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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/55/2020

ATA/109/2020 du 30.01.2020 ( DIV ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/55/2020-DIV ATA/109/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 30 janvier 2020

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

COMMUNE DE B______
représentée par Me Malek Adjadj, avocat

 



Attendu, en fait, que :

1) Monsieur A______, né en 1969, habite la commune de B______ (ci-après : la commune).

2) Le 4 décembre 2019 à 13h30, un surveillant de la piscine de C______ a rempli un formulaire d'interdiction d'entrée à ladite piscine à l'encontre de M. A______, valable immédiatement et jusqu'au 5 mai 2020.

Ledit formulaire, contresigné par un policier municipal, indique que M. A______ a refusé de le signer.

3) Cette interdiction d'entrée a été envoyée à M. A______ par courrier.

4) Le 9 décembre 2019, le conseil administratif (ci-après : CA) de la commune a pris une autre décision d'interdiction d'entrée concernant la même personne et la même période que celle du 4 décembre 2019, décision déclarée exécutoire nonobstant recours et envoyée à M. A______ par pli recommandé.

Selon le suivi des envois de la Poste, ce pli a été distribué au guichet le 19 décembre 2019.

5) Le 3 janvier 2020, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision d'interdiction d'entrée le touchant, en ne produisant que la décision-formulaire du 4 décembre 2019, et concluant à la restitution de l'effet suspensif ainsi qu'au constat de nullité de la décision attaquée.

La décision était nulle car non motivée, aucun motif ne résultant de la décision elle-même ni ne lui ayant été donné malgré plusieurs courriels de sa part.

6) Le TAPI a transmis ce recours à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 7 janvier 2020, pour raison de compétence.

7) Le 9 janvier 2020, le juge délégué a indiqué aux parties que la décision attaquée (telle que produite par l'intéressé) n'étant pas déclarée exécutoire nonobstant recours, le recours emportait de plein droit effet suspensif conformément à l'art. 66 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

8) Le 14 janvier 2020, M. A______ a écrit à la chambre administrative. Malgré l'effet suspensif, le personnel de la piscine ne l'avait pas laissé rentrer le matin même.

9) Le 13 janvier 2020, la commune s'est adressée au juge délégué. M. A______ n'avait pas produit la décision du 9 décembre 2019, qu'il avait pourtant reçue, si bien que l'effet suspensif avait bien été retiré.

L'interdiction d'entrée avait été prononcée pour cinq mois. Elle était intervenue à la suite de plusieurs épisodes d'agressivité de la part de M. A______ à l'encontre des autres nageurs, épisodes constatés par le personnel de la piscine et pour lesquels M. A______ avait été systématiquement admonesté. Les nombreux incidents récents étaient de plus en plus préoccupants et graves, l'agressivité voire la violence manifestée par M. A______ n'ayant fait que s'accroître.

La nécessité d'une interdiction d'accès immédiate était dès lors prépondérante.

10) Le 21 janvier 2020 également, M. A______ a indiqué à la chambre administrative n'avoir reçu que la décision-formulaire du 4 décembre 2019.

Il convenait d'accorder l'effet suspensif à son recours, l'interdiction d'entrée pouvant être mise en oeuvre par la suite au cas où elle serait confirmée à l'issue de la procédure. Il n'était pas un individu dangereux.

11) Sur ce, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

Considérant, en droit, que :

1) La compétence pour ordonner la restitution de l'effet suspensif au recours appartient à la présidence ou à la vice-présidence de la chambre administrative ou, en cas d'empêchement de ceux-ci, à un juge (art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 septembre 2017).

2) Aux termes de l'art. 21 LPA, l'autorité peut d'office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (al. 1) ; ces mesures sont ordonnées par le président s'il s'agit d'une autorité collégiale ou d'une juridiction administrative (al. 2).

En vertu de l'art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3).

3) Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) - ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1514/2019 du 14 octobre 2019 consid. 5 ; ATA/1467/2019 du 2 octobre 2019 consid. 4 ; ATA/1430/2019 du 26 septembre 2019). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu'aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités).

4) Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l'absence d'exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).

Pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu'un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités).

5) En l'espèce, contrairement au premier constat effectué par le juge délégué - qui se fondait sur un état de fait tronqué et qui, par ailleurs, ne constituait pas une décision -, il s'avère que l'effet suspensif a bien été retiré dans la décision du CA du 9 décembre 2019, et qu'il convient de statuer au sujet de son éventuelle restitution, comme demandé initialement dans l'acte de recours.

L'interdiction d'entrée a été prononcée pour une durée de cinq mois et ne concerne que la piscine publique de C______. Il conviendra certes de vérifier au cours de l'instruction du recours les allégations de la commune, selon lesquelles le recourant s'est montré agressif voire violent à l'égard d'autres usagers, mais au stade actuel de la procédure, l'intérêt public à la sauvegarde de l'ordre et de la sécurité des usagers doit prévaloir face à l'intérêt privé du recourant à utiliser la piscine publique la plus proche de son domicile, alors qu'il en existe plusieurs autres dans la région, des deux côtés de la frontière.

La restitution de l'effet suspensif sera donc refusée, et les frais de la procédure réservés jusqu'à droit jugé sur le recours.

 

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l'effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu'à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Monsieur A______ ainsi qu'à Me Malek Adjadj, avocat de la commune de B______.

 

 

La vice-présidente :

 

 

 

F. Krauskopf

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :