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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/350/2019

ATA/79/2020 du 28.01.2020 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/350/2019-FPUBL ATA/79/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 janvier 2020

 

dans la cause

 

Mme A______
représentée par Mme Clémence Jung, juriste, représentant le syndicat interprofessionnel des travailleurs et travailleurs (SIT), mandataire

contre

IMAD - INSTITUTION GENEVOISE DE MAINTIEN, D'AIDE ET DE SOINS À DOMICILE

 



EN FAIT

1) Mme A______, née le ______ 1971, a été engagée par l'Institution genevoise de maintien, d'aide et de soins à domicile (ci-après : IMAD), centre de Carouge, en qualité d'assistante en soins et santé communautaire (ci-après : ASSC) à domicile avec un taux d'activité de 80 % dès le 1er mars 2016.

Un contrat de travail a été signé le même jour, annexant la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et son règlement d'application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), ainsi qu'un cahier des charges décrivant le poste, son contenu, ses responsabilités et ses exigences, que Mme A______ a signé le 3 mars 2016.

2) Une première évaluation périodique de Mme A______, du 17 mai 2016, comportait des notations positives et quelques points à améliorer.

Une seconde évaluation, du 1er décembre 2017, relevait un objectif atteint, un objectif non atteint et deux objectifs encore à atteindre, des connaissances professionnelles allant de « adéquat pour la fonction à insuffisant » en passant par « à améliorer », fixait de nouveaux objectifs, et préavisait défavorablement à la nomination en raison du nombre de jours d'absence supérieur à cent quatre-vingts durant les deux premières années d'activité.

3) Par courrier du 1er décembre 2017, Madame A______ a contesté les appréciations négatives de l'évaluation, et s'est plainte d'être maltraitée.

4) Par courrier du 20 février 2018, l'IMAD est revenue en détail sur les insuffisances et les manquements constatés, et sur la question de la tenue vestimentaire, rappelant les demandes répétées à Mme A______ sur le retrait du turban.

5) Par courrier du 19 mars 2018, Mme A______ a rapporté à l'IMAD un entretien du 20 février 2018 au cours duquel la responsable des ressources humaines, Mme B______, lui avait annoncé une « directive turban » qui entraînerait le départ de celles qui le conserveraient.

6) Du 1er mars 2016 au 28 février 2018, Mme A______ a totalisé cent quarante-trois jours d'absence pour maladie, et cent quarante-trois jours pour accident. Du 1er mars 2016 au 31 mars 2019, Mme A______ a totalisé quatre cent quatre-vingts jours d'absence pour maladie (dont trois cent quarante du
26 février 2018 au 31 janvier 2019), deux jours d'absence pour déménagement, quatre jours d'absence pour formation interne, trente-huit jours fériés et
quarante-six jours de vacances. Du 1er février au 31 mars 2019, elle a été libérée de l'obligation de travailler pour cinquante-neuf jours.

7) Par courrier du 26 février 2018, l'IMAD a informé Mme A______ qu'elle prolongeait d'un an à dater du 1er mars 2018 sa période probatoire, car ses absences, quels qu'en soient les motifs, avaient dépassé cent quatre-vingts jours depuis son engagement. Au terme de la prolongation, son dossier de nomination serait réexaminé. Cette décision n'a pas fait l'objet de recours.

8) Par courrier du 7 septembre 2018, l'IMAD a convoqué Mme A______ à un entretien de service ayant pour objet la non-réalisation des conditions permettant sa nomination en raison du dépassement du nombre de jours d'absence admis en période probatoire et de l'insuffisance de ses prestations.

9) Le 25 octobre 2018, le Dr C______, médecin du travail de l'IMAD, a établi un certificat selon lequel Mme A______ exprimait beaucoup de difficultés au travail avec son équipe et sa responsable, ne pouvait en raison de son état de santé général reprendre son poste avant quatre à six mois, si possible dans une autre équipe, et sans garantie qu'elle puisse reprendre sa fonction actuelle dans son équipe actuelle de manière pérenne.

10) Le 26 octobre 2018, l'IMAD a ouvert une procédure en raison de la
non-réalisation des conditions de nomination (nombre des jours d'absence) et de l'insuffisance des prestations de Mme A______.

11) Le 10 décembre 2018, l'IMAD a résilié les rapports de travail avec effet au 31 mars 2019.

La période probatoire initiale avait dû être prolongée en raison des absences qui avaient dépassé cent quatre-vingts jours sur deux ans. Selon l'IMAD, « depuis le début de la prolongation de la période probatoire, Mme A______ avait cumulé deux cent quatre-vingts jours d'absence, or la nomination n'était pas possible lorsque les absences dépassaient soixante jours durant la période de prolongation ».

Le Dr C______ estimait que l'état de santé général de Mme A______ ne lui permettrait pas de reprendre son poste avant quatre à six mois au moins, sans pouvoir certifier qu'elle pourrait reprendre son activité aux conditions de l'engagement et au taux de 80 %.

À cela s'ajoutait que la qualité des prestations de Mme A______ était insuffisante ou partiellement insuffisante au plan des connaissances professionnelles, de l'engagement et de la motivation et enfin du comportement, de la coopération et de la communication.

L'IMAD contestait n'avoir pas apporté à Mme A______ le soutien qu'elle attendait de son employeur. La décision de mettre fin aux rapports de service était sans rapport avec le turban que Mme A______ portait et voulait porter. L'IMAD ne pouvait envisager sereinement la continuation de la collaboration avec une employée qui avait été absente un an et demi sur deux ans et demi pour cause de maladie ou accident et dont les prestations étaient insuffisantes.

12) Le 10 janvier 2019, l'IMAD a libéré Mme A______ de l'obligation de travailler dès le 17 décembre 2018 et jusqu'à l'échéance des rapports de travail le 31 mars 2019, le salaire étant versé durant cette période.

13) Par acte du 28 janvier 2019, remis à la poste le même jour, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 10 décembre 2018 par laquelle l'IMAD résiliait les rapports de service.

La décision devait être annulée et la recourante réintégrée.

La recourante n'avait pas bénéficié d'entretien d'évaluation après douze mois, soit en mars 2017, alors qu'elle était disponible. Avoir procédé à une évaluation de nomination violait le droit.

C'était non pas pour insuffisance de ses prestations, dont la qualité avait été reconnue dès la première évaluation, mais parce qu'elle portait un turban qu'après des remarques, des pressions et des menaces de licenciement, l'IMAD avait mis fin à son engagement.

La recourante avait été victime d'une discrimination à raison de la religion : si elle portait le foulard islamique dans son quotidien pour des motifs religieux, elle portait pour son travail un turban laissant le cou libre, ce qui ne pouvait être interprété comme un signe religieux. L'IMAD avait associé à tort le turban à un signe religieux.

La recourante avait fait l'objet de remarques hostiles et répétées, avait enduré une discrimination permanente, et avait subi de ce fait un « burn-out ». Son employeur avait failli à son devoir de protéger sa personnalité.

14) Le 20 mars 2019, l'IMAD a conclu au rejet du recours.

La recourante ne s'était jamais plainte de discrimination, ni de pressions ou de commentaires sur sa tenue jusqu'au 21ème mois de service, alors même que des rappels sur la tenue lui avaient été adressés en mars 2016, mai 2016 et octobre 2017, et que sa responsable lui avait annoncé en février 2018 que l'IMAD mettrait en place une nouvelle directive vu les développements politiques en matière de laïcité. La résiliation des rapports de travail était sans rapport avec le turban.

La charge de travail de la recourante était dans la moyenne.

Les absences de la recourante pour cause de maladie et d'accident s'étaient multipliées et avaient empêché l'évaluation au terme des douze premiers mois d'activité. L'évaluation du 1er décembre 2017, après vingt mois, était globalement insuffisante. Si la qualité des prestations, l'autonomie et la flexibilité n'étaient pas niées, les connaissances professionnelles, la motivation et l'engagement, la coopération et la communication étaient insuffisantes. Les procédures institutionnelles en matière de tenue vestimentaire et de gestion des absences n'étaient pas suivies. Le volume des prestations était à améliorer. La recourante manquait de proactivité et d'engagement, notamment pour documenter ses absences. L'interaction avec l'équipe devait être améliorée. L'interaction avec les infirmières était faible. La protection de la confidentialité était insuffisante : la recourante avait filmé des clients et montré le film à son fils. La communication avec les clients était adéquate et respectueuse, mais la communication et la coopération avec la hiérarchie insuffisante. Le ton était inapproprié au téléphone et la recourante effectuait des interventions déstabilisantes pour l'équipe.

Un entretien de management avait été prévu, mais n'avait pu avoir lieu car la recourante s'était trouvée en arrêt maladie dès le 21 février 2018, soit après l'échange de vues sur son évaluation.

L'ensemble du processus d'évaluation avait été respecté.

Selon le Dr C______, le travail ne pourrait être repris avant quatre à six mois, et les reprises précédentes avaient été très progressives.

La recourante ne remplissait pas les conditions de nomination. Ses prestations étaient par ailleurs insuffisantes. L'IMAD n'avait pas à invoquer un motif objectivement fondé pour la licencier en période probatoire. La recourante avait pu faire valoir son point de vue, elle n'avait pas été victime de discriminations ni de harcèlement moral, et son recours devait être rejeté.

15) La recourante et l'IMAD ont été entendues par le juge délégué le 4 juin 2019.

La recourante a confirmé les pressions subies sur le port du turban. Elle a indiqué qu'à chaque entretien sa responsable lui demandait quand elle l'enlèverait, s'il ne lui tenait pas trop chaud, pourquoi elle portait des manches longues, et si la confession des clients jouait un rôle pour elle. Quand il y avait un incident lié au terrorisme islamique elle recevait des remarques des collègues au sujet des musulmans. Ses collègues lui avaient à une reprise demandé si elle portait un burkini, et lui adressaient parfois sur le ton de la plaisanterie des commentaires sur sa tenue vestimentaire qu'elle percevait comme des reproches.

L'IMAD a répété que les doléances liées au turban n'avaient été portées à la connaissance de la direction qu'en janvier 2018, et qu'elle n'avait jamais entendu parler par ailleurs de harcèlement. Ce qui avait conduit au licenciement était le nombre des jours d'absence et l'insuffisance des prestations. Le port du turban n'était qu'une des nombreuses insuffisances, et n'était pas la cause du licenciement. La recourante ne pouvait être nommée. L'IMAD avait toujours été en pénurie de main d'oeuvre et peinait à recruter. L'IMAD avait aidé la recourante de son mieux. L'absence de la recourante avait empêché la mise en place de mesures supplémentaires pour l'aider. La pesée avait été faite soigneusement entre les intérêts de la recourante et ceux du service et de ses clients.

16) Le 13 juin 2019, la recourante a produit un calcul démontrant que ses jours d'absence étaient au nombre de seize et non cinquante-cinq entre décembre 2017 et février 2018. Elle a produit deux directives sur la gestion des absences et la formation. Elle demandait l'audition de son psychiatre le Docteur Amine AZI.

17) Le 7 juin 2019, l'IMAD a indiqué que si des enquêtes étaient ouvertes, elle demanderait l'audition de Mme D______, responsable d'équipe, de Mme B______ et du Dr C______.

Le 16 juin 2019, l'IMAD a contesté la computation opérée par la recourante, et observé que cela ne changeait rien au dépassement du maximum admis de jours d'absence en période probatoire. Les absences se comptaient en jours civils, et la recourante avait eu plus de cent quatre-vingts jours civils d'absence durant la période probatoire.

Dans des observations finales 23 août 2019, l'IMAD a persisté dans ses conclusions en rejet du recours.

18) La recourante n'a pas formulé d'observations.

19) Le 17 septembre 2019, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante sollicite l'audition de son psychiatre, et l'intimée sollicite l'audition des responsables et du médecin du travail si des enquêtes étaient ouvertes.

Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour la personne concernée de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision et de participer à l'administration des preuves (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2). Ce droit n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.2). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1) ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; ATA/1537/2017 du 28 novembre 2017 consid. 3a).

En l'espèce, la comparution personnelle des parties a été ordonnée.

S'agissant des autres auditions sollicitées, elles n'apparaissent pas nécessaires. Le dépassement du nombre maximal d'absences durant la période probatoire n'est pas contesté, et le psychiatre ne saurait témoigner sur la qualité des prestations de la recourante, second motif de la résiliation, ni sur d'éventuels comportements attentatoires à la personnalité de sa patiente.

Pour le surplus, le dossier soumis à la chambre de céans apparaît complet, au regard des pièces produites par les parties et des explications fournies par celles-ci, et lui permet de statuer en connaissance des éléments pertinents.

Il ne sera donc pas ordonné d'autres actes d'instruction.

3) La recourante était soumise au statut du personnel de l'IMAD du
5 novembre 2012 qui renvoie, sauf dérogation, à l'ensemble de la législation cantonale relative au personnel de l'administration cantonale, aux instructions de l'office du personnel de l'État contenues dans le memento ad hoc, au règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève du 12 décembre 2012
(RPPers - B 5 05.10), notamment et, en cas de dispositions lacunaires, à la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) à titre de droit public cantonal supplétif (art. 22 de la loi sur l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile du 18 mars 2011 - LIMAD - K I 07).

Aucune disposition du statut ne décrivant les statuts des membres du personnel de l'IMAD ou les conditions de fin des rapports de service, ce sont donc les dispositions de la LPAC et du RPAC qui s'appliquent, dans leur teneur au moment des faits.

4) Selon l'art. 4 al. 1 LPAC, le personnel de la fonction publique se compose de fonctionnaires, d'employés, d'auxiliaires, d'agents spécialisés et de personnel en formation. Est un fonctionnaire le membre du personnel régulier ainsi nommé pour une durée indéterminée après avoir accompli comme employé une période probatoire (art. 5 LPAC). Est un employé le membre du personnel régulier qui accomplit une période probatoire (art. 6 al. 1 LPAC).

La nomination en qualité de fonctionnaire intervient au terme d'une période probatoire de deux ans, sous réserve de prolongation de cette dernière
(art. 47 al. 1 RPAC ; art. 49 al. 2 du statut).

Conformément à l'art. 5 du règlement d'application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01), les prestations du nouveau collaborateur font l'objet, au terme de la période d'essai de trois mois et des première et deuxième années probatoires, d'une analyse qui porte notamment sur les capacités, le travail effectué et le comportement du titulaire. Si la période probatoire a été prolongée, les prestations de l'intéressé font également l'objet d'une analyse avant le terme de la prolongation (al. 1). Les résultats de l'analyse sont portés à la connaissance du titulaire et discutés au cours d'un entretien avec son chef direct et le supérieur hiérarchique. La formule d'analyse des prestations doit être signée par tous les intéressés. Le titulaire a la possibilité de rédiger une note contestant tout ou partie de l'analyse. Cette note fait partie intégrante du dossier d'analyse (al. 2).

Si les résultats ne sont pas jugés satisfaisants, l'intéressé est avisé par écrit qu'une nouvelle analyse doit être faite dans un délai maximum de douze mois, au plus tard avant la fin de la période probatoire (art. 5 al. 4 let. c RTrait).

La période probatoire des employés est prolongeable aux conditions de l'art. 5A RTrait. En particulier, elle peut être d'un an au maximum en cas d'absence, quels qu'en soient les motifs, dépassant cent quatre-vingts jours civils durant les deux années précédentes. La nomination ne sera possible, en principe, que si les absences, quels qu'en soient les motifs, ne dépassent pas soixante jours civils pendant la prolongation de la période probatoire (art. 5A let. d RTrait). Elle peut également être exceptionnellement prolongée d'un an au maximum en cas de prestations insuffisantes (art. 5A let. e RTrait).

Dans sa jurisprudence, la chambre administrative a déjà admis qu'une prolongation de la période probatoire d'une année en raison d'une longue incapacité de travail pouvait succéder à une prolongation de douze mois pour insuffisance de prestations (ATA/235/2013 du 16 avril 2013). En revanche, une nouvelle prolongation de la période probatoire en raison d'absence pour maladie ne pouvait être prononcée à la suite d'une première prolongation pour les mêmes motifs ; l'État devait ainsi nommer la collaboratrice ou la licencier (ATA/272/2015 du 17 mars 2015).

5) a. Pendant le temps d'essai et la période probatoire, chacune des parties peut mettre fin aux rapports de service moyennant le respect des délais de résiliation ; le membre du personnel n'ayant pas qualité de fonctionnaire est entendu par l'autorité compétente ; il peut demander que le motif de résiliation lui soit communiqué (art. 21 al. 1 LPAC). Lorsque les rapports de service ont duré plus d'une année, le délai de résiliation est de trois mois pour la fin d'un mois
(art. 20 al. 3 LPAC).

b. Les art. 336c et 336d CO sont applicables par analogie (art. 46A du statut). Après le temps d'essai, l'employeur ne peut pas résilier le contrat pendant une incapacité de travail totale ou partielle résultant d'une maladie ou d'un accident non imputables à la faute du travailleur, et cela, durant trente jours au cours de la première année de service, durant nonante jours de la deuxième à la cinquième année de service et durant cent quatre-vingt jours à partir de la sixième année de service (art. 336c al. 1 let. b CO).

6) L'objet du litige concerne la conformité au droit de la décision de résiliation des rapports de service de la recourante du 10 décembre 2018. La recourante conteste les manquements reprochés.

a. Contrairement aux fonctionnaires qui ne peuvent être licenciés qu'en présence d'un motif objectivement fondé, dûment constaté, démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison de l'insuffisance des prestations, du manquement grave ou répété aux devoirs de service ou de l'inaptitude à remplir les exigences du poste, la présence d'un motif fondé n'est pas nécessaire pour licencier un employé (art. 21 al. 3 et 22 LPAC a contrario).

b. L'administration doit jauger, au vu des prestations fournies par l'employé et du comportement adopté par celui-ci pendant la période probatoire, les chances de succès de la collaboration future et pouvoir y mettre fin si nécessaire avant la nomination s'il s'avère que l'engagement à long terme de l'agent public ne répondra pas aux besoins du service (ATA/115/2016 du 9 février 2016 et les arrêts cités). Elle dispose dans ce cadre d'un très large pouvoir d'appréciation quant à l'opportunité de la poursuite des rapports de service. Dans sa prise de décision, elle reste néanmoins tenue au respect des principes et droits constitutionnels, notamment celui de la légalité, de la proportionnalité, de l'interdiction de l'arbitraire et du droit d'être entendu (ATA/115/2016 précité et les arrêts cités). Le pouvoir d'examen de la chambre administrative se limite à la violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, de sorte qu'elle ne peut pas revoir l'opportunité de la décision litigieuse (art. 61 al. 1 et 2 LPA).

c. En particulier, le grief d'arbitraire ne doit être admis que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque les motifs allégués sont manifestement inexistants, lorsque des assurances particulières ont été données à l'employé ou en cas de discrimination. En revanche, l'autorité de recours n'a pas à rechercher si les motifs invoqués sont ou non imputables à une faute de l'employé ; il suffit en effet que la continuation du rapport de service se heurte à des difficultés objectives, ou qu'elle n'apparaisse pas souhaitable pour une raison ou une autre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_182/2013 du 7 novembre 2013 consid. 2.2).

d. Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. À cet égard, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d'un droit certain. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 232 consid. 6.2 et les arrêts cités).

7) En l'espèce, la recourante n'est pas une fonctionnaire, vu qu'elle n'a jamais été nommée, sa période probatoire ayant été prolongée. La prolongation de la période probatoire était conforme au droit. Dès lors, les conditions de licenciement qui sont applicables à la recourante sont bien celles des employés en période probatoire. Or, la recourante a été absente durant plus de soixante jours dans le cadre de la prolongation de son statut d'employée, ce qu'elle ne conteste pas.

L'autorité intimée a fait le choix de licencier la recourante, estimant que les absences de celle-ci et le pronostic incertain de reprise à terme auguraient mal des relations futures et de la satisfaction des besoins du service.

L'autorité a également tenu compte de l'évaluation insuffisante de la recourante. Elle a expliqué de manière claire les nombreuses carences qu'elle avait constatées et qui ne lui permettaient pas d'envisager de garder la recourante à son service.

Ce faisant, l'IMAD a fait usage du large pouvoir d'appréciation qui était le sien, la période probatoire permettant à l'entité publique de s'assurer que l'employé satisfasse aux exigences du poste pour lequel il a été engagé, avant qu'il soit pérennisé dans sa fonction.

Il ressort, en effet, des pièces au dossier que la période probatoire a été prolongée d'un an en raison des absences et de l'évaluation insuffisante. Si la première évaluation, intervenue après trois mois, était plutôt positive, quoique succincte, tel n'a pas été le cas de celle effectuée après vingt mois. Cette seconde évaluation a conduit à préaviser négativement la poursuite de la collaboration. Des objectifs ont alors été fixés à la recourante. Or, ceux-ci n'ont pas été atteints, la recourante ayant été absente à plusieurs périodes, et de manière ininterrompue depuis l'échange du 21 février 2018.

Ainsi, la recourante a été absente plus de soixante jours civils durant la période probatoire prolongée, et ses prestations ont été jugées insuffisantes. Dans ces conditions, il ne peut être fait grief à l'IMAD, qui remplit une mission d'intérêt public et doit veiller au bon fonctionnement de ses services, d'avoir finalement considéré que la recourante ne serait pas en mesure de remplir sa fonction, et d'avoir ainsi renoncé à ses services.

8) La recourante se plaint de discrimination à raison de sa religion.

La recourante soutient que le turban ne correspond pas pour elle à un signe religieux ni à une pratique religieuse. L'intimée pour sa part considère que le port pourrait être problématique mais s'est contentée de soulever le problème de manière récurrente.

Quoi qu'il en soit, la résiliation des rapports de service n'est pas fondée sur le port du turban, pas plus d'ailleurs qu'elle n'est fondée sur les convictions religieuses de la recourante. Le port du turban ne constitue qu'un élément parmi d'autres dans l'évaluation défavorable de la recourante, et il n'est pas établi que le turban lui-même ait été considéré par la hiérarchie comme un signe religieux.

Par ailleurs, la recourante n'a invoqué qu'en février 2018, date à laquelle elle n'était plus présente pour raisons de maladie, les remarques et attitudes dont elle aurait été victime de la part de collègues en raison de ses convictions religieuses, et l'IMAD affirme ne jamais en avoir entendu parler avant février 2018.

La recourante n'allègue pas s'être plainte auprès du groupe de confiance institué par les art. 4 al. 1 et 5 al. 3 du Règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève du 12 décembre 2012 (RPPers - B 5 05.10), dont la mission principale consiste à traiter les demandes des personnes qui font appel à lui et à contribuer à ce que cessent les atteintes à la personnalité constatées, d'entente avec la hiérarchie, et auquel peut s'adresser tout membre du personnel qui, dans sa relation de travail avec d'autres personnes, estime rencontrer d'importantes difficultés qui pourraient notamment constituer du harcèlement psychologique (art. 12 al. 1 let. a RPPers). Elle n'a ainsi pas mis en oeuvre le système précisément prévu par son employeur en cas d'atteinte à sa personnalité (ATA/1579/2019 du 29 octobre 2019, consid. 6).

Il n'apparaît donc pas que l'intimée aurait failli dans son obligation de protéger la personnalité de la recourante, et rien ne permet par ailleurs de suspecter que les deux motifs invoqués par l'IMAD à l'appui d'une résiliation des rapports de travail cacheraient en réalité un congé discriminatoire pour motifs religieux.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

9) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité ne sera allouée (art. 87
al. 2 LPA, ATA/1653/2019 du 12 novembre 2019 et les références citées).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 janvier 2019 par Mme A______ contre la décision du 10 décembre 2018 de l'Institution genevoise de maintien, d'aide et de soins à domicile ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Mme A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Mme Clémence Jung, représentant le syndicat interprofessionnel des travailleurs et travailleurs (SIT), mandataire de Mme A______, ainsi qu'à l'Institution genevoise de maintien, d'aide et de soins à domicile.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Pagan et Verniory,
Mme Cuendet, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :