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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4229/2018

ATA/1624/2019 du 05.11.2019 sur JTAPI/343/2019 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4229/2018-PE ATA/1624/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 novembre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Michel Celi Vegas, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 avril 2019 (JTAPI/343/2019)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1977, est ressortissant du Kosovo.

2) Entendu par la police genevoise le 9 août 2002, M. A______ a notamment indiqué être arrivé en Suisse en novembre 2000 afin d'y déposer une demande d'asile. Suite au refus de cette demande en mai 2001, il était parti vivre en France, avant de revenir en Suisse. Ses parents et ses quatre soeurs vivaient au Kosovo. Il avait fréquenté l'école primaire dans son pays durant huit ans puis y avait effectué des « petits boulots » dans le domaine de l'agriculture. Il n'avait aucune formation professionnelle. Plusieurs de ses oncles et cousins vivaient en Suisse allemande.

3) Par décision du 6 septembre 2002, une interdiction d'entrée en Suisse (ci-après : IES) valable jusqu'au 5 septembre 2004 a été prononcée à son encontre pour infractions graves aux prescriptions de police des étrangers.

4) Entendu par la police le 16 décembre 2003, M. A______ a indiqué être arrivé à Genève depuis la France environ dix jours plus tôt. Il était employé par la société B______ et logeait en France voisine. Il reconnaissait avoir travaillé en Suisse démuni des autorisations nécessaires.

5) Par décision du 12 février 2004, une IES, valable du 6 septembre 2004 au 11 février 2006, pour infractions graves aux prescriptions de police des étrangers (séjour et travail sans autorisation, démuni de passeport valable, violation d'une IES notifiée) a été prononcée à l'encontre de M. A______.

6) Le _______ 2004, M. A______ a épousé à Genève Madame  C______, ressortissante portugaise titulaire d'une autorisation d'établissement.

7) À la suite de son mariage, M. A______ s'est vu délivrer, le 19 décembre 2005, un permis de séjour au titre de regroupement familial, dont la validité a été régulièrement prolongée jusqu'au 20 décembre 2008.

8) En raison de son union, l'office fédéral des migrations, devenu le 1er janvier 2015 le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), a annulé avec effet immédiat, par décision du 8 décembre 2005, l'IES prononcée le 12 février 2004 à son encontre.

9) Le 23 mai 2006, M. A______ s'est vu délivrer par l'office cantonal de la population, devenu le 11 décembre 2013 l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), une autorisation révocable en tout temps en vue de travailler en faveur de D______ en qualité de ferrailleur. Différentes autorisations de travailler pour d'autres employeurs ont par la suite été délivrées.

10) L'action en annulation de son mariage déposée en octobre 2008 par Mme C______ a été rejetée par le Tribunal de première instance, jugement confirmé par arrêt de la chambre civile de la Cour de justice du 21 mai 2010.

11) Faisant suite à la demande de M. A______ tendant au renouvellement de son titre de séjour, l'OCPM a accepté, par décision du 15 décembre 2010, de soumettre son cas au SEM pour prolongation de son titre de séjour, ce dernier étant bien intégré à Genève et son union conjugale ayant duré plus de trois ans.

12) Par décision du 20 octobre 2011, le SEM a refusé d'approuver la prolongation de l'autorisation de séjour de M. A______ et lui a imparti un délai de huit semaines pour quitter la Suisse.

Par arrêt du 14 janvier 2013, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours interjeté par M. A______ contre cette décision. Cet arrêt a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 6 juin 2013.

13) Le 22 octobre 2011, le divorce de Mme C______ et de M. A______ a été prononcé.

14) Par pli du 2 juillet 2013, l'OCPM a imparti à M. A______ un délai au 9 août 2013 pour se présenter au service asile et départ.

15) Durant l'année 2013, M. A______ a adressé diverses correspondances au Président de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à Monsieur le conseiller fédéral Ueli MAURER, au Tribunal fédéral, au directeur du SEM et au Procureur général, s'agissant de sa situation administrative.

16) À teneur du rapport de renseignements établi le 15 janvier 2014, M. A______ a été refoulé par avion le 14 janvier 2014 à destination de Pristina.

17) Par requête du 15 mars 2017, M. A______ a sollicité, sous la plume de son conseil, la régularisation de son séjour en Suisse sous l'angle du cas de rigueur.

18) Le 29 mai 2018, le SEM a considéré que M. A______ sollicitait une réévaluation de la situation sous l'angle d'une demande d'autorisation de séjour pour cas de rigueur, s'agissant d'un sans-papiers, et non d'une demande de réexamen de sa décision du 20 octobre 2011. Le dossier était transmis à l'OCPM pour raisons de compétence.

19) Par courrier du 31 juillet 2018, le SEM a informé l'OCPM que M. A______ faisait l'objet d'un signalement au système d'information Schengen par la Hongrie pour avoir été en possession d'un visa falsifié.

20) Par décision du 30 octobre 2018, l'OCPM a refusé de soumettre le dossier de M. A______ avec un préavis positif au SEM et lui a imparti un délai au 31 décembre 2018 pour quitter la Suisse. Il ne se trouvait pas dans un cas d'extrême gravité et aucun obstacle à son retour n'ayant été invoqué ni démontré, son renvoi était possible, licite et raisonnablement exigible.

21) Par acte du 30 novembre 2018, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), à l'encontre de la décision précitée.

En Suisse depuis dix-huit ans, il exerçait une activité lucrative stable dans ce pays. Arrivé en Suisse à l'âge de 23 ans, encore vulnérable et en développement, il avait appris le français et considérait Genève, où il avait tissé un important réseau d'amitiés, comme sa patrie. Il avait appris son métier une fois arrivé en Suisse, de sorte qu'il était habitué aux conditions de travail helvétiques et avait acquis des qualifications spécifiques au domaine de la maçonnerie en Suisse. Ainsi, il était erroné de retenir qu'il ne possédait pas d'attaches profondes et durables dans ce pays. La plupart des personnes dont la situation était régularisée par le biais de l'opération « Papyrus » et du cas de rigueur oeuvraient dans le domaine de l'économie domestique, dans lequel une ascension professionnelle exceptionnelle était inexistante, de sorte que la prise en compte de ce critère était discriminatoire. L'obtention de documents falsifiés ne devait pas être retenue contre lui, dès lors qu'il se trouvait alors dans une situation de vulnérabilité telle qu'il avait « été corrompu par des réseaux mafieux sur place qui profitent du désespoir de nombreux migrants pour s'enrichir ». Son casier judiciaire suisse était vierge et il ne faisait l'objet d'aucune poursuite. N'ayant plus aucun ami ni possibilité de travail au Kosovo, il n'avait aucune chance de pouvoir s'y réintégrer.

Il remplissait les critères de l'opération « Papyrus ». Il séjournait en Suisse depuis dix-huit ans et considérer qu'il ne remplissait pas le critère de la durée du séjour en raison du fait qu'il y avait en partie séjourné illégalement serait constitutif d'une « inégalité de traitement arbitraire » inacceptable.

Plusieurs pièces étaient jointes à ce recours, notamment ses fiches de salaire pour les mois d'avril à décembre 2017 en faveur de E______ et pour les mois de janvier et février 2018 pour le compte de F______.

22) L'OCPM a conclu au rejet du recours.

Contrairement aux allégations de l'intéressé, il ne remplissait ni les conditions du cas de rigueur ni celles de l'opération « Papyrus », faute de totaliser dix ans de séjour ininterrompu en Suisse, au vu de son refoulement à destination du Kosovo en janvier 2014.

23) Par réplique du 25 février 2019, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

Contrairement aux allégations de l'autorité intimée, arrivé en Suisse en 2000, il totalisait plus de dix ans de séjour continu et régulier sur le territoire helvétique. Une décision de refoulement à destination du Kosovo avait certes été rendue en 2014, mais il était revenu en Suisse. Si ce comportement pouvait être considéré comme un élément défavorable relatif, il ne constituait toutefois pas un délit grave ou une menace pour la sécurité nationale. Après plus de dix ans de vie continue à Genève, où se trouvaient ses centres d'intérêts, il n'avait pas de projets de retour dans son pays d'origine. Le fait d'avoir bénéficié par le passé d'un titre de séjour non renouvelé n'avait pas pour conséquence de l'exclure du champ d'application du cas de rigueur et de l'opération « Papyrus ». L'unique reproche qui pouvait être formulé à son encontre était son séjour illégal, lequel s'expliquait par le fait qu'il avait « perdu le contact avec son pays d'origine ».

24) Dans sa duplique, l'OCPM a persisté dans ses conclusions.

25) Par jugement du 11 avril 2019, le TAPI a rejeté le recours.

a. Il développait les différents séjours de l'intéressé en Suisse. À compter de son mariage le _______ 2004, il avait séjourné en Suisse au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre de regroupement familial, puis à compter du 20 décembre 2008 et jusqu'au 14 janvier 2014, date de son refoulement au Kosovo, sa présence en Suisse avait été tolérée. Dès lors qu'il avait quitté le territoire suisse à l'issue de cette période de plus de neuf ans, le séjour y relatif ne pouvait être qualifié de continu. Revenu sur le sol helvétique en 2014, il y demeurait depuis lors illégalement. Même à retenir qu'il était revenu durant le 1er trimestre 2014, il avait effectué un séjour continu en Suisse d'une durée d'environ cinq ans à ce jour, ce qui, conformément à la jurisprudence, ne pouvait être qualifié de long. L'une des conditions cumulatives pour bénéficier de l'opération « Papyrus » n'était ainsi pas réalisée, de sorte qu'il ne saurait obtenir la régularisation de sa situation dans ce cadre.

Son intégration socio-professionnelle en Suisse et les autres critères n'étaient pas remplis.

Selon ses dires, il avait vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 23 ans. Actuellement âgé d'un peu moins de 42 ans, célibataire et sans enfants, il avait ainsi vécu plus de la moitié de sa vie, notamment son enfance, son adolescence, périodes décisives pour la formation de la personnalité, et l'entrée dans sa vie d'adulte, au Kosovo. De plus, durant ses séjours en Suisse, il avait bénéficié de plus d'une dizaine de visas de retour afin de se rendre au Kosovo, ce qui démontrait l'existence d'attaches récentes importantes dans ce pays. Aucun élément du dossier n'attestait que les difficultés auxquelles il devrait faire face en cas de retour seraient plus lourdes que celles que rencontraient d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse. Pour le surplus, il ne ressortait pas des éléments à la procédure qu'il connaîtrait des problèmes de santé.

b. Les visas de retour suivants ressortaient du dossier :

- valable du 2 octobre 2006 au 1er janvier 2007 afin de rendre visite à sa famille au Kosovo ;

- le 15 décembre 2008, valable trois mois ;

- le 7 juillet 2009, valable trois mois pour des vacances au Kosovo ;

- valable du 19 décembre 2009 au 15 janvier 2010 pour se rendre au Kosovo ;

- le 5 juillet 2010, valable trois mois ;

- le 8 décembre 2010, valable trois mois ;

- le 11 avril 2011, valable un mois pour se rendre en vacances au Kosovo ;

- le 30 juin 2011, valable trois mois ;

- le 19 juillet 2012, valable jusqu'au 31 août 2012 afin de se rendre au Kosovo ;

- le 14 décembre 2012, valable deux mois.

- Par demande du 12 décembre 2017, M. A______ avait indiqué qu'il prévoyait de se rendre au Kosovo pour des raisons « strictement familiales » du 20 décembre 2017 au 20 janvier 2018 et avait sollicité de l'OCPM un visa de retour.

- Il avait également sollicité, par requête du 23 juillet 2018, la délivrance d'un visa de retour afin de se rendre au Kosovo pour raisons familiales. Cette demande avait été refusée, dès lors qu'il faisait l'objet d'une décision fédérale de renvoi définitive et exécutoire.

Ni les conditions de l'opération « Papyrus » ni celles d'un cas de rigueur n'étaient remplies.

26) Par acte du 10 mai 2019, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à l'annulation de celui-ci et à ce qu'il soit autorisé à résider sur le territoire suisse au bénéfice d'un permis de séjour. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l'OCPM pour instruction et nouvelle décision. Préalablement, il sollicitait sa comparution personnelle.

L'autorité avait abusé de son pouvoir d'appréciation dans l'application de l'art. 31 al. 1 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), notamment dans le critère de l'intégration du recourant. C'était à tort que le TAPI avait prétendu interpréter le fait qu'il n'avait pas obtenu une validation d'acquis relative à sa pratique et à son expérience en Suisse. Il avait travaillé dans plusieurs entreprises genevoises en qualité de ferrailleur notamment et bénéficiait d'une solide réputation et d'un réseau professionnel. Par ailleurs, en dix-huit de vie sur le territoire genevois, il s'était tissé un important réseau de connaissances et d'amitiés. Il s'était marié, puis avait divorcé en Suisse. Il avait réussi à refaire sa vie malgré cet échec. Certains de ses oncles et tantes résidaient en Suisse.

C'était à tort que le TAPI s'était appuyé sur huit années de scolarité de l'intéressé au Kosovo. Cela correspondait tout au plus à la scolarité primaire uniquement. Cela ne démontrait pas des possibilités de réintégration dans ledit pays. De même, les activités qu'il avait précédemment exercées dans l'agriculture consistaient en des travaux d'adolescent.

La durée de sa présence en Suisse avait été mal interprétée par le TAPI. Il y avait vécu depuis l'année 2000, soit depuis dix-huit ans. Le fait qu'il ait été refoulé à destination de Pristina en janvier 2014 ne signifiait pas qu'il n'avait pas résidé de manière continue en Suisse. Sa présence, depuis 2014, tolérée par les autorités migratoires, devait être interprétée comme une continuation de son séjour depuis 2000, voire 2003 selon l'OCPM.

Bien que refoulé, il était immédiatement revenu en Suisse. On ne pouvait donc pas retenir une interruption de la durée du séjour.

Il avait pour le surplus bénéficié d'une autorisation de séjour au titre de regroupement familial durant une partie de son séjour en Suisse, élément favorable à prendre en considération. Il remplissait les conditions du projet « Papyrus » en remplissant par ailleurs tous les critères de l'art. 31 al. 1 OASA. Il respectait l'ordre juridique suisse, n'avait pas de casier judiciaire, était totalement indépendant financièrement, n'avait pas de poursuites, disposait d'une bonne connaissance de la langue française.

Il devait être entendu afin de pouvoir s'expliquer sur son retour immédiat en Suisse après son renvoi vers le Kosovo. Il entendait de même développer oralement le fait qu'il continuait de faire des efforts d'intégration, qu'il s'était tissé un réseau professionnel important depuis qu'il résidait en Suisse et s'était créé un nouveau contexte familial à Genève.

27) L'OCPM a conclu au rejet du recours.

28) Dans sa réplique, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

29) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant sollicite son audition par la chambre de céans.

a. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) n'implique pas une audition personnelle de l'intéressé, celui-ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; ATF 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l'espèce, l'audition du recourant n'est pas de nature à apporter des éléments pertinents supplémentaires au vu des pièces du dossier et de la question juridique à résoudre. Le recourant a par ailleurs pu se déterminer par écrit à plusieurs reprises.

La chambre administrative dispose des éléments nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause et ne donnera dès lors pas suite à cette requête.

3) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA).

En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité d'une décision prise en matière de police des étrangers lorsqu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 a contrario de la loi d'application de la LEtr du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

4) Le recourant requiert d'être mis au bénéfice d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité y compris sous l'angle d'une régularisation selon l'opération « Papyrus ».

5) a. Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) devenue la LEI, et de l'OASA. En l'absence de dispositions transitoires, la règle générale, selon laquelle s'appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où lesdits faits se sont produits, s'applique sous réserve, en matière de sanctions disciplinaires ou d'amendes administratives, que le nouveau droit soit plus favorable (ATA/847/2018 du 21 août 2018 consid. 3c et les références citées ; ATA/1052/2017 du 4 juillet 2017 consid. 4), prévaut.

b. Les faits de la présente cause s'étant intégralement déroulés avant le 1er janvier 2019, ils sont soumis aux dispositions de la LEI et de l'OASA dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, étant précisé que la plupart des dispositions de la LEI sont demeurées identiques.

6) La LEI et ses ordonnances, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour le Kosovo (ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 4).

7) a. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

b. L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du SEM, domaine des étrangers, 2013, état au 12 avril 2017, ch. 5.6.12 [ci-après : directives SEM])

c. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 précité consid. 4c ; Directives SEM, op. cit., ch. 5.6).

d. Si le séjour illégal a été implicitement toléré par les autorités chargées de l'application des prescriptions sur les étrangers et de l'exécution, cet aspect pèsera en faveur de l'étranger (Directives SEM, ch. 5.6.12).

e. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en oeuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3 ; C-1240/2012 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/353/2019 précité consid. 5d ; ATA/38/2019 précité consid. 4d).

f. L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b.dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1 ; 2A.255/1994 du 9 décembre 1994 consid. 3). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/828/2016 du 4 octobre 2016 consid. 6d).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1 ; ATA/353/2019 précité consid. 5d).

8) a. L'opération « Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères.

Les critères pour pouvoir bénéficier de cette opération sont les suivants selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter, consulté le 18 septembre 2019 :

- avoir un emploi ;

- être indépendant financièrement ;

- ne pas avoir de dettes ;

- avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; le séjour doit être documenté ;

- faire preuve d'une intégration réussie (minimum niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ;

- absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

Le livret précise que les étrangers qui ont séjourné en Suisse de manière légale et y sont demeurés ensuite de manière illégale ne peuvent pas bénéficier du projet « Papyrus ». Les étrangers qui ont quitté la Suisse suite à un séjour légal puis y sont revenus en tant que clandestins peuvent être inclus dans le projet pour autant qu'ils remplissent les critères dudit projet, y compris ceux relatifs à la durée de séjour depuis leur retour en Suisse.

b. Répondant le 9 mars 2017 à une question déposée par une conseillère nationale le 27 février 2017, le Conseil fédéral a précisé que, dans le cadre du projet pilote « Papyrus », le SEM avait procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes (https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId = 20175000, consulté le 19 septembre 2019). Il ne s'agissait pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voyait pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjournait et travaillait illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation était constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

9) En l'espèce, le recourant a bénéficié d'un séjour légal grâce à son mariage le 20 octobre 2004. Son séjour a été autorisé jusqu'au 20 décembre 2008.

Sa demande de renouvellement déposée le 21 octobre 2008 a été refusée, ce que le Tribunal fédéral a confirmé le 6 juin 2013. L'intéressé ne conteste pas avoir été refoulé de Suisse le 14 janvier 2014. Il déclare être revenu en Suisse « immédiatement » si bien qu'« on ne pouvait pas retenir une interruption de son séjour ». Il a déposé une demande d'autorisation pour cas de rigueur le 15 mars 2017 et conclut à être mis au bénéfice d'une autorisation pour cas de rigueur, y compris sous l'angle de l'opération « Papyrus ».

Toutefois, bien que le recourant ait séjourné plusieurs années en Suisse, il ne remplit pas la condition, nécessaire et cumulative, de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, reprise par l'opération « Papyrus », à savoir le respect de l'ordre juridique suisse. L'intéressé a été renvoyé au Kosovo le 14 janvier 2014, sous le contrôle des autorités suisses. La décision de refus d'approbation et de renvoi de Suisse du 20 octobre 2011, entrée en force par arrêt du Tribunal fédéral du 25 juillet 2013, a ainsi été exécutée. Courant 2014, l'intéressé est revenu illégalement en Suisse et y a repris une activité lucrative sans autorisation. En revenant en Suisse, alors qu'il savait qu'il n'y était pas autorisé, qu'il y faisait l'objet d'une décision définitive et exécutoire de renvoi, le recourant a violé l'ordre juridique suisse. Il a par ailleurs repris un emploi, sans y être autorisé, ce que démontrent les fiches de salaire versées au dossier. Il ne s'est enfin pas conformé aux demandes du SEM dès le 23 février 2018 de quitter le territoire.

À cela s'ajoute la possession d'un visa hongrois falsifié, ce que le recourant ne conteste pas tout en admettant avoir pris tardivement conscience de sa faute. La situation de « grande nécessité » qu'il allègue ne saurait minimiser sa faute.

C'est par ailleurs à tort que le recourant se prévaut de l'arrêt ATA/37/2018 du 16 janvier 2018 de la chambre de céans. Dans celui-ci, le recourant n'avait pas fait l'objet d'un refoulement, ni a fortiori, n'était revenu en Suisse « immédiatement », démontrant ainsi du peu de cas qu'il faisait des décisions des autorités helvétiques.

Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'OCPM a refusé de lui délivrer une autorisation de séjour et que le TAPI a rejeté le recours contre cette décision.

Dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire d'approfondir l'analyse des autres conditions de l'art. 30 LEI, étant précisé que l'examen qu'en a fait le TAPI est complet, fondé et peut être suivi en tous points, soit principalement que les conditions de la réintégration sociale du recourant, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, ne seraient pas gravement compromises en cas de retour dans son pays d'origine, compte tenu de son âge (42 ans), de son bon état de santé, de ses capacités à travailler, de la possibilité de mettre à profit au Kosovo les compétences acquises en Suisse auprès de différents employeurs, de la famille qu'il a conservé sur place et de ses fréquents retours dans son pays.

Le recours sera rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 mai 2019 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 avril 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michel Celi Vegas, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.