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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/778/2019

ATA/1691/2019 du 19.11.2019 ( TAXIS ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/778/2019-TAXIS ATA/1691/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 novembre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

M. A_______

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



EN FAIT

1) M. A______, au bénéfice depuis le 16 décembre 2013 d'un permis de service public au sens de l'ancienne loi sur les taxis et limousines du 21 janvier 2005 (aLTaxis), s'est vu délivrer, le 4 août 2017, une autorisation d'usage accru du domaine public par le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN).

2) Par décision du 24 janvier 2019, le PCTN lui a facturé la taxe annuelle 2019 de CHF 1'400.- pour ledit usage accru, fondée sur la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31), entrée en vigueur le 1er juillet 2017, et son règlement d'exécution du 21 juin 2017
(RTVTC - H 1 31.01), en particulier l'art. 26 al. 1 de ce dernier.

3) Par acte déposé le 25 février 2019 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a formé recours contre cette décision, concluant à l'annulation de celle-ci et à ce qu'il soit dit qu'il ne devait pas la somme facturée.

La taxe ne respectait pas les principes de la légalité, de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire. Elle ne reposait pas sur une base légale, faute de délégation législative, et visait une catégorie particulière de la population, ce qui se heurtait au principe de l'égalité de traitement et pénalisait la catégorie professionnelle des « artisans taxis ». Par ailleurs, elle était exorbitante et mettait en péril la capacité de gains et portait atteinte à son minimum vital. Enfin, la taxe ne lui procurait aucun service de l'État, les « artisans taxis » étant en réalité privés de l'usage accru du domaine public.

4) La LTVTC et son règlement d'exécution ayant fait l'objet de recours constitutionnels, la cause a été suspendue le 25 avril 2019, dans l'attente des arrêts à rendre par le Tribunal fédéral.

5) Par arrêts 2C_690/2017, 2C_772/2017 et 2C_773/2017 du 13 mai 2019, le Tribunal fédéral a rejeté ces recours. L'art. 11 LTVTC, qui prévoyait le paiement d'une taxe annuelle ne dépassant pas CHF 1'400.- par autorisation du droit d'usage accru du domaine public, ne violait pas les principes de la légalité, de la séparation des pouvoirs et d'équivalence. Le montant de CHF 1'400.- demeurait dans des limites raisonnables (2C_772/2017). De même, l'art. 46 LTVCT n'opérait pas une inégalité de traitement entre concurrents (2C_690/2017) ni ne consacrait une atteinte à la liberté économique des personnes astreintes au paiement de la taxe litigieuse (2C_773/2017).

6) La suspension de la présente procédure n'ayant plus lieu d'être, la cause a été reprise le 11 juin 2019 et les parties invitées à se déterminer à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_772/2017.

7) Le 11 juillet 2019, le PCTN a conclu au rejet du recours, relevant que le Tribunal fédéral avait rejeté tous les griefs invoqués par le recourant.

8) Le recourant ne s'est pas manifesté dans ce délai, ni dans le délai imparti pour exercer le cas échéant son droit de réplique à la suite de l'écriture du PCTN précitée.

9) Le 13 septembre 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Est litigieux le bien-fondé de la taxe réclamée au recourant.

a. Les titulaires de permis de service public au sens de l'aLTaxis se voient délivrer un nombre correspondant d'autorisations d'usage accru du domaine public au sens de la LTVTC, et conservent la titularité de leurs numéros d'immatriculation, pour autant qu'ils poursuivent leur activité de chauffeur de taxi, respectivement d'entreprise proposant un service de taxi. La taxe annuelle prévue par l'art. 11A LTVTC est due pro rata temporis de l'année en cours, à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi (art. 46 al. 1 LTVTC).

Tout titulaire de la carte professionnelle de chauffeur de taxi qui exploite un taxi de service privé en qualité d'indépendant ou travaille comme employé ou fermier d'un titulaire d'une autorisation d'exploiter un taxi ou une entreprise de taxis de service public au sens de l'aLTaxis, délivrée avant le 1er juin 2015, qui, lors de l'entrée en vigueur de la LTVTC révisée (le 1er juillet 2017), exerce de manière effective sa profession peut demander une autorisation d'usage accru du domaine public au sens de l'art. 10, dans un délai de six mois après son entrée en vigueur. La taxe annuelle prévue par l'art. 11A est due pro rata temporis de l'année en cours, à compter de la date de délivrance de l'autorisation (art. 46
al. 2 LTVTC).

b. En contrepartie du droit d'usage accru du domaine public, chaque détenteur d'une ou plusieurs autorisations paie une taxe annuelle ne dépassant pas
CHF 1'400.- par autorisation (art. 11A al. 1 LTVTC), dont le produit est affecté aux mesures nécessaires pour garantir le respect et la bonne application de ladite loi (art. 11A al. 2 LTVTC).

À teneur du règlement d'exécution, la taxe annuelle pour l'usage accru du domaine public s'élève à CHF 1'400.- et est destinée notamment au financement des effectifs supplémentaires nécessaires au sein des services de l'État chargés de garantir le respect et la bonne application de la loi et de son règlement d'exécution (art. 26 al. 1 RTVTC). La taxe est due le premier trimestre de chaque année, soit le 31 mars au plus tard. Le montant dû pro rata temporis pour l'année en cours doit être versé dans les trente jours qui suivent la délivrance de l'autorisation
(art. 26 al. 2 RTVTC).

3) Le recourant a contesté la légalité de la règlementation relative à la perception de la taxe litigieuse. Il a soutenu qu'elle contrevenait, en particulier, aux principes de la légalité, d'égalité, de la proportionnalité et était, par ailleurs, arbitraire.

Dans ses arrêts susmentionnés, le Tribunal fédéral s'est prononcé sur ces différents griefs et les a écartés. Le recourant ne soulève pas d'autres griefs que ceux qui ont été traités par le Tribunal fédéral. S'agissant notamment de celui relatif à la disproportion du montant de la taxe dont le recourant s'est particulièrement plaint, il est relevé que le Tribunal fédéral, précisant qu'il s'agissait d'une taxe causale, a examiné si ce montant était raisonnable. Mettant en balance le montant mensuel d'environ CHF 120.- que représentait la taxe annuelle, soit six courses mensuelles à CHF 20.-, d'une part, et la plus-value en termes de visibilité et de fluidité de circulation représentée par le droit d'usage accru du domaine public dont jouissaient les chauffeurs de taxis, d'autre part, le Tribunal fédéral a retenu que le montant de la taxe n'apparaissait pas déraisonnable (arrêt 2C_772/2017 consid. 4.5.7). Rien ne permet de s'écarter de cette analyse (ATA/1160/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3).

Le grief du recourant selon lequel les « artisans taxis » seraient en réalité privés de l'usage accru du domaine public ne repose sur aucune motivation, et, en tout état de cause, une remise en question des avantages de l'application de la LTVTC n'entre pas dans le cadre du présent litige.

En outre, le Tribunal fédéral a précisé que, dès lors que l'avantage économique retiré par le bénéficiaire du droit d'utilisation pour l'usage accru du domaine public était difficile, voire impossible à déterminer concrètement, la jurisprudence admettait que de telles taxes soient aménagées de manière schématique. Il convenait cependant que la taxe demeure compatible avec le principe de l'équivalence. Tel était le cas de la taxe litigieuse, qui ne créait pas des différences injustifiées et restait, comme déjà exposé, dans des limites raisonnables (arrêt 2C_772/2017 consid. 4.5.5). Sur ce point non plus, la chambre de céans n'a pas de motif de s'écarter de l'analyse du Tribunal fédéral. En particulier, elle ne peut introduire un critère de fixation de la taxe qui n'est pas prévu par la loi, comme par exemple la rentabilité de l'activité du recourant ATA/1160/2019 précité consid. 3), comme cela pourrait découler de son grief relatif à sa capacité de gains.

Infondé, le recours sera rejeté.

4) Malgré l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu, le recourant plaidant au bénéfice de l'assistance juridique (art. 87 al. 1 LPA ; art. 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera en outre allouée, vu l'issue du recours (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 février 2019 par M. A______ contre la décision du service de police et de lutte contre le travail au noir du 24 janvier 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à M. A______, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :