de vérification du CP1 de M. B______.

Selon le directeur de l'école primaire publique Habitat-A d'G______, établissement indiqué dans le courrier du 20 juin 2018 comme celui fréquenté par l'intéressé, le prénommé B______, né le ______ 1987, n'existait pas dans les registres de l'école. En revanche, une autre personne portant le même patronyme, née précédemment et ayant la même filiation avait été régulièrement inscrite dans l'établissement pendant l'année scolaire 1986-1987.

Selon un acte de naissance requis par l'avocat-conseil de l'ambassade à la mairie d'G______, il y avait une similitude des informations entre les actes de naissance de M. B______ et la personne portant le même patronyme, inscrite dans le registre de l'école primaire publique Habitat-A d'G______. Les documents d'état civil de M. B______ ne répondaient pas aux conditions juridiques de fond et de forme prévues par la loi ivoirienne et n'étaient pas tous authentiques.

M. B______ devait, pour prouver son identité, fournir son certificat d'études primaires et élémentaires (ci-après : diplôme CEPE) ou son relevé de notes en vue de déterminer quel acte de naissance avait servi à la présentation de l'examen de diplôme.

16) En mars 2019 à une date non précisée, l'état civil de Genève a reçu en entretien M B______ pour lui présenter la situation en lui demandant des explications sur son identité.

17) Le 20 avril 2019, M. B______ a déploré que son dossier de mariage ait été ralenti pendant des années par des obstacles administratifs de l'OCPM et de l'état civil de Genève et des difficultés de payer les taxes exigées.

Selon un entretien téléphonique de son mandataire avec l'état civil de Genève, son acte de naissance n'avait pas pu être authentifié dans la mesure où, dans les archives de l'école d'G______, il y avait un autre enfant du même nom et même date de naissance, mais qui avait un prénom différent. Son identité n'avait pas pu ainsi être établie.

18) Par décision du 20 mai 2019, l'état civil de Genève a refusé de poursuivre la procédure préparatoire du mariage tant que l'identité de M. B______ ne serait pas clairement établie et a requis de ce dernier de lui transmettre tous les documents qui pourraient permettre à l'ambassade de les faire authentifier afin d'établir son identité avec certitude.

L'extrait de naissance, établi le 13 juin 2012, fourni dans le cadre de la reconnaissance de paternité d'E______, le jugement supplétif d'acte de naissance du 21 décembre 2016, la copie intégrale d'acte de naissance établi sur la base de ce jugement, le procès-verbal de vérification des actes d'état civil de M. B______ et les données figurant dans les dossiers du SEM indiquant des années de naissance différentes, à savoir 1980, 1987 et 1990, ne permettaient pas d'établir avec certitude l'identité et la capacité matrimoniale de l'intéressé. L'officier d'état civil devait s'assurer des conditions légales notamment l'identité de la personne concernée.

19) Par acte du 19 juin 2019, les fiancés ont fait recours contre la décision précitée auprès du département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (ci-après : DSES).

20) Par décision du 15 août 2019, le DSES a confirmé le refus du 20 mai 2019 de l'état civil de Genève.

Certes, les données personnelles de M. B______ avaient été saisies dans le registre de l'état civil lors de la reconnaissance d'E______. Toutefois, l'état civil de Genève avait à juste titre requis les documents d'état civil usuels de l'intéressé et les avait transmis à l'ambassade pour authentification. L'enregistrement de la filiation paternelle était dans l'intérêt de l'enfant et primait les prescriptions en vigueur sur la saisie d'une personne étrangère dans le registre de l'état civil. La procédure formelle devait dès lors être relativisée au moment de l'enregistrement des données d'état civil du père. En Côte d'Ivoire, le défaut d'acte civil pouvait être suppléé par un jugement rendu sur simple requête au Tribunal du lieu où l'acte aurait dû être dressé. Le jugement supplétif était admis lorsque la déclaration de naissance d'un enfant n'avait pas été faite dans les délais légaux, soit dans les trois mois. Une personne ne pouvait pas avoir un jugement supplétif et un acte de naissance. L'intéressé, déjà en possession d'un acte de naissance lors de sa déclaration de paternité du 25 juillet 2012, avait néanmoins présenté pour sa procédure préparatoire de mariage des documents d'état civil établis sur la base du jugement supplétif du 21 décembre 2016.

Le rapport de vérification du 4 février 2019 et les actes présentés ne permettaient pas d'établir avec certitude l'identité, les données personnelles et la capacité matrimoniale de M. B______.

21) Par acte expédié le 16 septembre 2019, Mme A______ et M. B______ ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, en concluant à son annulation et à ce qu'il soit dit que l'état civil de la ville de Genève procède sans délai à leur mariage.

Leur droit au mariage avait été violé. L'état civil de Genève était de mauvaise foi et sa décision relevait d'un formalisme excessif. Il recourait à tous les prétextes pour ne pas célébrer leur mariage. Ils avaient déposé leur demande depuis sept ans.

22) Le 8 octobre 2019, le département a conclu au déboutement de Mme A______ et de M. B______ de toutes leurs conclusions.

Sa décision et celle de l'état civil de Genève portaient uniquement sur l'identité, les données personnelles et la capacité matrimoniale de M. B______, à l'exclusion de celles de Mme A______. Les documents produits dans le cadre du recours, soit la copie d'un acte de naissance du 4 janvier 2017 de la circonscription d'état civil de la commune d'D______ et le certificat de scolarité du 12 juin 2019 du directeur de la circonscription primaire d'G______ ne permettaient pas, sans authentification, de confirmer l'identité, les données personnelles et la capacité matrimoniale de M. B______. Des doutes sérieux subsistaient sur l'authenticité et la véracité de l'ensemble des documents produits par l'intéressé. Les documents produits lors de l'enregistrement de la déclaration de paternité sur E______ n'avaient pas été authentifiés, la filiation paternelle de l'enfant devant être enregistrée sans délai.

Selon la législation ivoirienne, le jugement supplétif était accepté lorsque la déclaration de la naissance n'avait pas été faite dans les délais légaux, soit dans les trois mois qui suivaient la naissance de l'enfant. Une personne ne pouvait pas détenir à la fois un jugement supplétif et un acte de naissance. Déjà en possession d'un acte de naissance lors de sa déclaration de paternité sur E______, le 25 juillet 2012, M. B______ avait néanmoins présenté pour sa procédure préparatoire de mariage des documents établis sur la base du jugement supplétif du 21 décembre 2016. Ce constat s'imposait aussi pour l'acte de naissance du 4 janvier 2017.

23) Le 30 octobre 2019, Mme A______ et M. B______ ont persisté dans les termes et les conclusions de leur recours.

24) Le 22 novembre 2019, sur demande de la chambre administrative, l'OCPM a, suivant les instructions du DSES, transmis à la chambre de céans l'intégralité des dossiers de Mme A______ et de M. B______.

25) Le 9 janvier 2020, le DSES a persisté dans ses précédentes observations.

26) Ensuite de quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur le bien-fondé de la décision du DSES confirmant celle de l'état civil de Genève qui a refusé de poursuivre la procédure préparatoire de mariage des recourants.

Dans ses observations du 8 octobre 2019, l'autorité intimée a souligné que les décisions en cause ne portent que sur l'identité, les données personnelles et la capacité matrimoniale du recourant. Elle considère que les données de la fiancée ne sont pas litigieuses dans le cadre de la présente procédure. Néanmoins, celle-ci a un intérêt à la procédure dans la mesure où le refus de poursuivre la procédure préparatoire de mariage opposé à son fiancé la touche dans son droit de se marier avec celui-ci.

3) Le droit au mariage est garanti notamment par l'art. 14 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et l'art. 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) qui dispose que dès l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit. Il appartient en principe à toute personne physique majeure, quelle que soit sa nationalité - y compris les apatrides - ou sa religion. Il s'agit d'un droit de l'homme et non d'un droit du citoyen (ATF 138 I 41 consid. 4 ; 137 I 351 consid. 3.5 ; Marie-Laure PAPAUX VAN DELDEN, Le droit au mariage et à la famille. Contours et implications en droit civil [Première partie], in FamPra.ch 2011 321-347, p. 322 ; Marc SPESCHA, Autorités de l'état civil : complices d'expulsions pour des motifs de police des étrangers ou garantes du droit au mariage ?, in Revue de l'état civil 2010 117-120, p. 119). Le droit au mariage n'est néanmoins pas absolu, et peut être limité notamment par des règles de forme, destinées à s'assurer que les conditions de fond du mariage sont réunies (Marie-Laure PAPAUX VAN DELDEN, Le droit au mariage et à la famille. Analyse critique des restrictions [Deuxième partie], in FamPra.ch 2011 589-631, p. 591). Il en va notamment ainsi de l'identité, de la filiation et de la capacité matrimoniale des fiancés (ATF 113 II 1 consid. 4).

4) a. Pour la procédure préparatoire au mariage, les fiancés établissent leur identité au moyen de documents et déclarent personnellement auprès de l'office de l'état civil qu'ils remplissent les conditions du mariage ; ils produisent les consentements nécessaires (art. 98 al. 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210). Les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses doivent établir la légalité de leur séjour en Suisse au cours de la procédure préparatoire (art. 98 al. 4 CC).

À l'appui de leur demande, les fiancés présentent un certificat relatif à leur domicile actuel (art. 64 al. 1 let a de l'ordonnance sur l'état civil du 28 avril 2004 - OEC - RS 211.112.2) ; des documents relatifs à la naissance, au sexe, au nom, à la filiation, à l'état civil (pour les personnes qui ont déjà été mariées ou liées par un partenariat enregistré : date de la dissolution du mariage ou du partenariat) ainsi qu'aux lieux d'origine et à la nationalité, lorsque les données relatives aux fiancés n'ont pas encore été enregistrées dans le système ou que les données disponibles ne sont pas exactes, complètes ou conformes à l'état actuel (art. 64 al. 1 let b OEC). Les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses joignent en outre une pièce établissant la légalité de leur séjour en Suisse jusqu'au jour probable de la célébration (art. 64 al. 2 OEC).

b. L'office de l'état civil examine si la demande a été déposée régulièrement (art. 99 al. 1 ch. 1 CC), l'identité des fiancés est établie (ch. 2), les conditions du mariage sont remplies (ch. 3). Il prend la responsabilité en fonction du cas concret, de décider s'il faut effectuer des recherches supplémentaires et cas échéant lesquelles (Message du Conseil fédéral concernant la révision du code civil suisse [état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asiles de famille, tutelle et courtage matrimonial] du 15 novembre 1995, FF 1996 I 1, p. 14). L'officier de l'état civil a pour mission de vérifier l'identité et la capacité matrimoniale des fiancés (Initiative parlementaire. Empêcher les mariages fictifs. Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 31 janvier 2008, FF 2008 2247, p. 2251).

L'autorité de l'état civil s'assure de l'identité et de la capacité civile des personnes concernées (art. 16 al. 1 let. b OEC) ; vérifie que les données disponibles du système et les indications à enregistrer sont exactes, complètes et conformes à l'état actuel (let. c). Les personnes concernées doivent produire les pièces requises. Celles-ci ne doivent pas dater de plus de six mois. Si l'obtention de tels documents s'avère impossible ou ne peut manifestement être exigée, des documents plus anciens sont admis dans des cas fondés (art. 16 al. 2 OEC). L'autorité de l'état civil informe et conseille les personnes concernées, met en oeuvre, au besoin, des recherches supplémentaires et peut exiger la collaboration des personnes concernées (art. 16 al. 5 OEC). Elle effectue l'examen prévu à l'art. 16 OEC (art. 66 al. 1 OEC). Elle examine, en outre si les documents et déclarations nécessaires sont joints (art. 66 al. 2 let. a OEC) ; si la capacité matrimoniale des deux fiancés est établie (art. 66 al. 2 let. c OEC) ; si les fiancés qui ne sont pas citoyens suisses ont établi la légalité de leur séjour en Suisse (art. 66 al. 2 let. e OEC). Elle peut vérifier la légalité du séjour dans le système d'information central sur la migration (art. 66 al. 3 phr. 1 OEC).

c. Dans le domaine de l'état civil, les représentations de la Suisse à l'étranger assument notamment les tâches de rechercher, recevoir, légaliser, traduire et transmettre des décisions et des documents étrangers relatifs à l'état civil (art. 5 al. 1 let. b OEC) ; de vérifier l'authenticité de documents étrangers (let. g).

d. Il appartient en principe aux fiancés d'entreprendre les démarches requises en vue de se procurer les documents eux-mêmes ou par l'entremise des tiers. Ils ont l'obligation de les produire. L'officier de l'état civil renseigne les fiancés à ce sujet et peut également se charger de commander certains documents à leurs frais. Lorsque les données sont litigieuses du fait qu'il existe des doutes fondés quant à leur exactitude, notamment si des données contradictoires ont été fournies antérieurement à diverses autorités, l'autorité cantonale de surveillance exige un prononcé judiciaire afin de faire constater l'état civil des fiancés devant le juge. L'officier de l'état civil doit veiller à ce que le dossier constitué par les fiancés comporte tous les éléments nécessaires à la prise de décision par l'autorité de surveillance. L'office de l'état civil doit, en cas de doute, effectuer des recherches supplémentaires, les fiancés ayant l'obligation de collaborer. Il s'agit en particulier de certains cas internationaux dans lesquels des doutes subsistent quant à l'authenticité et à l'exactitude des documents. L'office de l'état civil est alors compétent pour poser des questions complémentaires aux représentations suisses à l'étranger et leur faire examiner l'authenticité des documents lorsque cela s'avère indispensable, eu égard au respect du droit fondamental au mariage (Marie-Laure PAPAUX VAN DELDEN, De la procédure préparatoire et de la célébration du mariage, in Pascal PICHONNAZ/Bénédict FOËX, Code civil I, Commentaire romand, 2010, n. 11-16 p. 712-714 ad art. 98 CC).

Lorsqu'un complément d'information est indispensable à l'inscription d'un fait d'état civil, les autorités de l'état civil peuvent consulter le dossier des personnes concernées auprès du SEM ou s'en faire délivrer des copies, pour autant que les conditions légales de protection des données soient remplies (Philippe MEIER/Laura CARANDO, « Pas de mariage en cas de séjour irrégulier en Suisse ? », Jusletter du 14 février 2011, p. 3). Tel sera en particulier le cas lorsque l'identité ou la capacité matrimoniale des intéressés n'est pas clairement établie en raison des doutes relatifs aux documents remis et aux déclarations reçues ou de l'impossibilité objective de remettre les documents exigés. L'identité des fiancés doit être en effet établie pour que la demande en exécution de la procédure préparatoire soit recevable. S'il y a refus, il est le plus souvent fondé sur le manque d'éléments suffisants à établir l'état civil des fiancés, le Tribunal fédéral exigeant un minimum de preuve de la capacité matrimoniale des fiancés. Si les conditions du mariage ne sont pas remplies ou que des doutes importants subsistent, l'officier refusera de célébrer le mariage. Seuls des doutes importants peuvent faire obstacle au mariage étant donné la protection due au droit fondamental y relatif. L'autorité cantonale de surveillance peut néanmoins autoriser le mariage s'il peut être célébré conformément aux conditions prévues par le droit national de l'un des deux fiancés et s'il est compatible avec l'ordre public suisse (Marie-Laure PAPAUX VAN DELDEN, De la procédure préparatoire, op. cit., n. 2, 4 et 11 p. 716-717 et 719 ad art. 99 CC).

Une vérification est à engager d'office lorsque les doutes de falsification ou d'abus sont fondés. La représentation suisse dans le pays de provenance du document ou dans le pays d'origine de la personne concernée peut être appelée à collaborer. Toutefois, des documents plus récents peuvent être refusés si leur contenu ne correspond pas à l'état actuel. Des documents plus anciens sont admis si leur contenu prouve l'état actuel (Directive n° 10.08.10.01 de l'office fédéral de l'état civil [ci-après : OFEC] du 1er octobre 2008, Saisie des personnes étrangères dans le registre de l'état civil, p. 6 et 11).

e. À la clôture de la procédure préparatoire, l'officier de l'état civil constate le résultat de celle-ci (art. 67 al. 1 OEC). Si les conditions ne sont pas remplies ou que des doutes importants subsistent, il refuse de célébrer le mariage (al. 3). Il communique par écrit aux fiancés son refus de célébrer le mariage, en indiquant les voies de recours (art. 67 al. 4 OEC ; art. 64a al. 6 let. a OEC).

5) À teneur de l'art. 15a al. 4 OEC, si la saisie prévue à l'al. 2 de cette disposition découle de l'enregistrement de la filiation d'un enfant, l'officier de l'état civil peut exceptionnellement renoncer, dans des cas fondés, à saisir sans délai certaines données de l'état civil du père et de la mère. L'enregistrement de la filiation paternelle est dans l'intérêt de l'enfant et prime sur les prescriptions en vigueur sur la saisie d'une personne étrangère dans le registre de l'état civil. De ce fait, la procédure formelle doit être relativisée lors de l'enregistrement des données d'état civil du père. Dans des cas fondés, le père sera saisi dans le registre de l'état civil avec les données minimales. La preuve de l'état civil n'est pas une condition à l'établissement du lien de filiation avec l'enfant si le père étranger n'est pas marié avec la mère de l'enfant. Une reconnaissance effectuée auprès de l'office de l'état civil ou devant le tribunal ou une constatation juridique de la paternité ne peut être refusée si l'état civildu père ou, par exemple, sa filiationest inconnue ou non déterminée parce que les données correspondantes ne sont pas documentées. De même, l'enregistrement de la paternité ne peut être refusé pour la simple raison que le domicilene soit pas connu (Directive OFEC précitée, p. 18).

6) En l'espèce, le recourant a effectué plusieurs démarches auprès de l'état civil de Genève notamment lors de ses déclarations de reconnaissances de paternité concernant les enfants E______ en 2012 et F______ en 2018. Lors de la saisie de ses données dans le registre concerné, l'état civil de Genève pouvait enregistrer, conformément à l'art. 15a al. 4 OEC et à la directive OFEC précitée, des données minimales de celui-ci, l'enregistrement de la filiation paternelle étant dans l'intérêt des enfants concernés et primant sur les prescriptions en vigueur sur la saisie du recourant dans le registre de l'état civil.

a. Il ressort en outre du SYMIC que le recourant a donné à plusieurs reprises, lors de ses demandes d'asile, des dates de naissance différentes, soit le ______ 1980, 1987 et 1990. Par ailleurs, il est établi que lors de sa première demande d'ouverture d'une procédure préparatoire de mariage déposée le 30 mars 2012 et déclarée irrecevable le 1er novembre 2012, les documents relatifs à son identité, ses données personnelles et sa capacité matrimoniale n'ont pas été vérifiés par l'ambassade suisse à Abidjan, le recourant n'ayant pas donné suite au courrier de l'état civil de Genève du 5 juillet 2012 lui impartissant un délai de soixante jours pour présenter un document attestant la légalité de son séjour en Suisse.

En revanche, l'état civil de Genève a procédé, conformément aux dispositions en vigueur, à la vérification et à l'authentification des documents produits par le recourant à l'appui de la demande d'ouverture d'une procédure préparatoire de mariage déposée le 21 février 2017.

Le procès-verbal du 12 mars 2018 de vérification des documents du recourant a établi qu'il subsistait des doutes importants quant à l'authenticité des documents soumis et que, pour prouver son identité, le recourant devait communiquer des informations complémentaires concernant son parcours scolaire primaire. Les informations transmises par ce dernier n'ont pas permis de confirmer qu'il aurait fréquenté l'école primaire qu'il a indiquée. D'après le procès-verbal du 4 février 2019 de vérification du cursus scolaire primaire du recourant, celui-ci n'est pas inscrit dans les registres de l'école considérée. En revanche, selon le même procès-verbal, une autre personne portant le même patronyme, née précédemment et ayant la même filiation a été régulièrement inscrite dans l'établissement pendant l'année scolaire 1986-1987. Le recourant, selon le procès-verbal précité, a fourni des informations erronées pour se faire octroyer une nouvelle identité. Il a présenté des documents faux pour justifier une identité qui n'est pas la sienne.

Ainsi, il ressort du dossier qu'aucune pièce présentée ni aucune information fournie par le recourant n'a permis d'établir de manière suffisamment certaine, son identité, ses données personnelles et sa capacité matrimoniale.

Dans ces circonstances, l'état civil de Genève pouvait refuser de poursuivre la procédure préparatoire de mariage tant que l'identité, les données personnelles et la capacité matrimoniale du recourant n'étaient pas clairement établies au sens des dispositions applicables et que des doutes importants subsistaient à ce sujet.

La décision attaquée est dès lors conforme au droit.

b. Au demeurant, la décision attaquée ne viole pas le principe de la proportionnalité, l'état civil de Genève ayant refusé de poursuivre la procédure préparatoire tant que l'identité du recourant, ses données personnelles et sa capacité matrimoniale ne seraient pas clairement établies. Il a aussi requis de ce dernier de lui transmettre tous les documents en vue de leur authentification afin d'établir son identité avec certitude.

Répondant à cette demande de l'état civil de Genève, le recourant a, durant l'instruction de la présente procédure, transmis à l'autorité intimée une copie d'un acte de naissance du ______ 2017 de la circonscription d'état civil de la commune d'D______ en Côte d'Ivoire et un certificat de scolarité établi le 12 juin 2019 par le directeur de la circonscription primaire d'G______ , documents qui devront être vérifiés et authentifiés, le cas échéant, après leur actualisation pour répondre à l'exigence qu'ils ne doivent pas être datés de plus six mois.

c. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

7) Compte tenu des circonstances particulières du cas d'espèce, il sera, exceptionnellement, renoncé à la perception d'un émolument, malgré l'issue du litige (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 septembre 2019 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision du département de la sécurité, de l'emploi et de la santé du 15 août 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière civile ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre-Bernard Petitat, avocat des recourants, ainsi qu'au département de la sécurité, de l'emploi et de la santé.

Siégeant : M. Thélin, président, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :