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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/601/2019

ATA/1591/2019 du 29.10.2019 sur JTAPI/234/2019 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : RESSORTISSANT ÉTRANGER;EXCLUSION(EN GENERAL);COURRIER A PLUS;RESTITUTION DU DÉLAI
Normes : LPA.62.al1.leta; LPA.62.al3; LPA.62.al4; LPA.62.al5; LPA.16.al1; LPA.17.al1
Résumé : Recours contre le jugement du TAPI refusant d'entrer en matière pour non-respect du délai de recours. Le recourant ne conteste pas que la décision ait été déposée dans la case postale de son conseil à la date mentionnée et n'invoque aucun cas de force majeur. Le recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/601/2019-PE ATA/1591/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 octobre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 mars 2019 (JTAPI/234/2019)


EN FAIT

1) Par décision du 11 janvier 2019, expédiée par courrier « A + » à l'adresse du mandataire de Monsieur A______, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : l'OCPM) a refusé de lui octroyer une autorisation de séjour au titre de regroupement familial et a prononcé son renvoi de Suisse.

2) Par acte expédié le 14 février 2019 au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) et reçu par cette instance le 15 février 2019, A______ a recouru contre cette décision.

L'intéressé indiquait notamment que la décision querellée lui avait été notifiée le 16 janvier 2019.

3) À la demande du TAPI, l'OCPM lui a transmis le numéro d'envoi « A + » (n° _______). Selon les données du « suivi des envois » de la Poste, l'envoi « A + » correspondant au numéro précité avait été distribué le 14 janvier 2019.

4) Par courrier du 15 février 2019, le TAPI a informé A______ que son recours paraissait manifestement irrecevable, l'invitant à se déterminer sur la suite de la procédure. Il lui était par ailleurs demandé de s'acquitter d'une avance de frais s'il maintenait son recours.

5) L'intéressé ne s'est pas déterminé sur ce courrier mais a réglé l'avance de frais dans le délai octroyé.

6) Le 12 mars 2019, le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour non-respect du délai légal de recours. De plus, l'administré n'avait pas fait valoir un motif susceptible de constituer un cas de force majeure qui l'aurait concrètement empêché d'agir en temps utile.

7) En date du 22 mars 2019, A______ a requis du Tribunal de première instance (ci-après : TPI) la restitution du délai de recours. Son recours du 14 février 2019 devait être déclaré recevable. La décision de l'OCPM devait être considérée comme ayant été notifiée le 16 janvier 2019.

Il avait été absent de son domicile pour des motifs professionnels, entre le 13 et le 15 janvier 2019, et les membres de sa famille avaient relevé le courrier. Ses proches n'avaient pas pu lui indiquer la notification précise de la décision de l'OCPM. Il était rentré de l'étranger le 16 janvier 2019 et avait alors pris connaissance de la décision de refus d'octroi du permis de séjour et du renvoi vers son pays d'origine. Pour ces raisons, il avait été empêché d'observer le délai de recours, sans faute de sa part.

La décision d'irrecevabilité découlant de l'inobservation d'un délai de procédure était constitutive d'un formalisme excessif, car le non-respect du délai ne lui était pas imputable.

8) Par jugement du 9 avril 2019, le TPI a déclaré le recours irrecevable et a invité A______ à saisir l'autorité compétente.

9) Le 16 avril 2019, A______ a demandé au TAPI la restitution du délai de recours.

Il ne connaissait pas la procédure judiciaire, qu'il ne maîtrisait pas. Il ne connaissait pas non plus le système de notification du courrier « A + ». Il pensait que le calcul du délai s'effectuait à partir de la notification effective à l'instar des courriers recommandés.

L'irrecevabilité du recours entraînait pour lui des conséquences désastreuses et une issue dramatique. Toute sa famille se trouvait actuellement en Suisse : ses parents, ses quatre soeurs et ses deux oncles.

10) Par jugement du 18 avril 2019, le TAPI s'est déclaré incompétent pour se prononcer sur la demande en restitution de délai et a transmis d'office le recours à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Examinant, en outre, si le recours devait être considéré comme une demande de révision du jugement du 12 mars 2019, le TAPI a retenu qu'aucune des conditions de la révision n'était réalisée.

11) Aucune détermination n'a été demandée à l'OCPM.

12) Le 7 mai 2019, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Aux termes de l'art. 62 LPA, le délai de recours est de trente jours s'il s'agit d'une décision finale ou d'une décision en matière de compétence (al. 1 let. a) ; la décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution (al. 4), pour autant que celui-ci ait dû s'attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une communication de l'autorité, ce qui est le cas chaque fois qu'il est partie à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_239/2011 du 22 mars 2012 consid. 3.5 ; ATA/725/2018 du 10 juillet 2018 consid. 1 ; ATA/1595/2017 du 12 décembre 2017 consid. 2 et les arrêts cités).

En vertu de l'art. 62 al. 5 LPA, lorsqu'une personne à qui une décision devait être notifiée ne l'a pas reçue, sans sa faute, le délai de recours court du jour où cette personne a eu connaissance de la décision.

b. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même. Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 consid. 2 p. 24 ; ATA/871/2019 du 7 mai 2019 consid. 2b ; ATA/444/2018 du 8 mai 2018 consid. 3d).

c. Les cas de force majeure sont réservés, conformément à l'art. 16 al. 1 2ème phr. LPA. Tombent sous cette notion, les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible (ATA/1163/2015 du 27 octobre 2015 et les références citées).

Les conditions pour admettre un empêchement de procéder à temps sont très strictes. La restitution du délai suppose que l'intéressé n'a pas respecté le délai légal en raison d'un empêchement imprévisible dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (ATF 119 II 86 ; 112 V 255 ; ATA/251/2014 du 13 mai 2014 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 444 n. 1348). Celui-ci peut résulter d'une impossibilité objective ou subjective. L'empêchement doit être de nature telle que le respect des délais aurait impliqué la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme d'affaires avisé (ATA/397/2013 du 25 juin 2013 consid. 9 ; ATA/744/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/38/2011 du 25 janvier 2011).

3) a. À teneur de l'art. 17 al. 1 LPA, les délais commencent à courir le lendemain de leur communication ou de l'événement qui les déclenche.

Dans le cadre d'une procédure de recours, l'art. 62 al. 3 1ère phr. LPA prescrit que le délai court dès le lendemain de la notification de la décision.

Le fardeau de la preuve de la notification d'un acte et de sa date incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 129 I 8 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_634/2015 du 26 avril 2016 consid. 2.1 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 529).

b. La prestation « Courrier A Plus » - « A+ » - offre la possibilité de suivre le processus d'expédition du dépôt jusqu'à la distribution. Elle comporte également l'éventuelle réexpédition à une nouvelle adresse, ainsi que le retour des envois non distribuables. Lors de l'expédition par « Courrier A Plus », l'expéditeur obtient des informations de dépôt, de tri et de distribution par voie électronique via le service en ligne « Suivi des envois ». Les envois « Courrier A Plus » sont directement distribués dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire. En cas d'absence, le destinataire ne reçoit pas d'invitation à retirer un envoi dans sa boîte aux lettres (document de La Poste suisse sur Internet « Courrier A Plus [A+] - La transparence tout au long du processus d'expédition » ; aussi ATF 142 III 599 consid. 2.1).

c. La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où l'administré en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée. S'agissant d'un acte soumis à réception et adressé par pli non recommandé, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée parfaite au moment où l'envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/871/2019 précité consid. 3c ; ATA/725/2018 précité consid. 2c ; ATA/1593/2017 du 12 décembre 2017 consid. 3c), à savoir dans sa boîte aux lettres ou sa case postale. Il n'est pas nécessaire que celui-ci en prenne réellement connaissance (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1) ; il suffit qu'il puisse en prendre connaissance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_430/2009 du 14 janvier 2010 consid. 2.2).

Ainsi, lorsqu'une décision est notifiée par courrier A+, à savoir un courrier prioritaire dont l'expéditeur peut connaître la date de la remise dans la boîte aux lettres ou la case postale grâce au service en ligne « Suivi des envois », sans que cette remise soit quittancée ou fasse l'objet d'une signature par le destinataire, le délai commence à courir dès ladite remise (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_198/2015 du 30 avril 2015 consid. 3 ; 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 consid. 4.2 ; 2C_430/2009 précité consid. 2).

4) En l'espèce, l'intéressé fait valoir qu'il n'était pas à Genève au moment de la distribution du pli précité, mais à l'étranger pour des motifs professionnels. Il devait toutefois s'attendre à recevoir une décision de l'OCPM. Le recourant indique que les membres de sa famille ont relevé le courrier pendant son absence, soit du 13 au 15 janvier 2019. Il ne remet pas en question l'indication ressortant du « suivi des envois postaux », selon laquelle le courrier « A+ » a été déposé dans sa boîte aux lettres le 14 janvier 2019. Le courrier de l'OCPM est ainsi bien entré dans sa sphère d'influence le 14 janvier 2019 ; peu importe que ses proches n'aient pas pu lui indiquer la date exacte de la notification. Dès lors, il convient de retenir que la décision de l'OCPM a été notifiée au recourant le 14 janvier 2019.

Le délai de recours de trente jours a donc commencé à courir le lendemain, à savoir le 15 janvier 2019, pour échoir le mercredi 13 février 2019.

Expédié le jeudi 14 février 2019, le recours est donc tardif. Pour le surplus, le recourant ne peut se prévaloir d'un cas de force majeure au sens de l'art. 16 al. 1 LPA. En effet, son séjour à l'étranger était prévisible et n'était pas de nature à l'empêcher d'agir dans le délai de recours.

Au vu de ce qui précède, le TAPI a, à juste titre, déclaré le recours irrecevable.

Mal fondé, le grief sera rejeté.

5) Dans son jugement du 18 avril 2019, le TAPI a encore examiné si les conditions d'une révision au sens l'art. 80 LPA étaient réalisées.

À juste titre, il a constaté que tel n'était pas le cas, aucun élément ne permettant de retenir que de telles conditions seraient réalisées. Le recourant ne le soutient d'ailleurs pas.

Vu ce qui précède, le recours, manifestement infondé, sera rejeté, sans échange d'écritures (art. 72 LPA).

6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 300.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 avril 2019 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 mars 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 300.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :