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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2152/2018

ATA/1743/2019 du 03.12.2019 sur JTAPI/1108/2018 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.01.2020, rendu le 09.03.2020, IRRECEVABLE, 2C_50/2020
Descripteurs : RESSORTISSANT ÉTRANGER;PROCÉDURE PÉNALE;CONDAMNATION;AUTORISATION D'ÉTABLISSEMENT;RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL);ORDRE PUBLIC(EN GÉNÉRAL);RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);RESPECT DE LA VIE FAMILIALE;CONJOINT;PESÉE DES INTÉRÊTS
Normes : LPA.60.al1.leta; LPA.60.al1.letb; LEI.34; LEI.63.al1.leta; LEI.63.al1.letb; LEI.62.al1.letb; OASA.80.al1.leta; CEDH.8
Résumé : Confirmation de la révocation du permis d'établissement d'un ressortissant togolais âgé de 28 ans, arrivé en Suisse à l'âge de 10 ans, en raison des infractions pénales commises. Proportionnalité de la mesure confirmée dès lors qu'il représente une menace grave pour la sécurité et l'ordre public, que l'intégration professionnelle n'est pas bonne (pas de travail et dettes) et que sa réintégration dans son pays d'origine n'est pas impossible. Les liens qu'il entretient avec sa compagne et sa famille se trouvant en Suisse ne permettent pas de déroger à la décision de révocation. Renvoi possible, licite et exigible.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2152/2018-PE ATA/1743/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 décembre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Gazmend Elmazi, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE LA SÉCURITÉ, DE L'EMPLOI ET DE LA SANTÉ

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 novembre 2018 (JTAPI/1108/2018)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1991 à B______, est ressortissant du Togo.

2) Arrivé en Suisse le 11 octobre 2001, il a été mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement dans le cadre du regroupement familial avec son père, qui est de nationalité suisse suite à sa naturalisation.

3) M. A______ a été interpellé par la police à deux reprises entre 2007 et 2008 pour vol de véhicule, dommages à la propriété et incendie par négligence.

4) Par courrier du 12 octobre 2009, faisant suite à l'arrestation de M. A______ le 12 septembre 2009 pour brigandage, l'office cantonal de la population, devenu le 11 décembre 2013 l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a adressé un avertissement au précité et lui a indiqué qu'en cas de récidive son permis d'établissement pourrait être révoqué.

5) Suite à cela, M. A______ a été condamné à dix reprises :

a. Le 15 octobre 2009, par le Tribunal de la jeunesse à une peine privative de liberté de quatre mois avec sursis pour brigandage.

b. Le 3 septembre 2010, par le Tribunal de police à une peine privative de liberté de trois ans avec sursis de deux ans pour brigandage muni d'une arme, vol, violation de domicile et dommages à la propriété.

c. Le 8 juin 2011, par le Ministère public à une peine privative de liberté de trente jours pour vol et dommages à la propriété.

d. Le 24 juin 2011, par le Ministère public à une peine privative de liberté de six mois pour violation grave des règles sur la circulation routière - conduite en état d'incapacité en raison d'un taux d'alcoolémie qualifié et conduite sans permis de conduire -, vol d'usage, vol, dommages à la propriété.

e. Le 16 août 2011, par le Ministère public lausannois à une peine pécuniaire de cent jours-amendes avec sursis pour agression et menaces.

f. Le 1er novembre 2011, par le Ministère public à une peine pécuniaire de quinze jours-amendes pour dommages à la propriété.

g. Le 9 août 2012, par le Tribunal de police à une peine privative de liberté de deux ans pour brigandage, vol, dommages à la propriété à réitérées reprises, violation de domicile et délit manqué de vol.

h. Le 16 octobre 2015, par le Tribunal correctionnel à une peine privative de liberté de dix-huit mois pour voies de fait, menaces, délit et contravention à la loi sur les stupéfiants et abus de confiance, et pour avoir induit la justice en erreur. Sa libération conditionnelle antérieure a été révoquée et une peine d'ensemble prononcée.

i. Le 2 novembre 2016, par le Tribunal correctionnel à une peine privative de liberté de quatre ans pour brigandages commis à réitérées reprises et délit à la loi sur les stupéfiants.

j. Le 23 janvier 2017, par le Ministère public, sans peine additionnelle à celle découlant de sa dernière condamnation, pour conduite d'un véhicule sans permis de conduire.

6) Il ressort des attestations de l'Hospice général (ci-après : HG) que M. A______ a été au bénéfice de prestations financières du 1er décembre 2010 au 30 juin 2011, puis du 1er novembre 2011 au 29 février 2012, pour des montants ascendant à CHF 7'045.95 pour 2011 et CHF 1'126.10 pour 2012. Néanmoins, l'intéressé n'émargeait plus à l'aide sociale depuis 2013.

7) Par courrier du 19 décembre 2016, l'OCPM a requis de M. A______ des renseignements relatifs à ses attaches familiales en Suisse et à l'étranger, à ses revenus et activités professionnelles ainsi qu'à ses projets futurs, et a requis la production d'un rapport médical.

8) À teneur de l'extrait établi le 4 janvier 2017 par l'office des poursuites, M. A______ faisait l'objet de poursuites pour un montant total d'environ CHF 30'000.- et d'actes de défaut de biens pour environ CHF 13'700.-.

9) Par pli du 1er février 2017, M. A______, faisant suite à la demande de renseignements de l'OCPM, a indiqué que toute sa famille vivait en Suisse, soit son père, sa belle-mère, sa soeur et son frère. Ses grands-parents paternels vivaient au Togo, étant précisé qu'il n'avait pas de contacts avec eux, en raison de la barrière de la langue et du fait qu'il n'était pas retourné dans ce pays depuis de nombreuses années. Depuis son arrivée en Suisse, il avait travaillé, dans le cadre d'une formation, de 2007 à 2008 en tant que concierge et en 2011 dans le domaine du jardinage puis, de 2013 à 2014 comme électricien intérimaire, en 2015 en qualité de peintre en bâtiment intérimaire et en 2016 en tant que mécanicien durant son séjour en prison. Il effectuait une formation de nutrition du sportif, une fois celle-ci achevée, il souhaitait entamer une formation de coach sportif.

10) Par courrier du 14 février 2018, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de proposer au département de la sécurité et de l'économie, devenu le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (ci-après : DSES ou le département) la révocation de son autorisation d'établissement et de transmettre au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) son cas afin d'examiner l'opportunité de prononcer une interdiction d'entrée en Suisse à son encontre. Un délai lui était octroyé pour se déterminer.

Compte tenu du fait qu'il avait été condamné à dix reprises pour un total de peines privatives de liberté de plus de six ans pour des faits graves et n'avait cessé de récidiver malgré l'avertissement qui lui avait été adressé en 2009, la poursuite de son séjour en Suisse représentait une menace importante et constante pour l'ordre et la sécurité publics suisses, l'intérêt public à ce qu'il quitte le territoire helvétique prévalait sur son intérêt privé à y rester.

11) Faisant usage de son droit d'être entendu, M. A______ a indiqué à l'OCPM, le 19 mars 2018, qu'il s'opposait aux mesures envisagées et sollicitait le renouvellement de son autorisation d'établissement, subsidiairement l'octroi d'un titre de séjour.

S'il ne contestait pas les condamnations entre octobre 2009 et janvier 2017, il expliquait cependant qu'il ne s'était pas rendu compte de l'avertissement reçu huit ans plus tôt et précédant lesdites condamnations, étant donné qu'il n'en avait par la suite plus reçus, nonobstant ses condamnations postérieures. Il avait également commencé à rembourser les frais de justice auxquels il avait été condamné depuis début 2017.

Il n'avait pas été condamné pour brigandage muni d'une arme, dès lors que le Tribunal correctionnel avait au contraire retenu que les conditions d'application de cette aggravante n'étaient pas remplies. Cette juridiction avait d'ailleurs constaté sa prise de conscience et le fait qu'il poursuivait une formation, signe positif d'amendement.

Sa situation personnelle s'opposait à la révocation de son autorisation d'établissement, pour les motifs précédemment exposés. Il vivait à Genève depuis dix-huit ans, de sorte qu'il avait perdu toute attache avec son pays. Pratiquement toute sa famille et tous ses amis se trouvaient à Genève et il n'avait plus de contact avec sa mère, qui vivait en Côte d'Ivoire. Il n'avait aucune chance de s'intégrer au Togo ou en Côte d'Ivoire, pays où il n'était pas revenu depuis son enfance et dont il ne maîtrisait aucune des langues locales. Il n'avait jamais bénéficié de l'aide sociale et maîtrisait parfaitement le français.

12) Par décision du 22 mai 2018, le DSES a révoqué l'autorisation d'établissement de M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse, dès qu'il aurait donné satisfaction à la justice pénale.

Il avait fait l'objet, en huit ans, de dix condamnations équivalant à un total de plus de dix ans de peine privative de liberté. La régularité de ses actes, nonobstant ses incarcérations, montrait qu'il n'hésitait pas à attenter gravement ou à mettre en danger la sécurité et l'ordre publics suisses. Le Tribunal correctionnel avait relevé, dans son jugement du 2 novembre 2016, la gravité du comportement de M. A______. Un risque de récidive réel et actuel ne pouvait être écarté. Sa responsabilité pénale avait toujours été pleine et entière.

M. A______ ne pouvait se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle réussie, nonobstant le fait qu'il séjournait en Suisse depuis l'âge de neuf ans. Démuni de formation, il n'avait pas intégré durablement le marché de l'emploi. Il avait émargé à l'aide sociale de 2011 à 2012 pour un montant total d'environ CHF 8'170.- et avait également accumulé des dettes pour environ CHF 31'100.-. Il ne pouvait se prévaloir de son droit au respect de la vie familiale à l'égard de sa famille vivant en Suisse étant précisé qu'il pourrait maintenir des contacts réguliers avec celle-ci par le biais des moyens de communication modernes. Il ne perdait aucun statut professionnel ou social en Suisse. Célibataire, il n'avait pas d'enfant. Âgé de vingt-sept ans, il était en bonne santé et apte à travailler. Ayant vécu jusqu'à l'âge de neuf ans au Togo, ce pays ne lui était pas complètement inconnu. Ainsi, il en parlait la langue officielle, soit le français, et y possédait encore de la famille, bien qu'il n'ait pas gardé de contact avec eux. Par conséquent, les difficultés de réintégration dans son pays n'étaient pas insurmontables et bien qu'il ait passé dix-sept ans en Suisse, son intérêt privé à demeurer en Suisse ne prévalait pas sur l'intérêt public à préserver ce pays d'un criminel récidiviste incapable de s'adapter à l'ordre établi.

13) Par acte du 22 juin 2018, M. A______ a interjeté un recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision rendue par le DSES le 22 mai 2018, concluant, préalablement, à ce qu'il soit entendu, principalement, à l'annulation de la décision attaquée et à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de renouveler son permis d'établissement, subsidiairement au renvoi de la décision attaquée à l'OCPM pour réexamen et nouvelle décision.

En sus des motifs invoqués dans ses précédentes écritures, il a précisé qu'après avoir fréquenté le cycle d'orientation de 2004 à 2007, il s'était dirigé vers plusieurs formations professionnelles, sans toutefois les terminer car elles ne lui correspondaient pas. Il s'intéressait depuis 2016 au domaine de la nutrition et préparait assidûment son examen y relatif pour la seconde fois. Regrettant sincèrement ses erreurs, il s'investissait pleinement au sein de La Brenaz en travaillant à satisfaction dans l'atelier peinture. Il souhaitait également débuter une nouvelle vie à sa sortie de prison auprès de sa compagne, citoyenne suisse avec laquelle il était en couple depuis plus de trois ans. Il remboursait les frais de justice auxquels il avait été condamné en 2017 à hauteur de CHF 50.- par mois et actuellement de CHF 60.-, ainsi que les victimes à concurrence de CHF 20.- par mois. Selon le plan d'exécution de sa sanction pénale, il s'était bien adapté aux règles de l'établissement et dans les activités. Son attitude était décrite comme bonne envers le personnel et ses codétenus.

14) Dans ses observations du 23 août 2018, le DSES a maintenu la décision attaquée et proposé le rejet du recours.

La décision querellée reposait sur l'ensemble de l'historique pénal de l'intéressé. Son comportement criminel s'était étendu sur une longue période et les infractions avaient la plupart du temps été commises en état de récidive, de sorte qu'il était question de délinquance chronique et non de simples actes isolés possiblement dus à des erreurs de jeunesse. Ainsi, le pronostic défavorable, ses mauvais antécédents pénaux, le fait qu'il avait minimisé ses actes et le dessein de lucre, constituaient des risques de récidive, qui avaient pour conséquence que son retour dans son pays d'origine constituait une contrainte acceptable.

15) Une audience de comparution personnelle des parties s'est déroulée le 6 novembre 2018.

L'intéressé a indiqué qu'il avait déposé auprès de la mairie de Vernier une demande de mariage avec Madame C______, de nationalité suisse, qu'il fréquentait depuis à peu près huit ans. Il n'envisageait pas en l'état d'habiter avec son amie ni de se marier rapidement, dès lors qu'il souhaitait d'abord finir sa formation puis trouver un emploi. Il téléphonait environ une fois par semaine à son père, auquel il avait demandé de ne pas venir le voir en prison. Sa belle-mère lui rendait visite environ une fois par mois. À sa sortie de prison, il aurait le choix d'aller vivre chez cette dernière, chez son père ou chez son frère. Il avait des contacts téléphoniques avec des amis qu'il avait connus avant son incarcération, qui étaient honnêtes et travaillaient.

À sa sortie de prison, il avait pour projet de commencer une formation de coach sportif, au plus tôt en mars 2019, auprès de l'école D______ à E______, qui durait un an et demi et coûtait CHF 6'000.-, étant précisé que ce montant serait financé pour moitié par son père et pour moitié par lui-même. Il avait déjà effectué des démarches pour trouver du travail, même s'il ignorait quand il allait être libéré.

Né en Côte d'Ivoire, il y avait vécu jusqu'à l'âge de cinq ans, avant de se rendre au Togo dans la famille de son père pendant une année. Il était ensuite allé dans la famille de l'épouse de son père à Madagascar, puis était retourné environ six mois au Togo, avant de venir en Suisse. Ses grands-parents, avec lesquels il n'avait jamais vécu et dont il n'avait pas beaucoup de souvenirs, habitaient au Togo, étant précisé qu'il était possible que son grand-père soit décédé. Il souhaitait qu'on lui laisse encore une chance de s'en sortir, dès lors qu'il avait mûri en prison et souhaitait désormais changer de vie.

Le DSES a indiqué pour sa part que le délai de neuf ans entre l'avertissement et la révocation découlait de la surcharge de travail de l'OCPM.

16) Par jugement du 13 novembre 2018, le TAPI a rejeté le recours.

Son intégration en Suisse bien que longue n'avait pas été bonne. L'intéressé faisait l'objet de nombreuses condamnations pénales, de poursuites et d'actes de défaut de biens, il avait été au bénéfice de l'aide sociale et n'avait pas de perspectives concrètes d'emploi à sa sortie de prison.

Par ailleurs, le principe de la proportionnalité était respecté. L'administré était majeur, sans enfant et sans rapport de dépendance particulier avec l'un des membres de sa famille vivant en Suisse, ni avec sa petite amie avec laquelle il n'existait pas d'indices concrets d'un mariage sérieusement voulu et imminent. Il pourrait communiquer avec ses proches par les moyens de communication modernes. Au demeurant, M. A______ parlait la langue officielle de son pays.

L'intérêt public à son éloignement l'emportait sur l'intérêt privé de l'intéressé et de sa famille à pouvoir rester en Suisse. En effet, il avait mis en danger l'intégrité corporelle voire la vie des victimes dans le cadre des infractions perpétrées, motivé par des mobiles égoïstes et purement financiers. La faute était très lourde et de nombreuses chances lui avaient été données. Enfin, il ne montrait qu'une prise de conscience limitée face à ses actes.

Les neuf années passées entre l'avertissement et la révocation étaient dues à une surcharge de travail de l'OCPM mais il n'en demeurait pas moins que M. A______ avait été prévenu de cette possibilité et avait tout de même persisté dans la criminalité pendant une longue période.

17) Par acte du 14 décembre 2018, l'intéressé a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d'un recours. Il concluait à l'annulation du jugement précité et de la décision du département. Subsidiairement, la procédure devait être renvoyée au TAPI pour nouvelle décision.

Sa vie privée et familiale serait violée en cas de révocation de son permis d'établissement car le recourant avait des projets de mariage avec sa compagne. Il avait effectivement affirmé qu'il ne voulait pas se marier immédiatement mais il tenait à préciser ses propos. Il voulait avant tout terminer sa formation et trouver un emploi afin d'avoir les ressources suffisantes pour pouvoir organiser une fête de mariage modeste et louer un appartement conjugal. M. A______ avait fait une demande de libération conditionnelle, en cas de réponse positive, il serait en mesure de commencer dans un futur proche un travail à plein temps et d'emménager avec sa compagne, la date du mariage serait fixée le cas échéant. L'intéressé et sa fiancée avaient d'ailleurs effectué les démarches administratives auprès de la ville de Vernier en vue d'un mariage.

Il regrettait ses actes, la preuve en était qu'il remboursait les frais de justice et les montants alloués aux victimes. Il s'investissait dans les activités de la prison et travaillait à l'atelier de peinture. Le recourant avait réussi sa formation professionnelle en nutrition du sportif et avait commencé ses recherches pour un travail adapté aux modalités d'exécution de sa peine privative de liberté.

Les pièces jointes à ce recours étaient, notamment :

- son plan d'exécution de la sanction pénale établi en mars 2017 par le service d'application des peines et des mesures, à teneur duquel, entre autre, son engagement dans sa formation de nutritionniste sportif devait être évalué sur le long terme dès lors qu'il lui restait beaucoup de modules à effectuer. Il faisait preuve d'un très bon comportement au sein de l'établissement. Le risque de récidive général à sa sortie était élevé, notamment concernant des actes ayant pour but l'appât du gain (trafic de stupéfiants). Le risque de passage à l'acte violent semblait « un peu plus modéré » tout en restant important, notamment s'il reprenait contact avec son ancien réseau social, qui le pousserait à commettre à nouveau des délits violents. Le « poids conséquent des facteurs de risque et le peu de facteurs protecteurs » étaient relevés. Ses différents suivis avaient révélé un manque de constance et de motivation. Une réflexion sur son parcours délictuel et sur les difficultés qu'il rencontrerait dans le cadre de sa réinsertion était essentielle au regard du risque de récidive évalué, dès lors qu'il semblait négliger les obstacles qui se présenteraient à sa libération ;

- une déclaration écrite par sa belle-mère le 20 février 2017 indiquant qu'ils avaient de très bons contacts, qu'elle le connaissait depuis juillet 2004 et avait toujours vécu avec lui ;

- une déclaration écrite par son père le 3 août 2011. Il voyait son fils presque tous les jours au domicile familial et, lorsque ce dernier ne s'y trouvait pas, il l'appelait pour prendre de ses nouvelles et savoir où il dormait. Il parlait avec lui de formations professionnelles et subvenait à ses besoins, sans toutefois lui donner d'argent de poche. Son fils avait des contacts avec son frère et sa soeur, qui vivaient et travaillaient à Genève. Le précité avait rendu visite à une reprise à ses grands-parents, qui vivaient au Togo mais ne parlaient que le dialecte, de sorte que la communication avec leur petit-fils était impossible. Il ignorait où se trouvait la mère de son fils. Ce dernier lui avait indiqué regretter ses agissements et avait promis de ne pas recommencer ;

- ses fiches individuelles de rémunération par La Brenaz pour les mois de février à mai 2018, oscillant entre CHF 726.- et CHF 363.- auprès de l'atelier de mécanique de la Brenaz ;

- un extrait de compte du mois de mars 2018 faisant notamment état de versements de CHF 20.- au compte « LAVI », de CHF 60.- au compte « frais de justice » et de CHF 50.- au compte « jours-amendes » ;

- un formulaire de demande en vue du mariage signé, en date du 6 novembre 2018 et 3 septembre 2018 respectivement, par lui-même et Mme C______ ;

- un diplôme de nutrition du sportif, établi le 14 novembre 2018, suite à la réussite de l'examen et du succès de la formation.

18) Le 20 décembre 2018, le TAPI a transmis son dossier sans émettre d'observations.

19) Dans ses observations du 17 janvier 2019, le département a confirmé sa décision et précisé que les motifs du recours n'étaient pas de nature à modifier sa position. Le mariage du recourant avec sa fiancée ne changeait pas le fait que l'intérêt public à l'éloigner de la Suisse prévalait.

20) En date du 24 janvier 2019, l'OCPM a transmis le jugement du Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) du 15 janvier 2019. Il avait refusé sa demande de libération conditionnelle.

Bien que la condition temporelle pour la libération conditionnelle ait été réalisée et que l'établissement pénitencier ne s'opposait pas à sa libération malgré les sanctions multiples de l'intéressé pour des bagarres et des violences physiques ou verbales, il demeurait néanmoins que le pronostic était défavorable au vu des nombreux antécédents du recourant. Sa précédente libération conditionnelle avait été un échec et avait dû être révoquée. L'évaluation criminologique retenait qu'une récidive violente pouvait intervenir si l'intéressé reprenait contact avec son ancien réseau social et qu'une source de stress, telle qu'une situation financière précaire, survenait. Finalement, le projet de formation en tant que coach sportif se heurtait à un coût élevé que l'intéressé ne pouvait pas financer.

Il était préférable que l'intéressé passe en milieu ouvert avant une libération conditionnelle, ce qui permettrait de mieux cerner ses capacités de réinsertion.

21) Le 20 mai 2019, la chambre administrative a entendu l'intéressé en audience de comparution personnelle.

L'intéressé se trouvait dans l'établissement de Bellechasse et poursuivait sa peine dans un milieu ouvert. Il avait commencé une formation d'entraîneur personnel par correspondance dont la durée était de deux ans. Il regrettait son comportement durant sa jeunesse et se rendait compte qu'il avait été complètement « inconscient et stupide ». Il voulait réussir ses projets dans la vie et ne récidiverait plus car il avait « beaucoup à perdre ».

Il comptait se marier avec sa fiancée mais l'OCPM n'avait toujours pas autorisé ce mariage. D'ailleurs, il lui parlait tous les jours au téléphone. Son conseil lui avait affirmé qu'une demande en autorisation de mariage avait été déposée en septembre 2018 et qu'il se renseignerait sur cette demande auprès de l'OPCM. M. A______ indiquait que vu le refus de la libération conditionnelle, il avait envie de se marier le plus rapidement possible et que sa fiancée le souhaitait également.

Le recourant ne connaissait pas son pays d'origine, et à sa connaissance, ses grands-parents étaient décédés. M. A______ n'avait plus de contact avec les personnes qui avaient été condamnées en même temps que lui, ni même avec son groupe social de l'époque. Cependant, il recevait des visites régulières de son amie, son frère aîné, son père et sa belle-mère quand il se trouvait encore à l'établissement de la Brenaz.

22) Le 28 juin 2019, le département a maintenu les termes de sa décision et a conclu au rejet du recours.

Il a précisé que le recourant restait au bénéfice d'un titre de séjour valable sur le territoire suisse aussi longtemps que la révocation de l'autorisation d'établissement n'était pas entrée en force.

23) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Aux termes de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). L'al. 2 précise que les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi.

3) Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), devenue la loi sur les étrangers et l'intégration (ci-après : LEI). En l'absence de dispositions transitoires, la règle générale selon laquelle s'appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où lesdits faits se sont produits (ATA/1420/2019 du 24 septembre 2019 consid. 4 ; ATA/847/2018 du 21 août 2018 consid. 3c et les références citées), sous réserve, en matière de sanctions disciplinaires ou d'amendes administratives, que le nouveau droit soit plus favorable, prévaut (ATA/1420/2019 précité consid. 4 ; ATA/847/2018 précité consid. 3c).

Les faits de la présente cause s'étant intégralement déroulés avant le 1er janvier 2019, ils sont soumis aux dispositions de la LEI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, étant précisé que la plupart des dispositions de celle-ci sont demeurées identiques.

4) La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Togo.

Selon l'art. 34 LEI, l'autorisation d'établissement est octroyée pour une durée indéterminée et sans conditions (al. 1). L'autorité compétente peut octroyer une autorisation d'établissement à un étranger s'il a séjourné en Suisse au moins dix ans au titre d'une autorisation de courte durée ou de séjour, dont les cinq dernières années de manière ininterrompue au titre d'une autorisation de séjour et s'il n'existe aucun motif de révocation au sens des art. 62 ou 63, al. 2.

5) a. Une révocation de cette autorisation est possible lorsque l'étranger a été condamné à une peine privative de liberté de longue durée (art. 63 al. 1 let. a ; art. 62 al. 1 let. b LEI) ou atteint de manière très grave à la sécurité et l'ordre publics en Suisse ou à l'étranger, les met en danger ou représente une menace pour la sécurité intérieure ou extérieure de la Suisse (art. 63 al. 1 let. b LEI). Il y a notamment atteinte à la sécurité et à l'ordre publics en cas de violation de prescriptions légales ou de décisions de l'autorité (art. 80 al. 1 let. a OASA).

b. Selon la jurisprudence, la condition de la peine de longue durée de l'art. 62 al. 1 let. b LEI est réalisée, dès que la peine - pourvu qu'il s'agisse d'une seule peine (ATF 137 II 297 consid. 2.3.4) - dépasse une année, indépendamment du fait qu'elle ait été prononcée avec un sursis complet, un sursis partiel ou sans sursis (ATF 139 I 16 consid. 2.1 ; 135 II 377 consid. 4.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_288/2013 du 27 juin 2013 consid. 2.1).

c. Le critère de la gravité qualifiée de l'atteinte peut également être réalisé par des actes contrevenant à des prescriptions légales ou à des décisions de l'autorité qui présentent un degré de gravité comparativement moins élevé, mais qui, par leur répétition malgré des avertissements et des condamnations successives, démontrent que l'étranger ne se laisse pas impressionner par les mesures de droit pénal et qu'il ne possède ni la volonté ni la capacité de respecter à l'avenir l'ordre juridique (ATF 137 II 297 consid. 3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_182/2017 du 30 mai 2017 consid. 6.2 ; 2C_127/2016 du 13 septembre 2016 consid. 4.2.1 ; 2C_881/2012 du 16 janvier 2013 consid. 4.3.1 ; FF 2002 3469 p. 3565 ss). En d'autres termes, des infractions qui, prises isolément, ne suffisent pas à justifier la révocation, peuvent, lorsqu'elles sont additionnées, satisfaire aux conditions de l'art. 63 al. 1 let. b LEI (ATF 139 I 16 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_699/2014 du 1er décembre 2014 consid. 3.2 ; 2C_160/2013 du 15 novembre 2013 consid. 2.1.1). À cet égard, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de confirmer que le critère de la gravité pouvait être réalisé concernant la réitération d'infractions contre le patrimoine qui présentent un degré de gravité comparativement moins élevé, mais qui, par leur répétition, démontrent chez l'étranger une incapacité à se conformer à l'ordre établi (arrêt du Tribunal fédéral 2C_182/2017 précité consid. 6.2).

6) a. Même lorsqu'un motif de révocation de l'autorisation est réalisé, le prononcé de la révocation ne se justifie que si la pesée des intérêts à effectuer dans le cas d'espèce fait apparaître la mesure comme proportionnée aux circonstances (art. 5 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 et 96 LEI ; ATF 139 II 121 consid. 6.5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1189/2014 du 26 juin 2015 consid. 3.4.1).

La question de la proportionnalité d'une révocation d'autorisation doit être tranchée au regard de toutes les circonstances du cas d'espèce, les critères déterminants se rapportant notamment à la gravité de l'infraction, à la culpabilité de l'auteur, au temps écoulé depuis l'infraction, au comportement de l'auteur pendant cette période, au degré de son intégration et à la durée de son séjour antérieur, ainsi qu'aux inconvénients qui le menacent, lui et sa famille, en cas de révocation (ATF 139 I 16 consid. 2.2.1 ; 139 I 145 consid. 2.4 ; 139 I 31 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1103/2013 du 26 juillet 2014 ; ATA/968/2016 du 15 novembre 2016 consid. 9).

b. Lorsque la décision litigieuse se fonde sur la commission d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le premier critère servant à évaluer la gravité de la faute et à procéder à la pesée des intérêts en présence (arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2014 du 4 décembre 2014 consid. 4.2.2 ; 2C_565/2013 du 6 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Par ailleurs, le Tribunal fédéral se montre particulièrement rigoureux dans l'examen du risque de récidive en présence d'infractions à la législation fédérale sur les stupéfiants, d'actes de violence criminelle et d'infractions contre l'intégrité sexuelle (ATF 139 II 121 consid. 5.3 ; 137 II 297 consid. 3.3). La jurisprudence récente du Tribunal fédéral insiste particulièrement sur ce critère, faisant passer la faute de l'étranger lors de sa condamnation au premier plan, loin devant une assez longue durée passée sans la commission d'une nouvelle infraction - étant précisé que durant l'exécution de sa peine, il est de toute façon attendu d'un délinquant qu'il se comporte de manière adéquate (arrêt du Tribunal fédéral 2C_142/2017 du 19 juillet 2017 consid. 6.1).

En cas d'infractions pénales graves, il existe, sous réserve de liens personnels ou familiaux prépondérants, un intérêt public digne de protection à mettre fin au séjour d'un étranger afin de préserver l'ordre public et à prévenir de nouveaux actes délictueux, le droit des étrangers n'exigeant pas que le public demeure exposé à un risque même faible de nouvelles atteintes à des biens juridiques importants (ATF 139 I 16 consid. 2.2.1 ; 139 I 31 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1103/2013 précité consid. 5.3).

c. La durée de présence en Suisse d'un étranger constitue un autre critère très important. Plus cette durée est longue, plus les conditions pour révoquer l'autorisation doivent être appréciées restrictivement (ATF 135 II 377 consid. 4.4 et 4.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_94/2016 du 2 novembre 2016 ; 2C_789/2014 du 20 février 2015 consid. 5.3). La révocation de l'autorisation d'établissement d'un étranger qui séjourne depuis longtemps en Suisse doit se faire avec une retenue particulière, mais n'est pas exclue en cas d'infractions graves ou répétées même dans le cas d'un étranger né en Suisse et qui y a passé l'entier de sa vie (ACEDH Trabelsi c. Allemagne du 13 octobre 2011, req. 41548/06 ; ATF 139 I 31 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_459/2013 du 21 octobre 2013 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/10/2017 précité consid. 6a).

d. Il doit aussi être tenu compte de l'intensité des liens de l'étranger avec la Suisse et des difficultés de réintégration dans son pays d'origine (ATF 130 II 176 consid. 4.4.2 ; 125 II 521 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_565/2013 précité consid. 4.1 ; 2C_1237/2012 du 22 avril 2013 consid. 6.1 ; ATA/442/2018 du 8 mai 2018 consid. 6).

7) En l'espèce, M. A______ a été condamné à dix reprises, pendant une période de huit ans (2009 à 2017). La seule condamnation du recourant, le 2 novembre 2016, à une peine privative de liberté de quatre ans, remplit la condition de l'art. 62 al. 1 let. b LEI d'une peine privative de liberté de longue durée.

S'agissant des biens juridiques protégés :

a.       l'une concerne des infractions contre l'administration de la justice ;

b.      deux se rapportent à des infractions à la LCR ;

c.       deux concernent des infractions à la LStup ;

d.      deux ont trait aux infractions contre la vie et l'intégrité corporelle (agression et voies de fait) ;

e.       quatre relèvent de crimes et délits contre la liberté ;

f.       seize relèvent des infractions contre le patrimoine (principalement brigandage).

Les motifs de révocation prévus par les art. 63 al. 1 let. a cum 62 al. 1 let. b LEI et 63 al. 1 let. b LEI sont ainsi réalisés. Les infractions commises par le recourant ont lésé ou spécialement mis en danger des biens juridiques importants tels que l'intégrité corporelle. Elles ont été suffisamment graves et réitérées, au sens des dispositions précitées, pour admettre qu'il continue de représenter une menace grave pour la sécurité et l'ordre public permettant de justifier son éloignement de Suisse.

Il est indéniable que le renvoi du recourant au Togo constituera un déracinement et pourrait présenter des difficultés d'adaptation pour celui-ci. Toutefois, il ressort du dossier que le recourant a été condamné à de multiples reprises, en particulier pour brigandage. L'OCPM lui avait d'ailleurs adressé un avertissement le 12 octobre 2009 l'informant qu'en cas de récidive, son autorisation d'établissement pouvait être révoquée. Celui-ci a néanmoins commis de nouvelles infractions du même type par la suite et des infractions d'autre nature. La volonté déclarée du recourant de se conformer à l'ordre juridique suisse n'a ainsi pas été démontrée dans les faits. Partant, la révocation de l'autorisation d'établissement apparaît comme la seule mesure apte à atteindre le but d'intérêt public que représente le maintien de l'ordre public et la protection des personnes et de leurs biens.

Le recourant est arrivé en Suisse à l'âge de dix ans et y a vécu depuis lors. L'ensemble de ses attaches culturelles, sociales et familiales se trouvent à Genève où vivent son père, sa belle-mère, son frère, sa soeur, ainsi que son amie avec qui il entretient des contacts réguliers et harmonieux pour la plupart d'entre eux. Cela étant, le recourant n'a cependant pas exercé durablement un emploi en Suisse. Les pièces produites ne permettent pas non plus de retenir qu'il déploierait beaucoup d'efforts en vue de trouver un emploi. Le recourant ne peut ainsi se prévaloir d'une intégration professionnelle particulièrement réussie malgré l'obtention de son diplôme de nutrition du sportif et le travail qu'il effectue en prison dans l'atelier de peinture. Il a, par ailleurs, fait l'objet de poursuites pour un montant d'environ CHF 30'000.- et d'actes de défaut de biens pour environ CHF 13'700.-.

Compte tenu de ces éléments, la mesure ne paraît pas disproportionnée. Au contraire, l'intérêt public à l'éloignement du recourant l'emporte, dans les présentes circonstances, sur l'intérêt privé de celui-ci à demeurer en Suisse.

8) Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Pour qu'il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, l'étranger doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 137 I 284 consid. 1.3 ; ATA/384/2016 du 3 mai 2016 consid. 4d).

Les relations familiales qui peuvent fonder, en vertu de l'art. 8 § 1 CEDH, un droit à une autorisation de police des étrangers sont avant tout les rapports entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant ensemble (ATF 135 I 143 consid. 1.3.2 ; arrêt 2C_899/2014 du 3 avril 2015 consid. 3.1). Un étranger majeur ne peut se prévaloir d'une telle protection que s'il se trouve dans un état de dépendance particulier par rapport à un parent établi en Suisse en raison par exemple d'un handicap (physique ou mental) ou d'une maladie grave (ATF 129 II 11 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1153/2014 du 11 mai 2015 consid. 5.3 et 2C_251/2015 du 24 mars 2015 consid. 3).

Les fiancés ou les concubins ne sont en principe pas habilités à invoquer l'art. 8 CEDH. Ainsi, l'étranger fiancé à une personne ayant le droit de s'établir en Suisse ne peut, en règle générale, pas prétendre à une autorisation de séjour, à moins que le couple entretienne depuis longtemps des relations étroites et effectivement vécues et qu'il existe des indices concrets d'un mariage sérieusement voulu et imminent (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1035/2012 du 21 décembre 2012 consid. 5.1 ; 2C_207/2012 du 31 mai 2012 consid. 3.3 ; 2C_206/2010 consid. 2.1 et 2.3 du 23 août 2010 ; 2C_733/2008 du 12 mars 2009 consid. 5.1).

Le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH n'est toutefois pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le refus de prolonger une autorisation de séjour ou d'établissement fondé sur l'art. 8 § 2 CEDH suppose une pesée des intérêts en présence et l'examen de la proportionnalité de la mesure (ATF 139 I 145 consid. 2.2 ; 135 II 377 consid. 4.3). Pour apprécier ce qui est équitable, l'autorité doit - dans le cadre de la pesée des intérêts en jeu en application des art. 96 LEtr et 8 § 2 CEDH (ATF 135 II 377 consid. 4.3) - notamment tenir compte de la gravité de la faute commise par l'étranger, de la durée de son séjour en Suisse et du préjudice qu'il aurait à subir avec sa famille du fait de l'expulsion, respectivement du refus d'accorder ou de prolonger une autorisation de séjour.

9) Le recourant se prévaut de sa situation familiale. Il est admis que celui-ci a tous ses proches à Genève. De même, il peut être retenu qu'il est fiancé à une ressortissante suisse. Il y a lieu d'examiner sa situation au regard des critères de l'art. 8 CEDH, sans qu'il y ait besoin de trancher la question de l'incidence de l'absence actuelle de liens juridiques sur le plan matrimonial. Même s'il est vrai que la décision attaquée est susceptible de restreindre de manière importante les rapports personnels qu'il entretient avec sa famille et sa compagne actuelle, elles ne les empêchent pas totalement, même si ses proches ne le suivent pas à l'étranger. L'existence de ce lien familial ne peut pas faire obstacle à la décision de révocation litigieuse. En effet, l'art. 8 CEDH ne confère au recourant aucun droit particulier ou supérieur au maintien de son autorisation d'établissement, dès lors que la décision de révocation est fondée sur une base légale formelle et qu'elle est prise pour des motifs de protection de la sûreté ou de l'ordre public, voire de prévention des infractions pénales.

Quand bien même il conviendrait de retenir, comme le soutient le recourant, qu'il fréquente Mme C______ depuis de nombreuses années, le recourant ne peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour demeurer en Suisse. En effet, le couple ne forme pas ménage commun. Concernant le mariage, l'intéressé affirmait, devant le TAPI, qu'il ne voulait pas se marier et s'installer avec sa compagne dans l'immédiat, puis, devant la chambre de céans, il a indiqué vouloir épouser sa fiancée au plus vite au vu du refus de sa libération conditionnelle en y apportant pour preuve un formulaire de demande en vue du mariage. Bien que ce dernier élément démontre la volonté d'aller de l'avant, cela ne permet pas de conclure que le couple entretient depuis longtemps des relations étroites et effectivement vécues et qu'il existe des indices concrets d'un mariage sérieusement voulu et imminent.

Quoi qu'il en soit, force est de constater, que Mme C______ a connu le recourant alors que celui-ci se trouvait être en proie à des démêlés avec la justice. Elle devait donc s'attendre, comme du reste le recourant, lorsqu'elle a noué une relation affective avec celui-ci, que son statut de résident en Suisse puisse être remis en question par l'autorité de police des étrangers au vu de ses nombreuses condamnations pénales et de l'avertissement de l'OCPM du 12 octobre 2009. Dès lors, sous l'angle de la pesée des intérêts, la prise en compte de l'existence de leur relation et l'intérêt à son maintien ne sont pas prioritaires au regard de l'intérêt public à éloigner l'intéressé de Suisse.

Au vu ces circonstances, le recourant ne peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour demeurer en Suisse.

10) Finalement, le recourant invoque une violation de l'art. 121 al. 2 Cst. sans toutefois motiver son grief.

La violation alléguée n'est pas pertinente en l'espèce, puisque, comme analysée ci-dessus, la décision de révocation du permis d'établissement du recourant est conforme au droit.

11) a. Aux termes de l'art. 64 al. 1 let. c LEI, tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).

b. Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de cette mesure est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al.  1 LEI).

L'exécution du renvoi d'un étranger n'est pas possible lorsque celui-ci ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

c. En l'espèce, le recourant n'allègue pas que son retour dans son pays d'origine serait impossible, illicite ou inexigible au sens de l'art. 83 LEI et le dossier ne laisse pas apparaître d'éléments qui tendraient à démontrer le contraire.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

12) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 décembre 2018 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 novembre 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gazmend Elmazi, avocat du recourant, au département de la sécurité, de l'emploi et de la santé, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.