Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/4730/2019

ATA/113/2020 du 03.02.2020 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4730/2019-FPUBL ATA/113/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 3 février 2020

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me David Metzger, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



Vu l'arrêté du 18 décembre 2019, déclaré exécutoire nonobstant recours, par lequel le Conseil d'État a libéré Madame A______ de son obligation de travailler avec effet immédiat, sans incidence sur son traitement ; au vu du jugement pénal du 11 septembre 2019 du Tribunal de police (P/1______) déclarant Mme A______ coupable de gestions déloyales aggravées, la condamnant à une peine privative de liberté de neuf mois avec sursis pendant trois ans, la résiliation des rapports de service était envisagée, en raison de la rupture du lien de confiance ; au regard de sa condamnation pénale, il n'était pas souhaitable que l'intéressée poursuive son activité ;

vu le recours formé le 23 décembre 2019 par Mme A______ auprès de la chambre administrative de la Cour de justice, concluant à la restitution de l'effet suspensif, à l'annulation de l'arrêté attaqué, à sa réintégration à son poste et à l'allocation d'une indemnité de CHF 3'000.- pour les frais occasionnés par la procédure ;

qu'elle a fait valoir qu'étant en poste détaché et donc plus dans le poste dans lequel une infraction pénale lui était reprochée, rien ne justifiait de la libérer de son obligation de travailler ; elle contestait les faits retenus dans le jugement du Tribunal de police, contre lequel elle avait formé appel ; alors même que les faits en cause étaient connus du Conseil d'État de longue date, il avait continué à lui accorder sa confiance pendant quatorze mois en lui permettant de travailler dès octobre 2018 ; il ne pouvait ainsi justifier une rupture du lien de confiance ni sanctionner d'éventuelles violations des devoirs du personnel par une nouvelle procédure disciplinaire déguisée en résiliation des rapports de service, étant relevé que la révocation prononcée pour les mêmes faits avait été annulée par la chambre de céans ;

qu'elle subissait un préjudice irréparable ; le fait de travailler à nouveau pour l'État lui avait permis de panser les plaies créées par les décisions blessantes précédentes et lui permettait de rester en bonne santé ; la libération de l'obligation de travailler portait atteinte à son honneur ;

que le Conseil d'État, se déterminant sur demande de restitution de l'effet suspensif, a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement au rejet de la demande de restitution de l'effet suspensif ;

que dans sa réplique sur effet suspensif, la recourante a persisté dans ses conclusions ;

que par courrier du 23 janvier 2020, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 septembre 2017, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par la
vice-présidente, ou en cas d'empêchement de celles-ci, par un juge ;

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que, par ailleurs, l'art. 21 al 1 LPA permet le prononcé de mesures provisionnelles ;

que selon la jurisprudence, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/898/2019 du 14 mai 2019 ; ATA/503/2018 du 23 mai 2018) ; qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, spéc. 265) ;

que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405) ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que la chambre de céans dispose dans l'octroi de mesures provisionnelles d'un large pouvoir d'appréciation (ibidem) ;

que les décisions incidentes ne sont susceptibles de recours que si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 57 let. c LPA) ; qu'un préjudice est irréparable lorsqu'il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 ; 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2) ; un intérêt économique peut constituer un tel préjudice (ATF 127 II 132 consid. 2a ; 126 V 244 consid. 2c) ;

qu'en l'espèce, il convient, en premier lieu, de relever que la recevabilité du recours ne paraît pas manifeste ; en effet, la recourante conserve son salaire alors qu'elle est libérée de son obligation de travail, de sorte qu'elle ne subit pas de préjudice d'ordre financier ;

que, par ailleurs, la recourante bien qu'elle soutienne devoir travailler pour rester en bonne santé, ne rend, prima facie et sans préjudice de l'examen au fond, pas vraisemblable que la suspension querellée serait susceptible de lui causer une atteinte à sa santé ;

qu'en outre, selon la jurisprudence de la chambre de céans, l'éventuelle atteinte réputationnelle pouvait être réparée par la décision finale favorable à la recourante (ATA/1559/2019 du 21 octobre 2019; ATA/1013/2018 précité ; ATA/1624/2017 du 19 décembre 2017) ;

qu'il convient également de souligner l'intérêt public de l'État à ce qu'une fonctionnaire condamnée pour des infractions commises dans l'exercice de ses fonctions ne continue pas à officier, quand bien même la condamnation pénale ne serait pas définitive ; il en va, en effet, de la crédibilité et de la confiance que le public peut placer dans les représentants de l'État ;

qu'au vu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de restituer l'effet suspensif au recours ;

qu'il sera statué sur les frais de la présente décision avec le fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l'effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Me David Metzger, avocat de la recourante, ainsi qu'au Conseil d'État.

 

La présidente :

 

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :