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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1866/2018

ATA/1679/2019 du 19.11.2019 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RÉSILIATION;STATUT;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;POUVOIR D'APPRÉCIATION;RÉINTÉGRATION PROFESSIONNELLE;MOTIF;PROPORTIONNALITÉ;ÉVALUATION DE L'INCAPACITÉ DE TRAVAIL;MÉDECIN-CONSEIL
Normes : LPAC.21.al3; LPAC.22; LPAC.26; LPAC.31; LPAC.31.al4; RPAC.5; RPAC.20; RPAC.22.al1; RPAC.54
Résumé : Décision de licenciement pour motif fondé d'une fonctionnaire, en raison de son incapacité de travail considérée comme durable, la rendant inapte à exercer sa fonction. Aucun préavis médical n'est venu étayer la décision de l'institution. Dans un avis ne respectant pas les conditions de l'art. 26 al. 3 LPAC, antérieur à la décision de licenciement, le médecin conseil considère que celle-ci ne semble pas apte. Or, la collaboratrice a repris son travail à 50% avant la résiliation des rapports de service. Absence de motif fondé en raison du fait que l'incapacité complète et durable de la travailleuse n'a pas été établie par un préavis du médecin-conseil formel. En outre, l'écoulement des 730 jours de protection ne permet pas de mettre automatiquement fin au contrat. La procédure de l'art. 26 al. 3 LPAC n'a pas été respectée. Indemnité de 8 mois allouée, la question de la réintégration ne se posant pas car la recourante refuse de retourner au sein de l'institution de maintien, d'aide de soins à domicile. Recours partiellement admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1866/2018-FPUBL ATA/1679/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 novembre 2019

 

dans la cause

 

Madame A_______
représentée par Me Andres Perez, avocat

contre

INSTITUTION DE MAINTIEN, D'AIDE ET DE SOINS À DOMICILE (IMAD)

 



EN FAIT

1) Madame A_______, née le ______ 1967, a été engagée au sein de l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (ci-après : IMAD ou l'institution) à compter du 1er juillet 2012 à 80 % en tant qu'assistante en soins et santé communautaire (ci-après : ASSC).

Elle a intégré l'équipe du secteur « B_______ », sous la direction de Madame  C_______, sa responsable d'équipe.

2) Lors de son premier entretien d'évaluation et de développement des compétences (ci-après : EEDC), il a été jugé que ses prestations étaient au-dessus de la moyenne. Elle présentait « des grandes qualités professionnelles, était très engagée et appréciée par la clientèle ».

3) Les relations de travail, initialement sereines, se sont dégradées à la suite d'un incident signalé par Mme A_______. Un patient, suivi par une autre collaboratrice, avait ingéré des médicaments qui ne lui étaient pas destinés. La situation avait été constatée par Mme A_______ qui avait pris les mesures qui s'imposaient dans un tel cas. Cette attitude, saluée par la hiérarchie, avait mal été vécue par la collègue ayant commis l'erreur.

4) Le 9 octobre 2013, Mme A_______ a demandé son transfert. Les secteurs visés n'étant pas disponibles, elle a finalement été transférée au 1er janvier 2014 au sein de l'équipe D______, sous la direction de Monsieur E_______, responsable d'équipe.

5) Mme A_______ ayant été arrêtée depuis le 2 octobre 2013, une reprise à 50 % de son taux a été effectuée dès le 13 janvier 2014, puis à 100 % de son taux dès le 27 janvier 2014.

6) Le 2 avril 2014, la collaboratrice a été évaluée en vue de sa nomination, les prestations étant jugées globalement bonnes.

7) Mme A_______ a été nommée fonctionnaire avec effet au 1er juillet 2014.

8) Entre les mois de septembre 2014 et mai 2015, divers courriers et entretiens ont eu lieu entre Mme A_______, sa hiérarchie et les ressources humaines, notamment en relation avec ses horaires, et son souhait d'entamer un projet de formation d'infirmière. Divers éléments relatifs à sa relation professionnelle avec sa hiérarchie étaient relevés par la collaboratrice, celle-ci estimant vivre sous stress.

9) Le 26 octobre 2015, la collaboratrice a demandé son transfert au sein de l'unité d'accueil temporaire de répit (ci-après : UATR). Sa candidature n'a pas été retenue.

10) Le 11 avril 2016, la collaboratrice a été reçue par sa hiérarchie. S'agissant des problèmes de planning, ceux-ci s'étaient améliorés. L'intéressée a relevé se sentir blessée par certains commentaires négatifs la concernant au sein de son équipe.

Cet entretien a été formalisé par courrier du 24 mai 2016.

11) Le 20 juin 2016, Mme A_______ a souhaité apporter quelques précisions au rapport d'entretien du 24 mai 2016. Elle rencontrait des difficultés avec son responsable d'équipe, ce qui constituait une grande source de stress. En revanche ses collègues, les clients et le syndicat lui apportaient leur soutien.

12) À partir du 29 juin 2016, la collaboratrice a été en incapacité de travail complète, jusqu'au 31 mars 2018. Elle a repris le travail le 4 avril 2018.

13) Le 6 juillet 2016, la collaboratrice s'est plainte auprès de la directrice de l'IMAD de certains faits et agissements de sa hiérarchie.

14) Une rencontre a été fixée entre la hiérarchie, le service des ressources humaines et Mme A_______, afin de discuter des éléments évoqués dans le courrier susmentionné. L'absence pour cause de maladie de la collaboratrice a reporté cet entretien, qui n'a finalement jamais eu lieu.

15) Le 15 novembre 2016, Mme A_______ a déposé une demande de prestations d'invalidité auprès de l'office de l'assurance invalidité (ci-après : AI). Aucune décision n'a, en l'état, été rendue à teneur du dossier.

16) Le 11 avril 2017 s'est tenue une expertise psychiatrique réalisée par le Docteur F_______, à la demande de la Bâloise, l'assureur perte de gain de l'employeur.

Cette expertise a retenu un épisode dépressif récurrent moyen, avec syndrome somatique, ayant évolué vers un épisode dépressif récurrent sévère, sans symptômes psychotiques, réactionnel à des décès successifs et un conflit professionnel selon les dires de l'expertisée. L'absence de traitement médicamenteux avait aggravé la symptomatologie dépressive.

En cas d'évolution favorable, une reprise clinique « auprès d'un autre employeur ou du chômage » était attendue pour le 1er juillet 2017 à 50 % et pour le 1er août 2017 à 100 %. La reprise auprès de l'IMAD était considérée comme nulle en l'état, pour une durée indéterminée.

17) En parallèle, la collaboratrice a été suivie par le médecin du travail du service de santé et sécurité au travail (ci-après : SST), le Docteur G_______. Ce dernier a vu l'intéressée douze séances, entre le 1er octobre 2013 et le 13 février 2018.

18) Le 10 août 2017, le Dr G_______ a constaté une évolution positive de la situation et une amélioration de l'état de santé de la collaboratrice. Une reprise très progressive au sein de la même équipe était envisagée dès le 15 octobre 2017.

19) Le 2 octobre 2017, la collaboratrice a été informée que son droit au salaire en cas de maladie prendrait fin le 3 avril 2018, si son absence se poursuivait, à l'issue des sept cent trente jours d'indemnités légales.

Elle était également informée qu'elle serait prochainement convoquée formellement à un entretien de service pour l'entendre sur sa situation de santé et lui fournir des explications quant aux conséquences de l'épuisement du droit aux sept cent trente jours d'indemnités, soit notamment la possible fin des relations de travail.

20) La collaboratrice a été convoquée par courrier du 9 novembre 2017 par le responsable des ressources humaines (ci-après : RH) à un entretien de service au sens de l'art. 44 du règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01). L'objectif de l'entretien était de l'entendre au sujet de son incapacité à exercer son activité professionnelle pour des raisons de santé et évaluer les possibilités de reprise. La convocation précisait que cette incapacité était susceptible de conduire à la résiliation de ses rapports de service pour motif fondé selon les art. 21 al. 3 et 22 let. c de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05).

21) L'entretien de service s'est déroulé le 24 novembre 2017 entre la collaboratrice, son conseil, la responsable d'équipe D______ depuis le 1er février 2017 à la place de M. E_______, Madame H_______, ainsi que Monsieur  I_______, responsable RH, et Madame J_______, infirmière du SST.

a. L'état de santé et la capacité de reprise de Mme A_______ ont été évoqués lors de cet entretien. Elle a expliqué que son état de santé évoluait de manière positive, mais qu'elle n'envisageait pas une reprise d'activité dans l'immédiat, et pas dans son ancienne équipe au sein de laquelle elle avait subi des intimidations de la part de son ancien supérieur hiérarchique.

Elle proposait de travailler de nuit au sein d'un immeuble d'encadrement pour personnes âgées (ci-après : IEPA), en UATR ou encore au sein de l'équipe de maintien à domicile de nuit (ci-après : EMD).

b. L'employeur est revenu sur certaines contraintes des postes suggérés par la collaboratrice, estimant que ses attentes étaient irréalistes sur ces points. En particulier, les postes de permanents nocturnes étaient réservés aux étudiants et ceux-ci étaient engagés pour vingt-quatre mois au maximum tandis que les UATR fonctionnaient 24h sur 24h et il n'était pas possible, en intégrant cette structure, de n'effectuer que des horaires de nuit. L'EMD de nuit impliquait de procéder aux couchers tardifs des patients et non de travailler essentiellement de nuit.

Les responsables ont en outre précisé que M. E_______ avait quitté l'institution depuis près d'une année et n'était donc plus en charge de l'équipe D______

c. Il a été souligné lors de cet entretien que peu de postes de reclassement étaient disponibles à l'IMAD, 90 % des deux mille deux cents collaborateurs occupant des postes de terrain. L'attention de la collaboratrice était attirée sur les difficultés à trouver un poste correspondant aux modalités proposées.

d. Un délai au 18 décembre 2017, prolongé ultérieurement au 2 janvier 2018, était imparti à Mme A_______ pour d'éventuelles observations.

22) Le 15 décembre 2017, une demande de prestations provisoires d'invalidité a été formulée en faveur de la collaboratrice auprès de la caisse de prévoyance de l'Etat de Genève (ci-après : CPEG). Le formulaire rempli par l'employeur précisait qu'aucune tentative de reclassement n'avait été faite. L'état de santé de Mme A_______ ne le permettait alors pas. À teneur du dossier, aucune décision n'a été rendue par la CPEG.

23) Dans ses observations du 2 janvier 2018, l'intéressée a noté que le
procès-verbal semblait manifestement orienté, la manière dont l'entretien était relaté démontrant la volonté de l'IMAD de préparer la résiliation de son contrat de travail. À aucun moment, le procès-verbal ne faisait ressortir la volonté de l'institution de lui proposer sérieusement un retour à l'emploi.

Il n'était pas fait mention de l'art. 21 al. 3 LPAC. La collaboratrice avait fait part de souhaits et non d'exigences pour une reprise de son emploi en douceur, notamment en travaillant de nuit. Loin d'essayer de trouver une solution, les collaborateurs de l'IMAD s'étaient contentés d'évoquer des obstacles à la reprise.

Les causes de l'incapacité de travail n'étaient pas mentionnées dans le procès-verbal, alors que son atteinte à la santé résultait du comportement inadéquat de son ancien responsable d'équipe, ainsi que du manque de protection de l'employeur.

24) Le 9 février 2018, Mme A_______ a été informée que son droit au salaire se terminait en réalité le 18 avril 2018, et non le 3 avril 2018, en raison de jours de vacances posés durant l'arrêt maladie et qui venaient interrompre le décompte des sept cent trente jours.

25) a. Le 21 février 2018, le Dr G_______ a établi un rapport de suivi faisant état de ses constatations quant à l'aptitude de l'intéressée à reprendre son activité à 80 % au sein de l'IMAD à la suite de leur dernier entretien du 13 février 2018.

Il a estimé que Mme A_______ n'était pas apte à reprendre son travail, contrairement à ses précédents avis.

b. Après avoir rappelé l'historique de la relation de travail, il parvenait à la conclusion qu'elle n'était pas apte à travailler. Il constatait qu'elle restait fragile, mais que son état s'était amélioré grâce au traitement médical et au soutien familial. Son souhait de travailler la nuit traduisait une volonté de ne pas voir apparaître de difficultés d'ordre relationnel. Elle s'opposait, à son avis, à un retour au sein de l'équipe D______ en raison d'une « aversion subjective développée par rapport à ce lieu de travail, expliquant cette forte opposition ».

Le Dr G_______ précisait que « dispenser des soins auprès de personnes âgées vulnérables, travailler en équipe et suivre les recommandations de l'encadrement » étaient des facteurs qui pouvaient fragiliser cette collaboratrice.

c. À la suite de cette rencontre et malgré « l'amélioration très sensible de l'état de santé de Mme A_______, il [lui] était difficile à ce jour de se prononcer sur sa capacité à reprendre une quelconque activité à imad à son taux contractuel de 80 %, compte tenu de sa fragilité sur le plan psychologique ». Le Dr G_______ estimait que la reprise d'activité en milieu de soins était à ce jour trop précoce ; elle exposait la collaboratrice à des difficultés psychologiques trop importantes et ce indépendamment des mesures d'accompagnement qui pouvaient être mises en place ou être poursuivies (notamment suivi SST, coaching AI). En l'état, il se « devait d'émettre à ce jour de sérieuses réserves sur une aptitude au travail, et ce, dans l'intérêt même de Mme A_______ ». L'avis se contentait de rappeler l'historique de la collaboratrice et les conclusions du Dr G_______, sans mentionner quels éléments objectifs et médicaux étaient retenus par ce dernier pour atteindre de telles conclusions.

26) Le 4 mars 2018, la Doctoresse K_______, médecin traitant de l'intéressée, a établi un certificat médical de reprise d'activité à 50 % dès le 1er avril 2018. Aucune précision n'était apportée quant aux limitations fonctionnelles ou aux horaires de travail à effectuer.

27) Par courriel du 27 mars 2018, la collaboratrice a transmis le certificat médical susmentionné à son employeur.

28) Le même jour, l'IMAD a pris acte du certificat de reprise et proposé à la collaboratrice d'être affectée au sein de l'équipe L______ ou de son ancienne équipe D______. L'IMAD a précisé qu'une reprise d'activité partielle n'était pas de nature à reporter ou annuler la date de fin des prestations prévue le 18 avril 2018. Seule une reprise à 100 % à cette date pouvait éviter la fin des rapports de service.

La santé de Mme A_______ ne permettait pas d'envisager un reclassement dans une autre activité que celle d'ASSC en équipe de jour. Malgré le départ de M. E_______, la collaboratrice n'avait pas repris son poste. L'IMAD estimait avoir tout mis en oeuvre pour permettre à Mme A_______ de reprendre son activité.

L'attention de la collaboratrice était attirée sur le fait que seule une reprise complète empêcherait l'épuisement du droit aux sept cent trente jours de salaire versés.

29) Le 29 mars 2018, la collaboratrice a rappelé que son incapacité de travail était due au comportement inadéquat de M. E_______ ainsi qu'au manque de protection de son employeur dans cette situation. Les propositions de reprise étaient « absurdes » puisque l'IMAD proposait un retour au sein de son ancienne équipe. Enfin, elle a soulevé qu'une reprise d'activité à temps partiel n'était pas constitutive d'une disparition durable d'un motif d'engagement au sens de l'art. 22 let. c LPAC, contrairement à ce que semblait avancer l'IMAD.

30) Après plusieurs échanges, il a été convenu que Mme A_______ reprendrait une activité au sein de l'équipe L_____ à 50 %. Les modalités de reprise, fixées à raison de 3h12 par jour sur cinq jours, ont été explicitées à l'intéressée par un courriel du service juridique de l'IMAD.

31) Le 4 avril 2018, Mme A_______ a repris son activité à 50 % de son taux, soit à 40 %.

32) Le 6 avril 2018, sur la base d'un certificat médical précisant que deux journées complètes de huit heures devaient être effectuées en lieu et place de cinq journées de 3h12, les horaires de Mme A_______ ont été modifiés en conséquence. Elle travaillait dès lors les lundis et mercredis.

33) Le 11 avril 2018, la collaboratrice a rencontré sa responsable d'équipe titulaire, Madame M_______, ainsi que le responsable RH, M. I_______, afin du discuter du déroulement de sa reprise.

34) Par courrier du 12 avril 2018, le responsable RH de l'IMAD a prévenu la collaboratrice que, sans reprise à temps complet de son taux au 18 avril 2018, son contrat de travail serait résilié.

Ce courrier faisait par ailleurs état de ses limitations, empêchant une reprise selon l'IMAD. En effet, celle-ci ne pouvait pas conduire, ne savait pas faire du vélo et souhaitait répartir sa capacité de travail résiduelle sur des journées complètes de travail au lieu de cinq journées de 3h12 chacune.

35) Mme A_______ a fait part de ses observations par courrier du 17 avril 2018. Elle estimait que « la reprise mise en place par l'IMAD était un leurre et que manifestement l'institution n'avait pas l'intention de proposer sérieusement un retour à l'emploi ».

36) Par décision du 27 avril 2018, déclarée exécutoire nonobstant recours, reçue le 30 avril 2018 par recommandé, l'IMAD a résilié le contrat de travail de Mme A_______ pour motif fondé au sens des art. 21 al. 3 et 22 let. c LPAC et l'a libérée de l'obligation de travailler à partir du lundi 23 avril 2018.

L'historique des relations de travail avec Mme A_______ était rappelé. La reprise était impossible, la collaboratrice ne sachant pas faire de vélo et n'étant pas apte à conduire en l'état. Elle avait dû être placée en binôme avec un ASSC en voiture, puisqu'elle ne pouvait pas suivre à vélo. Il n'existait aucune perspective de reprise dans sa fonction d'ASSC au taux d'activité contractuel de 80 % et les possibilités d'une réorientation professionnelle correspondant à ses qualifications et sa situation de santé ne permettaient pas un reclassement au sein de l'institution.

Son droit au salaire était épuisé le 18 avril 2018 pour son incapacité de travail résiduelle de 50 %.

Les rapports de service étaient résiliés pour motif fondé avec effet au 31 août 2018, en raison de la disparition durable d'un motif d'engagement, en l'occurrence des raisons de santé (art. 21 al. 3 et 22 let. c LPAC).

37) Le 3 mai 2018, la collaboratrice a transmis un certificat médical de reprise à 100 %, établi le 23 avril 2018 par la Doctoresse K_______. Elle était désormais apte à travailler à son taux contractuel. Le courrier demandait une rectification du salaire de Mme A_______ et s'opposait à la résiliation.

38) Le 23 mai 2018, l'IMAD a répondu. Elle n'envisageait pas de replacer Mme A_______ dans son poste au vu des limitations constatées par le Dr G_______ et malgré le certificat médical du 23 avril 2018. Le changement d'avis de la Dresse K_______ était surprenant et l'IMAD émettait de sérieux doutes quant à la réelle capacité de reprise de Mme A_______.

L'IMAD acceptait toutefois d'entrer en matière sur une rectification du salaire de Mme A_______ entre le 23 avril et le 31 août 2018 pour tenir compte de sa capacité de travail complète depuis cette date.

39) Par acte expédié le 28 mai 2018, Mme A_______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant à son annulation et à la condamnation de l'IMAD au versement d'une indemnité correspondant à
dix-huit mois du dernier traitement brut.

a. La collaboratrice contestait le bien-fondé de la décision du 27 avril 2018, qui violait le droit, était contraire aux principes de proportionnalité et de la bonne foi.

Elle avait repris son poste à un taux de 50 % à compter du 1er avril 2018. Elle était disponible pour reprendre son emploi et le motif d'engagement n'avait ainsi pas disparu au 18 avril 2018. Sa reprise à temps partiel n'était pas durable, puisque son taux devait augmenter pour atteindre le taux contractuel, ce dès le 23 avril 2018.

Le Dr G_______ avait retenu par ailleurs une reprise progressive dès le mois d'octobre 2017 avant de changer d'avis et d'estimer début 2018 qu'aucune reprise n'était possible malgré l'évolution positive de la recourante. La décision contrevenait à l'art. 22 let. c LPAC pour ce motif déjà.

b. Dans un second temps, l'IMAD invoquait l'impossibilité manifeste d'assumer à moyen terme l'entièreté du cahier des charges d'ASSC au vu des limitations fonctionnelles évoquées. Les limitations concernaient un système de binôme, temporaire, l'horaire imposé à la recourante de 3h12 par jour et l'impossibilité de la recourante de conduire un véhicule ou de faire du vélo. Or, rien de tel n'était mentionné dans son cahier des charges. Certains secteurs de l'IMAD ne nécessitaient ni l'utilisation d'un vélo ni d'un véhicule pour se rendre chez les patients.

c. Enfin, aucune procédure de reclassement n'avait eu lieu, l'autorité intimée se contentant d'écarter ses propositions, estimant qu'elles étaient irréalistes. Aucune proposition de poste ne lui avait été faite, ni au sein de l'IMAD, ni au sein d'autres établissements publics. La décision était ainsi infondée car la procédure de reclassement n'avait pas été respectée.

d. L'employeur avait violé ses obligations. Le licenciement était contraire au principe de la bonne foi et de la proportionnalité. En effet, l'atteinte à la santé résultait de circonstances imputables à l'IMAD qui n'avait pas protégé la santé de sa collaboratrice, avant de la licencier lors de son retour au travail. Le congé était ainsi abusif.

e. Enfin, la recourante s'opposait à sa réintégration. Elle avait subi le harcèlement de deux collègues, puis de son chef hiérarchique sans que l'IMAD assure sa protection. L'atteinte à sa santé résultait de ce harcèlement. L'IMAD avait violé les règles de la procédure de reclassement, souhaitant manifestement se défaire de ses services. Aucune proposition n'avait été faite lui permettant d'intégrer un poste convenant à ses qualifications. Elle concluait à ce que l'IMAD lui verse une indemnité de dix-huit mois du dernier traitement brut.

40) Dans sa réponse, l'IMAD a conclu au rejet du recours. Il existait un motif fondé de licenciement et aucune possibilité de reclassement n'était envisageable. L'IMAD n'avait pas violé ses obligations en tant qu'employeur. Les principes de la proportionnalité et de la bonne foi avaient été respectés, tout comme la personnalité de Mme A_______ durant toute la durée de son engagement au sein de l'IMAD.

a. La collaboratrice avait épuisé son droit au salaire et par conséquent il n'était pas possible de la maintenir sous contrat à 80 % alors qu'elle ne travaillait qu'à 40 % et n'était ainsi payée qu'à 40 %. Cela constituait la disparition durable d'un motif d'engagement pour l'IMAD. La décision était ainsi conforme au droit.

b. Les possibilités de reclasser Mme A_______ dans un autre poste n'existaient pas. Les propositions formulées n'étaient ni adéquates ni recevables. Par ailleurs, elle ne disposait d'aucune formation permettant d'envisager un changement de fonction dans l'institution. Les places dans « l'administratif » étaient rares et pour la plupart réservés aux cadres, nécessitant des compétences dont Mme A_______ ne disposait pas. Le médecin du travail était réservé quant à une reprise.

c. L'IMAD avait rempli ses fonctions en tant qu'employeur et respecté la personnalité de Mme A_______, à la suite des difficultés relationnelles constatées. La reprise avait été organisée par l'IMAD dans des délais très courts. L'activité avait été organisée pour respecter le certificat médical, établi sans autre indication, à raison de 3h12 par jour sur cinq jours.

d. Le principe de la bonne foi n'avait pas été violé, aucune promesse n'ayant été donnée à la recourante. Le principe de la proportionnalité n'avait pas été violé vu que Mme A_______ avait épuisé son droit au salaire et il n'était pas envisageable pour l'institution de poursuivre la relation contractuelle alors que la recourante était partiellement sous contrat, mais sans salaire en cas d'incapacité de travail, pour une durée indéterminée. Selon l'IMAD, « le licenciement s'imposait, tant du point de vue de la collaboratrice à pouvoir bénéficier d'autres mesures de soutien plus adaptées à sa situation (chômage, AI) » que du point de vue de l'institution de s'appuyer sur des collaborateurs bénéficiant d'un état de santé compatible avec leur fonction.

41) Dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses conclusions et arguments. Le comportement de l'institution avait mené à son atteinte à la santé. L'application de l'art. 22 LPAC telle que faite par l'IMAD était contraire au droit et celle-ci ne pouvait être suivie en estimant que l'incapacité de travail allait perdurer. Aucune procédure de reclassement n'avait été menée.

42) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Sous la dénomination « Institution de maintien, d'aide et de soins à domicile », il est créé un établissement de droit public autonome, doté de la personnalité juridique et régi par les dispositions de la loi sur l'Institution de maintien, d'aide et de soins à domicile du 18 mars 2011 (LIMAD - K 1 07 ;
art. 1 al. 1 LIMAD).

L'institution est déclarée d'utilité publique. Elle a son siège dans le canton de Genève et est inscrite au registre du commerce du même canton
(art. 2 LIMAD).

Les relations entre l'institution et son personnel sont régies par la LPAC, sous réserve des dispositions spécifiques prévues par règlement interne liées aux missions de l'institution (art. 22 LIMAD).

3) a. Selon l'art. 26 al. 1 LPAC, le Conseil d'État, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration peut mettre fin aux rapports de service lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure, pour des raisons de santé ou d'invalidité, de remplir les devoirs de sa fonction. Il ne peut être mis fin aux rapports de service que s'il s'est avéré impossible de reclasser l'intéressé dans l'administration, au sein des services centraux et des greffes du pouvoir judiciaire ou dans l'établissement (art. 26 al. 2 LPAC).

L'incapacité de remplir les devoirs de service, à moins qu'elle ne soit reconnue d'un commun accord par le Conseil d'État, la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou le conseil d'administration, la caisse de prévoyance et l'intéressé, doit être constatée à la suite d'un examen médical approfondi pratiqué par le médecin-conseil de l'État, du pouvoir judiciaire ou de l'établissement en collaboration avec le médecin de la caisse de prévoyance et le ou les médecins traitants (art. 26 al. 3 LPAC).

b. Conformément à l'art. 21 al. 3 LPAC, l'autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour un motif fondé. Elle motive sa décision. Elle est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnels et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond aux capacités de l'intéressé. Les modalités sont fixées par règlement. L'art. 46A RPAC règle le reclassement. Il exige entre autres que les éléments constitutifs d'un motif fondé soient dûment établis lors d'entretiens de service (art. 46A al. 1 RPAC).

L'élargissement des motifs de résiliation des rapports de service, lors de la modification de la LPAC entrée en vigueur le 31 mai 2007, n'implique plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/783/2016 du 20 septembre 2016). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir, mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1471/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017).

c. L'art. 22 LPAC prévoit qu'il y a motif fondé lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c).

d. Le membre du personnel doit jouir d'un état de santé lui permettant de remplir les devoirs de sa fonction (art. 5 al. 1 RPAC). Il peut en tout temps être soumis à un examen médical pratiqué sous la responsabilité d'un médecin-conseil de l'établissement (art. 5 al. 2 RPAC). À la suite d'un examen médical, le médecin-conseil requis remet à l'intéressé et à la direction, une attestation d'aptitude, d'aptitude sous conditions ou d'inaptitude à occuper la fonction. Il précise les contre-indications qui justifient son attestation. Le respect du secret médical est garanti (art. 5 al. 3 RPAC).

Le législateur, considérant que l'état de santé fait partie des conditions d'engagement (art. 5 RPAC et 26 LPAC), a estimé que si une absence pour cause de maladie ou d'accident perdure sans qu'un remède y soit apporté ou ne puisse y être apporté, le motif fondé de la disparition durable d'un motif d'engagement est acquis (Mémorial du Grand Conseil - ci-après : MGC - 2005-2006/XI A 10437).

e. Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/347/2016 du 26 août 2016 consid. 5e ; ATA/1343/2015 du 15 décembre 2015 consid. 8).

4) a. Dans la présente affaire, la question déterminante porte sur le fait de savoir si l'état de santé de la recourante est un motif fondé suffisant, justifiant la résiliation des rapports de service.

Les parties divergent sur l'appréciation de cet élément en invoquant une lecture différente des pièces du dossier. L'avis du Dr G_______ du 13 février 2018 est déterminant pour l'autorité intimée, ce que la recourante conteste en s'appuyant sur les certificats médicaux établis en avril 2018 par son médecin. Sur cette base, l'intéressée s'estime apte à travailler à 100 % de son taux, contrairement à l'avis de l'autorité intimée, et s'oppose à son licenciement.

b. En sus des règles spéciales susmentionnées, la procédure administrative, qu'elle soit contentieuse ou non contentieuse, est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle l'autorité établit les faits d'office (art. 19 1er phr. LPA).

Selon cette maxime, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier (ATA/1192/2015 du 3 novembre 2015 consid. 2b). Elle ne dispense pas pour autant les parties de leur devoir de collaborer à l'établissement des faits (art. 22 LPA ; ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 128 II 139 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_148/2015 du 21 août 2015 consid. 3.1 ; 2C_32/2015 du 28 mai 2015 consid. 3.1). Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2).

c. Selon l'art. 20 al. 1 LPA, l'autorité réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision (1ère phr). Elle apprécie les moyens de preuve des parties (2ème phr).

La constatation des faits est, en procédure administrative tant fédérale que cantonale, gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 phr. 2 LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées : ce n'est ni le genre ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/573/2015 du 2 juin 2015 consid. 5a).

d. En matière d'assurances sociales, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concernait la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux, sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves. Ainsi, l'élément déterminant pour la valeur probante d'un certificat médical n'est ni son origine ni sa désignation sous la forme d'un rapport ou d'une expertise, mais bel et bien son contenu. Il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées. Le juge ne saurait écarter des résultats convaincants qui ressortent d'une expertise d'un médecin indépendant établi par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier. Le simple fait qu'un certificat médical soit établi à la demande d'une partie et produit pendant la procédure ne justifie pas, en soi, des doutes quant à sa valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 701/2014 du 27 juillet 2005
consid. 2.1.1 ; ATA/1327/2018 du 11 décembre 2018 consid. 3a).

e. Selon la jurisprudence de la chambre de céans, un certificat médical ne constitue pas un moyen de preuve absolu. En particulier, un document perd de sa force probante lorsqu'il est rédigé non au vu de constatations objectives du praticien, mais sur la base des seuls dires du travailleur ou qu'il est établi avec un effet rétroactif de plusieurs semaines. Le certificat médical n'est qu'un moyen de preuve parmi d'autres pour attester de l'empêchement de travailler. Le travailleur peut contredire le contenu du certificat par son comportement, auquel cas le certificat médical ne suffira pas à établir l'incapacité de travail au sens de l'art. 336c de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220 ; ATA/1091/2015 du 13 octobre 2015 consid. 4d et les références citées).

Par ailleurs, la jurisprudence fédérale a précisé que pourront en particulier être pris en compte pour infirmer une attestation médicale le comportement du salarié (on cite souvent l'exemple du travailleur qui répare un toit alors qu'il souffre d'une incapacité de travail totale en raison de douleurs à un genou) et les circonstances à la suite desquelles l'incapacité de travail a été alléguée (empêchement consécutif à un congédiement ou au refus d'accorder des vacances au moment désiré par le salarié ; absences répétées ; production de certificats émanant de permanences ou de médecins reconnus pour leur complaisance ; présentation d'attestations contradictoires ; attestations faisant uniquement état des plaintes du travailleur ou établies plusieurs mois après le début des symptômes ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_64/2008 du 14 avril 2008 consid. 3.4 ; ATA/1091/2015 du 13 octobre 2015 consid. 4d).

f. Le rôle du médecin-conseil consiste à aborder la question de l'aptitude au travail sous un angle plus large qu'un médecin psychiatre par exemple, puisque son examen peut porter sur tous les aspects médicaux en lien avec le cas qui lui est soumis (ATA/1327/2018 précité 3b), en connaissance des besoins et risques concrets afférents aux fonctions concernées, et que les différents paramètres qu'il prend en considération ne sont pas nécessairement de nature à changer au cours du temps (ATA/876/2016 du 18 octobre 2016 consid. 7c).

g. Lorsqu'une absence pour cause de maladie ou d'accident a dépassé trente jours civils sur une période d'observation de trois mois, le médecin-conseil de l'établissement peut prendre contact avec le médecin traitant du fonctionnaire et décide de toute mesure pour respecter tant la mission du médecin traitant que l'intérêt de l'établissement. Le médecin-conseil requis remet à l'intéressé, et à la direction, une attestation d'aptitude, d'aptitude sous conditions ou d'inaptitude à occuper la fonction. Il précise les contre-indications qui justifient son attestation (art. 54 al. 3 RPAC). Selon la jurisprudence relative à l'art. 54 al. 3 RPAC, il découle de cette disposition une obligation pour les médecins du service de santé du personnel de l'État de signaler toute situation problématique affectant l'aptitude d'un collaborateur à remplir la fonction pour laquelle il a été engagé, à défaut de quoi l'État risquerait lui-même de se voir reprocher de ne pas être intervenu pour protéger la santé de l'agent public concerné (ATA/876/2016 précité consid. 7c et ATA/1299/2015 du 8 décembre 2015 consid. 10d).

5) En l'espèce, la question de l'état de santé de la recourante doit être établie de manière claire et avec suffisamment de certitude. L'IMAD devait ainsi s'assurer de l'aptitude ou de l'inaptitude à travailler de la recourante avant de résilier ses rapports de service.

a. L'IMAD estime que la reprise partielle du mois d'avril 2018 justifie la résiliation des rapports de travail en raison de l'épuisement du droit au salaire en cas de maladie intervenu le 18 avril 2018. À ses yeux, la recourante aurait dû avoir repris le travail à 100 % de son taux à cette date.

L'épuisement du droit au salaire n'est pas un motif fondé au sens des art. 21 al. 3 et 22 let. c LPAC, et ne suffit pas pour mettre fin automatiquement au contrat. Une reprise partielle ne représente ni un motif fondé, ni la disparition durable d'un motif d'engagement.

b. L'IMAD justifie sa décision en considérant que « rien n'indiquait que l'incapacité de travail à 50 % » n'allait pas perdurer, estimant n'avoir eu connaissance du certificat de reprise à 100 % du taux de la recourante que le 3 mai 2018, alors qu'il avait été établi le 23 avril 2018.

Or, même si ce certificat de reprise n'a été transmis que tardivement, les autres éléments médicaux indiquaient tous que l'état de santé de la recourante s'était amélioré et qu'une reprise, prudente, pouvait dès lors être envisagée. Le Dr G_______ estimait déjà en octobre 2017 que l'évolution de la situation était positive et que la situation n'allait pas perdurer. Il avait par ailleurs préconisé une reprise très progressive à partir du 15 octobre 2017.

Ce même médecin a émis une opinion inverse au mois de février 2018, estimant cette fois-ci que l'état de l'intéressée s'améliorait, mais qu'elle restait fragile. Le médecin relevait que la recourante se déclarait prête à reprendre son travail, souhaitant travailler de nuit afin de ne voir apparaître aucune difficulté d'ordre relationnel. La collaboratrice souhaitait également travailler au sein des UATR ou des IEPA, car elle estimait que ces structures seraient plus adaptées pour elle et qu'elle bénéficierait d'un encadrement lui permettant de reprendre progressivement confiance en elle. Le médecin relevait toutefois que travailler à l'IMAD était une charge mentale très importante et que dispenser des soins auprès de personnes âgées vulnérables, travailler en équipe et suivre les recommandations d'un encadrement seraient des facteurs pouvant fragiliser cette collaboratrice.

Le médecin estimait qu'il lui était « difficile de se prononcer sur la capacité de Mme A_______, au mois de février 2018, à reprendre son activité à l'IMAD à son taux contractuel ». La reprise serait selon lui trop précoce, et exposerait Mme A_______ à « des difficultés psychologiques trop importantes, indépendamment des mesures d'accompagnement qui pourraient être mises en place ».

Le médecin ne se prononce pas sur une reprise à temps partiel ni sur un reclassement, ni même sur un autre poste au sein d'autres entités. Il se contente de d'émettre de « sérieuses réserves sur une aptitude au travail et ce, dans l'intérêt même de Madame A_______ ». L'avis ne permet pas de dire quels éléments médicaux ont été utilisés par le Dr G_______ pour arriver aux conclusions citées dans son avis médical.

c. L'avis du Dr G_______ est ainsi loin d'être clair, comme le démontrent par ailleurs les faits, la recourante ayant repris le travail dès le mois d'avril 2018. Il manque aussi d'éléments objectifs permettant de fonder une appréciation médicale pertinente sur l'état de santé de l'intéressée. Au vu des éléments produits par l'intéressée, qui invoque sa capacité à travailler, soutenue par plusieurs certificats médicaux de la Dresse K_______, l'avis du Dr G_______ ne suffit pas à lui seul à démontrer l'inaptitude de la recourante à reprendre son poste au sein de l'IMAD. On ne peut donc accorder un poids plus important à cet avis qu'aux certificats médicaux produits par la recourante, plus récents. Par ailleurs, aucun contact n'a eu lieu, à teneur du dossier, entre ce médecin, le médecin traitant de la recourante, et le médecin-conseil de la CPEG.

d. Ainsi, il ressort de ce qui précède que l'état de santé de Mme A_______ n'a pas été évalué de manière conforme à ce qui est attendu d'une autorité qui envisage de résilier des rapports de service pour motif fondé sur l'état de santé de son collaborateur. Aucun préavis médical formel du SSP attestant ou non de la possibilité pour la recourante de reprendre son activité professionnelle ne figure au dossier. Dès lors, les compétences professionnelles de la direction de l'IMAD n'étant pas médicales, il lui appartenait de s'assurer, en s'adressant aux professionnels formés à cet effet, que la recourante n'était effectivement plus apte à exercer sa fonction au sein de l'État de Genève. Si par ailleurs l'IMAD doutait de la réelle capacité de travail à 100 % de la recourante, il lui appartenait de prendre contact avec le médecin du travail afin de soumettre la recourante à un examen médical et qu'une attestation d'aptitude ou d'inaptitude soit rédigée conformément aux règles légales.

e. Au regard de l'évolution, lente mais existante, de l'état de santé de la recourante, et de la reprise positive réalisée à partir du mois d'avril 2018, à temps partiel, l'IMAD ne pouvait en outre pas retenir sans autre élément médical qu'aucune amélioration n'était envisagée à moyen terme. Vu que ces éléments n'ont pas été instruits par l'IMAD selon la procédure prévue à cet effet, l'autorité n'a pas établi l'existence d'un motif justifiant la résiliation des rapports de service pour raison de santé ou invalidité.

Ainsi, aucun des motifs évoqués par l'IMAD comme justifiant la fin des rapports de service ne correspond à un motif fondé au sens de la LPAC. Partant, la décision de résiliation des rapports de service n'est pas conforme au droit et doit être annulée.

6) a. Si la résiliation des rapports de service est contraire au droit, la chambre administrative peut proposer la réintégration à l'autorité compétente (al. 3). En cas de décision négative de l'autorité compétente ou de refus du recourant, la chambre administrative fixe une indemnité au recourant, dont le montant ne peut être inférieur à un mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération (al. 4).

En l'espèce, dans la mesure où la recourante s'est expressément opposée à sa réintégration, il convient de procéder à la fixation de l'indemnité à laquelle elle a droit en vertu de l'art. 31 LPAC.

b. Pour fixer l'indemnité, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, et de les apprécier sans donner une portée automatiquement prépondérante à certains aspects, comme le fait d'avoir ou non retrouvé un emploi en cours de procédure (ATA/274/2015 du 17 mars 2015 consid. 9b ; ATA/744/2014 du 23 septembre 2014 consid. 4b et les références citées). Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 8C_472/2014 du 3 septembre 2015 consid. 11.2 ; 8C_421/2014 du 17 août 2015 consid. 3.4.2 ; 8C_436-437/2014 du 16 juillet 2015 consid. 9.2).

c. L'ATA/1193/2017 du 22 août 2017 consid. 9b donne un aperçu de la jurisprudence rendue en matière de fixation d'une indemnité en cas de licenciement d'agents publics avant la modification de l'art. 31 LPAC.

Depuis la modification de l'art. 31 LPAC entrée en vigueur le 19 décembre 2015, les indemnités suivantes ont été allouées par la chambre administrative en cas de licenciement pour absence de motif fondé ou pour violation de la procédure de reclassement :

- dans une cause dans laquelle le licenciement avait été prononcé en l'absence de motifs fondés, la chambre administrative a notamment tenu compte de l'absence de tout reproche envers la recourante pendant près de quatre ans à compter de son engagement, de l'atteinte de longue durée à sa santé liée aux conditions de travail, de l'attitude déplacée de la collaboratrice, pouvant toutefois s'expliquer par l'attitude peu constructive et peu compréhensive de la part de sa hiérarchie, de l'absence de cohérence et d'empathie de la part de la nouvelle hiérarchie de l'intéressée face au contexte professionnel global, de l'absence de mesures prises par la hiérarchie afin de permettre à la collaboratrice de pouvoir maintenir son employabilité après sa longue maladie, de la durée des rapports de service de sept ans, du refus de réintégration, de la violation grave commise par l'autorité intimée en prononçant un licenciement en l'absence de motifs fondés et des conséquences sur les perspectives professionnelles futures de la collaboratrice, âgée de quarante-cinq ans. Elle a ainsi arrêté l'indemnité à douze mois (ATA/347/2016 précité consid. 11d). Cet arrêt n'a pas fait l'objet d'un recours auprès du Tribunal fédéral.

- six mois d'indemnité ont été alloués à la recourante (ATA/1193/2017 précité confirmé par le Tribunal fédéral le 11 octobre 2018 dans la cause 8C_697/2017) pour absence de procédure de reclassement, les circonstances comprenant aussi la durée des rapports de service (douze ans), les conditions du transfert de la recourante au service de facturation - présenté par la hiérarchie comme une nouvelle chance, alors qu'apparaissait dans la procédure l'intention de son employeur d'écarter la recourante -, le manque de soutien de la hiérarchie dans le cadre de la procédure d'enquête administrative ouverte contre son supérieur hiérarchique et qui avait affecté la recourante, la chronologie des événements (la recourante avait été convoquée à un entretien de service et s'était fait licencier à l'issue d'une procédure qui ne la concernait pas directement et lors de laquelle elle n'avait pas pu se défendre alors que de nombreux témoignages l'avaient accablée).

- neuf mois pour une absence de reclassement et un refus de réintégrer l'intéressé (ATA/1195/2017 du 22 août 2017 confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 8C_696/2017).

d. La chambre administrative a pour pratique de fixer l'indemnité pour refus de réintégration à un certain nombre de mois du dernier traitement brut de l'employé, conformément à l'art. 31 al. 4 LPAC (ATA/1042/2016 du 13 décembre 2016 ; ATA/258/2014 du 15 avril 2014). De plus, l'indemnité fondée sur cette disposition comprend le treizième salaire au prorata du nombre de mois fixés et n'est pas soumise à la déduction des cotisations sociales (ATA/1042/2016 précité ; ATA/590/2016 du 12 juillet 2016 ; ATA/1213/2015 du 10 novembre 2015). En l'absence de conclusion sur ce point, les intérêts moratoires n'y sont pas additionnés (art. 69 al. 1 LPA ; ATA/273/2015 du 17 mars 2015 ; ATA/193/2014 du 1er avril 2014).

e. En l'espèce, étant donné l'ensemble des circonstances susmentionnées, à savoir notamment le licenciement malgré la reprise du travail par la recourante, les conditions fixées à la reprise, soit notamment l'horaire imposé de 3h12 par jour sur cinq jours, la capacité de travail reconnue par certificat médical comme entière, remise en question par l'IMAD qui n'a pas d'autres éléments à apporter à l'appui de sa contestation, la bonne qualité des prestations de la recourante, l'incapacité de travail résultant de problèmes avec un supérieur hiérarchique, mais aussi la durée des rapports de service (de six ans) et l'absence de limitations fonctionnelles déterminantes, l'indemnité, conformément à la pratique de la chambre de céans, sera arrêtée à huit mois du dernier traitement mensuel brut de la recourante au sens de l'art. 2 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15).

L'indemnité sera fixée à huit mois du dernier traitement brut de la recourante au sens de l'art. 2 LTrait, à l'exclusion de tout autre élément de rémunération et sans intérêt moratoire, en l'absence de conclusions dans ce sens.

Au vu de ce qui précède, il n'est donc pas nécessaire d'examiner les autres griefs invoqués par la recourante.

7) Aucun émolument ne sera mis à la charge de la recourante, vu l'issue du litige (art. 87 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- lui sera allouée à la charge de l'IMAD (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 mai 2018 par Madame A_______ contre la décision de l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD) du 27 avril 2018 ;


 

au fond :

l'admet partiellement ;

annule la décision de l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD) du 27 avril 2018 ;

constate que le licenciement de Madame A_______ ne repose pas sur un motif fondé ;

fixe l'indemnité due à Madame A_______ par l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD) à huit mois de son dernier traitement mensuel brut ;

condamne en tant que de besoin l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD) à verser ce montant ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de CHF 1'500.- à Madame A_______ à la charge de l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Andres Perez, avocat de la recourante, ainsi qu'à l'institution de maintien, d'aide et de soins à domicile (IMAD).

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, MM. Pagan et Verniory, Mme Cuendet, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Marmy

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :