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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4037/2018

ATA/83/2020 du 28.01.2020 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.03.2020, rendu le 09.09.2020, REJETE, 8C_184/2020
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;EMPLOYÉ PUBLIC;FONCTIONNAIRE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;RÉSILIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;MOYEN DE DROIT;MOTIF;DEVOIR PROFESSIONNEL;JUSTE MOTIF;RECONVERSION PROFESSIONNELLE;PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.29.al2; LPA.18; LPAC.27; LIP.123; RStCE.20; RStCE.21; REST.13.al1; LIP.114.al1; LIP.10; LIP.16; LIP.142; RStCE.56; Cst.5.al2
Résumé : Rejet du recours contre la sanction (suppression de quatre annuités) infligée au recourant, dès lors que les manquements reprochés au recourant ne sont pas des actes isolés et que la violation de ses devoirs de service revêt une certaine gravité. Celui-ci n’a pas respecté le plan d’études et a imposé à ses élèves des textes crus avec pour sujets récurrents une sexualité particulièrement violente, sans aucune nécessité pédagogique et en les mettant particulièrement mal à l’aise. Il a par ailleurs fait passé des éprouves non conformes à certains de ses élèves.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4037/2018-FPUBL ATA/83/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 janvier 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Guy Zwahlen, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né en 1959, a été engagé par le département de l'instruction publique, devenu depuis lors le département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP), en qualité de suppléant à partir de l'année scolaire 1999-2000.

Le 30 juin 2003, il a obtenu le certificat d'aptitude à l'enseignement secondaire I et II pour enseigner la culture générale.

Le 1er septembre 2004, il a été nommé fonctionnaire.

2) M. A______ a enseigné la culture générale dès la rentrée scolaire
2007-2008 au sein du B______
(ci-après : B______) et/ou du C______ (ci-après : C______).

3) Le 26 mars 2010, Monsieur D______, directeur du B______, a prononcé un blâme à l'encontre de M. A______. En substance, il lui était reproché de ne pas respecter des délais administratifs, d'importants manquements dans le mandat visant la réalisation de l'examen de fin d'apprentissage de culture générale pour l'année 2008-2009, lesquels avaient conduit au retrait dudit mandat, des corrections lacunaires et incohérentes et des totaux erronés s'agissant des examens de fin d'apprentissage de juin 2009 ainsi qu'un manque de respect envers ses collègues et Madame E______, doyenne responsable de l'enseignement général.

4) Le 7 avril 2010, M. A______ a recouru contre le blâme auprès du conseiller d'État alors en charge du DIP, exposant notamment que son droit d'être entendu avait été violé.

5) Par décision du 29 septembre 2010, le conseiller d'État alors en charge du DIP a annulé le blâme au motif de l'existence d'une violation du droit d'être entendu de l'intéressé. Il a toutefois prononcé un avertissement à son encontre eu égard à l'ensemble des manquements avérés qui ressortaient du dossier.

6) Par courrier recommandé du 15 janvier 2014, le directeur du C______ dans lequel M. A______ enseignait alors l'a convoqué à un entretien. Les points devant être abordés concernaient son désistement de dernière minute à un entretien prévu le 6 janvier 2014, la non-remise des bulletins scolaires aux élèves de la classe 415, le message qu'il avait rédigé concernant un doyen du C______, la plainte d'un parent suite aux propos qu'il aurait tenus à l'encontre des élèves de la classe 415 ainsi que la poursuite de son enseignement au sein du C______ durant l'année scolaire 2014-2015.

7) Un entretien s'est tenu le 3 février 2014 en présence de l'intéressé ainsi que du directeur et de deux doyens du C______.

À teneur du courrier du 12 février 2014 adressé par le directeur du C______ à M. A______, ce dernier s'était engagé à présenter ses excuses écrites à un doyen suite au message offensant qu'il avait rédigé concernant celui-ci.

8) En mai 2014, six élèves de la classe 415 à laquelle M. A______ dispensait des cours de culture générale du C______ ont signé une lettre dactylographiée non datée rédigée à l'attention du directeur de l'établissement afin de se plaindre de l'enseignement de l'intéressé. Leur professeur leur « racont[ait] sa vie en cours », les sifflait, leur « parl[ait] mal » quand ils ne comprenaient pas quelque chose, se moquait d'eux lorsqu'ils se trompaient, les renvoyait sans motif, les rabaissait en les traitant d'« imbécile » ou d'« incapable », critiquait les autres professeurs et leur méthode d'enseignement ou encore leur montrait le mauvais exemple dans la manière de se tenir en classe.

Ils indiquaient supporter difficilement cet enseignement qui ne les aidait pas à trouver un apprentissage.

9) Un entretien s'est déroulé le 26 mai 2014 en présence de M. A______ et le directeur du C______ concernant la plainte formée par les élèves de la classe 415.

10) Par courrier du 27 mai 2014 adressé à M. A______, le directeur du C______ a relevé qu'il ressortait de leur discussion de la veille qu'il n'avait toujours pas adopté avec la classe 415 un registre de langage en adéquation avec sa fonction d'enseignant. Il espérait que dorénavant il saurait conserver dans son enseignement « la bonne distance avec les élèves ».

11) À compter de la rentrée scolaire 2014-2015, M. A______ a enseigné à nouveau la culture générale au B______, soit notamment à la classe « D2A » de la filière des agents de propreté (ci-après : AGPR).

12) Durant le mois de décembre 2014, Mme E______ a reçu un courrier dactylographié et signé par quinze élèves de la classe AGPR-D2A concernant la manière d'enseigner de M. A______, laquelle était pour eux cause « de désarroi, de démotivation et parfois de rejet ». Le dialogue était très difficile, « parfois dévalorisant » et ne les incitait pas à s'investir. Leur professeur tenait des propos dégradants à leur égard, soit des insultes.

Ils sollicitaient une intervention rapide de sa part afin de créer un climat favorable pour la suite et la réussite de leur apprentissage.

13) Un entretien s'est déroulé le 18 décembre 2014 entre Mme E______ et l'intéressé à propos de la plainte précitée.

14) Un entretien d'évaluation et de développement personnel enseignant
(ci-après : EEDP) a été réalisé le 17 mars 2016 au terme duquel l'examinateur a conclu que M. A______ répondait aux compétences requises pour cette fonction.

15) Durant l'année scolaire 2017-2018, M. A______ enseignait la culture générale auprès de deux classes de première année du B______, soit celle des AGPR et celle des ferblantiers-installateurs sanitaires (ci-après : FIS-PIA), laquelle comportait sept élèves nés entre 1997 et 2001 et était couplée avec la classe des constructeurs de voie de communication (ci-après : CVC).

16) Par courrier du 11 janvier 2018 à M. A______, M. D______ a indiqué avoir constaté que les épreuves de langues et communication (ci-après : LC) qu'il avait fait passer aux élèves de la classe d'AGPR n'étaient pas celles que tous les enseignants de culture générale de première année avaient l'obligation de faire passer à leurs élèves, conformément aux décisions prises lors du séminaire de culture générale qui s'était déroulé en juin 2017 et aux indications reçues en séance de rentrée.

Il apparaissait dès lors que les consignes données par les responsables de la section n'avaient pas été respectées, ce qui relevait d'un non-respect de l'art. 13 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST - C 1 10.31).

Il exigeait de connaître la raison pour laquelle les évaluations n'avaient pas été effectuées conformément aux instructions reçues.

17) Par lettre dactylographiée du 8 février 2018 et par courrier manuscrit du
9 février 2018, trois, respectivement quatre élèves de la classe FIS-P1A, se sont plaints auprès de M. D______ des propos tenus par M. A______ durant les dernières semaines, lesquels les avaient profondément choqués.

Leur professeur tenait des propos du type : « si j'allais en Thaïlande pour calmer mes pulsions sexuelles sur une fille de 14 ans, est-ce normal ? » ou « si je vous demande de passer chez moi le soir pour éviter que votre moyenne ne baisse, est-ce que j'en ai le droit ? ». Peu avant de leur distribuer un document concernant le clonage, il leur avait demandé si la zoophilie était autorisée, alors que le document en question ne parlait pas de sexualité. En revanche, plusieurs autres documents distribués parlaient de sexualité. Depuis que Monsieur F______ était « passé dans les journaux », M. A______ leur parlait de sexualité, notamment sur les mineurs.

Ils ne souhaitaient plus assister à son cours, auquel ils allaient en ayant « une boule au ventre » et durant lequel ils se sentaient « mal halaise » (sic). Ils espéraient que des mesures soient prises pour qu'ils n'aient plus à subir cela.

Plusieurs supports de cours remis par M. A______ étaient annexés à leur courrier, dont le contenu sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

18) Le 21 février 2018, M. D______ ainsi que Monsieur G______, doyen de la filière « métallurgie du bâtiment », ont reçu ensemble six des sept élèves de la classe de FIS-P1A pour les entendre au sujet de l'ambiance de la classe en générale et plus particulièrement dans le cours de culture générale dispensé par
M. A______.

À teneur du procès-verbal relatif à cette réunion figurant au dossier et signé par chacune des personnes présentes, à l'exception de M. D______, les élèves avaient indiqué que l'ambiance était bonne au sein de la classe. Ils ont également relevé qu'il n'y avait pas eu de problème dans le cours de culture générale sauf depuis que les médias avaient parlé de « l'affaire F______ ». Depuis lors, M. A______ ne parlait plus que de cela. Il leur semblait que leur professeur ne suivait plus le programme et faisait une fixation sur cette affaire. L'un des élèves avait notamment indiqué qu'au début, il n'avait pas été choqué « plus que cela » de parler de sexualité en classe. En revanche, c'était la répétition, le contenu des lectures proposées et les propos utilisés qui les inquiétaient. Ils ne se sentaient pas assez à l'aise avec leur enseignant pour lui faire part de leur malaise. Ils ne savaient pas si des élèves de la filière CVC s'étaient également plaints. Un autre élève avait encore précisé qu'aucun élève de la classe FIS-P1A ne s'était rendu au cours la veille. Un élève a indiqué que sa mère ne voulait plus qu'il suive le cours de culture générale. M. D______ a indiqué aux élèves que leur lettre serait transmise à M. A______. En attendant la suite de la procédure, ils devaient retourner en cours. S'ils percevaient une quelconque menace de la part de leur enseignant, ils devaient lui en faire part immédiatement.

19) Par deux courriers datés du 22 février 2018, respectivement par un courrier du 26 février 2018 ainsi que par un autre courrier non daté, les parents de quatre élèves de la classe FIS-P1A ont indiqué qu'ils trouvaient que certains documents remis au cours de culture générale à leurs enfants étaient choquants, inadaptés ou inappropriés. Ils ne souhaitaient plus que leurs enfants participent à ce cours.

20) Par courriel du 22 février 2018, Madame H______, cheffe de secteur des formations professionnelles, a indiqué à une responsable des ressources humaines (ci-après : RH) de la direction générale de l'enseignement secondaire II que les élèves de première année devaient suivre des enseignements de culture générale selon un programme déterminé par le B______. Ce programme s'inscrivait dans trois niveaux de référence (école, canton, confédération) selon le plan d'études d'établissement - enseignement de la culture générale du B______, formation en trois ou quatre ans, édition 2011 (ci-après : PEE CG B______), le plan d'études cantonal - enseignement de la culture générale dans la formation professionnelle initiale (ci-après : PEc CG) et le plan d'études cadre pour l'enseignement de la culture générale.

En l'occurrence, les documents remis par les élèves n'entraient pas dans le cadre du plan d'études en vigueur dans l'établissement et auquel ils étaient soumis. D'un point de vue pédagogique, les exemples présentés s'éloignaient de références formatrices. Ils prenaient appui de manière beaucoup trop forte sur les aspects émotionnels. Leur choix en relation avec l'actualité était contestable. Par ailleurs, l'ancienneté des exemples (plus de dix ans) ne favorisait pas la philosophie décrite dans les textes cantonaux.

21) Le 16 mars 2018, M. A______ s'est vu remettre en mains propres une convocation pour un entretien de service devant avoir lieu le 16 avril suivant en présence de M. D______, d'une responsable RH de la direction générale de l'enseignement secondaire II ainsi que d'une assistante de direction du B______, laquelle serait chargée de la prise du procès-verbal. Il lui était possible de venir accompagné par la personne de son choix.

L'objectif de l'entretien était de l'entendre concernant ses propos en classe et ses supports de cours, lesquels étaient non conformes au plan d'études en vigueur, ainsi que sur la non-conformité de ses épreuves de LC. Les faits susmentionnés, sur lesquels il pourrait s'exprimer lors de l'entretien, étaient susceptibles de conduire au prononcé d'une sanction disciplinaire. À titre préalable, l'ouverture d'une enquête administrative et une suspension provisoire incluant une suspension de toute prestation à la charge de l'État étaient envisageables.

Étaient joints à la convocation différents documents en lien avec les faits qui lui étaient reprochés, soit notamment les plaintes des élèves de la classe
FIS-P1A et de leurs parents, le procès-verbal d'entretien entre le directeur et les élèves concernés ainsi que le compte rendu, non daté, établi par Monsieur I______, maître adjoint de la culture générale au sein du B______, lequel avait procédé à l'examen des supports de cours afin d'en vérifier la conformité avec le PEE CG B______. À teneur de ce compte rendu, M. I______ a relevé que certains documents utilisés par M. A______ pouvaient servir de compléments et être pertinents dans le cas de l'étude de l'importance du droit dans le quotidien. La teneur des autres documents, orientés sur l'intégrité sexuelle, l'interdiction de la prostitution des mineurs, le viol et les contraintes sexuelles s'écartait du thème du semestre, soit le droit à la formation, et n'était pas prévue par le plan d'études dans le cadre de la première année. Les textes proposés, tirés d'articles relatant des faits divers, présentaient des détails « crus » et explicites qui pouvaient objectivement choquer des élèves, a fortiori mineurs, envers qui l'école se devait d'être un lieu d'apprentissage serein. Le choix de ces documents ne paraissait dès lors pas judicieux. Certaines thématiques délicates étaient traitées par les professionnels du service de santé de la jeunesse. La classe en question avait bénéficié d'une telle intervention le 3 octobre 2017. S'il n'était pas exclu par le plan d'études de traiter des thèmes d'actualité, baser un cours de plusieurs semaines sur des notions ne faisant pas partie de celui-ci n'était pas acceptable. En outre, la répétition ne semblait pas judicieuse. Enfin, l'aspect « identité » n'était pas présent dans le cadre du deuxième semestre, étant traité dans le premier dans le cadre du développement de l'enfant et de l'adolescent. Les documents sur le clonage étaient également hors plan d'études. Afin d'examiner si le thème de l'identité avait été approfondi au détriment d'autres thèmes obligatoires ou si
M. A______ avait bien abordé ceux-ci précédemment, il fallait vérifier le classeur témoin du cours.

22) Lors de l'entretien de service du 16 avril 2018, M. A______, qui s'est présenté en compagnie de Monsieur J______, également enseignant au B______, a notamment relevé que la convocation audit entretien préjugeait la sanction à venir, puisqu'elle énumérait les différentes sanctions possibles. Il estimait que cet entretien était « dirigé » et qu'il y avait une « cabale » contre lui, laquelle ne provenait pas des élèves. Il relevait plusieurs problématiques relatives aux documents qui lui avaient été remis lors de sa convocation. Il estimait que des élèves de première année ou encore des agents de propreté n'avaient ni l'âge ni le niveau pour porter un jugement de valeur sur la qualité des supports de cours qu'il utilisait. Il servait par ailleurs ceux-ci depuis plusieurs années sans qu'il y ait eu de critique jusque-là. Il contestait avoir tenu les propos qui lui étaient reprochés par les élèves. L'une des lettres de plainte de parents n'était pas datée et ne comportait ni adresse, ni date de réception, tandis qu'une seconde était rédigée en albanais et n'avait fait l'objet que d'une rapide traduction par une secrétaire du B______. Il se demandait pourquoi il n'avait pas été convié à la séance entre les élèves et le directeur. Le document rédigé par M. I______ n'était quant à lui pas signé. Il doutait par ailleurs que ce dernier ait des compétences et expériences supérieures aux siennes pour être mandaté en qualité de « contrôleur pour la conformité des plans d'études ». Il estimait au contraire que c'était
M. I______ qui ne respectait pas le plan d'études. Les propos, illustrations et exemples utilisés en cours visaient à protéger les élèves contre les risques encourus dans la vie de tous les jours. Il estimait que ses propos étaient extrêmement bien reçus et compris, en particulier par les jeunes filles. Il admettait toutefois utiliser parfois des mots « crus ». Au sujet de « l'affaire F______ » il admettait avoir évoqué les relations enseignants-élèves lorsque les protagonistes étaient majeurs.

Le directeur du B______ a relevé qu'il attendait toujours une réponse à son courriel du 11 janvier 2018 afin de connaître la raison de la non-conformité des épreuves de LC.

M. A______ a indiqué qu'il n'avait pas répondu en raison de « la période de fin de semestre » qui était mal choisie et pour ne pas critiquer ni porter préjudice à M. I______. Il avait rappelé que Mme E______ avait par ailleurs indiqué que le thème « droit à la formation » pouvait être étudié en amont au premier semestre. Il estimait que les plans d'études étaient irréalisables. Lorsqu'il avait osé critiquer cela, il s'était fait « agresser » par sa doyenne Mme E______. Cette dernière ne donnait toutefois plus de cours et n'avait jamais enseigné dans les classes « faibles » et ne savait donc pas de quoi il en retournait. Les objectifs étaient irréalisables et les critères inappropriés pour ces classes. Il considérait pour le surplus que son droit d'être entendu avait été « bafoué » car il manquait des pièces au dossier et restait convaincu que la plainte des élèves avait été rédigée par quelqu'un d'autre.

M. J______ a indiqué qu'il estimait cette procédure partiale dès lors que seule la moitié de la classe s'était plainte. Il aurait apprécié entendre la version des élèves non choqués par les propos de l'intéressé.

À l'issue de l'entretien, un certain nombre d'objectifs ont été fixés à
M. A______, soit notamment d'adopter une attitude et une posture digne d'un enseignant et qu'il modifie les termes qu'il utilise, sans connotations sexuelles ou ambigües. Un délai de quatorze jours lui était imparti pour faire valoir ses observations après la réception du procès-verbal de l'entretien de service.

23) Dans ses observations du 14 mai 2018, M. A______ a indiqué, en sus des éléments déjà exposés lors de l'entretien de service, que son droit d'être entendu avait été violé dès lors qu'il n'avait pas eu la possibilité de solliciter la présence d'un responsable RH. Il était par ailleurs fait référence à un « procès-verbal » d'entretien de service, alors qu'il s'agissait en réalité d'un « compte rendu ». Il a par ailleurs sollicité, sur treize pages, des modifications du « compte rendu » de l'entretien de service.

S'agissant de la plainte des élèves, l'utilisation du mot « inadéquat » n'était pas dans leur vocabulaire. L'un des élèves se disant choqué par le contenu de certains documents avait par ailleurs été absent le jour de l'utilisation de ceux-ci, soit le 30 janvier 2018. Seules deux phrases avaient été évoquées dans la plainte, lesquelles avaient été inventées par les auteurs de ce courrier, et l'article défini comme choquant était librement accessible sur Internet. Un élève avait indiqué, lors de la réunion avec le directeur du 21 février 2018, que depuis que les médias parlaient de « l'affaire F______ », leur professeur ne parlait plus que de cela. La presse avait toutefois évoqué cette affaire pour la première fois le _____ 2017. Or, l'élève en question avait été absent du cours de culture générale six fois entre le 7 novembre 2017 et le 30 janvier 2018, ce qui représentait un taux d'absence de 41 %, ce qui prêtait à discussion. Il y avait par ailleurs une discordance entre les positions de Mme H______ et M. I______, la première estimant que le thème de l'identité n'était pas prévu par le plan d'études cantonal, le deuxième considérant que cela devait être abordé dans le cadre du développement de l'enfant. M. I______, chargé de la rédaction des évaluations communes, ne respectait par ailleurs pas le plan d'études. Il concluait en relevant que M. D______ avait violé plusieurs lois « à des fins qui ressemblent à du harcèlement ».

24) Par décision du 8 octobre 2018, déclarée exécutoire nonobstant recours, la Conseillère d'État en charge du DIP a prononcé à l'encontre de M. A______, compte tenu du fait qu'il exerçait son activité depuis plus de trente ans et qu'il avait déjà fait l'objet d'un avertissement le 29 septembre 2010, une réduction de son traitement à l'intérieur de sa classe de fonction portant sur quatre annuités, son traitement passant, dans la classe 20, de l'annuité 15 à l'annuité 11.

Il ergotait sur la dénomination du procès-verbal d'entretien de service, alors que cela n'avait aucune influence. Il n'avait pas été averti de la possibilité de demander la présence d'un représentant des RH au motif que sa présence était déjà prévue dans la convocation. Par ailleurs, le fait de citer le catalogue exhaustif des sanctions administratives ne constituait pas un préjugé sur l'éventuelle décision finale mais était au contraire une exigence qui devait être mentionnée sur la convocation. Son droit d'être entendu avait été respecté dès lors qu'il avait pu s'exprimer oralement lors de l'entretien de service.

Il niait avoir tenu les propos rapportés par les élèves et remettait en cause la légitimité de leur courrier. Il semblait accuser sa hiérarchie d'avoir « fait un faux », accusation extrêmement grave et sans fondement. Les élèves avaient clairement confirmé leur propos lors de leur audition le 21 février 2018. Concernant les supports de cours, il estimait qu'ils étaient conformes au plan d'études. Or, tant la cheffe de secteur des formations professionnelles que le maître adjoint de la culture générale du B______ avaient analysé que tel n'était pas le cas. Il n'y avait d'ailleurs pas de contradiction dans leurs analyses respectives. Si la thématique de l'identité n'était pas en tant que telle considérée comme un thème en soi, elle était de fait intégrée dans le développement de l'enfant et la construction de l'État de droit qui était le thème central de l'enseignement de la culture générale au B______. Il semblait accuser le directeur du B______ de violer une norme poursuivie d'office, ce qui était très grave. Or, les éléments constitutifs d'un abus de droit n'étaient pas remplis. Son responsable hiérarchique était en droit de lui demander d'accomplir ses prestations conformément au cadre légal et règlementaire, sans que cela ne constitue du mobbing ou la violation d'une norme pénale. Les 12 mai et 15 décembre 2014, il avait déjà été interpellé, suite à des plaintes d'élèves, sur les propos inadéquats qu'il tenait en classe.

L'ensemble de ces éléments constituait une violation de ses devoirs de fonction, plus précisément de sa mission d'éducation qui lui imposait notamment un devoir d'exemplarité. Il ne respectait pas le plan d'études de sa matière en imposant aux élèves des textes crus avec pour sujets récurrents une sexualité particulièrement violente, sans aucune nécessité pédagogique et en les mettant particulièrement mal à l'aise. Il reconnaissait par ailleurs la non-conformité de ses épreuves, mais s'en exonérait en remettant en cause sans fondement le travail de ses collègues. Il avait agi sciemment alors qu'il savait qu'il ne devait pas agir de la sorte, ce qui constituait une faute grave, ce d'autant plus qu'elle avait eu des répercussions non seulement sur ses collègues et sur le bon fonctionnement de l'établissement mais également sur l'image que donnait l'enseignement et le corps enseignant vis-à-vis du public.

Il était invité à respecter dorénavant strictement son cahier des charges et ses devoirs de service. De nouveaux manquements pourraient appeler le prononcé d'une sanction disciplinaire plus grave allant jusqu'à la résiliation des rapports de service.

25) Par acte du 16 novembre 2018, M. A______ a interjeté recours par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée en concluant à sa mise « à néant » et à l'octroi d'une indemnité équitable au titre de défraiement de ses frais d'avocat.

Son droit d'être entendu avait été violé. D'une part, il n'avait pas pu participer à l'audition des élèves plaignants et leur faire poser des questions, en particulier sur l'identité de l'auteur de la lettre adressée à la direction et sur le fait de savoir s'ils n'avaient pas été « poussés » à porter plainte, s'ils avaient réellement été « choqués » par les documents utilisés et si ce n'était pas plutôt le fait d'avoir abordé « l'affaire F______ » qui avait été le déclencheur de leurs plaintes. Il n'y avait eu aucun interrogatoire des autres élèves n'ayant pas formulé de plaintes, malgré sa demande expresse dans ce sens. D'autre part, son droit d'être entendu avait été violé du fait que la question de savoir si les élèves ayant formé la plainte n'avaient pas été « instrumentés » n'avait pas été instruite, malgré sa demande. L'instigateur et auteur de la lettre adressée à la direction n'avait pas été « démasqué ». Au vu du niveau faible des élèves en langue française, la lettre ne provenait pas de leur plume. Il convenait de rappeler que des parents qui s'étaient plaints avaient écrit en kosovar et devaient être de religion musulmane, que l'un des élèves qui s'était plaint était régulièrement absent, tandis qu'un autre n'avait même pas suivi son cours. Il était curieux de constater que ses supports avaient été utilisés pendant plusieurs années sans réaction de la part des élèves jusqu'à ce qu'il n'aborde « l'affaire F______ ». Il était « particulier » qu'il y ait à ce moment une réaction de la doyenne, laquelle n'était autre que l'épouse d'un frère de Monsieur F______. Il avait eu un différend avec le frère de M. F______ en 2009, alors qui celui-ci était maître adjoint dans le même établissement scolaire que lui.

Sur le fond, il contestait ne pas avoir respecté le plan d'études. Seuls les documents litigieux avaient été examinés et non l'ensemble des supports de cours utilisés durant toute l'année scolaire, soit plusieurs centaines de documents, ce qui n'était pas acceptable. Nonobstant, l'usage des documents litigieux était conforme au plan d'études. Il n'était par ailleurs pas soutenable de considérer que l'usage desdits documents et les thèmes abordés ne correspondaient pas à l'exemplarité et à la dignité que l'on était en droit d'exiger d'un membre du corps enseignant. Les thèmes abordés l'avaient été dans un but de prévention et d'éducation. Il s'agissait dès lors bien de préparer les élèves à devenir des citoyens responsables. Les documents utilisés constituaient des articles de presse, des décisions de tribunaux et des articles de loi, de sorte qu'ils étaient libres d'accès. De plus, il s'adressait à des élèves majeurs sexuellement.

S'agissant du fait que les épreuves ne correspondaient pas à celles imposées, il se justifiait par le niveau des élèves, lesquels auraient tous été en échec scolaire, ce qui n'était pas admissible. On ne pouvait lui faire grief d'avoir utilisé un texte simple et court, de niveau « A2+ » afin d'éviter que ses élèves ne soient déscolarisés par l'échec des tests.

Il n'y avait dès lors aucun motif justifiant une sanction.

Étaient notamment jointes à son recours l'épreuve de culture générale que le recourant avait fait passer à ses élèves ainsi que l'épreuve « officielle » validée par le B______, dont les contenus seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

26) Dans sa réponse du 20 décembre 2018, le DIP a conclu au rejet du recours. Aucune violation du droit d'être entendu ne pouvait être constatée et la sanction prononcée à l'encontre du recourant était justifiée et proportionnée.

27) Par réplique du 11 février 2019, le recourant a persisté dans ses griefs et conclusions. Il sollicitait l'audition de deux témoins MM. J______ et K______, lesquels pourraient confirmer qu'il n'avait pas de comportement inapproprié avec les élèves ou ses collègues.

Il n'avait pas déjà fait l'objet d'une sanction administrative comme le prétendait le département dès lors que son blâme avait été annulé au profit d'un avertissement, lequel n'était qu'une mesure organisationnelle. L'un des élèves dont les parents s'étaient plaints laissait son classeur à l'école, de sorte qu'il se demandait comment ces derniers avaient pu lire les documents litigieux. Personne n'avait répondu à sa question de savoir à quel moment l'avis de Mme H______ avait été sollicité. Cette dernière fondait par ailleurs son raisonnement uniquement sur les documents litigieux sans prendre en compte la manière dont ils étaient présentés aux élèves. Au vu de l'omerta qui existait au sein du DIP sur les relations professeurs-élèves, il était nécessaire d'informer les apprentis sur les risques et les interdits. L'ancienneté des articles présentés avait pour but de « dépassionner » le débat, contrairement à ceux relatant l'actualité « immédiate ». Remis dans leur contexte général, les documents litigieux étaient parfaitement adaptés pour l'enseignement aux élèves concernés. L'ambiance au sein du secteur de la culture générale du B______ était particulièrement délétère, notamment avec les membres de la direction, ce qui ressortait des procès-verbaux des séances des
30 mars et 30 avril 2009. Cette procédure lui faisait ressentir un profond sentiment d'injustice, qui l'empêchait de dormir et causait des effets négatifs dans sa vie familiale.

Sur les six apprentis à plein temps qui suivaient son cours de culture générale, seul deux avaient réussi l'année scolaire.

Il était de notoriété publique à Genève que lorsqu'un membre de la famille F______ était critiqué, cela donnait lieu à de vives réactions de la part des autres membres de la famille.

28) Lors de l'audience de comparution personnelles des parties et d'enquêtes du 1er avril 2019, M. A______ a notamment précisé qu'il avait utilisé l'article contenant dans le titre « le jardinier » pour illustrer le fait qu'il n'y avait pas seulement des enseignants qui pouvaient avoir des attitudes inadmissibles par rapport à des élèves mais également des formateurs d'apprentis. Il était particulièrement attentif sur le fait d'informer les élèves sur les risques qu'ils prenaient. Il connaissait plusieurs situations où il y avait eu des relations entre enseignants et élèves, et c'était précisément ce que son enseignement visait à éviter. Il était exact qu'il n'avait pas fait passer les épreuves officielles et communes à l'école à des élèves faisant un apprentissage d'agent de propreté et dont le niveau en français était particulièrement bas. Le texte de la deuxième épreuve officielle, qui consistait à résumer un texte simple, parlait de Dédale et d'Icare que les élèves ne connaissaient même pas. Or, il n'était même pas demandé à des élèves de première année du collège de faire des résumés de textes. S'agissant des plaintes des élèves, la lettre dactylographiée datait du 8 février 2018, alors même qu'elle était censée être postérieure à la lettre manuscrite qui était pourtant datée du 9 février 2018.

M. J______ a indiqué être enseignant dans les branches techniques au B______. Il avait une formation technique et n'avais pas de classe d'apprentis agents de propreté. Il connaissait l'intéressé depuis une dizaine d'années et ils étaient amis. Ils avaient eu régulièrement des classes en commun depuis 2010 et n'avait jamais entendu de commentaires ou de remarques négatifs de la part des élèves concernant son enseignement ou son attitude, ni le contenu de ses cours. Il avait en revanche entendu des compliments et des élèves qui avaient regretté de ne plus l'avoir. Il avait assisté à l'entretien de service de l'intéressé. Il avait eu l'impression d'assister à un procès, dont M. A______ était l'accusé. Il n'avait jamais reçu copie du procès-verbal. Il était étonnant que le premier paragraphe de la lettre du 8 février 2018 ait été écrite par des élèves, notamment au vu du vocabulaire utilisé et de la référence au cadre scolaire. Il confirmait que M. A______ utilisait parfois un langage et un humour au second degré. Il ne connaissait pas le programme de culture générale. Il ressentait une diminution du niveau des apprentis à leur arrivée en formation. Ils avaient de plus en plus de mal à maîtriser le programme. Il y avait un nivellement par le bas. Il y avait une diversification des élèves, dont beaucoup étaient depuis peu de temps en Suisse, et de plus en plus d'adultes. Il respectait les évaluations communes organisées dans l'établissement. Il était inquiet car il avait le sentiment que sa direction avait incité des élèves à écrire des courriers dénigrants à l'égard d'un collaborateur, ce qui était inacceptable. Il avait entendu indirectement qu'il existait des tensions entre la direction et les maîtres d'enseignement général.

M. K______ a indiqué qu'il était un collègue de travail de M. A______ depuis sept ou huit ans et qu'il enseignait les aspects techniques des métiers de l'électricité. Ils avaient des classes en commun. Ils n'avaient pas d'apprentis agents de propreté. Encore récemment, un élève lui avait dit qu'il avait beaucoup aimé l'enseignement de l'intéressé. Globalement, les échos qu'il avait eus étaient toujours positifs. Les cours étaient décrits comme étant intéressants. Il n'avait pas entendu d'élèves se plaindre de lui. Il ne connaissait pas le programme de culture générale. Il y avait des tensions entre la direction et les enseignants. La direction posait des problèmes et n'acceptait aucune remarque. Lorsqu'il y avait des épreuves d'établissement organisées, il les faisait passer aux élèves. Environ la moitié des élèves étaient en échec scolaire à la fin de la première année. Il y avait de grandes lacunes en termes de travaux écrits. La lettre du 8 février 2018 qui lui était soumise ne lui semblait pas avoir été rédigée par des élèves au vu des termes utilisés (cadre scolaire, inadéquat, choqués par exemple). M. A______ utilisait de l'humour au second degré. Il était inquiet de l'évolution de l'ambiance au sein de l'établissement où il lui semblait qu'il y avait un malaise et un manque de confiance au niveau de la direction.

29) Lors de l'audience d'enquêtes du 3 juin 2019, Messieurs L______ et M______ ont tous deux indiqué être apprentis ferblantiers de deuxième année et avoir suivi les cours de culture générale de M. A______ l'année précédente. Ils ont indiqué que leur professeur leur avait parlé de « l'affaire F______ » et qu'après cela les cours tournaient autour des problèmes de sexualité. Ils avaient discuté de cela et montré le contenu des cours à leur maître de classe, lequel avait été très étonné. Le doyen et le directeur avaient été prévenus. À un moment donné, le doyen leur avait d'abord dit de ne plus aller en cours, puis leur avait indiqué qu'ils devaient y retourner. Selon eux, les thèmes abordés par leur professeur ne concernaient pas la culture générale. Dans leurs cours actuels de culture générale, ils ne parlaient pas de sexualité.

M. L______ a précisé qu'il avait pris une photographie le
6 février 2018 d'un texte qui leur avait été remis par M. A______. Il avait été extrêmement étonné par son contenu. Il avait alors montré ce texte à son maître de classe. Il n'était pas présent lors de la discussion avec le doyen car il était malade. À ce qu'on lui avait raconté, les élèves avaient expliqué au doyen les « choses » qui les avaient étonnés durant les cours. Le doyen avait reformulé ces éléments « en meilleur français » dans une lettre. Lorsqu'il avait parlé de tout cela à ses parents en leur montrant le texte photographié, ceux-ci lui avaient indiqué qu'ils ne voulaient plus qu'il aille en cours. Sa mère avait alors écrit une lettre qu'il avait transmise au doyen. M. A______ ne dénigrait pas et ne rabaissait pas les élèves.

M. M______ a précisé que le premier semestre de cours avec M. A______ s'était bien passé. Ce n'était pas le cas du deuxième semestre. M. A______ leur avait parlé de « trucs [qu'il trouvait] choquants ». Il parlait de sexe et utilisait des termes qui étaient choquants. Ils avaient surtout été choqués par le document qui parlait de la carotte. La lettre de plainte avait été faite par les élèves, en parlant avec les professeurs et le doyen. Elle avait été rédigée par un élève qui ne participait pas au cours de M. A______, pour les aider. Lorsqu'ils avaient fini celle-ci, le doyen les avait également aidés un peu en corrigeant « l'écriture et le français ». Selon lui, l'élève qui avait rédigé et le doyen n'avaient pas changé le contenu de la lettre. Ses parents lui avaient dicté une lettre qu'il avait rédigée en albanais puis transmis au doyen. Ses parents avaient signé cette lettre. Ses parents ne s'étaient pas rendus à une réunion en présence du doyen et des élèves. Il ne se rappelait plus si M. A______ les avait mis en garde contre les suites que pouvaient avoir certains comportements inadmissibles, mais ce n'était pas exclu. Il se rappelait que leur professeur avait fait des mises en garde sur les attitudes qu'ils ne devaient pas avoir, surtout avec les filles. Il avait été absent pendant le deuxième semestre pendant plus d'un mois. Aucun élève n'allait alors en cours. Il était retourné en cours lorsqu'on leur avait dit qu'ils devaient y retourner à défaut de quoi ils seraient considérés comme étant en échec.

30) Dans ses observations après enquêtes du 12 juillet 2019, le DIP a persisté dans ses conclusions.

31) Dans ses observations après enquêtes du 16 septembre 2019, M. A______ a maintenu son argumentation et les conclusions de son recours.

Les documents litigieux qu'il avait distribués ne constituaient pas à proprement parler des supports à caractère violent ou sexuel, mais des documents qui abordaient ces questions dans le cadre de procédures pénales ou en relation avec des faits et des infractions y relatifs. Il y avait un lien avec la matière enseignée, en particulier sous l'angle de l'analyse des problèmes de société et d'éthique. Ils avaient également une valeur pédagogique dès lors qu'ils avaient également été distribués dans un but de prévention. Le département semblait sous-estimer les risques auxquels les élèves pouvaient être exposés concernant leur intégrité sexuelle et leur personnalité. La presse s'était récemment faite l'écho du fait qu'un apprenti sur trois aurait été victime de harcèlement sexuel sur son lieu de travail. Or, précisément, il avait distribué un document qui se rapportait à de tels faits commis par un formateur sur le lieu d'apprentissage. Les documents litigieux et les propos tenus s'adressaient par ailleurs à des élèves de plus de seize ans, ayant atteint la majorité sexuelle. Il ne s'agissait par ailleurs que de quelques documents sur les cent septante et un qu'il avait distribués. Les élèves entendus par la chambre administrative avaient confirmé qu'après la plainte et l'entretien de service, ses cours n'avaient plus donné lieu à des reproches. Ainsi, le but visé par la hiérarchie, même s'il n'était pas légitime, à savoir qu'il n'aborde plus en classe des thèmes relatifs à la sexualité et ne distribue plus de documents y relatifs avait été atteint. La sanction violait donc le principe de la proportionnalité. La sanction querellée était injustifiée, ne respectait pas le principe de la légalité et était disproportionnée.

Était joint un chargé de pièces contenant notamment plusieurs articles de journaux et documents émanant du syndicat Unia relatifs au harcèlement sexuel au travail ou lors d'un apprentissage.

32) Le 17 septembre 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 65 al. 1 du règlement fixant le statut des membres du corps enseignant primaire, secondaire et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles du 12 juin 2002 - RStCE - B 5 10.04).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de la conseillère d'État en charge du DIP prononçant une réduction du traitement du recourant à l'intérieur de sa classe de fonction portant sur quatre annuités.

3) Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

4) Le recourant se plaint du fait que son droit d'être entendu aurait été violé pour plusieurs motifs. D'une part, il n'avait pas pu participer à l'audition des élèves plaignants et leur poser des questions, en particulier sur l'identité de l'auteur de la lettre adressée à la direction et sur le fait de savoir s'ils avaient réellement été « choqués » par les documents utilisés. D'autre part, il n'y avait eu aucun interrogatoire des autres élèves n'ayant pas formulé de plaintes, malgré sa demande expresse dans ce sens. Enfin, la question de savoir si les élèves ayant formé la plainte n'avaient pas été « instrumentés » n'avait pas été instruite, malgré sa demande.

5) a. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 4.1). Le droit de faire administrer des preuves découlant du droit d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285
consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 134 I 140 consid. 5.3).

De plus, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; 132 V8 368 consid. 3.1). L'autorité de décision peut donc se livrer à une appréciation anticipée de la pertinence du fait à prouver et de l'utilité du moyen de preuve offert et, sur cette base, refuser de l'administrer. Ce refus ne viole le droit d'être entendu que si l'appréciation à laquelle elle a ainsi procédé est entachée d'arbitraire (art. 9 Cst. ; ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 136 I 229 consid. 5.3).

b. Dans un arrêt du 17 mars 2015 (ATA/271/2015 consid. 3a), la chambre de céans a admis que des faits puissent être établis par l'audition des personnes ayant formulé des griefs contre l'employé visé et non de l'ensemble des membres du service, dès lors que les auditions n'avaient pas pour objet d'établir des faits dans le cadre d'une procédure contentieuse au sens de l'art. 18 LPA, ni n'étaient survenues dans le cadre d'une enquête administrative au sens de l'art. 27 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). On pouvait certes regretter que l'ensemble du personnel n'ait pas été entendu ensuite mais l'autorité n'était pas tenue de prendre cette mesure. Elle était en effet en droit d'estimer que les faits étaient établis par d'autres éléments du dossier, au risque pour elle de ne pas pouvoir le démontrer par la suite à satisfaction de droit.

Cette jurisprudence a été reprise dans l'ATA/1177/2018 du 6 novembre 2018.

c. À titre préalable, il convient de relever que le recourant a sollicité dans sa réplique du 11 février 2019 l'audition de deux témoins, à laquelle il a effectivement été procédé lors de l'audience devant la chambre de céans du
1er avril 2019.

Le recourant reproche à l'intimé d'avoir interrogé uniquement les élèves signataires de la plainte et non tous ses élèves. En l'occurrence, l'intimé était effectivement en droit de recueillir les témoignages d'une partie seulement des élèves du recourant, comme le confirme la jurisprudence précitée. En outre, le recourant ne conteste pas avoir transmis les documents litigieux à ses élèves et n'avoir pas évalué les élèves de la classe d'AGPR au moyen de l'évaluation officielle, de sorte que l'audition des autres élèves n'apparaissait pas nécessaire. Par ailleurs, le recourant ne saurait fonder aucun grief quant au fait qu'il n'a pas été invité à participer à la réunion s'étant tenue le 21 février 2018 en présence des élèves de la classe de FIS-P1A. Cette réunion visait à entendre les élèves sur les propos et doléances rapportés concernant les cours dispensés par le recourant et il apparaît évident, au vu de la relation liant le recourant à ses élèves, que sa présence n'était pas souhaitable afin de permettre aux personnes présentes de s'exprimer librement. Le recourant a toutefois eu accès au procès-verbal de ladite séance ainsi qu'au nom des différents élèves présents. Par ailleurs, le juge délégué a procédé à l'audition de deux élèves signataires d'un des courriers de plainte à l'égard du recourant, durant laquelle l'intéressé a pu poser les questions qu'il souhaitait. S'agissant de l'identité du rédacteur de la plainte élément qui n'apparaît pas pertinent pour l'issue du présent litige , l'un des élèves entendus lors de l'audition précitée a pu y apporter une réponse. Enfin, contrairement à l'avis du recourant, aucun élément ne laisse à penser que les élèves auraient été instrumentalisés par une tierce personne pour formuler des griefs à l'encontre de leur professeur, de sorte qu'il ne peut être reproché à l'intimé de ne pas avoir procédé à des actes d'instruction complémentaires sur cette question.

Pour le surplus, il ressort du dossier que, tout au long de la procédure, que ce soit oralement au cours des entretiens ou par écrit notamment à la suite de l'entretien de service du 16 avril 2018, ou encore lors de son audition et de ses écritures devant la chambre de céans, le recourant a eu l'occasion de se déterminer et s'est exprimé de manière circonstanciée au sujet des éléments qui lui sont reprochés.

Partant, le grief de violation du droit d'être entendu est infondé.

6) a. Le fonctionnaire n'entretient pas seulement avec l'État qui l'a engagé et le rétribue les rapports d'un employé avec un employeur, mais, dans l'exercice du pouvoir public, il est tenu d'accomplir sa tâche de manière à contribuer au bon fonctionnement de l'administration et d'éviter ce qui pourrait nuire à la confiance que le public doit pouvoir lui accorder. Il lui incombe en particulier un devoir de fidélité qui s'exprime par une obligation de dignité. Cette obligation couvre tout ce qui est requis pour la correcte exécution de ses tâches (ATA/1619/2019 du
5 novembre 2019 consid. 4a ; ATA/605/2011 du 27 septembre 2011 consid. 7 et les références citées).

b. À Genève, ces principes figurent notamment dans la législation applicable aux enseignants de la fonction publique (art. 1 al. 4 de la loi sur l'instruction publique du 17 septembre 2015 - LIP - C 1 10). À teneur de l'art. 123 LIP, les membres du personnel enseignant doivent observer dans leur attitude la dignité qui correspond aux missions, notamment d'éducation et d'instruction qui leur incombe (al. 1) ; ils sont tenus au respect de l'intérêt de l'État et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (al. 2). Cette règle est reprise à
l'art. 20 RStCE, qui prévoit qu'ils doivent observer dans leur attitude la dignité qui correspond aux responsabilités leur incombant, tandis que l'art. 21 RStCE rappelle qu'ils se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1), de même qu'assumer personnellement leur travail, ainsi que s'abstenir de toute occupation étrangère au service pendant les heures de travail (al. 3). Selon l'art. 13 al. 1 REST, le maître participe à l'instruction et à l'action éducative des élèves. Par ailleurs, l'art. 114 al. 1 LIP prévoit que, dans le cadre scolaire, chaque élève a droit à une protection particulière de son intégrité physique et psychique et au respect de sa dignité.

c. En tant que membre du corps enseignant secondaire, l'enseignant est chargé d'une mission d'éducation dont les objectifs sont énoncés aux art. 10 et 16 LIP. Son rôle est ainsi de contribuer au développement intellectuel, manuel et artistique des élèves, à leur éducation physique mais aussi à leur formation morale à une période sensible où les élèves passent de l'adolescence à l'état de jeune adulte. Dans ce cadre, l'enseignant constitue, à l'égard des étudiants, à la fois une référence et une image qui doivent être préservées. Il lui appartient donc, dès qu'il se trouve hors de sa sphère privée, d'adopter en tout temps un comportement auquel ceux-ci puissent s'identifier. À défaut, il détruirait la confiance que la collectivité, et en particulier les parents et les élèves, ont placée en lui. Ce devoir de fidélité embrasse l'ensemble des devoirs qui lui incombent dans l'exercice de ses activités professionnelles et extra-professionnelles. Dès que ses actes sont susceptibles d'interagir avec sa fonction d'éducateur, le devoir de fidélité impose à l'enseignant la circonspection et une obligation de renoncer, sauf à prendre le risque de violer ses obligations (ATA/1619/2019 précité consid. 4c ; ATA/585/2015 du 9 juin 2015 consid. 11 ; ATA/605/2011 précité consid. 8 et les références citées).

7) a. Aux termes des art. 142 LIP et 56 RStCE qui ont la même teneur, les membres du personnel enseignant qui enfreignent leurs devoirs de service ou de fonction, soit intentionnellement, soit par négligence, peuvent faire l'objet des sanctions suivantes dans l'ordre croissant de gravité : prononcé par le supérieur hiérarchique, en accord avec la hiérarchie, le blâme (let. a) ; prononcées par le conseiller d'État en charge du département (let. b), la suspension d'augmentation de traitement pendant une durée déterminée (ch. 1) ou la réduction du traitement à l'intérieur de la classe de fonction (ch. 2) ; prononcés par le Conseil d'État à l'encontre d'un membre du personnel nommé (let. c), le transfert dans un autre emploi avec le traitement afférent à la nouvelle fonction, pour autant que le membre du personnel dispose des qualifications professionnelles et personnelles requises pour occuper le nouveau poste (ch. 1), ou la révocation, notamment en cas de violations incompatibles avec la mission éducative (ch. 2). Lorsqu'il prononce la révocation, le Conseil d'État peut stipuler que celle-ci déploie un effet immédiat si l'intérêt public le commande (al. 2).

b. Les rapports de service étant soumis au droit public, l'autorité qui inflige une sanction disciplinaire doit respecter les principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire. Ainsi, le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. À cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées pour le bon fonctionnement de la profession en cause, et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressé (ATA/1287/2019 du 27 août 2019 consid. 9a et les références citées). Elle doit tenir compte de l'intérêt de l'intéressé à poursuivre l'exercice de son métier, mais aussi veiller à l'intérêt public, en particulier la protection des élèves et le respect des valeurs pédagogiques de l'enseignement à Genève (ATA/605/2011 précité consid. 11 et les références citées).

Traditionnellement, le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5
al. 2 Cst., se compose des règles d'aptitude qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé de nécessité qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés et de proportionnalité au sens étroit qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 142 I 49 consid. 9.1 ; 135 I 233 consid. 3.1 et les arrêts cités).

8) a. La sanction prononcée repose, à teneur de la décision litigieuse, sur deux motifs, lesquels seront examinés successivement. Il est, d'une part, fait grief au recourant de ne pas avoir respecté le plan d'études en matière de culture générale de première année et d'avoir imposé aux élèves des textes crus avec pour sujets récurrents une sexualité particulièrement violente, sans aucune nécessité pédagogique et en les mettant particulièrement mal à l'aise. Il lui est, d'autre part, reproché d'avoir fait passer des épreuves de LC non-conformes aux élèves de la classe d'AGPR de première année.

S'agissant du fait que les épreuves ne correspondaient pas à celles imposées, il se justifiait par le niveau des élèves, lesquels auraient tous été en échec scolaire, ce qui n'était pas admissible.

b. Le recourant conteste pour sa part ne pas avoir respecté le plan d'études. Il considère que les thèmes abordés et les documents litigieux ont été examinés dans un but de prévention et d'éducation.

Le recourant tente de remettre en cause la légitimité des plaintes des 8 et 9 février 2018 signées par certains élèves de la classe FIS-P1A, relevant que l'un des signataires était dispensé de ses cours, qu'un autre avait été absent durant
40 % du temps et que la lettre semblait avoir été rédigée par une ou plusieurs tierces personnes. Il remet également en cause les plaintes formées par la suite par les parents de certains élèves, en prétextant qu'un des élèves laissait systématiquement son classeur en classe et que ses parents ne pouvaient donc avoir vu les documents litigieux, qu'une des lettres avaient été rédigée en albanais et que les parents étaient vraisemblablement musulmans, et qu'une autre lettre n'était pas datée et ne contenait pas de date de réception. Or, le recourant perd de vue qu'il ne s'agit pas de discuter de la validité des plaintes formées à son encontre, lesquels en tant que dénonciations non anonymes ne sauraient être remises en cause, mais de savoir si les faits rapportés sont avérés. Ainsi, les circonstances ayant entouré la rédaction des plaintes précitées ne sont pas déterminantes. Suite aux plaintes, l'autorité a instruit les faits rapportés. Six élèves sur les sept de la classe de FIS-P1A ont en l'occurrence confirmé la teneur des éléments ressortant des plaintes lors de l'entretien avec le directeur et un doyen du FCPC le 21 février 2018. Par ailleurs, les deux élèves entendus lors de l'audience du 3 juin 2019 ont témoigné du fait que le recourant parlait régulièrement de sexe en usant de propos choquants. Pour le surplus, les faits reprochés au recourant concernent principalement le contenu de certains documents distribués aux élèves dont la remise n'est en tant que telle pas contestée.

La question de savoir si le recourant a respecté le programme de première année de culture générale au B______ en abordant des questions de sexualité, et en particulier celles concernant les rapports entre élèves et enseignants ou entre apprentis et formateurs, n'est pas non plus déterminante. À teneur du dossier, le recourant a distribué à ses élèves, en qualité de supports de cours, plusieurs articles journaux anciens les plus anciens remontant à 2007 relatant des faits divers macabres ou sordides concernant des atteintes sexuelles ou à la vie, subies par de jeunes femmes ou adolescentes. L'article du « 20 Minutes » du ______ 2009 intitulé « un jardinier accusé d'abus sur une ado » détaille en particulier certains des sévices sexuels particulièrement odieux pratiqués par un formateur sur son apprentie. Il ressort également du dossier que l'une des épreuves de culture générale, relative à de la compréhension de texte, portait sur un article de la Tribune de Genève de 2007 intitulé « Après l'avoir tué, il a plongé son corps dans la baignoire ». Plusieurs autres articles de presse relatifs à la même affaire, en lien avec l'assassinat d'une étudiante qui se prostituait, ont également été distribués. À teneur des courriers de plaintes des 8 et 9 février 2018 d'élèves de la classe FIS-P1A, du procès-verbal de l'entretien du 21 février 2018 et des auditions de deux des élèves concernés, il apparaît qu'à compter de la médiatisation de « l'affaire F______ », le recourant a focalisé l'intégralité de son cours de culture générale sur des questions de sexualité touchant notamment les mineurs et les jeunes adultes. Les élèves entendus ont indiqué que le contenu des lectures remises, mais également les propos utilisés et leur répétition les avaient choqués et mis « mal à l'aise ». Plusieurs parents se sont également plaints du contenu des lectures remises aux élèves par le recourant. Sous prétexte de sensibiliser ses élèves à des problèmes de société qui pourraient les toucher, le recourant a mis à leur disposition des documents, ayant certes été à un moment ou à un autre accessibles directement dans la presse, mais qui accumulés et répétés étaient de nature à créer un cadre d'enseignement malsain. Rien ne permet, par exemple, d'expliquer l'utilité de distribuer plusieurs articles relatant à chaque fois les circonstances de l'assassinat d'une étudiante. Par ailleurs, le fait d'aborder de manière répétitive et inadéquate le thème de la sexualité, en des termes crus et au moyen de supports relatant des faits particulièrement violents, ne peut être considéré comme ayant eu une quelconque visée pédagogique. Il ressort d'ailleurs du dossier que les élèves entendus n'ont absolument pas perçu les raisons pour lesquels le thème de la sexualité a été abordé de manière aussi répétitive et choquante, estimant, tout comme leurs parents, que cela n'avait pas sa place dans un cours de culture générale.

Au demeurant, si le recourant souhaitait réellement mettre en garde ses élèves contre certains dangers auxquels ils pouvaient être confrontés la question de savoir si tel était son rôle demeurant ouverte , il aurait pu aborder ces questions par des moyens propres à ne pas heurter leur sensibilité. À cet égard, il sera notamment relevé que le recourant a produit à l'appui de ses écritures devant la chambre de céans différents articles de journaux et documents mettant en lumière les problématiques qu'il alléguait vouloir précisément aborder durant ses cours soit notamment les violences sexuelles concernant les mineurs lesquels ne comportent aucune description violente ou macabre. Ces documents auraient été effectivement aptes à apporter les éclairages souhaités dans ces domaines, sans choquer inutilement les élèves concernés.

Les éléments qui précèdent permettent de retenir que le recourant a manifestement failli dans sa mission d'éducation, enfreignant par là-même ses devoirs de fonction.

c. Le recourant ne conteste par ailleurs pas ne pas avoir soumis ses élèves à une évaluation commune imposée. Il justifie toutefois son comportement par le fait qu'au vu du niveau de ses élèves, il ne pouvait leur faire passer l'évaluation officielle, sous peine de les placer tous en situation d'échec scolaire. Il avait toutefois respecté le plan d'études en utilisant un texte simple et court, de niveau « A2+ ». En l'occurrence, si les motivations du recourant peuvent sembler de prime abord fondées, les conséquences de son comportement sont dommageables. D'une part, son désir d'éviter à ses élèves un échec ne saurait lui permettre de faire fi des évaluations mises en place par l'établissement et des instructions pédagogiques et administratives reçues de la part de sa hiérarchie. D'autre part, comme le relève le département, en ne respectant pas les évaluations communes mises en place, il y a un risque évident de ne pas pouvoir repérer les élèves en difficulté et ainsi de ne pas pouvoir leur offrir le soutien scolaire nécessaire. Par ailleurs, il apparaît que l'évaluation « officielle », contrairement à celle faite par le recourant, ne portait pas uniquement sur un exercice de compréhension de texte, mais également sur une partie « grammaire et vocabulaire » et sur une partie « rédaction ». Ainsi, en sus de ne pas respecter l'évaluation commune, l'évaluation du recourant ne testait pas toutes les compétences devant être évaluées. Enfin, le comportement du recourant pose des problèmes évidents d'égalité de traitement par rapport aux autres élèves de l'établissement ayant dû passer l'évaluation officielle de culture générale.

Les manquements reprochés au recourant sont donc également fondés sur ce point.

d. Pour le surplus, le recourant semble sous-entendre que la sanction litigieuse serait liée au fait qu'il aurait abordé « l'affaire F______ » durant ses cours et qu'il aurait eu un différend avec des membres de la famille F______ lorsqu'il enseignait dans le même établissement. Or, ce raisonnement ne résiste pas à l'examen. Quand bien même Mme E______, épouse d'un frère de M. F______, est effectivement doyenne au sein du B______ pour l'enseignement général, il ne ressort pas du dossier qu'elle serait intervenue de près ou de loin dans la présente affaire. Elle n'était pas directement destinataire des lettres de plainte des élèves ou de leurs parents et n'était pas présente lors de l'audition des élèves par l'établissement ou lors de l'entretien de service du recourant.

Enfin, le recourant soutient que l'ambiance au sein du secteur de la culture générale du B______ était particulièrement délétère, notamment avec les membres de la direction, de sorte qu'il ne comprend pas la raison d'un « acharnement » sur sa propre personne. Or, l'existence ou non d'une ambiance délétère n'est pas pertinente dans le cas d'espèce. Les faits ayant conduit à la sanction litigieuse ne concernent aucunement les rapports entre le recourant et ses collègues ou sa hiérarchie, mais exclusivement le contenu de ses cours et de ses évaluations.

9) À teneur du dossier, les manquements reprochés au recourant ne sont pas des actes isolés. Il a notamment déjà fait l'objet de plaintes de la part d'élèves ou de parents en mai et en décembre 2014 concernant notamment les propos qu'il tenait à leur égard et le contenu de ses cours. Ces éléments ont donné lieu au prononcé d'un avertissement. Ces plaintes, en sus d'autres éléments, ont abouti à plusieurs entretiens entre le recourant et sa hiérarchie. Par ailleurs, comme susmentionné, la violation de ses devoirs de service revêt une certaine gravité. Le fait que le recourant ait cessé de parler et de distribuer des documents relatifs à la sexualité après les plaintes et l'entretien de service ne saurait, comme il le prétend, justifier sous couvert du respect du principe de la proportionnalité la renonciation à toute sanction. Le rétablissement d'un comportement conforme à ses devoirs de service n'empêche en rien le prononcé d'une sanction pour les actes commis précédemment. Le prononcé d'une sanction apparaît, dans ces conditions, justifié. La sanction prononcée soit la réduction de son traitement à l'intérieur de sa classe de fonction n'apparaît pas démesurée à la lumière des faits commis et du catalogue des sanctions envisageables. Elle se situe notamment au milieu dudit catalogue. De même, la suppression de quatre annuités reste également proportionnée au sens étroit. En tenant compte de toutes les circonstances du cas d'espèce, et notamment du fait que le recourant exerce son activité depuis plus de trente ans, l'autorité intimée n'a ainsi pas violé le principe de la proportionnalité ni abusé de son pouvoir d'appréciation.

La sanction prononcée étant conforme au droit, le grief du recourant doit être écarté. Compte tenu de ce qui précède, le recours entièrement mal fondé sera rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 novembre 2018 par Monsieur A______ contre la décision de la conseillère d'État en charge du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 8 octobre 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guy Zwahlen, avocat du recourant, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Verniory, Mme Cuendet, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :