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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4237/2018

ATA/1780/2019 du 10.12.2019 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;AÉROPORT;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;RÉSILIATION;INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL);RÉTABLISSEMENT DE L'ÉTAT ANTÉRIEUR
Normes : LPAC.22; LPAC.21; LPAC.31; Cst.36.al3
Résumé : Admission du recours d'un employé de l'Aéroport International de Genève, licencié suite à une incapacité de travail de longue durée, alors que ce dernier souhaite être reclassé malgré ses limitations physiques. Aucune vraie procédure de reclassement n'a été menée par l'AIG, qui s'est contenté de lui rappeler, à intervalles réguliers, qu'il lui appartenait de postuler, déléguant à l'employé la procédure de reclassement. Aucune proposition de poste, de stage ou de formations n'ont été faites à l'employé. Recours partiellement admis et réintégration proposée, dès lors qu'aucune prise de position de l'employeur ne figure au dossier sur ce point.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4237/2018-FPUBL ATA/1780/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 décembre 2019

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Andrea Von Flüe, avocat

contre

AÉROPORT INTERNATIONAL DE GENÈVE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1968, a été embauché par l'Aéroport international de Genève (ci-après : AIG) le 1er juin 2005, en qualité d'agent de sûreté, par contrat de durée déterminée qui s'est transformé en contrat de durée indéterminée à compter du 1er juin 2006, à 100 %.

2) À l'exception d'un avertissement en 2016, pour violation des règles de sûreté, les entretiens de développements de M. A______ ont toujours été globalement bons, ce dernier remplissant ou dépassant les objectifs fixés par son employeur.

3) En raison de graves problèmes de lombalgies, M. A______ n'a plus été en mesure d'assurer son poste de manière satisfaisante, ne pouvant plus demeurer debout de manière prolongée, position pourtant exigée par son affectation à partir de la fin de l'année 2015.

4) Entre novembre 2015 et début 2017, l'intéressé a alterné des périodes d'incapacité de travail, totales ou partielles, et des périodes de travail.

Durant ces périodes, des aménagements dans son activité, afin d'éviter le piétinement et la station debout, ont été mis en place, sur recommandation du médecin-conseil de l'AIG, le Docteur B______. Malgré ceux-ci, la situation a évolué de manière négative, la station debout prolongée étant désormais exclue.

5) Depuis le 7 mars 2017, l'intéressé se trouve en arrêt maladie à 100 %.

6) Après une première demande à l'office de l'assurance-invalidité
(ci-après : AI) intervenue en 2015 et close entre temps, l'AI a pris en charge des indemnités journalières et les frais liés à une formation entre janvier et avril 2018 à un taux de 50 %, ainsi qu'une évaluation de compétences. À teneur du dossier, l'examen de son dossier est toujours en cours.

7) Les 7 octobre 2015, 31 mars 2016, 18 mai 2017 et 18 août 2017, M. A______ a reçu des courriers de son employeur au contenu similaire, l'informant de la fin prochaine de son droit au traitement et lui demandant de signaler « toute autre activité professionnelle pou[vant] être compatible avec son état de santé » dans l'éventualité d'un reclassement provisoire ou définitif au sein de l'AIG.

Ces courriers précisaient également que si une reprise d'activité professionnelle à 100 % était impossible à l'échéance du droit au traitement et qu'aucune possibilité de « reclassement définitif » n'existait, la réduction de son taux d'activité contractuel, voire la résiliation des rapports de travail dans le respect du statut du personnel serait envisagée.

8) Le 31 octobre 2017, s'est tenue une réunion entre les parties au cours de laquelle les modalités de la fin des rapports de travail ont été discutées.

9) Le 28 novembre 2017, l'AIG a informé l'intéressé de son intention de mettre fin aux rapports de service. Les parties ont, en vain, tenté de trouver d'accord portant sur la fin des rapports de travail.

10) a. Par décision du 5 janvier 2018, l'AIG a rendu une décision de résiliation des rapports de service, l'incapacité de travail de l'intéressé présentant un caractère durable. Ce dernier était en arrêt de travail totalement ou partiellement depuis plus de sept cent trente jours. Il n'existait pas de possibilités de reclassement au sein de l'AIG.

b. M. A______ a formé recours le 7 février 2018 auprès de la commission de recours (ci-après : la commission de recours) prévue par l'art. 74 du statut du personnel de l'Aéroport international de Genève approuvé le 16 février 2006, entrée en vigueur le 1er mars 2006 (ci-après : le statut) à l'encontre de la décision précitée. Il concluait à son annulation et à la mise à disposition d'un poste à temps partiel d'au moins 50 % et, subsidiairement, à ce qu'une indemnité de six mois de salaire brut pour licenciement abusif lui soit accordée.

c. Son employeur n'avait rien entrepris pour lui permettre de rester un employé de l'AIG en violation des art. 29 al. 4 et 51 l. 4 du statut. Il contestait son licenciement qui ne respectait pas l'art. 57 du statut. Il se plaignait d'une inégalité de traitement par rapport à d'autres employés qui avaient bénéficié d'indemnités de départ supérieures.

11) À la suite de la réponse de l'AIG, deux audiences de comparution personnelle et d'audition de témoins se sont tenues devant la commission de recours, les 4 mai et 25 juin 2018.

a. Madame C______, juriste à l'AIG, a été entendue quant à la question des formations internes. Elle a précisé que « M. A______ a été informé des possibilités de formations internes, dans le domaine informatique et bureautique notamment. (...) Tous les employés de l'AIG ont connaissance de ces opportunités de formation ». En outre, « les accès informatiques de collaborateurs n'[étaient] pas bloqués durant une incapacité de travail ». M. A______ n'avait jamais dit avoir rencontré des difficultés à se connecter.

b. Le Dr B______ a notamment déclaré que « tous les trois mois se [tenaient] des séances avec la représentante de l'AI, les ressources humaines et [lui-même]. Ils discut[aient] de tous les cas et notamment de la situation de M. A______. Le Dr B______ a rappelé que si le poste « VIP était adapté à la situation de M. A______ s'agissant des contraintes physiques, il y avait également à prendre en considération les compétences liées au métier lui-même et à la nature de la clientèle concernée. Sauf erreur, il [était] exigé la maîtrise de plusieurs langues ».

c. Madame D______, collaboratrice AI en charge du dossier de M. A______ a précisé que l'attitude de celui-ci était proactive à partir de l'année 2018, l'intéressé étant « demandeur de mesures de réadaptation ».

Le détail des déclarations des témoins et parties sera repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

12) La commission de recours a rejeté le recours de M. A______ par décision du 31 octobre 2018, reçue le 2 novembre 2018.

La décision n'avait pas été notifiée durant une période de protection. L'incapacité pouvait être considérée comme durable. Il n'existait visiblement pas de perspectives d'amélioration, aucun retour en emploi à brève ou moyenne échéance du recourant n'était envisageable. Il n'existait pas de possibilités de reclassement interne, l'AIG ayant satisfait aux exigences minimales découlant de l'art. 51 du statut. La situation du collaborateur avait eu un impact sur le bon fonctionnement de l'AIG en termes de planification des horaires notamment. Le principe de l'égalité de traitement était respecté, les parties ayant discuté hors d'un cadre procédural afin de tenter de régler la situation de manière consensuelle. La décision était conforme au droit et reposait sur un motif justifié au sens de
l'art. 57 du statut.

13) Par acte déposé le 3 décembre 2018, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice
(ci-après : chambre administrative), concluant à ce qu'il soit constaté que son licenciement est injustifié, à l'allocation d'une indemnité équivalant à six mois de salaire pour cause de licenciement injustifié, ainsi qu'à ce qu'il soit ordonné à l'AIG sa réintégration à un poste à un taux de 50 % au moins.

L'AIG avait failli à son obligation de reclassement. Le recourant souhaitait continuer à travailler pour l'AIG malgré ses problèmes de santé, et l'institution n'avait rien fait pour le soutenir. La décision était ainsi contraire au droit. Il avait postulé au poste d'enquêteur sûreté, mais n'avait pas été retenu. Il n'avait pas postulé à d'autres postes, ayant des problèmes de connexion pour accéder à l'intranet de l'AIG, où les postes étaient publiés.

14) Dans ses observations, l'AIG a conclu à ce que la décision du 31 octobre 2018 de la commission de recours soit confirmée en tous points. Le licenciement était justifié.

Le recourant lui-même reconnaissait que son incapacité de travail avait un caractère durable et l'absence de perspectives d'amélioration de son état de santé dans un délai raisonnable. L'AIG rappelait la jurisprudence de la commission concernant le reclassement, soit qu'il n'existait pas de droit à celui-ci, pas plus qu'à la création d'un poste sur mesure. Aucune solution n'avait pu être trouvée en interne et la création d'un poste « sur mesure » ne pouvait être exigée de l'AIG.

15) Après que le recourant eut persisté dans les termes de son recours, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 75 du statut ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Après la période d'essai, le délai de congé est, dès la cinquième année de service, de six mois pour la fin d'un mois (art. 56 let. A al. 2 du statut). Il existe un motif justifié lorsque, pour une raison sérieuse, la poursuite des rapports de travail n'est pas dans l'intérêt du bon fonctionnement du service (art. 57 let. A al. 3 du statut). En cas de de licenciement injustifié et de refus de réintégration de l'AIG, l'autorité de recours peut condamner celui-ci au paiement d'une indemnité ne dépassant pas dix-huit mois du salaire fixe (art. 57 let. A al. 5 du statut).

b. On retrouve une notion identique à celle de motifs justifiés de l'art. 57 let. A al. 3 du statut à l'art. 71 al. 1 du statut du personnel des Transports publics genevois du 1er janvier 1999 ainsi que dans les travaux préparatoires de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) (MGC 1996 43/VI 6330 p. 6355 ; ATA/123/2012 du 6 mars 2012 consid. 4a ; ATA/791/2010 du 16 novembre 2010 consid. 7a ; ATA/848/2005 du 13 décembre 2005 consid. 11b).

Ainsi, l'avant-projet de réforme du statut de la fonction publique prévoyait que les rapports de service des fonctionnaires pouvaient être résiliés pour un motif justifié, ce dernier étant considéré comme réalisé lorsque la poursuite de ces rapports n'était pas, objectivement, dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'administration ou de l'établissement. Toutefois, devant l'hostilité des organisations syndicales à l'égard de la notion de « motif justifié », jugée trop vague et ouvrant la porte à l'arbitraire, cette dernière a été remplacée par celle de « motif objectivement fondé » (MGC 1996 43/VI 6330 p. 6355 s.). L'expression « n'est pas dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'administration » a été supprimée pour les mêmes raisons (MGC 1997 55/IX 9638 p. 9662). Lors de la modification de la LPAC de 2007, entrée en vigueur le 31 mars 2007, l'expression « motifs objectivement fondés » a été remplacée par celle de « motifs fondés », dans le but de faciliter à l'employeur l'administration de la preuve de l'existence d'un motif de licenciement (MGC 2006-2007/IV A-4511 p. 4528). C'est ainsi que les motifs actuels de licenciement, selon l'art. 22 LPAC, doivent être considérés comme étant plus restrictifs que ceux qui étaient prévus par l'avant-projet et le projet de loi.

c. Il découle dès lors de l'analyse des travaux préparatoires de la LPAC que l'art. 57 let. A al. 3 du statut doit être jugé comme étant moins sévère, dans les motifs permettant le licenciement, que l'art. 22 LPAC. Cette différence se justifie d'ailleurs par le fait que le législateur n'a précisément pas voulu attribuer au personnel de l'AIG le statut de fonctionnaire (ATA/693/2015 du 30 juin 2015 ; ATA/123/2012 du 6 mars 2012 consid. 4a ; ATA/791/2010 du 16 novembre 2010 consid. 7a).

3) Les membres du personnel de l'AIG doivent être déclarés médicalement aptes à assumer le poste qu'ils occupent (art. 9 du statut). L'art. 51 al. 4 du statut précise que l'AIG doit s'efforcer de confier un poste correspondant aux capacités de l'employé dont les prestations sont insuffisantes en raison de son état de santé.

4) Au plan cantonal, la même incombance existe pour les fonctionnaires (art. 21 LPAC).

a. Selon la jurisprudence, lorsque la loi prescrit à l'État de ne pas licencier une personne qu'il est possible de reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en oeuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui (ATA/679/2017 du 20 juin 2017 consid. 7c ; ATA/298/2016 du 12 avril 2016 consid. 5b ; ATA/128/2015 du 3 février 2015 consid. 4).

b. Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est l'une des expressions du principe de la proportionnalité. Il impose à l'État de s'assurer, avant qu'un licenciement ne soit prononcé, qu'aucune mesure moins préjudiciable pour l'administré ne puisse être prise (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/806/2012 du 27 novembre 2012 ; ATA/223/2010 du 30 mars 2010 ; MGC 2005-2006/XI A 10420).

Il s'agit tout d'abord de proposer des mesures dont l'objectif est d'aider l'intéressé à retrouver ou maintenir son « employabilité », soit sa capacité à conserver ou obtenir un emploi, dans sa fonction ou dans une autre fonction, à son niveau hiérarchique ou à un autre niveau. Avant qu'une résiliation ne puisse intervenir, différentes mesures peuvent être envisagées. Elles peuvent prendre de multiples formes, telles qu'un certificat de travail intermédiaire, un bilan de compétences, un stage d'évaluation, des conseils en orientation, des mesures de formation et d'évolution professionnelles, l'accompagnement personnalisé, voire « l'outplacement ». Il faut ensuite rechercher si une solution alternative de reclassement au sein de la fonction publique cantonale peut être trouvée. En contrepartie, la garantie du niveau salarial atteint en cas de changement d'affectation peut dans ce cas être abrogée (ATA/846/2016 précité consid. 12b ; ATA/310/2015 précité consid. 5b ; MGC 2005-2006/XI A 10420 s.).

c. Un établissement autonome n'est pas dispensé de rechercher un poste vacant dans toute l'administration cantonale pour reclasser un fonctionnaire, quand bien même ce statut ne lui permet toutefois pas de proposer une solution de reclassement à l'État ou à d'autres entités autonomes, ne maîtrisant pas la gestion de leur personnel, mais l'autorise en revanche à mener des recherches et identifier les postes ouverts chez ses partenaires de l'État (arrêt du Tribunal fédéral 8C_697/2017 du 11 octobre 2018 consid. 5.2.1. ; ATA/1343/2015 du 15 décembre 2015 consid. 9b et les références citées).

d. L'autorité administrative est dispensée de l'obligation d'ouvrir une procédure de reclassement si le médecin-conseil atteste que le fonctionnaire n'est pas médicalement apte à reprendre un emploi quelconque au sein de l'État de Genève à court et à moyen terme, que le fonctionnaire ne conteste pas cette situation et que le délai de protection de la résiliation des rapports de service pour temps inopportun est échu (ATA/783/2014 du 7 octobre 2014 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 8C_839/2014 du 5 mai 2015).

5) Selon l'art. 61 LPA, le pouvoir d'examen de la chambre administrative se limite à la violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (al. 1 let. a). La chambre de céans ne peut ainsi pas revoir l'opportunité de la décision litigieuse (al. 2).

6) Dans un premier grief, le recourant estime que la procédure de reclassement n'a pas été correctement menée par son employeur au sens de l'art. 51 al. 4 du statut. Il ne conteste pas les motifs de son licenciement, conséquence directe de ses problèmes de santé. Il ne conteste pas non plus ne pas être en mesure, à l'heure actuelle, d'assumer son poste d'agent de sûreté.

Le médecin conseil considère depuis 2015 à tout le moins, que le recourant n'est plus apte à exercer son emploi d'agent de sûreté au sein de l'AIG, ce que le recourant n'a pas contesté. Dans un premier temps, des mesures ont été prises visant à aménager le poste de travail du recourant ; l'employeur l'a, notamment, dispensé de l'activité « fouille de personnes », qui lui demandait beaucoup d'efforts physiques, et a limité ses horaires, de sorte que ceux-ci étaient réguliers et de jour, en raison en particulier de la prise de médicaments.

Toutefois, à l'exception des réunions trimestrielles qui se tenaient entre le médecin conseil, l'AIG, le syndicat et le département RH, aucun autre élément ne démontre que l'AIG ait effectivement tenté de reclasser le recourant.

Le Dr B______ a précisé lors de son audition que ces réunions permettaient de discuter de la situation de l'employé. Toutefois, lors de ces réunions, la liste des postes internes qui seraient adaptés à la situation du recourant n'était pas passée en revue ni discutée.

Le Dr B______ a cependant confirmé lors de son audition qu'un autre poste comme celui de « VIP » n'était pas exclu pour le recourant, ce dernier n'étant incapable d'exercer son activité qu'à la fonction d'agent de sûreté et un tel poste était adapté aux limitations physiques du recourant.

À plusieurs reprises, le recourant a été invité par l'AIG à lui indiquer si une reprise de son activité était envisageable et si une autre activité professionnelle pouvait être compatible avec sa situation. Ce faisant, l'AIG a toutefois délégué au recourant son obligation de reclassement, se déchargeant de l'obligation d'indiquer à l'employé quels postes adaptés étaient disponibles et auxquels il devait postuler.

L'AIG indique qu'aucun poste en interne n'a pu être trouvé, les postes de nature administrative ne représentant que 20 % des effectifs et plusieurs d'entre eux exigeant des qualifications spécialisées que le recourant ne possède pas. Toutefois, aucune proposition de poste, à teneur du dossier, n'a été concrètement faite au recourant. L'AIG ne s'est d'ailleurs pas adressé aux autres établissements autonomes ou à l'État de Genève concernant des éventuels postes vacants.

Par ailleurs, aucune proposition de formation ou de stage n'a été formulée ni présentée au recourant. En juin 2017, deux postes qui auraient pu correspondre au profil du recourant ont par ailleurs été publiés sur l'intranet de l'AIG, sans que ce dernier ne juge utile de transmettre l'annonce de ces postes au recourant. Ce dernier n'a appris leur existence qu'à l'occasion de la réunion du 31 octobre 2017, lorsque le reproche de ne pas postuler lui a été fait. C'est également à cette occasion qu'il a informé l'AIG du fait qu'il n'arrivait pas à se connecter sur l'intranet.

Ces éléments pris dans leur ensemble permettent à la chambre administrative de constater que le recourant a, certes, bénéficié de la part des intimés d'une adaptation de son poste et d'un accompagnement formel depuis le début de sa maladie. Aucune mesure matérielle et concrète lui permettant de retrouver son « employabilité » au sens des principes rappelés ci-dessus n'a cependant été prise par l'AIG. Ce dernier n'a pas mis en oeuvre ce qu'on pouvait raisonnablement exiger de lui pour essayer de trouver un poste adapté pour le recourant, étant relevé au surplus que différents entretiens ont été menés avec des interlocuteurs de l'intimé et une collaboratrice de l'OAI pour discuter de la situation professionnelle du recourant, comme cela ressort des audiences tenues par la commission de recours.

Il ressort également desdites audiences qu'aucun stage ni aucune formation n'a été proposée au recourant, alors même que cela aurait pu lui permettre d'identifier d'autres postes qui pouvaient éventuellement lui convenir, l'AIG comptant, selon ses propres indications, environ 300 métiers différents.

En outre, il est exact que différents postes ont été mis au concours par l'intimé après qu'est survenue l'incapacité de travail du recourant. Il ressort également du dossier que le recourant n'a pas brigué ces postes, alors même qu'il est attendu de l'employé de participer activement à son reclassement. Or, le recourant n'arrivait pas à se connecter à l'intranet et l'AIG ne lui a proposé aucun des postes vacants ni attiré son attention sur l'existence de ceux-ci et ceux qui pouvaient lui convenir. Il lui appartenait pourtant de transmettre les postes éventuellement vacants à son employé.

Enfin, l'autorité intimée ne peut pas être suivie lorsqu'elle reproche au recourant d'avoir refusé un bilan de compétence. Un tel bilan faisait partie d'une proposition de départ formulée par l'AIG, proposition qui formait un tout et qui a cependant été refusée au terme d'un processus de négociation entre les parties. Aucun autre bilan de compétence n'a été proposé au recourant par l'AIG.

Dans ces circonstances, l'art. 51 du statut n'a pas été respecté, l'autorité n'ayant pas procédé de manière conforme au droit au reclassement de son employé. Partant, le licenciement ne repose pas sur un motif justifié au sens de l'art. 57 du statut, en raison des carences de la procédure de reclassement.

7) Lorsqu'un licenciement est déclaré injustifié par l'autorité de recours, cette dernière peut proposer la réintégration de l'intéressé et, en cas de refus de l'AIG, condamner celui-ci au paiement d'une indemnité ne dépassant pas dix-huit mois de salaire fixe (art. 57 al. 5 du statut).

Ce dernier alinéa est le pendant de l'art. 31 de la LPAC qui dispose que si le tribunal retient que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, il peut proposer à l'autorité compétente la réintégration (al. 2) ; en cas de décision négative de l'autorité compétente, le tribunal fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération; concernant un employé, l'indemnité ne peut être supérieure à six mois (al. 3).

Ainsi, lorsqu'un licenciement est déclaré injustifié par l'autorité de recours, cette dernière ne peut ordonner la réintégration de l'intéressé mais uniquement proposer celle-ci, soit en cas de refus de l'AIG, le condamner au paiement d'une indemnité. Il en va de même dans le cas d'un licenciement à terme assorti de la libération de l'obligation de travailler.

En l'occurrence, l'AIG ne s'est pas prononcé a sur la possibilité d'une réintégration. Partant, la réintégration du recourant sera proposée. En cas de refus de réintégration, l'AIG devra transmettre sa décision à la chambre administrative pour que celle-ci fixe l'indemnité due, en application de l'art. 57 al. 5 du statut.

Ce qui précède conduit à l'admission partielle du recours.

8) Au vu de la teneur de l'art. 87 al. 1 2ème phrase LPA, aucun émolument ne sera mis à la charge de l'AIG, bien que ce dernier succombe. Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera en revanche accordée à M. A______, à la charge de l'AIG (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 décembre 2018 par Monsieur A______ contre la décision de l'Aéroport international de Genève du 31 octobre 2018 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision du 31 octobre 2018 de la commission de recours du personnel de l'Aéroport international de Genève ;

propose la réintégration de Monsieur A______ au sein de l'Aéroport international de Genève ;

ordonne à l'Aéroport international de Genève, en cas de refus de procéder à cette réintégration, de transmettre sa décision à la chambre administrative pour fixation d'une indemnité ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à Monsieur A______, à la charge de l'Aéroport international de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Andrea Von Flüe, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Aéroport international de Genève.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, MM. Thélin, Pagan et Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :