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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4733/2019

ATA/43/2020 du 17.01.2020 sur JTAPI/1158/2019 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4733/2019-MC ATA/43/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 janvier 2020

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Léonard Micheli-Jeannet, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 décembre 2019 (JTAPI/1158/2019)


EN FAIT

1) Monsieur A______, également connu des autorités suisses sous d'autres identités, né le ______ 1985, est originaire d'Algérie. Il est démuni de tout document d'identité.

2) Il a déposé une première demande d'asile, sous l'une de ses autres identités, en Suisse le 19 juin 2009.

3) Par décision du 25 novembre 2009, l'office fédéral des migrations, devenu depuis secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM), n'est pas entré en matière sur cette demande et a ordonné son renvoi de Suisse à destination de l'Allemagne, où il avait précédemment déposé une demande d'asile, chargeant le canton de Genève de procéder à l'exécution de cette mesure.

4) Le 19 janvier 2010, il s'est soustrait à son renvoi en Allemagne en exigeant son débarquement de l'avion qui devait l'y reconduire. Il a alors été placé en détention administrative.

5) Après vingt-neuf jours de détention, le 16 février 2010, il a été refoulé en Allemagne, accompagné par trois policiers.

6) Le 11 mai 2013, il est revenu en Suisse et, le surlendemain, y a déposé une nouvelle demande d'asile.

7) Par décision du 30 juillet 2013, devenue définitive le 8 août 2013, le SEM a refusé d'entrer en matière sur cette demande et a ordonné son renvoi de Suisse, le sommant de quitter le pays au plus tard le jour suivant l'entrée en force de sa décision, sous peine de s'exposer à des mesures de contrainte.

8) Les 18 novembre 2009 et 27 septembre 2019, il s'est vu notifier deux décisions d'interdiction d'entrée en Suisse prononcées à son encontre par le SEM, la première valable jusqu'au 2 novembre 2012, la seconde jusqu'au 22 juillet 2022.

9) Selon l'extrait de son casier judiciaire, entre le 25 octobre 2013 et le 4 avril 2019, il a fait l'objet de six condamnations pénales, notamment pour vol et tentative de vol (à une reprise, le 25 octobre 2013) et divers séjours illégaux. Il a été condamné le 20 juillet 2018 par le Ministère public genevois pour séjour illégal et opposition aux actes de l'autorité à une peine privative de liberté de soixante jours.

10) Le 3 juin 2014, il a été identifié par les autorités algériennes. Il a ensuite été présenté à ces dernières lors d'un entretien consulaire tenu à Berne le 15 juillet 2015.

11) Il a été placé en détention administrative en vue de l'exécution de son renvoi du 11 juin au 20 août 2015 (soit pendant quarante-deux jours).

12) Entre août 2015 et mai 2019, les autorités algériennes ont délivré cinq
laissez-passer en sa faveur pour permettre son retour en Algérie. Toutes les tentatives de refoulement entreprises au cours de cette période par la police genevoise sur la base de ces documents ont échoué. Il a notamment refusé d'embarquer dans l'avion devant l'y reconduire le 3 août 2015, pendant sa détention administrative, et le 5 novembre 2015 (il séjournait alors à la prison de Champ-Dollon). Il en a fait de même le 19 juillet 2018, après que la police l'avait interpelé le jour même dans le foyer où il logeait. Le 2 mai 2019, date à laquelle une nouvelle place avait été réservée sur un vol, la police, venue le chercher pour le conduire à l'aéroport, ne l'a pas trouvé dans ledit foyer.

13) Interrogé par la police le 4 avril 2019, il a notamment déclaré qu'il avait toujours résidé au foyer ______, qu'il n'avait pas de lien particulier avec la Suisse, qu'il voulait aller vivre en France avec son amie, qu'il n'avait entrepris aucune démarche en vue de son retour dans son pays et qu'il recevait « l'aide sociale ». En première page du procès-verbal d'audition, la police a indiqué qu'il était « sans domicile fixe ».

14) Le 27 septembre 2019, il a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon en vue de l'exécution de deux peines privatives de liberté.

15) Le 15 octobre 2019, le SEM a demandé aux autorités genevoises de réserver une place sur un vol à destination de l'Algérie pour y permettre son retour, précisant qu'il solliciterait ensuite la délivrance d'un nouveau laissez-passer auprès des autorités algériennes, lequel serait transmis à swissREPAT.

16) La police a effectué une réservation pour un vol avec escorte policière, que swissREPAT a confirmée pour le 30 mars 2020 au départ de Genève.

17) Par jugement du 18 décembre 2019, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a ordonné la libération conditionnelle de M. A______ pour le 24 décembre 2019. L'intéressé avait indiqué qu'il avait le projet de séjourner en France auprès de Madame  B______, avec qui il était lié par un partenariat enregistré.

18) Le 20 décembre 2019, les autorités suisses ont adressé aux autorités françaises une demande tendant à sa réadmission sur leur territoire. Ces dernières ont refusé le lendemain, aux motifs qu'il n'était pas titulaire d'un titre de séjour valable et qu'il n'y avait pas de trace de son passage dans le pays au cours des six derniers mois.

19) À sa sortie de prison, le 24 décembre 2019, M. A______ a été remis entre les mains de la police en vue de son refoulement.

À 14h12, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à son encontre pour une durée de quatre mois en application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), en lien avec l'art. 75 al. 1 let. c
(recte : h) LEI, et de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI. À ce dernier, il avait préalablement déclaré qu'il était en bonne santé et n'était pas d'accord de retourner en Algérie, dans la mesure où sa fiancée habitait en France, à Annecy.

20) Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le même jour.

21) Auditionné par le TAPI le 26 décembre 2019, M. A______ a déclaré qu'il n'était toujours pas d'accord de retourner en Algérie ; il ne monterait pas dans l'avion le 30 mars 2020. Il avait séjourné au foyer ______ jusqu'au mois d'avril 2019. Il avait ensuite vécu avec son amie à Annecy. Il n'était pas marié avec elle. Il n'avait pas encore entrepris des démarches dans ce sens. Il était avec elle depuis environ une année. Il n'avait jusqu'ici entrepris aucune démarche afin d'obtenir un permis de séjour en France. Il ne disposait pas des documents d'identité nécessaires à cette fin. Son passeport se trouvait chez une connaissance en France. Il était toutefois échu. Lors de sa dernière arrestation, il accompagnait son amie, qui venait entreprendre des démarches à Genève pour trouver un travail. Lors de sa sortie de prison, le 24 décembre 2019, il pensait retrouver sa liberté et rejoindre son amie pour faire la fête à Annecy. Il était d'accord de quitter la Suisse pour aller en France. S'il devait être remis en liberté, il serait d'accord d'être logé à nouveau dans un foyer à Genève et d'y être assigné.

Le représentant du commissaire de police a déclaré que M. A______ avait été libéré le 20 août 2015, à l'issue de sa détention administrative, après qu'il avait refusé de monter dans l'avion qui devait le reconduire en Algérie le 3 août 2015. Le TAPI lui a fait remarquer que ladite détention avait pourtant été ordonnée jusqu'au 11 septembre 2015. Il a alors indiqué qu'il ignorerait si cette mise en liberté avait été ordonnée [de façon anticipée] par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Il n'avait pas trouvé trace de cela dans le dossier en sa possession et n'avait actuellement pas accès au dossier physique de M. A______ tenu par l'OCPM, ceci jusqu'au 2 janvier 2020.

À la demande de M. A______, le TAPI a procédé à l'audition de Mme B______ en qualité de témoin. Celle-ci a déclaré qu'elle souhaitait se marier civilement avec M. A______, qu'elle avait épousé religieusement le ______ 2019 dans une mosquée à Genève. Ils voulaient le faire depuis plusieurs mois déjà, mais en avaient été empêchés à cause de l'arrestation de ce dernier. Elle s'apprêtait à entreprendre les démarches utiles auprès des autorités françaises. Elle avait pensé le faire ce jour même, après la libération conditionnelle de M. A______, mais la mairie était fermée. Elle s'y emploierait dès que possible, le jour même, la mairie ouvrant à 15h. Ils avaient vécu ensemble de mai à fin août 2019 dans un appartement qu'ils avaient loué en France.

M. A______ a conclu à sa mise en liberté immédiate. Aucun changement déterminant des circonstances susceptibles de justifier une nouvelle mise en détention n'était intervenu depuis sa remise en liberté le 20 août 2015. Sa détention était en outre contraire au principe de la proportionnalité. Il avait en effet un projet de mariage, qu'il aurait pu concrétiser s'il n'avait pas été arrêté en septembre 2019. Il était absolument disproportionné de le maintenir en détention, alors qu'il pourrait par exemple être assigné à un lieu de résidence.

22) Par jugement du 27 décembre 2019, le TAPI a confirmé l'ordre de mise en détention pris par le commissaire de police pour la durée de quatre mois, soit jusqu'au 23 avril 2020.

M. A______ ne démontrait pas qu'il serait, d'une façon ou d'une autre, légitimé à se rendre valablement ailleurs que dans son pays d'origine, en particulier en France, dont les autorités avaient d'ailleurs très récemment refusé sa réadmission. Il n'était actuellement pas fondé à formuler un choix quant à son lieu de destination. Sous cet angle, la préparation de l'exécution de son refoulement de Suisse à destination de l'Algérie, seul État dans lequel il pouvait légalement se rendre, ne prêtait donc pas le flanc à la critique. Il ne saurait par ailleurs être remis sans autre en liberté pour quitter la Suisse en choisissant lui-même son lieu de destination. Les autorités suisses devaient au contraire s'assurer du fait qu'il quitterait effectivement le territoire, en l'état vers son pays d'origine.

Il était plus que vraisemblable que sa remise en liberté, le 20 août 2015, avait résulté du fait qu'il avait refusé de monter à bord de l'avion qui devait le reconduire dans son pays le 3 août 2015, de sorte que l'exécution de son renvoi n'apparaissait plus envisageable dans un délai raisonnable. Depuis lors, et alors qu'il en avait toujours l'obligation, il n'avait pas entrepris la moindre démarche pour quitter la Suisse. En outre, il avait à nouveau refusé à deux reprises, le 5 novembre 2015 et le 19 juillet 2018, de monter à bord de l'avion supposé le reconduire dans son pays.

L'un des motifs à l'origine de la première mise en détention s'était ainsi renouvelé - et renforcé - et demeurait donc. Dans ces conditions, une seconde mise en détention, destinée à assurer l'exécution d'une nouvelle tentative concrète de renvoi, prévue le 30 mars 2020 et en soi possible, n'était pas contraire à la jurisprudence du Tribunal fédéral.

L'intéressé ne disposait plus d'un lieu de séjour à Genève. Ainsi, à sa sortie de prison, le 24 décembre 2019, le commissaire de police pouvait être amené à penser qu'il tenterait de se soustraire à son renvoi et disparaître dans la clandestinité, étant rappelé que la France avait refusé de l'admettre sur son territoire.

M. A______ faisait l'objet d'une décision de renvoi entrée en force, qui n'avait toujours pas été exécutée. Il n'avait pas été condamné pour une infraction qualifiée de crime depuis sa mise en détention administrative en 2015 de sorte qu'une nouvelle mise de détention ne saurait (à nouveau) reposer sur les art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI.

Depuis sa remise en liberté, survenue le 20 août 2015, il n'avait pas entrepris la moindre démarche pour quitter la Suisse, avait refusé à deux reprises de monter à bord d'un avion qui devait le reconduire en Algérie, déclarait toujours ne pas être disposé à y retourner. Au vu de ces éléments, on pouvait clairement admettre l'existence d'un risque concret qu'à nouveau, il n'obtempérerait pas aux instructions des autorités suisses lorsqu'elles lui ordonneraient de monter à bord de l'avion le 30 mars, mais aussi qu'il pourrait ne plus se trouver à disposition des autorités suisses s'il devait être libéré, situation visée par le motif de détention prévu par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI. Le principe de la légalité était donc respecté.

Les autres conditions pour la mise en détention étaient remplies, ce que le jugement détaillait.

L'ordre de mise en détention litigieux était confirmé.

23) Par acte du 9 janvier 2020, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à l'annulation du jugement et à sa libération immédiate.

L'art. 76 LEI avait été violé. En application de la jurisprudence, il n'était pas possible de détenir une personne sur la base des éléments qui existaient déjà lors de la première mise en détention. En l'espèce, la situation au moment de la nouvelle demande de mise en détention était analogue à celle ayant mené à la libération de M. A______ en août 2015. L'autorité requérante n'avait apporté aucun élément tangible permettant d'inférer le contraire. Elle n'était notamment pas capable de détailler les circonstances précises de la libération de M. A______ le 20 août 2015.

Le TAPI avait émis des hypothèses sur les raisons ayant amené à la remise en liberté. Cela n'était pas acceptable. Il ne lui appartenait pas de se substituer à l'autorité requérante en retenant qu'il existait vraisemblablement un changement de circonstances afin de justifier la nouvelle mise en détention. Pour le surplus, l'hypothèse émise, à savoir que le renvoi n'apparaissait plus envisageable dans un délai raisonnable, ne résistait pas à l'examen, un vol ayant été organisé à peine deux mois après la libération de l'intéressé, soit en novembre 2015.

Le TAPI retenait comme circonstance nouvelle le fait que le recourant ne disposait plus d'un lieu de séjour à Genève. Or, le TAPI avait comparé des situations de juillet 2018 et de mai 2019 avec celle de décembre 2019. Il lui appartenait de comparer entre août 2015 et décembre 2019. De surcroît, cet argument se heurtait aux garanties constitutionnelles imposant aux autorités d'assister les personnes en situation de détresse et de mettre à leur disposition des solutions d'hébergement.

Enfin, le TAPI avait lui-même relevé que l'un des motifs à l'origine de la première mise en détention s'était renouvelé, renforcé et donc demeurait. Le TAPI lui-même considérait dès lors que la situation ne s'était pas modifiée depuis plusieurs années.

24) Le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

Il existait des circonstances nouvelles depuis 2015, soit trois soustractions à des renvois en refusant de prendre un n vol et une disparition du foyer rendant impossible le renvoi prévu le 2 mai 2019.

Par ailleurs, le terme de la détention administrative de l'intéressé ordonnée le 11 juin 2015 avait eu lieu non pas en raison d'une libération ordonnée par l'OCPM, mais de l'écrou, le 20 août 2015, de l'intéressé par les autorités pénales vaudoises, lesquelles avaient accepté, en juin 2011, de reporter l'exécution d'une peine privative de liberté de quatre-vingt jours devant être purgée par l'intéressé, cela afin de favoriser l'exécution de son départ, déjà organisé pour prendre place le 3 août 2015. Il produisait les pièces en attestant.

25) Par écritures spontanées du 15 janvier 2020, le commissaire a indiqué qu'il venait de recevoir un courrier, daté du 10 janvier 2020, du maire délégué de la commune déléguée ______ (commune de ______) en France faisant état d'un rendez-vous appointé le 7 février 2020 avec l'intéressé et Mme B______ « pour une audition préalable à leur mariage en mairie ______ ». Le document était joint, à l'instar d'un courriel de l' « agent d'accueil et État civil » de ladite commune attestant que l'audition préalable au mariage était une étape obligatoire des dossiers de mariage, mais n'était pas une garantie que le mariage ait lieu et rappelant que la célébration d'un mariage ne conférait pas un titre de séjour, une démarche devant être faite auprès du service de l'immigration et de l'intégration compétent.

26) Invité à répliquer, le recourant a persisté dans ses conclusions. La recevabilité des pièces était douteuse, l'intimé devant être en leur possession au moment de la réponse. La détention constituait une violation disproportionnée du droit du mariage au sens de l'art. 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ainsi qu'au respecte de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH) du recourant et de Mme B______.

Selon Mme B______, la cérémonie était prévue le 14 mars 2020. La mairie ne pourrait toutefois attester de ce fait que le vendredi 17 janvier 2020. Le projet de mariage était donc imminent. Il n'existait aucune raison que le permis de séjourner en France soit refusé au recourant. Le recourant risquait de manquer cette étape obligatoire aux projets du couple pour des raisons qui confinaient au formalisme excessif. L'avenir immédiat du recourant était dans un pays voisin de la Suisse, les moyens mis en oeuvre en Suisse étaient inopportuns, s'agissant de l'occupation d'une place de détention administrative en Suisse romande et de l'organisation d'un vol en Algérie.

Une attestation de Monsieur C______ était jointe. Sa fille B______ habitait avec son fiancé, M. A______ à l'adresse mentionnée en en-tête, soit la sienne, au ______. L'attestation datait du 5 janvier 2020 et était accompagnée des copies des cartes d'identité de M. C______ et de sa fille.

27) Les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile - c'est-à-dire dans le délai de dix jours - devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr -F 2 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 1ère phr. LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 10 janvier 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 § 1 let. f CEDH et de
l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF
140 II 1 consid. 5.1).

4) En vertu de l'art. 76 al. 1 let. b LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si elle a été condamnée pour crime.

Elle le peut aussi si des éléments concrets font craindre que la personne concernée entende se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de l'art. 90 LEI notamment (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités
(art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

Ces chiffres 3 et 4 de l'art. 76 al. 1 let. b LEI décrivent tous deux les comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition ; ils doivent donc être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un de ces deux motifs - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2). Si le fait d'être entré en Suisse illégalement, d'être démuni de papiers ou de ne pas quitter le pays dans le délai imparti à cet effet ne saurait, pris individuellement, suffire à admettre un motif de détention au sens de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 (voire ch. 4) LEI, ces éléments peuvent constituer des indices parmi d'autres en vue d'établir un risque de fuite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_142/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.2 ; ATF 140 II 1 précité).

Lorsqu'il examine le risque de fuite, le juge de la détention doit établir un pronostic, en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du renvoi le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions en seront réunies. Il dispose pour ce faire d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3).

5) a. En l'espèce, le recourant fait l'objet d'une décision de renvoi du 30 juillet 2013 ainsi que d'une mesure d'interdiction d'entrée, prononcée le 27 septembre 2019, valable jusqu'au 22 juillet 2022.

Persistant à ne pas vouloir retourner en Algérie, il n'a entrepris aucune démarche en vue de l'exécution de son renvoi depuis 2015, ce qu'il ne conteste pas. Au contraire, il s'y est toujours opposé et déclare s'y opposer encore.

Il a par ailleurs disparu du foyer où il logeait, le 2 mai 2019, rendant impossible le renvoi prévu le même jour.

Au vu de ces éléments, les conditions de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI sont remplies.

b. Le recourant allègue que de nouveaux motifs de mise en détention seraient nécessaires à la suite de sa « libération » en 2015.

Cet argument est infondé dès lors que le recourant n'a pas été libéré en 2015, mais a fait l'objet d'un écrou sur le canton de Vaud où il a été transféré en août 2015.

De surcroît, il existe des éléments nouveaux consistant principalement en ses refus de prendre un vol les 5 novembre 2015 et 19 juillet 2018, sa disparition le 2 mai 2019, une ordonnance pénale du 20 juillet 2018 notamment pour opposition aux actes de l'autorité.

En conséquence, la nouvelle mise en détention est admissible, la durée prévue, même cumulée aux précédentes détentions administratives, restant largement inférieure à la durée totale autorisée (art. 79 LEI).

Les conditions légales susmentionnées pour ordonner sa mise en détention administrative sont ainsi manifestement remplies.

6) a. La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

Conformément à l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder.

Aux termes de l'art. 79 LEI, la détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion visées aux art. 75 à 77 LEI ainsi que la détention pour insoumission visée à l'art. 78 LEI ne peuvent excéder six mois au total (al. 1) ; la durée maximale de la détention peut, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus et, pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, de six mois au plus, dans les cas suivants : la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (let. a) ; l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (let. b ; al. 2).

b. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la détention administrative d'une personne de nationalité algérienne est compatible avec l'actuelle impossibilité d'organiser des vols spéciaux à destination de l'Algérie, puisque, réalisés par l'intermédiaire de vols de ligne, les renvois sous la contrainte à destination de ce pays sont possibles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.4 ; 6B_106/2016 du 7 décembre 2016 consid. 1.4.1 ; 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 5.2 ; 2C_1072/2015 du 21 décembre 2015 consid. 3.3).

c. En l'espèce, les autorités compétentes ont entrepris avec célérité les démarches nécessaires à la réservation d'un vol de ligne, dès lors qu'une place est réservée dans un avion le 30 mars 2020.

En l'espèce, aucune autre mesure, moins incisive, n'est apte à garantir la présence du recourant lors de l'exécution du renvoi, celui-ci s'étant opposé tant verbalement que physiquement à son renvoi et ayant clairement affirmé sa volonté de ne pas être renvoyé dans son pays d'origine. La détention est en conséquence apte à atteindre le but voulu par le législateur, s'avère nécessaire compte tenu de l'attitude adoptée par le recourant et proportionnée au sens étroit, dès lors que conformément à la jurisprudence, si l'intérêt du recourant est grand à ne pas être renvoyé, l'intérêt public au respect des décisions de justice doit primer. La détention est conséquence proportionnée compte tenu de la proximité de la date du renvoi.

7) a. Le recourant fait grief à l'intimée de violer l'art. 8 CEDH et son droit au mariage.

Selon l'art. 8 CEDH, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (al. 1). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (al. 2).

Selon l'art. 12 CEDH, à partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit.

Selon la jurisprudence, il n'y a pas atteinte à la vie familiale si l'on peut attendre des membres de la famille qu'ils réalisent leur vie de famille à l'étranger (ATF 135 I 153 consid. 2.1).

b. Le recourant est ressortissant d'Algérie et sa compagne est française. Aucun des deux ne possède le droit de résider sur territoire helvétique. Leurs démarches pour se marier ont été entreprises en France. Compte tenu de ce qui précède, le renvoi du recourant de Suisse n'empêche pas son mariage avec son amie. Il sera loisible aux intéressés de poursuivre leurs démarches en vue de leur mariage en France, depuis l'Algérie pour ce qui concerne le recourant, ou d'examiner s'il leur est possible de se marier en Algérie, s'ils le souhaitent.

Le recourant indique que sa mise en détention entraverait le mariage, notamment par son impossibilité à se rendre à l'audition préalable à celui-ci. En l'état, l'intéressé ne démontre toutefois pas qu'il aurait le droit de se rendre en France, notamment au bénéfice d'un laissez-passer, afin de pouvoir participer audit entretien. Par ailleurs, sa seule participation à cet entretien ne garantit au recourant ni que le mariage puisse être fait, ni qu'il aura le droit de séjourner en France. Si l'intérêt privé du recourant à ce que le mariage puisse se célébrer est certes important, il reste moindre par rapport à l'intérêt public au renvoi de l'intéressé. Par ailleurs, la chambre de céans a déjà jugé que la mise en détention d'une personne le jour même de son mariage, empêchant la tenue de ladite cérémonie, ne violait pas la CEDH et restait proportionnée (ATA/48/2011 du 27 janvier 2011 consid. 9).

Le grief de violation de la CEDH sera donc rejeté.

8) a. Selon l'art. 80 al. 4 LEI, l'autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative, de maintien ou de levée de celle-ci, tient compte de la situation de la personne détenue et des conditions d'exécution de la détention.
Celle-là doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

Selon l'art. 83 LEI, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (al. 2). L'exécution n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3). L'exécution de la décision peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

b. L'impossibilité de l'exécution d'un renvoi présuppose, en tout état de cause, que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (ATA/1176/2019 du 24 juillet 2019, ainsi que la jurisprudence citée).

En l'espèce, aucune pièce au dossier n'indique que le renvoi serait impossible.

Au vu de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, aucune autre mesure moins incisive que la détention ne peut être envisagée et l'exécution du renvoi est possible.

9) Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 et
art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA- E 5 10.03). Vu l'issue de celui-ci, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 janvier 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 décembre 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Léonard Micheli-Jeannet, avocat du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre de détention administrative de Favra, pour information.

siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière:

 

 

P. Hugi

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :