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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4433/2018

ATA/1662/2019 du 12.11.2019 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : ASSISTANCE PUBLIQUE;BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS D'ASSISTANCE;CHANGEMENT DE RÉSIDENCE;CONCLUSIONS;DEVOIR DE COLLABORER;DOMICILE;PRESTATION D'ASSISTANCE
Normes : LIASI.9; LIASI.11.al1.leta; LIASI.35.al1.leta; LIASI.35.al1.letc; LIASI.35.al1.letd; LPA.65; LPA.73.al1
Résumé : La décision de suppression des prestations d'aide financière accordées au recourant est conforme au droit et proportionnée vu l'impossibilité d'établir son lieu de résidence effectif en raison de son manque de collaboration. Les conditions mêmes présidant à l'ouverture de ce droit ne peuvent ainsi être établies. À cela s'ajoute que le recourant conserve la possibilité de déposer une nouvelle demande d'aide sociale.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4433/2018-AIDSO ATA/1662/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 novembre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

M. A_______

contre

HOSPICE GÉNÉRAL


EN FAIT

1) a. M. A______, né en 1983, de nationalité suisse, a bénéficié des prestations de l'Hospice général (ci-après : l'hospice) du 1er mars au mois de juin 2004, ensuite du 1er janvier 2005 au 31 mars 2005 et du 1er octobre 2013 au 31 août 2018. Il bénéficie à nouveau des prestations de l'hospice depuis le 1er janvier 2019.

b. Selon le registre des habitants de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), M. A______ a séjourné au ______, rue B______, à C______, du 2 janvier 1990 au 1er mai 1991 ; au ______, avenue de D______, à C______, adresse de ses parents,du 1er mai 1991 au 1er mai 2005, ensuite du
1er juillet au 1er octobre 2008 ; au ______, avenue E______, à C______, du 1er mai 2005 au 1er février 2008 ; au ______, rue des F______, à G______, du 1er février 2008 au 1er juillet 2008 ; au ______, route de H______, à I______, du 1er octobre 2008 au 1er décembre 2009 ; au ______, chemin de J______, à K______, du 1er décembre 2009 au 21 septembre 2018 ; et de nouveau au ______, avenue de D______, à C______, dès le 21 septembre 2018 à ce jour.

2) a. Les 4 octobre 2013, 2 octobre 2014, 7 septembre 2015, 21 septembre 2016 et 12 janvier 2019, M. A______ a signé un document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » (ci-après : Mon engagement).

Il s'engageait à donner immédiatement et spontanément à l'hospice toutes les pièces nécessaires à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique en Suisse et à l'étranger ; à informer sur tout nouveau fait de nature à entraîner la modification du montant de ses prestations d'aide financière, et à communiquer toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique, en Suisse et à l'étranger.

b. Il avait également complété et signé les formulaires de demande de prestations d'aide sociale financière en indiquant avoir comme adresse, depuis 2013, un appartement sis au ______, chemin de J______, à K______.

3) Dès 2013, M. A______ a eu plusieurs entretiens avec son assistante sociale du centre d'action sociale (ci-après : CAS) L______.

a. Les 14 octobre 2013, 16 janvier, 16 février, 25 avril, 29 juillet, 9 septembre, 2 octobre et 2 décembre 2014, il a déclaré être célibataire, mais vivre en couple avec Mme M______ dans un appartement à l'adresse précitée de K______, dont le contrat de bail était au nom de M. A______. Néanmoins, il avait vécu chez ses parents ou chez l'une de ses soeurs voire chez des amis, en raison des difficultés de cohabitation avec Mme M______. Il souhaitait quitter l'appartement en raison de cette cohabitation difficile, même s'il s'y rendait régulièrement. En 2010, il avait laissé la jouissance de l'appartement à Mme M______ et avait vécu depuis cette date chez des amis. Il était revenu vivre avec celle-ci en 2013.
Mme M______ était également à la recherche d'un autre logement.

b Lors de l'entretien du 14 octobre 2013, M. A______ a produit un contrat de bail à loyer signé le 5 novembre 2009, avec effet au 1er décembre 2009, portant sur l'appartement précité de trois pièces et un parking pour un loyer mensuel de CHF 1'370.-, charges comprises. Le 16 février 2014, il a remis à son assistante sociale un contrat de colocation signé avec Mme M______, le 20 janvier 2014, pour une période du 1er février 2014 au 31 janvier 2015 moyennant une participation de CHF 660.- au loyer mensuel, charges comprises. Le 9 septembre 2014, il a produit une décision du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) octroyant à Mme M______ une prestation de CHF 660.- à titre de participation à son loyer. L'hospice assurait la prise en charge de l'autre moitié du loyer mensuel.

4) M. A______ a été suivi par le service de réinsertion professionnelle (ci-après : SRP) de l'hospice, du 1er mai 2015 au 31 août 2016.

À la suite de l'échec de son projet professionnel, il a été transféré à nouveau au CAS L______ en septembre 2016.

5) Dès son retour au CAS L______, M. A______ a eu d'autres entretiens avec l'assistante sociale s'occupant désormais de son dossier d'aide financière.

Les 28 septembre et 29 novembre 2016, 18 janvier et 28 novembre 2017, 12 janvier et 30 avril 2018, il a annoncé envisager de déménager chez ses parents ou chez l'une de ses soeurs, la cohabitation avec Mme M______ devenant de plus en plus éprouvante. Il voulait quitter le logement de K______ au début de l'année 2017. Il avait néanmoins renoncé à s'installer chez ses parents ou chez l'une de ses soeurs, même si la cohabitation avec Mme M______ était pénible. Il prévoyait de trouver une autre solution de logement en 2017.

6) Le service des enquêtes de l'hospice a rendu deux rapports sur la situation de M. A______.

a. Selon un rapport de « contrôle terrain » du 8 juillet 2014, M. A______ était absent le 24 juin 2014 à l'adresse précitée de K______. Mme M______ avait déclaré à l'inspectrice ne pas connaître l'emploi de temps de ce dernier et ne pas savoir où il était. Lors des visites de l'inspectrice des 23, 26 et 30 juin et du
1er juillet 2014, personne n'avait ouvert la porte de l'appartement de
K______. Le 30 juin 2014, le concierge avait déclaré à l'inspectrice ne pas connaître l'intéressé. Selon lui, seule Mme M______ logeait dans l'appartement.

b. D'après un autre rapport du 28 août 2018, le 4 juin 2018, les noms de A______ et M______ figuraient sur une boîte à lettres à l'adresse susmentionnée, mais pas sur la porte palière. Le 6 juillet 2018, l'intéressé s'était présenté au service des enquêtes à la suite d'une convocation remise dans la boîte à lettres de l'adresse précitée. Il avait déclaré lors de cet entretien, avoir son lieu de vie à l'adresse précitée ; il s'y rendait uniquement la nuit pour ne pas rencontrer Mme M______ avec laquelle il entretenait de mauvaises relations ; il dormait sur un canapé ; il ne détenait pas la clé de l'appartement ; il avait peu d'affaires dans l'appartement ; il dormait occasionnellement chez des amis ou chez l'une de ses soeurs. Selon Mme M______, interrogée par l'inspectrice lors de sa visite sur place, l'intéressé ne venait jamais dormir sur place et n'avait jamais eu des affaires dans l'appartement. Celui-ci payait un loyer de CHF 665.- par mois.

c. D'après l'OCPM, l'intéressé était enregistré comme domicilié à l'adresse précitée depuis le 1er décembre 2009, Mme M______ depuis le 19 novembre 2010. Selon les relevés du compte bancaire n° 1______.2______ de M. A______ ouvert auprès de l'N______ (ci-après : N______), l'adresse de l'intéressé était au 25 juillet 2018, au ______, rue de D______, à C______.

7) Le 16 juillet 2018, M. A______ a eu un entretien avec son assistante sociale en présence d'une responsable d'unité du CAS L______.

a. Interrogé au sujet de son « réel lieu de vie », l'intéressé a déclaré ne pas dormir toujours à K______ et passer la nuit chez des amis, des membres de la famille et surtout chez l'une de ses soeurs.

b. La responsable d'unité et l'assistante sociale ont demandé à l'intéressé de fournir à l'hospice l'adresse de sa résidence effective, la preuve de son changement d'adresse auprès de l'OCPM et de l'affectation des prestations d'aide financière octroyées à titre de participation au paiement du loyer. Elles lui ont fixé un délai au 31 juillet 2018 pour s'exécuter.

8) Par courrier du 18 juillet 2018 valant avertissement, l'hospice a confirmé à M. A______ le contenu de l'entretien du 16 juillet 2018.

Le droit aux prestations serait interrompu avec effet au 31 juillet 2018 et une demande de remboursement de la totalité des prestations versées depuis le début de l'aide financière lui serait notifiée si l'intéressé ne respectait pas le délai imparti pour produire les documents demandés.

9) Le 31 juillet 2018, M. A______ a téléphoné à son assistante sociale pour lui communiquer son adresse au ______, rue de D______, à C______.

10) Par décision du 22 août 2018, exécutoire nonobstant opposition, l'hospice a mis fin aux prestations d'aide financière octroyées à M. A______ depuis le 31 juillet 2018 au motif que sa domiciliation dans le canton de C______ n'avait pas pu être attestée et qu'il n'avait pas fourni dans le délai imparti toutes les informations demandées.

La résidence effective de l'intéressé n'avait pas pu être établie. Selon le contrôle du service des enquêtes, ce dernier n'occupait pas le logement au
______, chemin de J______, à K______, déclaré comme lieu de vie et pour lequel il recevait l'aide financière depuis le 1er octobre 2013. Le concierge de l'immeuble ne le connaissait pas et n'avait pas attesté de sa présence régulière dans le bâtiment. M. A______ n'avait pas fourni dans le délai imparti les renseignements demandés.

L'intéressé n'avait en outre pas fourni des justificatifs de paiement de son loyer réclamés dans l'avertissement du 18 juillet 2018. Une demande de remboursement concernant les sommes perçues indûment pour le loyer lui serait ultérieurement adressée.

11) Le 20 septembre 2018, M. A______ a fait opposition contre cette décision en concluant à ce que l'hospice renonce à mettre fin à son aide financière.

Il avait essayé en vain de demander à Mme M______ de lui fournir les justificatifs de participation au loyer de l'appartement de K______. Même si celle-ci reconnaissait verbalement cette participation financière, elle refusait de le consigner dans un écrit. Elle avait indiqué être disposée à répondre uniquement à une demande de l'hospice.

12) Par décision sur opposition du 16 novembre 2018, l'hospice a rejeté celle-ci et confirmé la décision du 22 août 2018 en tant qu'elle mettait fin aux prestations d'aide financière octroyées à M. A______ avec effet au 1er août 2018.

M. A______ n'avait pas son lieu de résidence effective au ______, chemin de J______, à K______. Il n'avait en outre pas démontré s'être constitué une autre résidence effective à C______. Il n'avait donné aucun argument contestant les constatations du service des enquêtes, admettant ainsi implicitement ne pas avoir pour adresse l'appartement de K______. Il s'était contenté de produire une attestation de l'OCPM du 21 septembre 2018 selon laquelle son domicile était chez ses parents et qu'il résidait depuis 1990 dans le canton de C______.

La question des loyers ferait l'objet d'une demande de remboursement distincte en fonction des preuves de participation financière au loyer de l'appartement concerné.

L'intéressé pouvait déposer une nouvelle demande de prestations d'aide financière auprès du CAS de son quartier s'il ne parvenait pas à faire face à ses besoins vitaux.

13) Par acte expédié le 15 décembre 2018, M. A______ a recouru contre la décision précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant à ce que « son recours soit accepté ».

Sa relation avec Mme M______ s'était dégradée rapidement depuis 2013-2014. Il avait pour ce motif passé peu de temps à son adresse de K______. Il avait néanmoins payé son loyer tous les mois. Il vivait depuis cette période chez ses soeurs et ses parents. Il avait affirmé habiter à l'adresse de K______ dans la mesure où il y payait son loyer et y recevait son courrier. L'adresse enregistrée auprès de l'OCPM était celle de K______, même s'il y passait peu de temps « physiquement ».

Il n'avait pas fourni les documents demandés en raison de la détérioration de sa relation avec Mme M______, celle-ci l'ayant informé tardivement de la réception de son courrier.

14) Par courrier du 9 janvier 2019, la chambre administrative a imparti à M. A______ un délai pour satisfaire aux exigencesde l'art. 65de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sous peine d'irrecevabilité de son recours.

15) Le 24 janvier 2019, M. A______ a donné suite au courrier précité de la chambre de céans.

a. Dans son recours du 15 décembre 2018, il demandait la reconnaissance du paiement de sa part au loyer de l'appartement de K______, même s'il n'habitait plus à l'adresse précitée.

b. Il a à nouveau produit le contrat de colocation du 20 janvier 2014 et des récépissés de paiement d'un loyer mensuel de CHF 1'320.- portant sur les mensualités de décembre 2014 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2015 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2016 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2017 ; et janvier, mars, juin et juillet 2018.

16) Par décision du 8 février 2019, l'hospice a requis de M. A______ le remboursement de CHF 28'380.- des prestations versées du 1er janvier 2015 au 31 juillet 2018.

L'intéressé recevait des prestations d'aide financière depuis le 1er octobre 2013. Selon une visite domiciliaire du 6 juillet 2018, il ne vivait pas dans son logement de K______. Il n'avait pas remis les documents requis dans le délai imparti au 31 juillet 2018. La décision du SPC relative aux prestations versées à Mme M______ était la preuve de son domicile à l'adresse de K______ durant l'année 2014. Sans autre document et selon la visite domiciliaire précitée, il n'existait aucune preuve de sa réelle occupation du logement de K______ dès janvier 2015.

17) Le 5 mars 2019, l'hospice a conclu à l'irrecevabilité du recours. Il a également conclu préalablement, au cas où le recours serait déclaré recevable, à ce qu'un délai lui soit accordé pour se prononcer sur le fond. Il a aussi conclu principalement au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.

M. A______ ne contestait pas la fin de son droit à des prestations d'aide financière, seul objet de la décision attaquée. Il reconnaissait expressément dans ses écritures de recours ne pas avoir eu son domicile et sa résidence effectifs à l'adresse annoncée à l'hospice.

Il percevait à nouveau une aide financière dès le 1er janvier 2019 dans la mesure où il avait rendu vraisemblable sa résidence effective au domicile de ses parents.

18) L'intéressé n'ayant pas répliqué malgré la possibilité offerte de le faire, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sous cet angle (art. 52 de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04 ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) a. Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière par laquelle sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/1302/2017 du 19 septembre 2017 ; ATA/518/2017 du 9 mai 2017). Ainsi, une requête en annulation d'une décision doit être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu'elle ne déploie pas d'effets juridiques (ATA/1302/2017 précité).

b. En l'espèce, le recourant n'a pas pris de conclusions formelles en annulation de la décision de l'hospice du 16 novembre 2018. L'on comprend toutefois de ses écritures qu'il est en désaccord avec celle-ci et qu'il souhaite son annulation ainsi que le maintien des prestations d'aide financière. Il s'ensuit que le recours est également recevable sous cet angle.

3) L'intimé a requis un délai pour se déterminer sur le fond de la cause si le recours était déclaré recevable.

a. Selon l'art. 73 al. 1 LPA, l'autorité qui a pris la décision attaquée et toutes les parties ayant participé à la procédure de première instance sont invitées à se prononcer sur le recours. La juridiction peut autoriser une réplique et une duplique si ces écritures sont estimées nécessaires (art. 74 LPA). Dans les cas prévus aux art. 73 et 74 LPA, la juridiction administrative fixe les délais dans lesquels les parties doivent produire leurs écritures (art. 75 LPA).

L'art. 73 LPA n'impose pas d'exigences particulières auxquelles doit satisfaire la réponse au recours. Cette disposition se limite à offrir aux parties ayant participé à la procédure de première instance la possibilité de s'exprimer sur le recours et de faire valoir leurs points de vue (ATA/915/2019 du 21 mai 2019 ; ATA/18/2013 du 8 janvier 2013). En outre, le délai fixé par la juridiction administrative à teneur de l'art. 75 LPA est, au sens technique, un terme, susceptible d'être prolongé.

b. En l'espèce, l'intimé a été invité par la chambre administrative à se prononcer sur le recours. Dans sa réponse du 5 mars 2019, il a non seulement conclu à l'irrecevabilité de celui-ci, mais également à son rejet. À l'appui de ses conclusions, il invoque que le recourant ne conteste pas la fin de son droit à des prestations d'aide financière, seul objet de la décision attaquée, et que celui-ci reconnaît dans ses écritures de recours ne pas avoir eu son domicile et sa résidence effectifs à l'adresse annoncée à l'hospice. Ce faisant, l'intimé a repris succinctement ses arguments de la décision attaquée et de celle du 22 août 2018 mettant fin aux prestations d'aide financière au recourant. Dans ces circonstances, un délai supplémentaire n'est pas susceptible de permettre à l'intimé d'apporter des éléments pertinents supplémentaires pour trancher le litige. Au demeurant, le dossier est complet et permet à la chambre de céans de résoudre les questions juridiques qui se posent.

4) Le litige porte sur la suppression des prestations d'aide financière accordées au recourant en raison de son manque de collaboration et de l'impossibilité d'établir son lieu de résidence effective sur le canton de Genève.

5) a. La LIASI a pour but de prévenir l'exclusion sociale et d'aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Ont droit aux prestations d'aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n'atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par règlement du Conseil d'État (art. 21 al. 1 LIASI). Pour une personne majeure, cette limite est de CHF 4'000.- (art. 1 al 1 let. a du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 - RIASI - J 4 04.01).

b. Le bénéficiaire est tenu de fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière. Il doit se soumettre à une enquête de l'hospice lorsque celui-ci le demande (art. 32 al. 1 et 3 LIASI). De même, il doit immédiatement déclarer à l'hospice tout fait nouveau de nature à entraîner une modification du montant des prestations qui lui sont allouées (art. 33 al. 1 LIASI). Le document intitulé « Mon engagement » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation économique (ATA/817/2019 du 25 avril 2019 ; ATA/1237/2018 du 20 novembre 2018).

c. L'art. 35 LIASI décrit six cas dans lesquels les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées.

Tel est notamment le cas lorsque le bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (art. 35 al. 1 let. a LIASI) ou lorsqu'il ne s'acquitte pas intentionnellement de son obligation de collaborer telle que prescrite par l'art. 32 LIASI ou qu'il refuse de donner les informations requises au sens des art. 7 et 32LIASI, donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles(art. 35 al. 1 let. c et d LIASI).

d. En l'occurrence, le recourant a été informé de ses obligations à l'égard de l'intimé dès le dépôt de ses demandes d'aide sociale financière, dès 2013 à tout le moins, auxquelles était joint le document « Mon engagement » qu'il a également signé. Son devoir de donner immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaires à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique y figurait. Cette obligation lui a été rappelée à réitérées reprises lors des entretiens qu'il a eus avec ses assistantes sociales respectives. Cependant, malgré l'avertissement du 18 juillet 2018, il n'a pas donné suite à la demande de documents, notamment ceux portant sur l'adresse de sa résidence effective et son changement d'adresse auprès de l'OCPM, dans le délai imparti au 31 juillet 2018.

Au vu de ce qui précède, force est de constater que les multiples tentatives de l'hospice pour connaître le domicile et la résidence effectifs du recourant sont restées vaines en raison du comportement de celui-ci. Le recourant a par conséquent manqué à son obligation de collaboration, en connaissance des sanctions encourues. Il lui appartenait de se conformer à cette obligation dans la mesure où il avait pris l'engagement de déclarer à l'hospice toute modification de sa situation personnelle. Il aurait ainsi dû fournir à l'intimé les documents demandés notamment dans l'avertissement du 18 juillet 2018, dans le délai imparti au 31 juillet 2018.

La décision de l'intimé qui supprime les prestations d'aide financière est sous cet angle conforme au droit.

6) Le recourant soutient, dans son recours, qu'il habitait au ______, chemin de J______, à K______, mais y passait très peu de temps, vivant surtout chez ses soeurs ou chez ses parents. Dans son courrier du 24 janvier 2019 à la chambre de céans, il affirme qu'il n'habitait pas de manière régulière au chemin de J______ ______.

a. À teneur de l'art. 11 al. 1 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière prévues par cette loi, les personnes qui : ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève (let. a) ; ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) ; répondent aux autres conditions de la loi (let. c).

Il s'agit de l'aide financière ordinaire. Les trois conditions à remplir sont cumulatives. La condition du domicile et de la résidence effective sur le territoire du canton de Genève est une condition cumulative qui a pour effet que des prestations d'aide financière complète ne sont accordées qu'aux personnes autorisées à séjourner dans le canton de Genève, soit aux personnes d'origine genevoise, aux confédérés et aux étrangers bénéficiant d'un titre de séjour (ATA/817/2019 précité ; ATA/1232/2017 du 29 août 2017).

La notion de domicile est, en droit suisse, celle des art. 23 et 24 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), soit le lieu où une personne réside avec l'intention de s'y établir (art. 23 al. 1 in initio CC). La notion de domicile contient deux éléments : d'une part, la résidence, soit un séjour d'une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits et, d'autre part, l'intention de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d'un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. Le domicile d'une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances. Le lieu où les papiers d'identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales constituent des indices qui ne sauraient toutefois l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l'intéressé (ATF 141 V 530 consid. 5.2 ; 136 II 405 consid. 4.3 ; 134 V 236 consid. 2.1). Ce n'est pas la durée du séjour à cet endroit qui est décisive, mais bien la perspective d'une telle durée (arrêts du Tribunal fédéral 5A.398/2007 du 28 avril 2008 consid. 3.2 ; 5A.34/2004 du 22 avril 2005 consid. 3.2). Du point de vue subjectif, ce n'est pas la volonté interne de la personne concernée qui importe, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire qu'elle a cette volonté (ATF 137 II 122 consid. 3.6 = JdT 2011 IV 372 ;
133 V 309 consid. 3.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 5A.398/2007 précité consid. 3.2).

b. En l'occurrence, pour prouver que sa résidence effective se trouve au
______, chemin de J______, à K______, le recourant a produit les contrats de bail du 5 novembre 2005 et de colocation du 20 janvier 2014 relatifs à l'appartement en cause. Toutefois, conformément à la jurisprudence susmentionnée le lieu figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales constituent des indices qui ne sauraient l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de l'intéressé. Pour le surplus, il ressort des récépissés des factures du bail à loyer produits que le recourant a participé au paiement du loyer mensuel de l'appartement de K______ en décembre 2014 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2015 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2016 ; janvier, mars, mai, juillet, septembre et novembre 2017 ; et janvier, mars, juin et juillet 2018. Ces documents ne permettent pas cependant de considérer que le domicile du recourant au ______, chemin de J______, à K______, est établi. Ils doivent en conséquence être nuancés.

D'une part, selon le rapport du « contrôle terrain » du 8 juillet 2014, le recourant n'était pas présent à l'adresse de l'appartement de K______. Le concierge de l'immeuble a confirmé à l'inspectrice que celui-ci lui était inconnu et que seule Mme M______ occupait l'appartement.

D'autre part, selon le rapport d'enquête du 28 août 2018, les relevés du compte bancaire du recourant auprès de l'N______ attestent que son adresse était, au 25 juillet 2018, au ______, rue de D______, à C______, au domicile de ses parents. Par ailleurs, aucun effet personnel n'a été trouvé dans les armoires de l'appartement de K______ contrôlées par l'inspectrice lors de sa visite.

De surcroît, le recourant a régulièrement, lors de ses entretiens avec ses assistantes sociales respectives, fait mention de son souhait de quitter le logement en cause en raison des relations tendues avec Mme M______. Il a déclaré avoir entrepris des démarches pour trouver un logement séparé. Il a en conséquence tout à la fois manifesté clairement sa volonté de quitter l'appartement en cause dont il n'avait par ailleurs pas la clé et sa volonté de trouver un nouvel endroit où loger.

Au demeurant, dans ses écritures, le recourant reconnaît que même s'il payait sa part au loyer de l'appartement de K______, il n'y habitait plus. Concernant son lieu de résidence effective, il a, à plusieurs reprises, changé de versions, affirmant tour à tour habiter chez ses parents, chez l'une de ses soeurs, voire chez des amis en raison des difficultés de cohabitation avec Mme M______. Même s'il ressort du registre des habitants de l'OCPM que l'intéressé séjournait au ______, chemin de J______, à K______, du 1er décembre 2009 au 21 septembre 2018, ce fait n'est pas propre à infirmer les déclarations du recourant selon lesquelles il n'habitait plus à cette adresse au moment de la décision attaquée et les constatations faites par le service des enquêtes dans ses rapports des 8 juillet 2014 et 28 août 2018.

Dans ces conditions, la chambre de céans considérera comme établi que le recourant n'était pas domicilié au ______, chemin de J______, à K______ au moment de la décision attaquée ni au moment de la décision initiale. L'intéressé n'a pas allégué ou démontré quel était son domicile ou sa résidence effective dans le canton de Genève (art. 11 al. 1 let. a LIASI).

Au vu de ces éléments, l'hospice était fondé à mettre un terme à ses prestations au sens de l'art. 35 al. 1 let. a, c et d LIASI.

7) Selon la jurisprudence, la suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193
consid. 3b = JdT 1998 I 562 ; ATA/1302/2017 précité).

En l'occurrence, la suppression du droit aux prestations d'aide financière du recourant avec effet au 1er août 2018 apparaît proportionnée et adaptée au cas d'espèce, compte tenu de toutes les circonstances susrappelées. De plus, le recourant gardait la possibilité de déposer une nouvelle demande de prestations d'aide financière auprès du CAS de son quartier s'il ne parvenait pas à faire face à ses besoins vitaux.

Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

8) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), ni alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 décembre 2018 par M. A______ contre la décision de l'Hospice Général du 16 novembre 2018 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à M. A______, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : M. Thélin, président, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

P. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :