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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3952/2018

ATA/1809/2019 du 17.12.2019 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3952/2018-FPUBL ATA/1809/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 décembre 2019

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Christian Dandres, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE



EN FAIT

1) Après un stage du 1er avril au 31 juillet 2000 afin d'organiser la manifestation « B______ », M. A______, né en 1971, a, dès le 15 mars 2001, été engagé en qualité de collaborateur scientifique auprès des Musées C______, sous statut d'auxiliaire, au taux de 100 % puis de 80 %, par la Ville de Genève (ci-après : la ville). En octobre 2005, il a été rattaché administrativement au Musée D______.

Par décision du 15 septembre 2006, le Conseil administratif de la ville
(ci-après : CA) a confirmé la nomination de M. A______, au terme de sa période d'essai, en qualité de collaborateur scientifique, à 80 %, pour une durée indéterminée.

Le 4 juin 2008, le CA a accordé à M. A______ une première promotion en le faisant bénéficier de la 12ème classe de traitement avec effet au 1er juillet 2008, et, le 16 juin 2010, une seconde promotion avec la 13ème classe de traitement, avec effet au 1er juillet 2010.

2) Le 14 octobre 2009, le CA a adopté le règlement d'application du statut du personnel de la Ville de Genève du 14 octobre 2009 (REGAP - LC 21 152.0), entré en vigueur le 31 décembre 2010.

En vertu de l'art. 10 REGAP, sont nommés en qualité de cadres intermédiaires les collaborateurs et collaboratrices qui exercent une activité d'encadrement et des responsabilités en élaborant des méthodes, des programmes et des moyens dans le cadre de politiques et d'objectifs définis (al. 1). Leur fonction se situe entre les classes de salaire I à M (al. 2). La qualité de cadre intermédiaire est mentionnée dans l'acte de nomination (al. 3).

Comme cela sera relevé dans la partie en droit, les membres du personnel qui ne sont pas cadres supérieurs ou intermédiaires ont droit à un congé additionnel d'une demi-heure par heure supplémentaire et une heure par heure supplémentaire effectuée entre 22h00 et 06h00 ainsi que les dimanches et les jours fériés, alors qu'il n'y pas une telle majoration pour les cadres intermédiaires.

3) Lors de sa séance du 15 décembre 2010, le CA a décidé que le titre de cadre intermédiaire s'appliquerait à toutes les personnes qui satisfaisaient aux trois critères énoncés dans le REGAP, étant précisé que les cadres intermédiaires avaient sous leur responsabilité directe et constante au moins trois personnes
(2ème §).

Par ailleurs, les personnes qui portaient le titre de chef de projet, même si les personnes qui leur rapportaient pendant la durée du projet n'avaient pas de lien hiérarchique constant avec elles, seraient néanmoins également considérées comme cadres intermédiaires (3ème §).

Cette décision ferait l'objet d'une directive d'application du REGAP et serait transmise à la direction générale pour information aux partenaires sociaux (4ème §).

4) Le 20 décembre 2010, la direction des ressources humaines de la Ville
(ci-après : DRH) a informé M. A______ que l'entrée en vigueur le 31 décembre 2010 du nouveau statut du personnel (LC 21 151 ; ci-après : le statut), qui avait été entériné le 29 juin 2010 par le Conseil municipal, entraînerait un certain nombre de changements. Notamment, sa nouvelle classe de traitement serait J. Son poste restait celui de collaborateur scientifique à 80 %.

5) Le 6 avril 2011, M. A______ a signé le cahier des charges de la fonction de médiateur culturel - chef de projet, classée en catégorie L de l'échelle des traitements.

Le 29 juin 2011, le CA a décidé de classer la fonction de M. A______ dans ladite catégorie L avec effet au 1er juillet 2011 et d'en modifier l'intitulé, qui devenait médiateur chef de projets, à 80 %, aux Musée D______ et Musée E______.

6) Dès août 2011 et jusqu'à la fin 2011, M. A______ a eu un désaccord et des discussions avec la DRH et le CA au sujet d'un congé parental à la suite de la naissance de ses deux filles.

7) Lors de sa séance du 27 juin 2012, le CA a décidé d'ouvrir des négociations avec les organisations représentatives du personnel et les commissions du personnel afin de modifier l'art. 10 REGAP, dont la nouvelle formulation proposée serait :

« Art. 10 Cadres intermédiaires (art. 6 statut)

Sont nommé-e-s en qualité de cadres intermédiaires les collaborateurs et collaboratrices dont la fonction se situe entre les classes de salaire I à M.

La qualité de cadre intermédiaire est mentionnée dans l'acte de nomination ».

Ces négociations n'ont toutefois pas eu lieu.

8) Par courriel du 15 octobre 2013, l'administrateur du D______ (ci-après : D______) et du Musée E______ a fait part à certaines personnes - et non M. A______ - qu'après contact auprès de la DRH, il semblait qu'aucun médiateur n'ait la qualité de cadre intermédiaire et que le changement de modalité de compensation des heures du soir et du week-end ne puisse pas être justifié.

9) Parallèlement, entre le 8 novembre 2005 et le 14 décembre 2015,
M. A______ a fait l'objet de sept entretiens d'évaluations par sa supérieure directe, Mme E______, montrant qu'il répondait aux attentes ou dépassait les attentes suivant les critères d'appréciation, notamment « responsabilité sur autrui (pour les personnes qui ont la responsabilité de collaborateurs seulement) » (8 novembre 2005, 12 septembre 2006, 8 mars 2008, 10 mars 2010 et 14 novembre 2011), et atteignait les objectifs (25 février 2014 et 14 décembre 2015).

10) Lors de sa séance du 20 janvier 2016, le CA a décidé d'annuler et remplacer ses décisions des 15 décembre 2010 et 27 juin 2012 relatives aux cadres intermédiaires, de confirmer stricto sensu la teneur actuelle de l'art. 10 REGAP et de considérer que les personnes ayant une fonction de chef de projets classées en L et M étaient également réputées être des cadres intermédiaires car elles assuraient des fonctions d'encadrement.

11) Le 11 février 2016, M. A______ a signé, en tant que « médiateur, chef de projet », pour D______ et son site du Musée E______, en classe de traitements L, à 80 %, un cahier des charges.

Sa « mission générale » était : la conception et la gestion d'événements culturels de type « B______ », « F______ », etc. ; la conception et l'animation des actions de médiation pour les publics scolaires et non scolaires en lien avec la collection permanente et les expositions temporaires du Musée de l'histoire des sciences ; la participation à l'évolution et au développement du domaine de la médiation scientifique et culturelle ; l'apport d'un appui à la conception d'expositions selon les besoins de l'institution.

Suivaient les descriptions des « activités principales et responsabilités », du « champs de compétence », des « conditions particulières d'exercice » et des « bases statutaires ».

12) Par pli du 23 mars 2016, le directeur général de l'administration municipale (ci-après : le directeur général) a confirmé à M. A______ son statut de cadre intermédiaire au sens de l'art. 10 REGAP, avec les droits et obligations qui s'y rapportaient.

13) M. A______ s'est opposé à l'octroi de ce statut et, par courriel du syndicat SSP/VPOD (ci-après : le syndicat) du 13 avril 2018, il a interpellé le directeur général à ce sujet.

Ce dernier lui a répondu par courriel du 17 avril 2018 que le problème de l'intéressé serait réglé lors des prochaines collocations, car la fonction de chef de projet avait été remaniée et divisée en plusieurs fonctions, que plusieurs d'entre elles ne seraient « pas classifiées en cadre intermédiaire », et que M. A______ serait certainement colloqué dans l'une d'entre elles.

Par lettre du syndicat du 15 mai 2018 se référant à ce dernier courriel,
M. A______ s'est plaint de ce que sa situation n'était toujours pas claire aux yeux de son employeur et a demandé que son droit à la compensation de ses heures supplémentaires soit rétabli avec effet rétroactif au 1er mars 2016.

14) Par décision adressée le 1er juin 2018 au syndicat, le directeur général a, après nouvelle étude du dossier par la DRH, confirmé que M. A______ était bien cadre intermédiaire au vu de sa situation de chef de projet.

15) Par écriture du syndicat du 28 juin 2018, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du CA, concluant à ce qu'il soit confirmé qu'il n'avait pas la qualité de cadre intermédiaire, vu l'absence de charge d'encadrement et d'arrêté de nomination indiquant qu'il serait cadre intermédiaire.

16) Par décision - non motivée - du 10 octobre 2018, le CA a rejeté ce recours.

17) Par acte expédié le 12 novembre 2018 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative),
M. A______, par l'intermédiaire de son conseil nouvellement constitué, a formé recours contre cette décision du CA, la décision de le considérer comme cadre intermédiaire devant être annulée car violant les art. 6 statut et 10 REGAP ainsi que le principe de la proportionnalité, « sous suite de frais et dépens ».

18) Par réponse du 17 décembre 2018, la ville a conclu au rejet de ce recours, « avec suite de frais et dépens ».

19) Le 21 janvier 2019, M. A______ a répliqué.

20) Par écrit du 11 avril 2019, la ville s'est opposée à la production, sollicitée dans ladite réplique, des notes auxquelles se référaient les extraits de séances du CA contenant ses positions relatives aux cadres intermédiaires des 15 décembre 2010, 27 juin 2012 et 20 janvier 2016.

21) Le 14 mai 2019, à la demande des parties, s'est tenue une audience de comparution personnelle devant le juge délégué.

a. Selon le conseil de M. A______, les décisions interprétatives du CA ne sauraient aller à l'encontre du texte de l'art. 10 REGAP. S'agissant de la décision du CA du 15 décembre 2010, le 2ème § explicitait correctement l'art. 10 REGAP, mais le 3ème § était contradictoire par rapport au 2ème et ne pourrait constituer qu'une présomption, réfragable, la preuve pouvant être apportée que le chef de projet n'exerçait pas une activité d'encadrement.

b. Pour le représentant de la ville, cette dernière n'était pas d'accord avec cette interprétation du 3ème §. Le 2ème § décrivait l'interprétation que faisait le CA de l'activité d'encadrement et le 3ème § contenait une exception pour les chefs de projet qui devaient de toute façon être considérés comme des cadres intermédiaires, constituant ainsi non une présomption mais un cas d'application spécifique interprétant l'art. 10 REGAP. En effet, certains chefs de projet exerçaient une activité d'encadrement au sens large, pas forcément dans un cadre hiérarchique, et le CA avait estimé qu'ils devaient entrer dans la notion des cadres intermédiaires.

Le représentant de la ville n'avait pas connaissance d'une directive d'application au sens du 4ème § de la décision du 15 décembre 2010 précitée. Il n'y avait pas eu de suite au projet figurant dans la décision du CA du 27 juin 2012.

L'art. 10 al. 3 REGAP avait été mis en oeuvre pour M. A______ par la lettre qui lui avait été adressée le 23 mars 2016, étant précisé que celui-ci ne pouvait pas faire l'objet d'un acte de nomination dès lors qu'il était déjà nommé.

Le régime des heures supplémentaires était différent si l'on était employé « normal », cadre intermédiaire ou cadre supérieur. Ce qui changeait pour les cadres intermédiaires était qu'ils n'avaient pas de majoration pour les heures effectuées la nuit et le week-end (art. 106 REGAP). Il y avait donc une compensation simple de ces heures pour les cadres intermédiaires.

c. M. A______ a expliqué qu'une fois tous les deux ans, il était en charge d'une manifestation de la ville qui s'appelait « B______ », charge qu'il partageait avec sa collègue directe, Mme E______, qui était cadre supérieure (classe O). Ils faisaient cela sous la direction de la direction du D______. Il était exact que, seulement pour cette manifestation, il attribuait le travail à des employés auxiliaires ou temporaires. Deux personnes étaient engagées à ce titre durant quatre mois avant et pendant la manifestation. Six personnes en plus étaient engagées pendant deux semaines avant et durant la manifestation. Dix-huit étudiants étaient engagés durant une semaine pendant la manifestation. M. A______ leur confiait du travail et leur donnait des instructions. Il n'y avait pas d'autres occasions où il effectuait de telles tâches. Pour les autres manifestations qu'il organisait, il était seulement en contact avec l'équipe du D______.

Il devait certes contrôler l'exécution du travail par les employés dans le cadre de ladite manifestation, mais il ne pouvait pas les sanctionner, et en cas de problèmes, il en référait à la direction du D______.

Lorsque les entretiens d'évaluation susmentionnés avaient été effectués, Mme E______ avait la charge du Musée E______ auquel il était rattaché. Elle était sa supérieure hiérarchique, ce qu'elle n'était plus désormais, même si elle était toujours cadre supérieure.

d. D'après le représentant de la ville, cette dernière ne contestait pas les faits tels que décrits ci-avant. Pour elle, il s'agissait d'une activité d'encadrement. C'était donc un problème d'interprétation de cette notion qui était au centre du litige.

e. M. A______ avait le souvenir qu'en 2016, autour de la lettre du directeur général du 23 mars 2016, ses heures de nuit et de week-end n'avaient plus été compensées avec une majoration comme auparavant. Il avait bien reçu cette lettre du 23 mars 2016 lui confirmant son statut de cadre intermédiaire. À la question de savoir pourquoi il n'avait pas contesté le contenu de cette lettre, il a répondu que cela avait pris longtemps pour que le syndicat examine la situation et se prononce.

f. À l'issue de l'audience, l'avocat de M. A______ a indiqué ne pas avoir d'autres demandes de mesures d'instruction que la production des notes selon la réplique du 21 janvier 2019, tandis que la ville a renoncé à des mesures d'instruction complémentaires.

22) Dans ses observations finales du 14 juin 2019, la ville a persisté dans les conclusions au fond de son recours.

À la demande du juge délégué, elle a produit un organigramme structurel du D______ et de son site le Musée E______ (état au 6 juin 2019).

23) Le 18 juin 2019, M. A______ a persisté dans les conclusions au fond de son recours.

Il convenait d'appliquer l'art. 10 REGAP à rigueur de texte. Cette disposition règlementaire prévoyait trois conditions cumulatives, soit exercer une charge d'encadrement, disposer d'un salaire situé entre les classe I et M, et voir la qualité de cadre intermédiaire figurer expressis litteris dans l'acte de nomination.

24) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

25) Pour le surplus, les arguments des parties et certains éléments de fait seront, en tant que de besoin, repris dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) a. Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 104 statut ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

b. La question de savoir s'il l'a été en temps utile, soit dans le délai de trente jours au sens de l'art. 104 statut, compte tenu du fait que la lettre du directeur général du 26 mars 2016 avait déjà fait part au recourant de sa qualité de cadre intermédiaire, peut demeurer indécise. Il est précisé que la ville s'en rapporte à justice concernant la recevabilité du recours.

2) a. Selon la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral et reprise par la chambre de céans (ATA/1140/2018 du 30 octobre 2018 consid. 2a et les références citées), tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), repris par
l'art. 41 LPA, le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du
19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 138 V 125
consid. 2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2).

b. La ville s'oppose à la production des notes telle que demandée par le recourant, en se fondant notamment sur l'art. 26 de la loi sur l'information du public, l'accès aux documents et la protection des données personnelles du
5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08).

À teneur de cette disposition légale, les documents à la communication desquels un intérêt public ou privé prépondérant s'oppose sont soustraits au droit d'accès institué par la LIPAD (al. 1). Tel est le cas, notamment, lorsque l'accès aux documents est propre à entraver notablement le processus décisionnel ou la position de négociation d'une institution (al. 2 let. c). Les notes échangées entre les membres d'une autorité collégiale ou entre ces derniers et leurs collaborateurs sont exclues du droit d'accès institué par ladite loi (al. 3).

Selon les travaux préparatoires de la LIPAD, en excluant purement et simplement du droit d'accès aux documents les notes échangées entre les membres d'autorités collégiales (comme le Conseil d'État et les exécutifs communaux) ainsi qu'entre eux et leurs collaborateurs, l'art. 26 al. 3 LIPAD renforce l'exception tirée du risque d'entrave notable au processus décisionnel mentionnée à l'art. 26 al. 2 let. c LIPAD. Il s'agit de permettre la libre formation de l'opinion du collège gouvernemental, en mettant ses membres à l'abri des pressions auxquelles les exposerait la communication de leur opinion souvent provisoire formulée au stade antérieur à la prise collective de décisions. Comme il est admis que les séances du Conseil d'État et des exécutifs communaux doivent se tenir à huis clos (art. 7 et 11 LIPAD), il faut préserver à ces autorités collégiales un espace de délibération et de préparation de leurs décisions collectives en dehors de tout regard extérieur. Le caractère catégorique de cette exception, en particulier le fait qu'une décision contraire de l'autorité collégiale elle-même ne soit pas réservée, se justifie par le souci d'engager chacun de ses membres dans le processus collégial et de les empêcher d'exercer un jeu de pouvoir des uns sur les autres sur la scène publique. Il s'agit aussi de permettre aux collaborateurs des membres d'autorités collégiales d'exprimer librement leurs opinons et propositions à l'intention de ces derniers (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7698 ; ATA/1141/2018 du 30 octobre 2018 consid. 4c).

c. En l'occurrence, la décision du CA du 15 décembre 2010 se réfère à une note de la DRH, la décision du 27 juin 2012 à une note de la conseillère administrative en charge du département des finances et du logement, et la décision du 20 janvier 2016 à des notes de la même conseillère administrative ainsi que du directeur général.

Ces notes sont indubitablement échangées entre les membres d'une autorité collégiale ou entre ces derniers et leurs collaborateurs, et sont donc exclues du droit d'accès, conformément à l'art. 26 al. 3 LIPAD.

Au demeurant, la ville a motivé de manière circonstanciée sont interprétation de l'art. 10 REGAP dans ses écritures et lors de l'audience.

Il ne sera dès lors pas donné suite à la requête de production de notes formulée par le recourant.

3) a. Aux termes de l'art. 6 statut, afférent aux « catégories de personnel », sont considérées comme membres du personnel toutes les personnes exerçant une activité au service de la ville auxquelles le présent statut est applicable en vertu de l'art. 2 (al. 1). Sont des employées et employés les membres du personnel nommés pour une durée indéterminée (al. 2). Le CA définit les membres du personnel qui sont des cadres supérieures ou cadres supérieurs et des cadres intermédiaires (al. 6).

Selon l'art. 8 REGAP, qui fait partie du chapitre III « rôles et compétences » et est intitulé « cadres (art. 6 statut) », les cadres supérieures ou cadres supérieurs et les cadres intermédiaires doivent pouvoir obtenir les moyens humains et matériels indispensables à la réalisation de la mission qu'ils ou elles sont tenus d'assumer (al. 1). Elles ou ils peuvent entreprendre de leur propre chef toute démarche rendue nécessaire par l'urgence d'une situation, sans en référer au préalable à leur hiérarchie (al. 2). Elles ou ils sont en droit d'obtenir le soutien de leur hiérarchie dans l'application des lois et règlements qui régissent leur activité (al. 3).

L'art. 9 REGAP ayant pour titre « cadres supérieures et cadres supérieurs (art. 6 statut) » et l'art. 10 REGAP intitulé « cadres intermédiaires (art. 6 statut) » sont insérés dans le chapitre IV « instruments de gestion », section 1 « cadres
(art. 6 statut) ».

b. À teneur de l'art. 106 REGAP, les cadres intermédiaires qui, pour s'acquitter de leur mission, doivent effectuer des heures supplémentaires peuvent compenser les heures effectuées par des congés d'une durée équivalente. Ces heures, quel que soit le moment où elles ont été effectuées, ne donnent pas lieu à une majoration quelconque (al. 1). Les heures supplémentaires ne doivent pas excéder 120 heures par année (al. 2). Les modalités de contrôle des heures supplémentaires effectuées sont fixées d'entente entre l'intéressé ou l'intéressée et son supérieur ou sa supérieure hiérarchique et sous le contrôle du secrétaire général ou de la secrétaire générale de la ville (al. 3).

Le texte de cette disposition règlementaire est repris par l'art. 45 du règlement sur l'aménagement du temps de travail adopté par le CA le 13 juin 2012 (RATT - LC 21 152.20). Il diffère du contenu de l'art. 43 RATT, qui concerne le personnel en général et qui prévoit que les heures supplémentaires doivent être compensées par des congés d'une durée équivalente, d'entente entre les parties, aussitôt que possible mais au plus tard dans un délai de six mois
(al. 1), et qu'elles donnent en outre droit à un congé additionnel d'une demi-heure par heure supplémentaire et une heure par heure supplémentaire effectuée entre 22h00 et 06h00 ainsi que les dimanches et les jours fériés (al. 3).

c. Les communes disposent d'une très grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu'elles entretiennent avec leurs agents (arrêt du Tribunal fédéral 2P.46/2006 du 7 juin 2006 ; ATA/1140/2018 du 30 octobre 2018 consid. 5a ; ATA/449/2016 du 31 mai 2016 consid. 5a ; François BELLANGER, Le contentieux communal genevois, in Thierry TANQUEREL/François BELLANGER [éd.], L'avenir juridique des communes, 2007, p. 125 ss, spéc. 149).

d. Cela étant, pour interpréter l'art. 10 REGAP, il faut en premier lieu se fonder sur son texte en tant que tel (interprétation littérale ; ATF 140 II 202 consid. 5.1 ; ATA/1749/2019 du 3 décembre 2019 consid. 5a), comme le préconise du reste la décision du 20 janvier 2016.

Le fait que par décision, le CA a voulu confirmer stricto sensu la teneur actuelle de l'art. 10 REGAP exclut l'existence de l'adoption ou de la modification d'une disposition d'exécution par le CA ou l'instance déléguée par lui à cet effet qui aurait, en application de l'art. 18 al. 3 let. a statut, obligé ledit conseil à informer préalablement en particulier les organisations représentatives du personnel et les commissions du personnel concernées. Le grief sur ce point du recourant est ainsi écarté.

Outre le fait que le projet de nouvel art. 10 REGAP tel qu'envisagé dans la décision du 27 juin 2012 du CA a été abandonné et que la décision du CA du
15 décembre 2010 a été annulée par celle du 20 janvier 2016, les précisions contenues dans ces deux dernières décisions du CA selon lesquelles les cadres intermédiaires auraient sous leur responsabilité directe et constante au moins trois personnes (15 décembre 2010) et que les chefs de projets feraient partie de cette catégorie (15 décembre 2010 et 20 janvier 2016) ne ressortent pas du texte de l'art. 10 REGAP, ni ne sont forcément impliquées par ce dernier.

En revanche, pour être considérés comme des cadres intermédiaires, les collaborateurs et collaboratrices doivent exercer une activité d'encadrement et des responsabilités en élaborant des méthodes, des programmes et des moyens dans le cadre de politiques et d'objectifs définis (art. 10 al. 1 REGAP). Cette règle est écrite de manière relativement générale, sans restrictions, et permet une interprétation large, tenant compte du but visé, de même qu'une application reposant sur les circonstances concrètes considérées dans leur ensemble. Ainsi, rien ne permet de retenir que les cadres intermédiaires devraient avoir sous leur responsabilité un nombre minimal de personnes, ni que ce serait de manière constante. Doit en parallèle être prise en considération la question de savoir si les employés concernés exercent des responsabilités en élaborant des méthodes, des programmes et des moyens dans le cadre de politiques et d'objectifs définis, sans avoir forcément des personnes subordonnées sous leurs ordres. La question de savoir si l'encadrement de personnes est une condition nécessaire peut demeurer indécise. Est en revanche décisif le fait que les cadres intermédiaires se voient confier des responsabilités, ce qui implique une autonomie et la prise d'initiatives dans le cadre des objectifs définis.

e. En l'espèce, il est incontesté qu'une fois tous les deux ans, le recourant attribue du travail et donne des instructions à deux employés auxiliaires ou temporaires durant quatre mois et pendant la manifestation « La Nuit des sciences », à six personnes pendant deux semaines avant ainsi que durant ladite manifestation, de même qu'à dix-huit étudiants durant une semaine avant cet événement et pendant ce dernier. Il s'agit manifestement d'une activité d'encadrement, laquelle ne suppose pas nécessairement toutes le prérogatives d'un supérieur hiérarchique telles que la sanction d'éventuels manquements.

En outre, le cahier des charges signé le 11 février 2016 implique incontestablement des responsabilités en vue de l'organisation et la mise en oeuvre de manifestations culturelles et d'actions de médiations pour les publics scolaires et non scolaires notamment. En effet, il contient les termes de conception, gestion, programmation, planification, réalisation, mise en place d'équipe compétente, coordination et mobilisation de réseaux de partenaires, prises d'initiatives, flexibilité, encadrement sur le plan opérationnel des équipes et collaborateurs associés à ces événements ainsi que délégation des tâches à ceux-ci. Du reste, sous « conditions particulières d'exercice » figurent : « horaires irréguliers, la mission du service peut implique une présence durant certains week-ends, jours fériés ou en soirée, selon les besoins » ; « risques physiques ou psychiques : stress durant la gestion d'événements » ; « difficultés particulières : gestion de la délégation des tâches aux collaborateurs-trices ». Il importe peu que selon ce cahier des charges, l'intéressé n'est pas habilité à engager son secteur par sa signature ou financièrement.

Au surplus, comme relevé par l'intimée, les comptes rendus des entretiens d'évaluation précités montrent que le recourant, s'agissant du critère d'appréciation « responsabilité sur autrui (pour les personnes qui ont la responsabilité de collaborateurs seulement) », « [sait], avec finesse, évaluer les différentes compétences des personnes avec lesquelles il collabore, il sait très bien à qui déléguer quelle tâche, tout en motivant une équipe » (8 novembre 2005 et 12 septembre 2006) ; « dans les dossiers qui lui sont confiés, [il] sait parfaitement préparer le travail, le planifier et en diriger l'exécution » ; « c'est avec confiance que nous lui confions la tâche d'encadrer prochainement une stagiaire » ; « par ailleurs, il sait très rapidement et efficacement prendre les décisions qui s'imposent en cas d'urgence » (18 mars 2008) ; « [il] sait parfaitement motiver et responsabiliser ses collaborateurs (stagiaires ou employés temporaires de B______) » ; il planifie et organise leur travail avec une grande aisance (de l'écriture de leur cahier des charges au suivi de leurs tâches quotidiennes) et sait en obtenir le meilleur avec le sourire » (14 novembre 2011) ; « excellente gestion des équipes de la [B______] » (25 février 2014 et
14 décembre 2015).

Enfin et par surabondance, même dans l'hypothèse où la décision du CA du 15 décembre 2010 devait recevoir une application ici, son 3ème § devrait être considéré comme une règle spécifique pour les chefs de projet, puisqu'il concerne expressément la situation où ceux-ci n'ont pas de personnes constamment sous leur responsabilité hiérarchique mais donnent seulement des instructions à des collaborateurs dans le cadre des projets dont ils ont la mission.

Au regard de ces circonstances, considérées dans leur ensemble, les tâches du recourant correspondent à la définition des cadres intermédiaires donnée par l'art. 10 al. 1 REGAP.

f. Par ailleurs, la fonction de l'intéressé se situe dans la classe de salaire L, donc dans le cadre de l'art. 10 al. 2 REGAP.

g. Enfin, à teneur de l'art. 66 REGAP - qui se trouve dans le chapitre VI « naissance et fins des rapports de service », section 1 « naissance des rapports de service (art. 24 à 29 statut) » -, l'acte de nomination ou d'engagement fait référence au statut et au règlement général d'application et indique la date d'entrée en fonction, la durée hebdomadaire du travail, le traitement initial, la fonction occupée, la classification correspondante et, le cas échéant, si cette fonction correspond à un poste de cadre (al. 1). Le chef ou la cheffe de service remet au nouveau collaborateur ou collaboratrice la description de la fonction qu'il ou elle occupe ainsi que son cahier de charges personnel (al. 2).
L'art. 68 REGAP précise que les cadres supérieurs et intermédiaires peuvent être nommés à l'issue d'une procédure de recrutement menée par des intervenantes et intervenants indépendants qui attestent de leurs compétences.

Il s'ensuit que l'acte de nomination auquel fait référence l'art. 10
al. 3 REGAP est celui qui initie les rapports de service. Le recourant ayant été nommé avant la reconnaissance de son statut de cadre intermédiaire, il est normal qu'il n'y ait pas eu de nouvel acte de nomination dans lequel aurait été mentionnée sa qualité de cadre intermédiaire. Du reste, l'art. 10 al. 3 REGAP ne prescrit pas une condition pour la reconnaissance de cette qualité, mais seulement l'obligation que si un acte de nomination est établi au début de rapport de service, l'éventuelle qualité de cadre intermédiaire doit être mentionnée. Enfin, au plan formel, les décisions de la ville des 1er juin et 10 octobre 2018 confirmant le statut de cadre intermédiaire remplacent à tout le moins et en tant que de besoin un acte de nomination.

h. Le recourant devant être considéré comme un cadre intermédiaire selon le texte clair de l'art. 10 REGAP, il n'y pas de place pour une quelconque applications des principes de la proportionnalité (art. 5 al. 2 ainsi que 36 Cst.) et de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.).

Au demeurant, il n'est aucunement choquant que des employés de la ville dont le salaire appartient à des classes relativement élevées au sein de la ville
(art. 10 al. 2 REGAP) ne bénéficient pas d'une compensation des heures supplémentaires effectuée entre 22h00 et 06h00 ainsi que les dimanches et les jours fériés aussi favorable que les membres du personnel dont les classes de salaire, et donc les traitements, sont inférieures. Il sied à cet égard de relever que, pour les cadres supérieurs, dont la fonction se situe en classe de salaire N et
au-dessus (art. 9 al. 2 REGAP), la compensation des heures supplémentaires est moins favorable que pour les cadres intermédiaires. En effet, à teneur de l'art. 44 al. 1 RATT, dans la mesure où elles n'excèdent pas 100 heures par année, les heures supplémentaires effectuées par les cadres supérieures et cadres supérieurs ne donnent lieu ni à une rémunération ni à une compensation en temps, sauf circonstances exceptionnelles, la limite des 100 heures par année est réduite proportionnellement au taux d'activité.

i. Par leurs courriels des 15 octobre 2013 et 17 avril 2018, l'administrateur du D______, respectivement le directeur général n'ont pris aucun engagement à l'égard de l'intéressé, ni ne lui ont fait une quelconque promesse, de sorte que celui-ci ne peut rien tirer en sa faveur, notamment sous l'angle du principe de la bonne foi (art. 5 al. 3 ainsi que 9 Cst.), de ces courriels, ni du reste du fait qu'il n'a pas été traité comme cadre intermédiaire pendant plusieurs années après l'entrée en vigueur du REGAP.

j. Vu ce qui précède, c'est sans abus ou excès de son pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), et donc conformément au droit, que la ville considère que le recourant est un cadre intermédiaire et le traite en conséquence.

Partant, le recours sera rejeté, en tant qu'il est recevable.

4) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la ville qui y a également conclu mais dispose de son propre service juridique et est donc apte à procéder par elle-même, ce qu'elle a du reste fait
(art. 87 al. 2 LPA ; ATA/492/2018 du 22 mai 2018 consid. 18).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu'il est recevable, le recours interjeté le 12 novembre 2018 par M. A______ contre la décision de la Ville de Genève du 10 octobre 2018 ;

met à la charge de M. A______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Dandres, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf,
M. Pagan, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :