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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4736/2019

ATA/30/2020 du 14.01.2020 sur JTAPI/1160/2019 ( MC ) , ADMIS

Recours TF déposé le 17.02.2020, rendu le 17.08.2020, REJETE, 2C_170/2020
Normes : LaLEtr.10; CEDH.5; Cst.31; Cst.36; LEI.75.al1; LEI.76; LEI.78; LEI.79; LEI.80.al6.leta
Résumé : Cas particulier dans lequel la détention administrative de trois mois ordonnée par le commissaire de police n’est pas à même de garantir l’exécution de l’expulsion du ressortissant étranger mis en cause. La détention étant disproportionnée la remise en liberté immédiate est ordonnée par la chambre administrative.
En fait
En droit

république et

canton de F______

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4736/2019-MC ATA/30/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 janvier 2020

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Catarina Monteiro Santos, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
30 décembre 2019 (JTAPI/1160/2019)


EN FAIT

1.             M. A______, né le ______ 1998, est originaire du Cameroun, et résiderait en Suisse depuis l'âge de dix ans environ.

Il ressort d'une ordonnance pénale du Ministère public genevois du 26 avril 2018 que M. A______ a été au bénéfice d'un permis de séjour échu le 10 mai 2016.

La documentation figurant à la procédure et concernant le statut administratif de M. A______ au regard du droit des étrangers ne semble sur ce point pas être complète.

2.             M. A______ a fait l'objet des condamnations pénales suivantes :

a. Le 10 novembre 2015, le Tribunal des mineurs de Lausanne (VD) l'a condamné à une peine privative de liberté de deux ans pour lésions corporelles graves (art. 122 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), lésions corporelles simples (art. 123 al. 1 CP), menaces (art. 180 CP), délit à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 - LStup - RS 812.121), et de contravention à la loi sur les stupéfiants (art. 19a LStup).

b. Le 25 novembre 2016, le Ministère public genevois l'a condamné, par ordonnance pénale OPMP/______/2016 prononcée dans la procédure P/______/2016, à une amende de CHF 500.- pour contravention à la loi sur les stupéfiants (art. 19a LStup - possession de 98,6 gr de haschisch).

c. Le 26 avril 2018, le Ministère public genevois l'a condamné, par ordonnance pénale OPMP/______/2018 prononcée dans la procédure P/______/2018, à une peine privative de liberté de nonante jours, assortie du sursis avec un délai d'épreuve de trois ans, pour recel (art. 160 CP) et séjour illégal (art.115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20).

d. Le 14 décembre 2018, le Tribunal de police de F______ l'a condamné, par jugement JTDP/______/2018 rendu dans la procédure P/______4/2018, à une peine privative de liberté de huit mois pour vol commis à réitérées reprises (art. 139
al. 1 CP), dommages à la propriété commis à réitérées reprises (art. 144 al. 1 CP), violations de domicile commises à réitérées reprises (art. 186 CP) et séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

e. Le 26 mars 2019, le Ministère public genevois l'a condamné, par ordonnance pénale OPMP/______/2019 rendue dans la procédure P/______/2019, à une peine privative de liberté d'ensemble de cent cinquante jours après révocation du sursis accordé le 26 avril 2018, pour recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), délit à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 LStup) et séjour illégal (art. 115 al. 1
let. b LEI).

f. Le 13 juin 2019, le Tribunal de police de F______ l'a condamné, par jugement JTDP/826/2019 prononcé dans la procédure P/______/2019, à une peine privative de liberté de quatre mois pour tentative de vol (art. 22 et 139 CP) et violation de domicile (art. 186 CP) et a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans.

3.             Le 2 octobre 2018, une demande de soutien à l'exécution du renvoi de M. A______ a été adressée au secrétariat d'État aux migrations
(ci-après : SEM).

4.             Le 3 mai 2019, les autorités camerounaises ont reconnu M. A______ comme un citoyen camerounais.

5.             Le 15 octobre 2019, l'office cantonal de la population et des migrations
(ci-après : OCPM), après avoir entendu M. A______, a décidé de ne pas reporter l'exécution de la décision d'expulsion judiciaire prononcée à son encontre par le Tribunal de police le 13 juin 2019.

6.             Par jugement JTPM/______/2019 rendu le 6 novembre 2019 dans la procédure PM/______/2019, le Tribunal d'application des peines et mesures a refusé d'ordonner la libération conditionnelle de M. A______ dans le cadre de l'exécution de la peine privative de liberté de cent cinquante jours prononcée le
26 mars 2019, vu le pronostic très défavorable.

7.             Par arrêt ACPR/867/2019 rendu le 11 novembre 2019 dans la procédure PS/68/2019, la chambre pénale des recours de la Cour de justice (ci-après : CPR) a déclaré irrecevable pour défaut de compétence matérielle le recours formé par M. A______ contre la décision de l'OCPM du 15 octobre 2019.

8.             Par arrêt AARP/______/2019 du 14 novembre 2019, la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : CPAR) a rejeté l'appel formé par
M. A______ contre le jugement du Tribunal de police du 13 juin 2019.

9.             Par arrêt 6B_1340/2019 du 29 novembre 2019, le Tribunal fédéral a admis les recours de M. A______ et du Ministère public, annulé l'arrêt du
11 novembre 2019 et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision par l'autorité compétente.

10.         Par ordonnance OCPR/______/2019 du 16 décembre 2019, la CPR, prenant acte du conflit de compétence négatif et du risque que l'expulsion de M. A______ soit exécutée avant que son recours ne puisse être tranché, a accordé l'effet suspensif au recours contre la décision de l'OCPM du 15 octobre 2019.

11.         Le 16 décembre 2019, le SEM a transmis le laissez-passer valant passeport établi le 21 novembre 2019 par l'ambassadeur du Cameroun en Suisse, et valable jusqu'au 20 janvier 2020, en faveur de M. A______, reconnu comme ressortissant camerounais.

12.         Le 27 décembre 2019, M. A______ a été remis en liberté.

13.         Le 27 décembre 2019, le commissaire de police, après avoir entendu M. A______, qui a indiqué s'opposer à retourner au Cameroun, où il ne connaissait plus personne et craignait pour sa vie, a ordonné la mise en détention administrative de ce dernier pour une durée de trois mois en vue de l'exécution de la mesure judiciaire d'expulsion prononcée à son encontre par le Tribunal de police, en application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI (auparavant LEtr -
RS 142.20) et soumis sa décision le même jour au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

14.         M. A______ a été entendu le 30 décembre 2019 par le TAPI. Il s'est opposé à la décision du commissaire de police. Il a déclaré qu'il était arrivé en Suisse à l'âge de dix ans, qu'il avait eu un permis B qu'il n'avait pas renouvelé, qu'il vivait depuis 2017 au chemin B______ ______ à C______ chez sa cousine Mme D______, qu'il n'avait plus de famille au Cameroun depuis le décès de sa grand-mère et n'y connaissait personne, que toute sa famille vivait en Suisse, sa mère et sa tante à E______ et sa cousine à F______, qu'il n'aurait pas de ressources au Cameroun, où la situation sécuritaire était mauvaise en raison d'attaques du groupe terroriste Boko Haram.

Le commissaire de police a déclaré pour sa part qu'il n'entendait pas exécuter la décision de non-report d'expulsion de l'OCPM aussi longtemps que le recours de M. A______ ne serait pas tranché au fond, et qu'il n'aurait par ailleurs aucune peine à obtenir un nouveau laissez-passer si celui accordé par l'ambassade venait à expirer.

15.         Par jugement JTAPI/______/2019 du 30 décembre 2019, le TAPI a confirmé la détention de M. A______ pour une durée de trois mois.

Le recourant faisait l'objet d'une expulsion judiciaire, il avait été condamné à plusieurs reprises pour des crimes, son départ de Suisse répondait à un intérêt public certain, il ne disposait à F______ ni de lieu de séjour ni de moyens de subsistance, il n'avait plus de contact avec sa cousine, qui n'habitait plus C______, de sorte que la détention respectait le principe de proportionnalité. Les autorités compétentes avaient par ailleurs initié les démarches nécessaires en vue de l'exécution du renvoi, et la durée de la détention, de trois mois, ne paraissait pas disproportionnée vu les démarches et procédures en cours. Les craintes de M. A______ pour sa vie n'apparaissaient pas fondées, mais ce grief devait quoi qu'il en soit être examiné par l'autorité saisie du recours contre la décision de non-report de l'OCPM.

16.         Par acte du 6 janvier 2020 remis à la poste le 7 janvier 2020, M. A______ a recouru à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement JTAPI/______/2019 du 30 décembre 2019.

Une expulsion dans son pays mettrait concrètement sa vie en danger, car le Cameroun était en état de guerre civile et de violence généralisée. De plus, il n'avait pas de famille là-bas. Il ne voyait pas où aller ailleurs qu'en Suisse. Ses conditions de détention étaient indignes.

17.         Le 8 janvier 2020, le TAPI a produit son dossier, sans formuler d'observations.

18.         Le 9 janvier 2020, le commissaire de police a conclu au rejet du recours. La décision attaquée n'apparaissait pas arbitraire, elle n'était pas disproportionnée, et le recourant n'avait subi aucune atteinte à sa dignité du fait de ses conditions de détention.

19.         Le 13 janvier 2020, M. A______ a renoncé à faire usage de son droit de répliquer et a persisté dans les conclusions de son recours.

20.         Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l'art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 7 janvier 2020 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

En outre, à teneur dudit art. 10 LaLEtr, elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle en cette matière (al. 2 2ème phr.) ; elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l'étranger (al. 3 1ère phr.).

3) a. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101 ; ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_1017/2012 du 30 octobre 2012 consid. 3 et les jurisprudences citées) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 précité consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012
consid. 2.1).

b. En vertu de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI en lien avec l'art. 75 al. 1 LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion au sens de la LEI ou une décision de première instance d'expulsion au sens notamment des art. 66a ou 66a bis CP, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment si elle menace sérieusement d'autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et fait l'objet d'une poursuite pénale ou a été condamnée pour ce motif (art. 75 al. 1 let. g LEI) ou a été condamnée pour crime (art. 75 al. 1
let. h LEI).

Par crime au sens de l'art. 75 al. 1 let. h LEI, il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a), ce qui est notamment le cas des lésions corporelles graves
(art. 122 CP), du vol (art. 139 ch. 1 CP) ainsi que du recel (art. 160 CP).

c. La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude - exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

Aux termes de l'art. 79 LEI, la détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion visées aux art. 75 à 77 LEI ainsi que la détention pour insoumission visée à l'art. 78 LEI ne peuvent excéder six mois au total (al. 1) ; la durée maximale de la détention peut, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus et, pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, de six mois au plus, dans les cas suivants : la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (al. 2 let. a) ; l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (al. 2 let. b).

Conformément à l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder.

La durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

Le principe de la proportionnalité interdit non seulement que la mesure administrative en cause soit plus incisive que ce qui est nécessaire, mais aussi qu'elle soit insuffisante pour atteindre son but (arrêts du Tribunal fédéral 2C_497/2017 du 5 mars 2018 consid. 4.2.2 ; 2C_431/2017 du 5 mars 2018 consid. 4.3.3).

Selon la jurisprudence, le devoir de célérité est en principe violé lorsque, pendant plus de deux mois aucune démarche n'est plus accomplie en vue de l'exécution du renvoi par les autorités compétentes, sans que cette inaction soit en première ligne causée par le comportement des autorités étrangères ou celui de l'étranger lui-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 et les arrêts cités).

d. À teneur de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention est levée si le motif de la détention n'existe plus ou l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, une telle impossibilité supposant en tout état de cause notamment que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6668/2012 du 22 août 2013 consid. 6.7.1 relativement à l'art. 83 al. 2 LEI, a fortiori).

e. En l'espèce, et ainsi que l'a admis le TAPI, les conditions de détention administrative sont remplies. Le recourant a été condamné notamment pour vols, recel et lésions corporelles graves, infractions constitutives de crimes. Il fait par ailleurs l'objet d'une décision d'expulsion judiciaire exécutoire.

La détention administrative est en conséquence justifiée dans son principe.

f. Sous l'angle du principe de la proportionnalité, au regard de l'ensemble des circonstances, notamment de son passé pénal, du pronostic défavorable retenu par le Tribunal pénal, soit du risque de récidive, et de la menace que le recourant présente ainsi pour l'ordre et la sécurité publics, l'intérêt privé du recourant à être libéré ne saurait primer l'intérêt public à son maintien en détention en vue d'assurer l'exécution de son renvoi.

Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion ont été entreprises tempestivement, et l'autorité attend désormais l'issue du recours contre la décision de l'OCPM.

Le commissaire de police a quant à lui assuré qu'il n'exécuterait pas l'expulsion jusqu'à droit jugé.

Le laissez-passer pourra être renouvelé sans difficulté s'il devait expirer avant une décision sur recours.

Dans le cas présent, il n'apparaît pas prima facie que l'exécution du refoulement du recourant s'avérerait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible.

Certes, le recourant fait valoir que sa vie serait menacée au Cameroun, mais en dépit de tensions locales - au Nord du pays en lien avec les djihadistes du Sahel, à l'Est en lien avec le Centrafrique, et dans certaines zones anglophones en lien avec les minorités - le pays n'est ni en guerre ni en guerre civile, et le recourant ne rend pas vraisemblable qu'il serait concrètement menacé.

Quoi qu'il en soit, l'examen de ce grief est du ressort de l'OCPM, qui a refusé de suspendre l'exécution de l'expulsion, et dont la décision est aujourd'hui l'objet d'un recours pendant.

Il reste à examiner la durée de la détention administrative litigieuse au regard du délai dans lequel l'expulsion pourra vraisemblablement être exécutée.

La durée de trois mois, telle que fixée par le commissaire de police et admise par le TAPI, ne sera pas suffisante pour qu'il soit jugé sur le report de l'exécution de l'expulsion. En effet, le conflit négatif de compétences devra préalablement être tranché par la chambre constitutionnelle de la cour de justice, dont l'arrêt pourra encore faire l'objet d'un recours, et ce n'est qu'une fois le conflit de compétence tranché que l'autorité désignée comme compétente pourra instruire et décider sur le fond, sachant que sa décision pourra elle aussi faire l'objet d'un recours.

Si la suspension de l'exécution de l'expulsion n'est pas en soi de nature à remettre en question le maintien en détention administrative (ATA/1143/2019 du 19 juillet 2019), il apparaît dans le cas d'espèce que la détention de trois mois ordonnée par le Commissaire de police n'est pas à même de garantir l'exécution de l'expulsion du recourant.

La détention apparaît ainsi disproportionnée.

Le recours sera admis, la décision de mise en détention annulée et le recourant remis en liberté.

4) Le recourant se plaint de conditions de détention indignes.

Le commissaire de police a rappelé que la fouille à l'entrée est la règle et est conduite avec tact, caméras éteintes. La tentative de suicide est le fait d'un autre détenu, n'implique pas l'établissement, et si elle peut certes être choquante, n'attente pas à la dignité du recourant.

Le raisonnement du commissaire doit être confirmé, et le grief, pour peu qu'il soit recevable, sera rejeté.

Au vu des éléments mis en évidence ci-dessus, le recours de M. A______ sera admis.

5) La procédure étant gratuite (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument de procédure ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, et le fait que le recourant a rédigé lui-même son recours, son avocate se contentant d'indiquer que son client n'entendait pas répliquer, une indemnité réduite de procédure de CHF 200.- sera allouée au recourant (art. 87 al. 2 LPA).

******

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 janvier 2020 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 décembre 2019 ;

au fond :

l'admet ;

ordonne la remise en liberté immédiate de M. A______ ;

alloue à M. A______ une indemnité de procédure de CHF 200.- ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

dit que, les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Catarina Monteiro Santos, avocate du recourant, au commissaire de police, au Tribunal administratif de première instance, à l'office cantonal de la population et des migrations, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'à l'établissement de Favra, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mmes Krauskopf et
Cuendet, M. Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

F______, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.