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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3284/2019

ATA/1796/2019 du 10.12.2019 ( LOGMT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3284/2019-LOGMT ATA/1796/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 décembre 2019

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE



EN FAIT

1) Madame A______ et son mari ont pris à bail, en juin 2014, un appartement de cinq pièces au Grand-Lancy, occupé par eux et leurs deux enfants mineurs.

2) L'office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) leur a octroyé régulièrement une aide au logement.

Chaque décision d'allocation précisait que cette aide était supprimée si les bénéficiaires rejetaient une proposition pour un logement moins cher.

3) À la suite de l'annonce, le 17 juillet 2017, par Mme A______ du départ de son mari du domicile conjugal, l'office l'a invitée à produire les pièces actualisées se rapportant à ses revenus et ceux de son mari.

4) Par décision du 16 août 2017, l'OCLPF a octroyé à Mme A______ une allocation de logement de CHF 416.65, tenant compte de l'occupation du logement par quatre personnes, M. A______ apparaissant toujours comme étant domicilié dans l'appartement.

5) Le 11 février 2019, Mme A______ a déposé son dossier de candidature auprès du secrétariat des fondations immobilières de droit public (ci-après : SFIDP) pour un appartement de quatre à cinq pièces situé dans les communes de Carouge, Genève, Lancy, Onex ou Vernier. Parallèlement, elle a sollicité le renouvellement de l'aide au logement.

6) Par décisions des 19 mars et 3 mai 2019, l'aide au logement a été accordée à hauteur de CHF 416.65 par mois. Le loyer annuel s'élevait à CHF 21'312.-, charges non comprises, réduit à CHF 19'764.- dès le 1er juin 2019. Après déduction de l'allocation au logement, le loyer annuel à charge de l'intéressée se montait à CHF 14'764.20 (CHF 19'764.- moins 12 x CHF 416.65).

7) Par pli du 13 mai 2019, l'OCLPF a proposé à Mme A______ un appartement sis au chemin B______ à Châtelaine, dont le loyer annuel s'élevait, compte tenu de l'octroi d'une subvention annuelle maximale de CHF 6'800.- (12 x CHF 566.65) à CHF 13'864.-, charges non comprises.

8) Le 17 mai 20019, Mme A______ a décliné cette proposition, au motif que l'appartement comportait une pièce de moins que son logement actuel et que le loyer serait « plus élevé ».

9) Par décision du 27 mai 2019, confirmée sur réclamation le 7 août 2019, l'OCLPF a supprimé l'allocation de logement à compter du 1er juin 2019, Mme A______ ayant, sans justes motifs, refusé un appartement moins onéreux que celui qu'elle occupait.

10) Dans sa réclamation, Mme A______ a indiqué qu'elle avait déposé une demande de logement sans l'intention de la voir aboutir.

11) Par acte expédié le 10 septembre 2019, Mme A______ recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice contre la décision sur réclamation, dont elle a demandé l'annulation. Elle a conclu à ce que l'OCLPF lui octroie une aide au logement de CHF 416.65 par mois avec effet au 1er juin 2019.

Elle occupait son logement avec sa fille de 6 ans et son fils de 19 ans. Il n'y avait pas de sous-occupation au sens de l'art. 31C LGL. Si elle devait loger dans un appartement de quatre pièces, elle serait contrainte de dormir au salon, ne pouvant faire dormir ses enfants, d'âge et de sexe opposés, dans la même chambre. Ainsi, elle devait pouvoir bénéficier d'un appartement de cinq pièces.

Le recours était contresigné par Madame C______, « curatrice privée ».

12) Invitée à préciser la nature du mandat de curatelle allégué et à indiquer si la chambre de céans pouvait directement communiquer avec Mme C______, Mme A______ a répondu qu'il s'agissait d'une amie ; l'aide que cette dernière lui apportait ne résultait pas d'une curatelle.

13) L'OCLPF a conclu au rejet du recours.

Le logement de quatre pièces proposé à la recourante, nettement moins cher, aurait permis à celle-ci de réaliser une économie de CHF 5'899.80 par an. Par ailleurs, ledit logement répondait aux critères indiqués par la recourante elle-même dans sa demande de logement. Enfin, aucun inconvénient n'aurait résulté de la prise à bail de l'appartement proposé, étant relevé que la famille n'aurait pas été en sur-occupation.

14) Dans sa réplique, la recourante a relevé que la pratique d'économicité adoptée par l'autorité intimée méprisait « la règlementation en vigueur » relative à la protection des mineurs. Elle s'était trompée lorsqu'elle avait réclamé un logement de quatre pièces. Il avait été convenu avec la Fondation qu'elle se présenterait au guichet pour demander la modification de la base de données. Si la Fondation avait omis ou oublié de modifier la base de données, la recourante n'avait pas à en subir les conséquences.

15) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était garée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le refus de renouveler l'aide au logement de la recourante.

a. Un locataire peut être mis au bénéfice d'une allocation de logement si son loyer constitue une charge manifestement trop lourde, eu égard à son revenu et à sa fortune, et si un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénients majeurs (art. 39A al. 1 LGL). L'art. 39A al. 2 LGL précise que le locataire d'un immeuble non soumis à la LGL peut être mis au bénéfice d'une telle allocation dans les mêmes conditions, pour autant que le logement qu'il occupe réponde aux normes fixées par l'art. 39B LGL, c'est-à-dire que son logement soit agréé par l'État.

Le loyer et les caractéristiques du logement doivent correspondre aux normes admises dans les immeubles soumis à la loi, compte tenu de l'année de construction de l'immeuble (art. 39B al. 3 LGL). Selon l'art. 39A al. 3 LGL, le Conseil d'État détermine les conditions auxquelles le locataire a droit à une allocation, ainsi que le calcul de celle-ci.

b. Selon l'art. 7 al. 3 du règlement d'exécution de la LGL du 24 août 1992 (RGL - I 4 05.01), le nombre de personnes occupant le logement ne doit, en général, pas excéder le nombre de pièces du logement.

En application de l'art. 22 al. 1 let. a RGL, l'allocation de logement ne peut pas être accordée aux locataires qui, après en avoir été requis, ne justifient pas qu'un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénient majeur pour eux.

Selon la jurisprudence de la chambre de céans, l'allocation peut être refusée si, d'une part, le locataire n'est pas en mesure de démontrer qu'il a entrepris des démarches suffisantes afin de trouver un appartement mieux adapté à sa situation financière et, d'autre part, il a refusé l'échange avec un appartement moins onéreux (ATA/312/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/352/2016 du 26 avril 2016 consid. 3b ; ATA/865/2015 du 25 août 2015 ; ATA/408/2011 du 21 juin 2011 ; ATA/757/2010 du 2 novembre 2010).

S'il n'entend pas se conformer à cette obligation, le locataire doit démontrer qu'un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénients majeurs. Constituent de tels inconvénients, notamment, l'insalubrité du logement proposé, le lourd handicap d'un enfant, la cohabitation avec un
ex-conjoint avec qui les relations sont devenues mauvaises, la naissance de triplés alors que l'appartement est petit ou encore le fait de ne pas pouvoir installer dans un studio un lit spécial requis par l'état de santé d'un locataire (ATA/352/2016 précité ; ATA/630/2012 du 18 septembre 2012 ; ATA/190/2011 du 22 mars 2011 ; ATA/611/2010 du 1er septembre 2010 ; ATA/542/2010 du 4 août 2010).

c. En l'espèce, la recourante a refusé le logement proposé par la SFIDP au motif qu'il ne comporterait pas suffisamment de pièces pour y accueillir ses deux enfants et elle. Or, selon l'art. 7 al. 3 RGL, intitulé « sur-occupation », le nombre de personnes occupant le logement ne doit pas excéder le nombre de pièces du logement. Partant, une famille composée, comme l'espèce, de trois personnes n'est pas en situation de sur-occupation d'un logement de quatre pièces.

Par ailleurs, le logement proposé par la SFIDP correspondait aux critères indiqués par la recourante elle-même. Le fait qu'elle ne souhaite pas que ses deux enfants partagent une chambre ne permet pas de retenir que cet élément constituerait un inconvénient majeur. Le logement comprenant trois pièces habitables - hormis la cuisine -, il permet d'éviter que les enfants dorment dans la même pièce, si tel est le souhait de leur mère.

En outre, compte tenu des allocations annuelles de logement auxquelles elle avait droit (de CHF 6'800.- pour l'appartement proposé et CHF 4'999,80 pour celui occupé), le loyer de l'appartement proposé, de CHF 13'864.- par année (CHF 20'664.- moins CHF 6'800.-), était inférieur à celui de CHF 14'764.- (CHF 19'764.- moins CHF 4'999,80) relatif à l'appartement qu'elle occupait jusqu'alors. Contrairement à ses affirmations, le loyer qu'elle aurait donc dû supporter - après déduction de l'allocation au logement - en prenant à bail l'appartement proposé, était inférieur à celui qu'elle devait acquitter, en tenant compte de ladite allocation.

Pour le surplus, en tant que la recourante soutient que le principe de l'économicité pratiqué par l'autorité intimée irait « au-delà du raisonnable », il convient de rappeler que l'art. 1 al. 2 let. d LGL prescrit à l'État de veiller à l'économie des coûts. La loi concrétise d'ailleurs cette obligation au travers de différentes dispositions, dont précisément l'art. 39A al. 1 LGL qui limite le droit à une allocation de logement aux personnes pour qui le loyer constitue une charge manifestement trop lourde, eu égard à son revenu et à sa fortune, et si un échange avec un logement moins onéreux ne peut se réaliser sans inconvénients majeurs.

En conclusion, dès lors que le logement proposé à la recourante correspond tant à ses propres critères de recherche qu'au nombre de personnes composant son groupe familial, le refus opposé par celle-ci n'est pas fondé, de sorte que l'autorité intimée n'a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d'appréciation en retenant que la recourante ne remplissait plus les conditions ouvrant le droit à l'allocation de logement.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

3) Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03 ; ATA/299/2014). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la recourante qui succombe (art. 87 al. 2 LPA).

L'amie de la recourante n'étant pas sa curatrice ni un mandataire professionnellement qualifié au sens de l'art. 9 LPA, le présent arrêt sera notifié uniquement à la recourante.

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 septembre 2019 par Madame A______ contre la décision de l'Office cantonal du logement et de la planification foncière du 7 août 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à l'office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :